Le Droit de la consommation, troisième tome du Traité de droit économique, expose, dans une perspective comparative, l’ensemble des règles européennes et françaises : publicité, pratiques commerciales déloyales, conditions de validité du contrat, clauses abusives, conformité des produits, vices cachés, sécurité des produits.

Droit de la consommation

Lorsque le message s'adresse à un public ciblé, on constate une nette tendance de la jurisprudence à apprécier son caractère trompeur in concreto. 
Parfois, l'appréciation in concreto renforce la sévérité du contrôle. Tel est le cas lorsque le juge est confronté à la lisibilité des mentions portées sur des affiches publicitaires postées en bord de route et visant un public d'automobilistes qui se  …

Appréciation in concreto

Lorsque le message s'adresse à un public ciblé, on constate une nette tendance de la jurisprudence à apprécier son caractère trompeur in concreto. 

Parfois, l'appréciation in concreto renforce la sévérité du contrôle. Tel est le cas lorsque le juge est confronté à la lisibilité des mentions portées sur des affiches publicitaires postées en bord de route et visant un public d'automobilistes qui se déplacent à grande vitesse  ou lorsque le message publicitaire cible un public extrêmement vulnérable comme les personnes atteintes de maladies graves ou incurables. Les juges refusent dans ce cas de retenir l'emphase, considérant que ces personnes ne disposent pas du recul nécessaire pour apprécier le caractère exagéré des slogans . 

Dans d'autres hypothèses, l'appréciation in concreto permet d'atténuer la rigueur du contrôle. Ainsi, au lieu d'apprécier les qualités substantielles d'un produit, les juges peuvent prendre en considération les attentes des utilisateurs spécifiquement visés . L'appréciation in concreto s'illustre aussi dans des hypothèses où la publicité est destinée à des professionnels ou à des spécialistes. La jurisprudence tient compte du fait que ceux-ci constituent un public plus averti, moins vulnérable que le consommateur moyen . Lorsqu'une publicité est publiée dans une parution réservée à un public de spécialistes, l'appréciation de son caractère trompeur s'effectue au regard de ce public . Toutefois cette jurisprudence ne s'applique que si les professionnels sont en mesure d'exercer leur sens critique . Tel n'est pas le cas d'une publicité relative à du matériel informatique destiné au corps médical  ou d'une publicité qui gonfle artificiellement les ventes d'un magazine afin de tromper les professionnels destinataires du message sur l'efficacité de la parution . En outre, depuis les lois de transposition de 2008, les professionnels ne pouvaient plus se prétendre victimes d'omissions trompeuses, l'article L. 121-5 (ancien art. L. 121-1, III), précisant qu'ils ne pouvaient invoquer que la commission d'actions trompeuses  ou les pratiques commerciales trompeuses per se de l'article L. 121-4 (ancien art. L. 121-1-1) du Code de la consommation . La loi de ratification de l'ordonnance du 14 mars 2016  est revenue sur cette solution en étendant aux professionnels et aux non-professionnels la protection accordée par les articles L. 121-2 à L. 121-4 , c'est-à-dire y compris en cas d'omission trompeuse. Certaines juridictions continuent cependant d'estimer que le Code de la consommation n'est pas applicable lorsqu'aucun consommateur n'est en  cause et que les allégations dénoncées ne sont adressées qu'à des  professionnels .

Certaines décisions refusent cependant de procéder à une appréciation in concreto même lorsque la publicité vise un public particulier et préfèrent sanctionner le caractère mensonger des allégations plutôt que de rechercher si la publicité était susceptible de tromper .

V. not. Cass. crim., 27 novembre 1990, LawLex200300003451JBJ, approuvant Orléans, 5 mars 1990, LawLex200300001611JBJ ; Cass. crim., 12 octobre 1994, LawLex200300003390JBJ, approuvant Versailles, 8 juillet 1993, LawLex200300001607JBJ ; Amiens, 30 septembre 2009, LawLex201200001319JBJ.

Cass. crim., 5 février 1997, LawLex200300003392JBJ, approuvant Paris, 20 novembre 1995, LawLex200300001698JBJ.

L. 2017-203 du 21 février 2017 ratifiant les ordonnances n° 2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation et n° 2016-351 du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d'habitation et simplifiant le dispositif de mise en œuvre des obligations en matière de conformité et de sécurité des produits et services, JO du 22 février 2017.

Versailles, 12e ch., 30 janvier 2020, LawLex202000000203JBJ, le fait qu'un contrat de location financière ait été souscrit par un  médecin libéral pour l'achat de matériel nécessaire à l'exploitation de  son activité professionnelle ne l'empêche pas d'invoquer les textes  relatifs aux pratiques commerciales trompeuses ; Aix-en-Provence, 1er février 2018, LawLex201800000264JBJ, retenant que l'adoption d'une pratique commerciale déloyale per se de l'article L.  121-4 du Code de la consommation peut être invoquée par un  professionnel.

