Le Droit de la consommation, troisième tome du Traité de droit économique, expose, dans une perspective comparative, l’ensemble des règles européennes et françaises : publicité, pratiques commerciales déloyales, conditions de validité du contrat, clauses abusives, conformité des produits, vices cachés, sécurité des produits.

Droit de la consommation

“Le Code civil reconnaît la liberté contractuelle sur le fondement de l’autonomie de la volonté” . En conséquence, les conventions doivent être négociées, formées et exécutées de bonne foi (art. 1104 C. civ.) et dès lors qu'elles sont légalement formées, elles tiennent lieu de loi entre les parties (art. 1103 C. civ.), les juges étant tenus de les appliquer comme telles. Cette harmonie des relatio …

Dispositif légal.

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“Le Code civil reconnaît la liberté contractuelle sur le fondement de l’autonomie de la volonté” . En conséquence, les conventions doivent être négociées, formées et exécutées de bonne foi (art. 1104 C. civ.) et dès lors qu'elles sont légalement formées, elles tiennent lieu de loi entre les parties (art. 1103 C. civ.), les juges étant tenus de les appliquer comme telles. Cette harmonie des relations juridiques ne tient pas compte des rapports de force économiques. Aussi le législateur est-il rapidement intervenu pour protéger la partie la plus faible à la relation contractuelle. Les mesures adoptées dans un souci de protection des consommateurs se fondent assez largement sur le principe de bonne foi et de loyauté contractuelle, inscrit à l'article 1104. La réglementation sur les clauses abusives l'illustre de manière exemplaire. De même, le droit de l'Union requiert du juge national qu'il apprécie l'existence d'un déséquilibre contractuel au regard des notions de bonne foi, d'équité et de loyauté contractuelle . 

La répression des clauses abusives a été introduite en droit français  par la loi 78-23 du 10 janvier 1978 , dite loi Scrivener, pour pallier les carences de la législation civile dans le domaine de la protection des consommateurs et lutter contre les pièges des contrats d'adhésion proposés par certains professionnels. L'article 35 de la loi prévoyait ainsi que des décrets en Conseil d'État pris après avis de la Commission des clauses abusives pouvaient interdire, limiter ou réglementer, “dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs”, les clauses qui “apparaissent imposées aux non-professionnels ou consommateurs par un abus de la puissance économique de l'autre partie et confèrent à cette dernière un avantage excessif”. Les clauses en question devaient être relatives au caractère déterminé ou déterminable du prix ainsi qu'à son versement, à la consistance de la chose ou à sa livraison, à la charge des risques, à l'étendue des responsabilités et garanties, aux conditions d'exécution, de résiliation, résolution ou reconduction des conventions. Un seul décret, en date du 24 mars 1978, a été adopté . Il déclarait expressément abusives quatre types de clauses : i) la clause ayant pour objet ou pour effet de constater l'adhésion du non-professionnel ou consommateur à des stipulations contractuelles qui ne figurent pas sur l'écrit qu'il signe  ; ii) la clause ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou de réduire le droit à réparation du non-professionnel ou consommateur en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations ; iii) la clause ayant pour objet ou pour effet de réserver au professionnel le droit de modifier unilatéralement les caractéristiques du bien à livrer ou du service à rendre  ; iv) la clause de garantie contractuelle qui ne mentionne pas clairement que s'applique, en tout état de cause, la garantie légale des défauts ou vices cachés de la chose vendue ou du service rendu. En vertu de ce dispositif, le juge ne pouvait en principe sanctionner que les stipulations expressément visées par le décret. Néanmoins, par un arrêt remarqué, la Cour de cassation s'est affranchie de la référence au décret et reconnue un pouvoir autonome de caractérisation de l'abus même dans des hypothèses non prévues par le pouvoir réglementaire . La loi du 26 juillet 1993 a par la suite codifié les dispositions de l'article 35 aux articles L. 132-1 à L. 132-5 du Code de la consommation (actuels art. L. 212-1 et s.) .

Parallèlement, le législateur de l'Union a adopté, le 5 avril 1993, la directive 93-13 , qui poursuit un double objectif : protéger le consommateur et éviter toute distorsion de concurrence entre vendeurs ou entre prestataires de services à l'occasion de la commercialisation de leurs produits ou de leurs services dans d'autres États membres. En laissant aux États membres la faculté d'adopter ou de maintenir des dispositions plus strictes, ayant pour objet d'assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur, le texte ne réalise qu'une harmonisation minimale. L'article 3 de la directive retient une définition de la clause abusive différente de celle adoptée à l'époque par le droit français. Est abusive, “une clause qui figure dans un contrat n'ayant pas fait l'objet d'une négociation individuelle (...) lorsque, en dépit de l'exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties”. En annexe figure une liste indicative de clauses qui peuvent être déclarées abusives. La France a transposé la directive avec la loi 95-96 du 1er février 1995 , puis l'ordonnance 2001-741 du 23 août 2001 . La loi de 1995 a transposé, au sein de l'article L. 132-1 du Code de la consommation (actuel art. L. 212-1), la définition du droit de l'Union et reproduit fidèlement l'annexe de la directive.

