Contrats d'affaires

En principe, aux termes de l’article 1168 du Code civil, dans les contrats synallagmatiques, le défaut d’équivalence des prestations n’est pas une cause de nullité du contrat, à moins que la loi n’en dispose autrement. Le législateur n’autorise la prise en considération du prix lésionnaire, qui consiste dans une sorte d’erreur sur la valeur, qu’en cas de vente portant sur un immeuble, sur des engr …

Lésion

DEPREZ, La lésion dans les contrats aléatoires, RTD civ. 1955, 1 ; LE GRIEL, La jurisprudence récente concernant la lésion dans la vente immobilière, D. 1967, 57 ; VIATTE, L'aléa dans les ventes d'immeubles à charge de rentes viagères, Gaz. Pal. 1975, 297 ; GOBIN, De la date d’évaluation de la lésion en matière de vente, JCP N, 1976, 2759 ; GRUA, La distinction des contrats aléatoires et des contrats commutatifs, RTD civ. 1983, 263 ; TAURAN, La vente à bas prix, RRJ 1998/3, 899 ; PHILIPPE, De quelques problèmes posés par la profession de marchand de biens, Defrénois, 1984, 833 ; MEAU-LAUTOUR, Aléa, lésion et vileté du prix, JCP N, 1990, 301.

En principe, aux termes de l’article 1168 du Code civil, dans les contrats synallagmatiques, le défaut d’équivalence des prestations n’est pas une cause de nullité du contrat, à moins que la loi n’en dispose autrement. Le législateur n’autorise la prise en considération du prix lésionnaire, qui consiste dans une sorte d’erreur sur la valeur, qu’en cas de vente portant sur un immeuble, sur des engrais, ou en cas de cession de droits d’auteur. L’action en rescision est expressément exclue pour toutes les ventes qui ne peuvent être faites que d’autorité de justice .

La lésion en matière de vente d’immeuble est encadrée par les articles 1674 et suivants du Code civil. Ce texte est d’interprétation stricte. Dès lors, une cession de parts sociales d’une société civile immobilière ne peut faire l’objet d’une rescision pour lésion du fait de la nature mobilière de ces parts sociales . De même, le cessionnaire d’un office notarial ne peut agir en réduction du prix pour lésion, dès lors que les règles de droit commun de la vente mobilière qui s’y appliquent n’admettent pas la révision du prix .

Aux termes de l’article 1674, “ si le vendeur a été lésé de plus de sept douzièmes dans le prix d’un immeuble, il a le droit de demander la rescision de la vente, quand bien même il aurait expressément renoncé dans le contrat à la faculté de demander cette rescision, et qu’il aurait déclaré donner la plus-value ” . L’article 1683 précise en outre que “ la rescision pour lésion n’a pas lieu en faveur de l’acheteur ”. En conséquence, seul le vendeur peut l'invoquer.

L’article 1675 précise que “ pour savoir s’il y a lésion de plus de sept douzièmes, il faut estimer l’immeuble suivant son état et sa valeur au moment de la vente ”. Dans le cas d’une vente qui porte, selon la commune intention des vendeurs et de l’acheteur, sur un ensemble unique et indivisible, la lésion doit être examinée au regard du prix global fixé par l’acte de vente pour l’ensemble . Concernant une promesse synallagmatique de vente, la lésion doit s’apprécier au jour de la conclusion du contrat de promesse, et non à l’échéance de son terme , et ce même en présence d'une condition suspensive . En revanche, dans le cas d’une promesse unilatérale de vente, la lésion s’apprécie au jour de la levée de l’option .

L’article 1676 dispose que “ la demande n’est plus recevable après l’expiration de deux années, à compter du jour de la vente ”. En cas de vente sous condition suspensive, le délai biennal de la prescription de l’action commence à courir au jour de la réalisation de la condition ou de la renonciation au bénéfice de celle-ci . Le délai, en cas de promesse unilatérale de vente, démarre au jour de la levée de l’option par le bénéficiaire de la promesse . Il en résulte que, lorsqu’une promesse unilatérale de vente stipule que la levée de l’option doit être effectuée dans le mois de la réalisation des conditions suspensives, sauf renonciation à leur bénéfice, la vente ne peut être parfaite avant cette date . De même, lorsque les parties à une promesse unilatérale de vente d’un immeuble ont subordonné le caractère parfait et définitif de la vente à la condition suspensive de la signature de l’acte authentique, le délai d’exercice de l’action en rescision pour cause de lésion ne peut commencer à courir qu’à compter de la date de cet acte .

S’agissant de la preuve de la lésion, l’article 1677 prévoit qu’elle “ ne pourra être admise que par jugement et dans le cas seulement où les faits articulés seraient assez vraisemblables et assez graves pour faire présumer la lésion ”. La décision, qui, en application de ce texte, autorise le demandeur à apporter la preuve de la lésion, n’a d’autorité de la chose jugée que sur le plan de la recevabilité de l’action, et non de l’existence de la lésion . Aux termes de l’article 1678, “ cette preuve ne pourra se faire que par un rapport de trois experts, qui seront tenus de dresser un seul procès-verbal commun, et de ne former qu’un seul avis à la pluralité des voix ” sur l’existence de la lésion.

