Contrats d'affaires

La résolution unilatérale par voie de notification, prévue à l'article 1226 du Code civil, constitue la codification de la faculté reconnue par la jurisprudence au créancier d'une obligation inexécutée de résoudre le contrat à ses risques et périls . Selon la Haute juridiction, la gravité du comportement d'une partie à un contrat peut justifier que l'autre partie y mette fin de façon unilatérale à …

Résolution unilatérale par voie de notification.

La résolution unilatérale par voie de notification, prévue à l'article 1226 du Code civil, constitue la codification de la faculté reconnue par la jurisprudence au créancier d'une obligation inexécutée de résoudre le contrat à ses risques et périls . Selon la Haute juridiction, la gravité du comportement d'une partie à un contrat peut justifier que l'autre partie y mette fin de façon unilatérale à ses risques et périls , que le contrat soit à durée déterminée ou non .

Avant la réforme du droit des contrats, la résolution par voie de notification figurait comme une exception au principe de la résolution judiciaire. Le nouveau texte l'érige désormais au rang de principe concurrent de la résolution judiciaire" . En outre, avant la réforme, la résolution unilatérale était subordonnée à une mise en demeure préalable du cocontractant ; le créancier à l’initiative de la résolution s’exposait alors uniquement au versement de dommages et intérêts au cas où le juge estimerait, a posteriori, qu’il a exercé abusivement cette prérogative ; dans cette dernière hypothèse, c’était au débiteur souhaitant obtenir la sanction de la résolution unilatérale abusive de démontrer que le manquement qui lui était imputé, était dépourvu de gravité, alors qu’en principe, en cas de résolution judiciaire, c’est au demandeur d’apporter la preuve de la gravité de l’inexécution.

Désormais, le nouvel article 1226 du Code civil dispose  : "Le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable. Selon la jurisprudence, une société ne démontre pas une situation d'urgence la dispensant de l'envoi à son sous-traitant d'une mise en demeure, lorsqu’elle produit un rapport d'expertise non-judiciaire qui n'est pas corroboré par d'autres pièces versées aux débats et ne permet pas à lui-seul d'établir l'existence de malfaçons imputables au maçon . En outre, dès lors que le créancier n'a pas adressé à son cocontractant la mise en demeure préalable à la résiliation, il n'y a pas lieu de rechercher si l'inexécution alléguée était suffisamment grave pour justifier une résiliation aux risques et périls du créancier .

Selon la Haute juridiction, le créancier peut également se dispenser d'une mise en demeure préalable, “lorsqu'il résulte des circonstances que celle-ci est vaine” , tel étant le cas, selon la Cour, “lorsque le comportement de l'une des parties est si grave qu'il rend matériellement impossible la poursuite des relations contractuelles”. Selon la Cour d'appel de Paris, une menace verbale circonstancielle ne serait pas de nature à rendre vaine la mise en demeure requise au titre de l'article 1226 .

L'article 1226 poursuit : "La mise en demeure mentionne expressément qu'à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat .

Lorsque l'inexécution persiste, le créancier notifie au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent.

Le débiteur peut à tout moment saisir le juge pour contester la résolution. Le créancier doit alors prouver la gravité de l'inexécution".

En application de ce texte, il a été jugé qu'un entrepreneur, qui, au lieu d'effectuer la pose en rénovation d'un oeil de boeuf, comme prévu au devis, a procédé à sa dépose totale en dégradant le mur, a manqué à son obligation contractuelle, de sorte que ces manquements sont constitutifs d'une inexécution grave de ses obligations justifiant la résolution unilatérale du contrat d'entreprise par voie de notification à l'initiative du maître d'ouvrage ainsi que sa condamnation à payer à ce dernier le trop payé de l'acompte versé correspondant à la différence entre cet acompte et le coût des prestations correctement effectuées .

La résolution unilatérale par voie de notification est par ailleurs encadrée par l'article 1228 du Code civil, qui autorise le juge à écarter la résolution au profit de l'exécution forcée du contrat ou de l'octroi de dommages et intérêts : “Le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l'exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts”. 

Cass. 1re civ., 13 octobre 1998, LawLex201000000957JBJ, JCP G 1999, II, 10133, obs. RZEPECKI ; D. 1999, 197, obs. JAMIN ; RTD civ. 1998, 506, obs. RAYNARD ; RTD civ. 1999, 394, obs. MESTRE ; Defrénois 1999, 374, obs. MAZEAUD, rendu à propos d'un contrat d'anesthésie-réanimation :  la gravité du comportement d'une partie à un contrat peut justifier que l'autre partie y mette fin de façon unilatérale à ses risques et périls, et que cette gravité, dont l'appréciation qui en est donnée par une autorité ordinale ne lie pas les tribunaux, n'est pas nécessairement exclusive d'un délai de préavis.

Chambéry, 15 novembre 2022, LawLex202400007553JBJ : le non-paiement d’une facture ne peut justifier la résiliation  unilatérale du contrat de maîtrise d'œuvre d'exécution par  l’entrepreneur lorsqu'elle est afférente à des travaux supplémentaires,  hors marché, lequel était à forfait, sans que celui-ci ait apporté la  preuve de leur acceptation par les maîtres de l'ouvrage.

Cass. 1re civ., 28 octobre 2003, LawLex201000000957JBJ.

Rapport au Président de la République relatif à l'Ord. n° 2016-131 du 10 févr. 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, pp. 18-19 : “La résolution unilatérale n’est cependant plus appréhendée comme une exception au principe de la résolution judiciaire, mais est traitée comme une faculté autonome offerte au créancier qui, victime de l’inexécution, aura désormais le choix, en particulier en l’absence de clause résolutoire expresse, entre les deux modes de résolution, judiciaire ou unilatérale”.

Orléans, 28 mai 2024, LawLex202400007558JBJ.- V. dans le même sens, TJ Bordeaux, 27 février 2024, LawLex202400002005JBJ : le maître d’ouvrage qui justifie avoir adressé par lettre recommandée avec avis de réception à l’entrepreneur un courrier de notification de la résolution du contrat les liant, en raison de son abandon de chantier et de l’existence de nombreux désordres, mais ne produit aucune mise en demeure préalable à la résolution du contrat, conforme aux dispositions de l’article 1226 du Code civil, ne peut qu’être débouté de ce chef, dès lors qu’il n’a demandé que le constat du bien-fondé de la résolution notifiée et non le prononcé de la résolution pour inexécution suffisamment grave.

Bordeaux, 24 janvier 2024, LawLex202400000608JBJ.

Cass. com., 18 octobre 2023, LawLex202300012682JBJ.

Paris, 11 septembre 2024, LawLex202400007555JBJ.

Paris, 11 septembre 2024, LawLex202400007555JBJ, relevant que la mise en demeure qui ne mentionne pas expressément qu'à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat et ne fait état que de la possible application de pénalités de retard et de la possibilité de saisir la justice pour obtenir l'autorisation de recourir à une autre entreprise pour terminer les travaux ne répond pas aux exigences de l'article 1226 du Code civil.

Amiens, 19 janvier 2021, LawLex202300003106JBJ.

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