Contrats d'affaires

La libre détermination du prix par les parties résulte du jeu de l’article 1591 du Code civil et de celui de l’article 1102 , qui codifie, depuis la réforme du droit des obligations, le principe de liberté contractuelle. Le vendeur et l'acheteur doivent trouver un accord sur la chose, le prix et y consentir de manière libre et éclairée, l’un et l’autre ne devant pas être contraints de vendre ou d' …

Violence/Contrainte économique

La libre détermination du prix par les parties résulte du jeu de l’article 1591 du Code civil et de celui de l’article 1102 , qui codifie, depuis la réforme du droit des obligations, le principe de liberté contractuelle. Le vendeur et l'acheteur doivent trouver un accord sur la chose, le prix et y consentir de manière libre et éclairée, l’un et l’autre ne devant pas être contraints de vendre ou d'acquérir la chose à un prix auquel ils n’auraient pas consenti.

L’article 1130 du Code civil dispose que la violence vicie le consentement lorsque, sans elle, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Aux termes de l’article 1140 du Code civil, “ il y a violence lorsqu’une partie s’engage sous la pression d’une contrainte qui lui inspire la crainte d’exposer sa personne, sa fortune ou celles de ses proches à un mal considérable ”. La violence peut prendre la forme d’une contrainte morale, mais pour justifier la nullité de la vente, elle doit être telle qu'elle prive celui qui l’invoque de son libre consentement .

Depuis la réforme du droit des obligations, la violence économique est admise au titre des vices du consentement. L’article 1143 nouveau du Code civil dispose : “ Il y a également violence lorsqu’une partie, abusant de l’état de dépendance dans lequel se trouve son cocontractant à son égard obtient de lui un engagement qu’il n’aurait pas souscrit en l’absence d’une telle contrainte et en tire un avantage manifestement excessif ”. Pour justifier la nullité d’une vente sur le fondement de cette disposition, l’exploitation abusive d’une situation de dépendance doit être établie . Pour ce faire, les juges doivent d’une part identifier le risque et les conséquences économiques qui ont eu pour effet de placer une partie dans une situation de dépendance à l’égard de son cocontractant. Une compagnie aérienne n’est ainsi pas fondée à invoquer la violence économique pour justifier la nullité d’un contrat de maintenance d’avions, dès lors qu’elle ne précise pas en quoi le risque de devoir retarder l'exploitation d'un seul avion, le temps de trouver un autre prestataire de maintenance pour sa prise en charge, l'aurait conduite à rompre des contrats et aurait eu des conséquences économiques telles, qu'il l’aurait placée dans une situation de dépendance à l'égard de son cocontractant, la contraignant à signer l'avenant par lequel ce dernier lui imposait une augmentation de ses tarifs . D’autre part, les juges doivent caractériser l’exploitation de la crainte de celui qui invoque la violence économique “ d’un mal menaçant ses intérêts légitimes ” et qui l’aurait contraint à contracter. C’est pourquoi un salarié, ayant cédé à son employeur ses droits d’auteur sur un dictionnaire qu’il a mis au point, n’est pas fondé à obtenir la nullité de la cession pour violence, à défaut de démontrer l’existence d’une exploitation par son employeur de sa crainte d’être licencié dans le cadre d’un plan de compression du personnel qui l’aurait contraint à lui céder ses droits . 

Selon la Haute juridiction, les principes qui guident la profession d’avocat qui prête serment d'exercer ses fonctions “ avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité ”, ne sauraient priver l'un de ses membres, lorsqu’il se trouve dans une situation de dépendance à l'égard de son client, du droit, dont dispose tout contractant, d'invoquer un consentement vicié par la violence, et de se prévaloir de la nullité de l'accord d'honoraires conclu avec ce client . 

La Cour d'appel de Paris a précisé que la violence économique, vice du consentement, suppose la preuve d'un abus de dépendance permettant d'obtenir du cocontractant victime un engagement qu'il n'aurait sinon pas souscrit et qui génère un avantage manifestement excessif alors que l'abus de dépendance économique, visé par l'article L. 420-2, alinéa 2, du Code de commerce, requiert la preuve, outre de la réalité de la dépendance économique, de l'exploitation abusive de celle-ci dès lors qu'elle est susceptible d'affecter le fonctionnement ou la structure de la concurrence . Le vice du consentement tiré de l'abus de l'état de dépendance des cédants à l'égard du cessionnaire de leurs titres n'est ainsi pas établi lors qu'il résulte d'éléments concomitants ou postérieurs à la signature de l'acte qu'ils avaient conservé la faculté de ne pas déférer aux exigences du cessionnaire .

La sanction du consentement vicié par violence est prévue à l’article 1131 du Code civil, qui dispose que lorsqu’un prix a été fixé injustement, pour cause de violence ou de contrainte économique, le contrat doit être frappé d’une nullité relative, l’action étant soumise au délai de prescription de droit commun de cinq ans. Toutefois, la victime dont le consentement a été vicié pour cause de violence ou de contrainte économique peut, comme l’indique l’article 1182 du Code civil, confirmer la vente si la violence a cessé. Elle peut également agir en réparation sur le plan délictuel.

“ Chacun est libre de contracter ou de ne pas contracter, de choisir son cocontractant et de déterminer le contenu et la forme du contrat dans les limites fixées par la loi. La liberté contractuelle ne permet pas de déroger aux règles qui intéressent l'ordre public. ”

Cass. 3e civ., 29 avril 1998, LawLex202200001275JBJ.

Seule l’exploitation abusive d’une situation de dépendance, faite pour tirer profit de la crainte d’un mal menaçant directement les intérêts légitimes de la personne, peut vicier de violence son consentement, Cass. 1re civ., 3 avril 2002, LawLex202000001879JBJ, Contrats, conc. consom. 2002, n° 121, obs. LEVENEUR ; Comm. com. électr. 2002, 89, obs. STOFFEL-MUNCK ; Comm. com. électr. 2002, 80, obs. CARON ; RTD civ. 2002, 502, obs. MESTRE et FAGES ; JCP G 2002, I, 184, n° 6, obs. VIRASSAMY ; D. 2002, 1860, obs. GRIDEL et CHAZAL.

Cass. Com., 9 juillet 2019, LawLex202200001741JBJ, JCP G 2019, doctr., 879, obs. SERINET ; RTD civ. 2019, 854, obs. BARBIER ; AJ contrat 2019, 439, obs. DISSAUX.

Cass., 1re civ., 3 avril 2002, LawLex202000001879JBJ, Contrats, conc. consom. 2002, n° 121, obs. LEVENEUR ; Comm. com. électr. 2002, 89, obs. STOFFEL-MUNCK ; Comm. com. électr. 2002, 80, obs. CARON ; RTD civ. 2002, 502, obs. MESTRE et FAGES ; JCP G 2002, I, 184, n° 6, obs. VIRASSAMY ; D. 2002, 1860, obs. GRIDEL et CHAZAL.

Cass. 2e civ., 9 décembre 2021, LawLex202200001742JBJ, JCP G 2022, doctr., 257, obs. LOISEAU et 371, obs. CASEAU-ROCHE.

Paris, 17 janvier 2024, LawLex202400000539JBJ.

Cass. com., 10 juillet 2024, LawLex202400005212JBJ. 

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