Contrats d'affaires

L'acheteur professionnel doit faire preuve de plus de vigilance que l'acheteur profane. Lorsqu'il est de même spécialité que le vendeur, l'acquéreur est présumé connaître le vice. Il peut cependant renverser la présomption par la preuve du caractère indécelable du vice ou du dol. Les juges se montrent moins sévères à l'égard du professionnel lorsqu'il n'est pas de même spécialité que le vendeur.
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Acheteur professionnel.

L'acheteur professionnel doit faire preuve de plus de vigilance que l'acheteur profane. Lorsqu'il est de même spécialité que le vendeur, l'acquéreur est présumé connaître le vice. Il peut cependant renverser la présomption par la preuve du caractère indécelable du vice ou du dol. Les juges se montrent moins sévères à l'égard du professionnel lorsqu'il n'est pas de même spécialité que le vendeur.

Lorsque l'acheteur est de même spécialité que son vendeur, les juges estiment que ses compétences professionnelles lui confèrent une meilleure appréhension de la chose. Le degré de diligence attendu de lui se trouve, dans ce cas, renforcé et il doit procéder à une inspection plus minutieuse de la chose que celle exigée du profane . Ainsi, le défaut du produit qui aurait pu être décelé par le professionnel de la spécialité en question s'il avait conduit les analyses et tests appropriés ne constitue pas un vice caché . L'acheteur de même spécialité que le vendeur qui ne vérifie pas l'état de la marchandise, alors que des indicateurs visuels et sa connaissance des matériaux lui permettaient de déceler les vices de la chose, ne peut agir en garantie des vices cachés . De même, l'acquéreur qui se présente sur internet comme un spécialiste en la matière disposant de vingt ans d'expérience ne peut invoquer l'existence d'un vice caché alors qu'une opération élémentaire lui aurait permis de le découvrir . Plus encore, l'acheteur de même spécialité que son vendeur est présumé connaître les vices affectant la chose, même si cette  présomption n'est pas, contrairement à celle qui pèse sur le vendeur professionnel, irréfragable . 

La présomption de découverte du vice ne jouant pas lorsque celui-ci ne pouvait être décelé au moment de la vente, même par un acheteur professionnel , le juge doit vérifier si ce dernier a procédé à un examen normal et diligent de la chose, proportionné à ses compétences techniques, et s'il était concrètement en mesure de le déceler . Le vice présente un caractère indécelable, même pour un acquéreur professionnel, lorsque seuls des examens très approfondis lui auraient permis de le découvrir au moment de la vente . Il en va ainsi lorsque la révélation du vice a nécessité un démontage du matériel , l'étude approfondie du sous-sol  ou un usage prolongé de la chose . En effet, le juge ne peut attendre d'un acheteur qu'il procède à des manipulations qui ne sont pas d'usage . Comme le caractère indécelable du vice, le dol du vendeur fait tomber la présomption de connaissance du vice pesant sur l'acheteur de même spécialité .

L'acheteur professionnel, qui n'est pas de même spécialité que le vendeur, doit faire preuve d'un degré de diligence supérieur à celui attendu d'un acheteur profane, mais inférieur à celui requis d'un acheteur professionnel de même spécialité. Ainsi, même s'il n'est pas présumé connaître les vices de la chose, l'acheteur professionnel qui n'a pas la même spécialité que son vendeur doit procéder avant la vente aux vérifications techniques d'un usager normalement diligent . L'acquéreur de spécialité différente, normalement diligent, pourra néanmoins invoquer le bénéfice de la garantie des vices cachés si le vice présente un caractère indécelable au regard de son absence de compétences particulières dans le domaine en question . Un agriculteur ayant l'habitude de conduire des tracteurs, ne peut être considéré comme un spécialiste en mécanique présentant des compétences particulières pour déceler un vice, qui n’était ni ostensible, ni immédiatement perceptible au jour de la vente, puisqu’il ne pouvait apparaître que dans des conditions normales d'utilisation, c'est-à-dire en charge et en terrain accidenté . Constitue ainsi un vice indécelable pour un tel acheteur le défaut affectant les vitesses d'une chargeuse agricole qui n'a pu être découvert qu'après démontage de la boîte de vitesse au cours de l'expertise . De même, les vices affectant un navire ne peuvent être considérés comme apparents aux yeux de l'acheteur professionnel de spécialité différente, lorsqu'ils n'étaient que latents au moment de la livraison . La qualité d'acheteur de spécialité différente s'apprécie en la personne même de l'acheteur, et non des personnes qui l'assistent éventuellement . 