Colmar, 5 décembre 2018, LawLex201900002057JBJ.

V. not. Cass. crim., 26 mars 1992, LawLex200300003611JBJ, jugeant que le fait que la publicité litigieuse soit destinée à un public avisé de chasseurs n'est pas de nature à lui ôter son caractère délictueux.

Cass. crim., 2 octobre 1996, LawLex200300003664JBJ, approuvant Pau, 14 mars 1995, LawLex200300001686JBJ, Contrats Conc. Consom. 1997, n° 38, obs. RAYMOND ; Gaz. Pal. 1997, Somm., 216, obs. GREFFE, tenant compte des attentes des ménagères, utilisatrices du produit détergent en cause ; Rouen, 12 septembre 1995, LawLex200300001694JBJ, retenant comme consommateur de référence l'utilisateur potentiel du produit soit, en l'espèce, les utilisateurs de fosses septiques.

Cass. crim., 31 mai 1995, LawLex200300003862JBJ, approuvant Dijon, 1er juillet 1994, LawLex200300001701JBJ, jugeant qu'une publicité qui ne précise pas que l'utilisation du bien vendu est soumise à un agrément n'est pas trompeuse car il appartient au consommateur-spécialiste de se renseigner sur les formalités administratives afférentes au type d'appareil en cause ; Cass. crim., 25 septembre 2001, LawLex200300004456JBJ, approuvant Rennes, 16 novembre 2000, LawLex200300004548JBJ, considérant que la plaquette d'un entrepreneur en bâtiment n'est pas susceptible d'induire ses lecteurs en erreur sur la qualité de son intervention, dès lors que ceux-ci, professionnels de ce secteur, doivent lire le document publicitaire, comportant toutes les informations utiles, dans son intégralité ; TGI Paris, 19 mai 2005, LawLex200500010357JBJ, estimant qu'une publicité ne peut tromper les professionnels auxquels elle est destinée, lorsqu'elle associe la mention d'une certification ISO à un argumentaire en contradiction avec celle-ci ; Paris, 16 décembre 2015, LawLex201500001835JBJ ; 28 octobre 2016, LawLex201600001784JBJ ; 27 janvier 2017, LawLex201700000198JBJ, publicité s'adressant à des professionnels qui connaissent bien les solutions proposées et les entreprises présentes sur le marché ; Nîmes, 15 mars 2018, LawLex201800000471JBJ.

Bordeaux, 14 janvier 1992, LawLex200400001193JBJ : publicité parue dans une revue réservée spécialisée s'adressant à un public de connaisseurs et d'éleveurs de chiens ; Versailles, 29 mars 2001, LawLex200200000653JBJ, RJDA 2001, n° 821 : publicité parue dans des revues réservées aux entreprises de distribution d'imprimés, documents publicitaires et journaux gratuits faisant état de l'inaccessibilité des boîtes aux lettres des immeubles d'habitation. Les juges considèrent qu'elle ne peut être comprise par ses destinataires, professionnels avertis, comme signifiant que l'annonceur est la seule société de distribution de prospectus publicitaires pouvant pénétrer dans les lieux ; V. aussi Rennes, 28 juin 2011, LawLex201200001097JBJ ; Nîmes, 15 mars 2018, LawLex201800000471JBJ.

V. Cass. crim., 22 novembre 2016, LawLex201600001927JBJ, LD janvier 2017, 8, obs. BRES ; RJDA 2017, n° 126 ; 17 janvier 2018, LawLex201800000145JBJ, Dr. pén. mai 2018, Chron. 5, obs. BAZIN ; Paris, 19 janvier 2018, LawLex201800000185JBJ ; Aix-en-Provence, 10 avril 2018, LawLex201800000591JBJ.

Cass. crim., 26 janvier 1988, LawLex200300003573JBJ.

Paris, 26 septembre 1991, LawLex200200001789JBJ, RJDA 1991, n° 1102 ; D. 1992, Somm., 341, obs. IZORCHE.

Pour un ex., V. Lyon, 28 septembre 2012, LawLex201200002224JBJ. - Comp., TGI Paris, 15 septembre 2016, LawLex201600001543JBJ, et Paris, 13 octobre 2016, LawLex201600001693JBJ, selon lesquels même l'article L. 121-2 n'est pas applicable dans les relations entre professionnels.

Paris, 5 février 2016, LawLex201600000303JBJ ; Aix-en-Provence, 1er février 2018, LawLex201800000264JBJ.

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