La loi 2008-776 du 4 août 2008, dite LME , a, à son tour, modifié l'article L. 132-1 et abrogé la liste de clauses annexée à cet article, en confiant au pouvoir réglementaire la mission d'élaborer une nouvelle liste. Elle a par ailleurs introduit dans le Code de commerce la sanction des clauses abusives dans les rapports entre professionnels . Le décret 2009-302 du 18 mars 2009 , pris en application de la loi LME, a défini une liste “noire” et une liste “grise” de clauses présumées abusives respectivement de manière irréfragable ou simple, codifiées aux articles R. 212-1 et R. 212-2 (anciens art. R. 132-1 et R. 132-2) du Code de la consommation .

Dans un souci de simplification et d'harmonisation des règles applicables, le Gouvernement a adopté l'ordonnance 2016-301 du 14 mars 2016 censée “améliorer la cohérence juridique des dispositions légales, au bénéfice des utilisateurs”, qui procède à une recodification “à droit constant” du Code de la consommation. Ce “nouveau” code est entré en vigueur le 1er juillet 2016. Toutefois, une lecture attentive du texte révèle des modifications d'importance. Ainsi, l'article L. 212-1 qui remplace l'article L. 132-1 ne mentionne plus de non-professionnels et semble ainsi s'aligner sur le droit de l'Union. En réalité, tel n'est pas le cas, puisque le nouvel article L. 212-2 déclare applicables aux contrats conclus entre professionnels et non-professionnels les dispositions de l'article L. 212-1. Il en va de même s'agissant des nouveaux articles R. 212-1 et R. 212-2, issus du décret 2016-884 du 29 juin 2016 : ils reprennent les dispositions des anciens articles R. 131-1 et R. 132-2 sans plus viser les non-professionnels, mais ceux-ci sont réintégrés dans le dispositif par l'article R. 212-5. Pour le reste, les dispositions de l'ancien article L. 132-1 subsistent mais sont ordonnées différemment.

La proposition de directive du 8 octobre 2008, qui s'est concrétisée par la directive 2011-83 du 25 octobre 2011 , prévoyait à l'origine de renforcer le degré d'harmonisation de la réglementation de l'Union relative aux clauses abusives. Faute d'accord entre les États membres, les clauses abusives ont été retirées du texte final. La proposition de règlement sur le droit commun européen de la vente , en cours d'examen, qui fixerait un cadre contractuel supplétif et non obligatoire, tente une nouvelle fois de réviser le cadre réglementaire des clauses abusives. A l'instar du droit français, il prévoit une liste noire et une liste grise de clauses présumées abusives. Un texte européen a été récemment adopté en matière de clauses abusives : la directive 2019-2161 du 27 novembre 2019, qui vise à garantir l'efficacité des règles protectrices des consommateurs par un renforcement du caractère dissuasif des sanctions applicables . Un nouvel article 8 ter est inséré au sein de la directive 93-13 qui laisse toute latitude aux États membres pour déterminer le régime des sanctions applicables, pour autant que celles-ci soient effectives, proportionnées et dissuasives . La sanction, qui pourra prendre la forme d'une amende, s'ajoute donc au mécanisme du “réputé non écrit” jusqu’alors seul applicable. En conformité avec le droit de l'Union, l'ordonnance 2021-1734 du 22 décembre 2021 a renforcé le montant de l'amende administrative fixée à l'article L. 241-2 - qui passe de 3 000 à 15 000 euro, pour une personne physique et de 15 000 à 75 000, pour une personne morale et en cas d'infraction de grande ampleur pourra être porté à 4 % du chiffre d'affaires annuel, sans pouvoir excéder deux millions d'euro - et instauré une amende civile, en cas de récidive et d'infraction de grande ampleur (nouvel art. L. 241-1-1).

En France, l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats a inclus la lutte contre les clauses abusives dans le Code civil . La répression des clauses abusives concerne désormais tous les contrats d'adhésion, et pas seulement ceux conclus entre non-professionnels ou consommateurs et professionnels. L'introduction de la notion de clause abusive dans le Code civil pose la question de la coexistence des régimes existants. En effet, la création d'un déséquilibre significatif est punie par le Code de la consommation lorsqu'il concerne un consommateur ou non-professionnel qui contracte avec un professionnel et réprimée par le Code de commerce dans les relations contractuelles entre professionnels . Cette multiplication de règles risque de nuire à la prévisibilité nécessaire à la vie des affaires et va à contre-courant des nécessités de la vie économique et de l'évolution des droits étrangers. 

VOGEL, Traité de Droit des affaires. Du droit commercial au droit économique, LGDJ, 2016, n° 71.