Cass. com., 26 mars 2013, LawLex201400000366JBJ, RTD com. 2013, 322, obs. BOULOC : le professionnel alerté des risques présentés par le traitement aux PCP de chais de bois et qui a néanmoins fait le choix d'acquérir, d'occasion, des caisses palettes sans procéder aux vérifications élémentaires incombant à un professionnel averti et qui lui auraient permis de se convaincre lui-même du défaut, ne peut agir en garantie des vices cachés.

Paris, 7 septembre 2017, LawLex201700001437JBJ.

Cass. com., 5 avril 2016, LawLex201600000918JBJ, JCP, G, 2016, n° 797, obs. GROSSER ; RJDA 2016, n° 521.

Cass. com., 23 novembre 1999, LawLex200500004308JBJ, RJDA 2000, n° 255 : le vice affectant des bobines de tôle galvanisée n'est pas décelable,  même par l'acquéreur professionnel, dès lors que seul le déroulement des  bobines, qui n'est pas d'usage, permet de le découvrir.

Toulouse, 1er juin 1995, LawLex200500005539JBJ.

Paris, 6 octobre 1995, LawLex200500004362JBJ, RJDA 1996, n° 211.

Cass. com., 10 juin 1997, LawLex200500005494JBJ : le vice affectant un tractopelle, considéré par l'expert comme caché  pour un acheteur profane, doit l'être également pour le professionnel de  l'électricité, dépourvu de connaissance particulière concernant les  engins de chantier ; Nîmes, 18 septembre 2014, LawLex201600000296JBJ, estimant que même s'il a fait preuve d'une certaine légèreté en achetant un véhicule  d'occasion à distance sans procéder à aucun essai sur route ni examen  visuel, les vices qui affectent la chose sont cachés pour un professionnel de spécialité différente de celle du vendeur, lorsqu'ils n'ont pas été décelés au cours du contrôle technique qui a précédé la  vente et n'ont pu être révélés que par une expertise ; Caen, 16 avril 2024, LawLex202400003252JBJ : lorsque la société acquéreuse, qui ne s’était pas déplacée pour vérifier l’état de la benne acquise, ne pouvait déceler, au regard des photographies communiquées, à sa demande, par le vendeur, les fissures en affectant le châssis, et que même si elle s'était rendue sur place, sa qualité de professionnel ne lui aurait pas permis de le faire, seule l'expertise ayant permis de déterminer l'existence, l'étendue et la gravité des désordres affectant la machine, la vente doit être résolue sur le fondement de la garantie des vices cachés.

Bordeaux, 6 juin 2024, LawLex202400004382JBJ.

Amiens, 31 janvier 2019, LawLex201900000171JBJ.- V. aussi, Paris, 23 janvier 2020, LawLex202000000118JBJ : le désordre qui résulte du défaut de montage d'un écrou lors de la  fabrication d'un tracteur n'est pas décelable par l'acquéreur de  spécialité différente, dès lors que seul un démontage a permis de le  découvrir ; Riom, 12 mars 2024, LawLex202400002365JBJ, relevant que la qualité de maçon et d’utilisateur habituel du type de matériel acheté n’implique pas que l’acheteur ait été nécessairement en mesure de déceler les défauts de la chose vendue, dès lors que les désordres à l’origine des dysfonctionnements du véhicule n’ont été identifiés qu’à la suite d’une expertise ayant nécessité des investigations approfondies et une analyse particulière des préconisations du constructeur en matière d’entretien, dont l’acheteur n'était pas supposé avoir connaissance dans le cadre de son activité.