CJUE, 14 mars 2013, Aziz c. Caixa d'Estalvis de Catalunya, aff. C-415-11, LawLex201300000363JBJ, CMLR 2014, 955, obs. IGLESIAS SANCHEZ ; RTD eur. 2013, 559, obs. AUBERT de VINCELLES : pour déterminer si le déséquilibre significatif est créé “ en dépit de l'exigence de bonne foi ”, le juge national doit vérifier si le professionnel, en traitant de façon loyale et équitable avec le consommateur, pouvait raisonnablement s'attendre à ce que ce dernier accepte la clause à la suite d'une négociation individuelle.

L. 95-96 du 1er février 1995 concernant les clauses abusives et la présentation des contrats et régissant diverses activités d'ordre économique et commercial, JO du 2 février 1995, 1755.

Ord. 2001-741 du 23 août 2001 portant transposition de directives communautaires et adaptation au droit communautaire en matière de droit de la consommation, JO du 25 août 2001, 13645.

L. 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, JO du 5 août 2008, 12471.

V. Traité de droit économique, T. 1 Droit de la concurrence, LawLex/Bruylant, 2015, n° 641.

D. L. VOGEL, 2009-302 du 18 mars 2009 portant application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, JO du 20 mars 2009, 5030.

Sur le décret, V. AMRANI-MEKKI, Décret du 18 mars 2009 relatif aux clauses abusives : quelques réflexions procédurales, RDC 2009, 1617 ; DURAFOUR, Est-il possible d'encadrer réglementairement l'appréciation judiciaire du caractère abusif d'une clause contractuelle ?, RLDA 2009, n° 36, 43 ; LEGEAIS, Clauses abusives. Décret portant application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, RTD com. 2009, 424 ; PAISANT, Le décret du 18 mars 2009 portant listes noire et grise de clauses abusives, JCP G, 2009, n° 28, 60 ; SAUPHANOR-BROUILLAUD, Les remèdes en droit de la consommation : clauses noires, clauses grises, clauses blanches, clauses proscrites par la jurisprudence et la Commission des clauses abusives, RDC 2009, 1629.

Dir. 2011/83 du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, JOUE L 304 du 22 novembre 2011, 64

Dir. 2019-2161 du 27 novembre 2019 modifiant la directive 93-13-CEE du  Conseil et les directives 98-6-CE, 2005-29-CE et 2011-83-UE du Parlement  européen et du Conseil en ce qui concerne une meilleure application et  une modernisation des règles de l’Union en matière de protection des  consommateurs, JOUE L 328 du 18 décembre 2019, 7.

Les États membres pourront limiter l’application de ces sanctions aux clauses expressément définies comme abusives en toutes circonstances par le droit national (en l’occurrence, notre art. R. 212-1 C. consom.) ou aux professionnels qui continuent d’utiliser des clauses jugées abusives par une décision définitive.

Après les États-Unis en 1962, la Suède en 1971, le Royaume-Uni en 73, le Danemark en 1974 et la RFA en 1976.

Ainsi, l'article 1170 prévoit que “toute clause qui prive de sa substance l'obligation essentielle du débiteur est réputée non écrite ”. L'article 1171 ajoute que “dans un contrat d'adhésion, toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite”. - Sur ces textes, V. GAUDEMET, Quand la clause abusive fait son entrée dans le Code civil, Contrats Conc. Consom. mai 2016, étude , 27 ; MEKKI, Fiche pratique sur les clauses abusives : quel modus operandi pour les professionnels du droit ?, sous Ord. n° 2016-131, 10 févr. 2016 et C. civ., art. 1171 nouv., Gaz. Pal. 10 mai 2016, 11.

L'article L. 442-6, I, 2º réprime le fait de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

L. 78-23 du 10 janvier 1978 dite “Scrivener” sur la protection et l'information des consommateurs de produits et de services, JO du 11 janvier 1978, 301.

D. 78-464 du 24 mars 1978, JO du 1er avril 1978, 1412.

Cet article du décret a cependant été annulé par le Conseil d'État, en raison de son excessive généralité, dans une décision du 3 décembre 1980, LawLex201600000002JBJ, D. 1981, 228, note LARROUMET ; JCP G, 1981, II, 19502 avec les concl. HAGELSTEEN ; RTD com. 1981, 340, obs. HÉMARD.

Le texte réservait cependant la faculté d'apporter des modifications liées à l'évolution technique, à condition qu'il n'en résulte ni augmentation de prix, ni altération de qualité et que le non-professionnel ou consommateur ait la la possibilité de mentionner les caractéristiques auxquelles il subordonne son engagement.

Cass. civ. 1re, 14 mai 1991, LawLex200300001213JBJ, Contrats Conc. Consom. 1991, n° 160, obs. LEVENEUR ; D. 1991, 449, note GHESTIN ; Defrénois 1991, n° 35142, obs. AUBERT ; JCP G, 1991, 21763, obs. PAISANT ; RTD civ. 1991, 526, obs. MESTRE.

L. 93-949 du 26 juillet 1993 relative au Code de la consommation, JO du 27 juillet 1993, 10538.

Dir. 93-13 du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, JO L 95 du 21 avril 1993, 29.

Droit de la consommation

401. Dispositif légal.(1)

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Les décisions de justice citées dans ce paragraphe :

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401. Dispositif légal.(1)

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