Bordeaux, 29 novembre 1994, LawLex200500004245JBJ.

Cass. com., 8 juillet 1999, LawLex200500003963JBJ, RJDA 1999, n° 1189 ; 8 juillet 2003, LawLex200300003412JBJ, énonçant que le vice de la chose vendue ne peut être considéré comme apparent dès  lors qu'il ne peut être décelé par un acheteur normalement diligent même  à la suite d'un examen attentif, de sorte que le juge n'est pas tenu de  rechercher si les mécaniciens compétents qui accompagnaient l'acquéreur  pouvaient le découvrir.

Cass. com., 5 février 2020, LawLex202000000274JBJ ; Rennes, 13 février 2024, LawLex202400001780JBJ : la société acquéreuse, qui a reçu du vendeur une facture pro-format du camion nacelle, objet de la vente, qui indiquait expressément “ vente dans l'état sans garantie ”, et “ vente à marchand ”, accompagnée du rapport de l'APAVE qui faisait état de défauts importants, ne saurait soutenir, alors en outre qu’elle était en présence d’une exclusion de garantie, valable entre professionnels de même spécialité, avoir acquis un véhicule atteint de vices cachés, dès lors que les informations portées à sa connaissance par le vendeur faisaient apparaître les vices.

Versailles, 7 mars 2017, LawLex201700000567JBJ.

Cass. com., 27 novembre 1991, LawLex200300003018JBJ, Contrats Conc. Consom. 1992, n° 94, obs. LEVENEUR ; RJDA 1992, n° 139 ; Rouen, 7 juin 1990, LawLex200400001844JBJ, RJDA 1993, n° 102 :  l'acquéreur, professionnel de l'hôtellerie, ne peut prétendre ignorer le  vice résultant d'une nouvelle réglementation applicable au classement  des établissements hôteliers, même s'il n'en a pas été informé par le  vendeur ; Lyon, 14 janvier 2000, LawLex200300004437JBJ : les défauts d'équipement d'un tractopelle concernant le remplacement de vitres cassées, d'un siège, de poignées de commandes et l'absence d'un godet d'excavation constituent des vices apparents pour l'acheteur professionnel normalement avisé.

Cass. com., 13 novembre 1990, LawLex200300003016JBJ.- V. dans le même sens : Cass. civ. 1re, 4 décembre 1990, LawLex200300003009JBJ.

Agen, 5 septembre 2012, LawLex201300000209JBJ, précisant que le vendeur intermédiaire est fondé à appeler en garantie le constructeur  dès lors que le vice était indécelable, même pour un professionnel auquel s'applique la présomption de connaissance du vice et qu'il n'a  pas été informé de la campagne de rappel menée par le constructeur.

Cass. com., 3 janvier 1991, LawLex200300003017JBJ, vice requérant un examen très approfondi en laboratoire ; Aix-en-Provence, 16 mai 2008, LawLex201200001900JBJ, vice nécessitant des investigations en laboratoire. - V. aussi Cass. com., 26 mars 2013, LawLex201400000364JBJ, RTD com. 2013, 325, obs. BOULOC : le vice résultant de l'absence de revêtement Epoxy dans la paroi intérieure d'une cuve,  révélé à l'issue d'un rapport d'expertise, qui a exclu qu'un seul examen  visuel puisse la déceler, ne constitue pas un vice apparent, même pour  un professionnel ; Bordeaux, 23 janvier 1992, LawLex200500005567JBJ, vice d'un bateau décelable seulement par un expert ; Bordeaux, 15 novembre 2016, LawLex201600001912JBJ, estimant que le fait que l'acheteur de bouchons de liège viciés soit un professionnel  du vin n'exonère pas le vendeur dès lors que le bouchonnage constaté  n'a pu être décelé qu'à l'issue d'une expertise.

Nîmes, 21 mai 1992, LawLex200300004207JBJ : le défaut est caché même pour l'acheteur professionnel de même  spécialité dès lors qu'il n'est pas décelable en l'absence de démontage  du matériel. 

Versailles, 13 janvier 2000, LawLex200500005114JBJ.

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