L’article 1681 énonce que “ dans le cas où l’action est admise, l’acquéreur a le choix ou de rendre la chose en retirant le prix qu’il en a payé, ou de garder le fonds en payant le supplément du juste prix, sous la déduction du dixième du prix total ”. L’acheteur est le seul à pouvoir proposer une revalorisation du prix pour éviter que la vente ne soit rescindée, le vendeur ne pouvant prétendre qu’à la rescision de la vente dès lors qu’il invoque la lésion . Lorsque l’acheteur choisit le rachat de la lésion, le supplément de juste prix qu’il doit payer doit correspondre, non à la valeur vénale de l’immeuble au moment où il a été vendu, mais à sa valeur réelle au moment où ce règlement complémentaire doit intervenir . Le dixième dont l’article 1681 autorise la déduction est celui du prix total, qui résulte des versements, initial et complémentaire, de l’acquéreur .

Concernant la vente d’engrais, la loi du 8 juillet 1907 prévoit le mécanisme de la lésion au bénéfice de l’acheteur, et non du vendeur comme en matière de vente immobilière. L’article 1er de cette loi dispose que “ la lésion de plus du quart dans l’achat des engrais, des semences et plants destinés à l’agriculture, et des substances destinées à l’alimentation des animaux de la ferme, donne à l’acheteur une action en réduction de prix et dommages-intérêts ”. L’article 2 ajoute que “ cette action doit être intentée, à peine de déchéance, dans le délai de quarante jours à dater de la livraison ”.

En matière de cession du droit d’exploitation d’un auteur, la lésion est encadrée par la loi 57-298 du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique, codifiée à l’article L. 131-5 du Code de la propriété intellectuelle. Cet article dispose qu’ “ en cas de cession du droit d’exploitation, lorsque l’auteur a subi un préjudice de plus de sept douzièmes dû à une prévision insuffisante des produits de l’œuvre, il peut provoquer la révision des conditions de prix du contrat ”. Une telle demande ne peut toutefois être formée que dans le cas où l’œuvre a été cédée moyennant une rémunération forfaitaire. La lésion est alors appréciée en considération de l'ensemble de l'exploitation par le cessionnaire des œuvres de l'auteur qui se prétend lésé.

Cass., 3e civ., 9 avril 1970, LawLex202200000120JBJ, JCP G 1971, II, 16925, obs. PETOT-FONTAINE.

Cass., 3e civ., 24 février 1999, LawLex202200000123JBJ, D. 2000, 38, obs. NAJJAR.

Cass., 3e civ., 11 décembre 1984, LawLex202200000925JBJ.

Cass., 3e civ., 18 juillet 1972, LawLex202200000124JBJ, D. 1973, 208, obs. PIERRE-FRANCOIS.

Cass., 3e civ., 6 juin 2007, LawLex202200000923JBJ, RDC 2007, 1203, obs. BRUN.

Cass., 1re civ., 7 juin 1966, LawLex202200000127JBJ, JCP 1967, II, 15049, obs. PLANCQUEEL ; RTD civ. 1967, 186, obs. CORNU ; Cass., 3e civ., 22 janvier 1970, LawLex202200000922JBJ, JCP 1971, II, 16743, obs. PLANCQUEEL ; RTD civ. 1970, 788, obs. CORNU.

Cass., 3e civ., 4 décembre 1973, LawLex202200000139JBJ.

Telle que modifiée par la loi n° 79-595 du 13 juillet 1979.

Cass., 1re civ., 7 décembre 2004, LawLex202200000927JBJ, RDC 2005, 681, obs. MAZEAUD.

Cass. 3e civ., 30 avril 2025, LawLex202500003575JBJ : selon lequel un prix représentant environ un cinquième de la valeur de l’immeuble, tel qu’établi par un collège d’experts judiciaires, n’est pas pour autant un prix dérisoire.

Cass., 3e civ., 3 novembre 2011, LawLex202200001005JBJ, RTD civ. 1993, 124, obs. MESTRE ; JCP G 1993, II, 22164, obs. VIRASSAMY.

Cass., 3e civ., 20 février 1974, LawLex202200000121JBJ : en présence d’un accord des parties sur la chose et le prix, une promesse synallagmatique de vente vaut vente, le terme prévu dans la convention n'ayant pour effet que d'en retarder l'exécution, de sorte que la lésion doit s’apprécier au jour de la conclusion du contrat de promesse, et non à l’échéance du terme correspondant au décès du dernier conjoint survivant.

Cass., 3e civ., 30 mars 2011, LawLex202200000926JBJ.

Cass., 3e civ., 7 juillet 2010, LawLex202200000928JBJ, pour un bail à construction assorti d'une promesse unilatérale de vente conférant une option au preneur en fin de bail, les deux conventions formant un ensemble indivisible.

Cass., 3e civ., 16 novembre 2005, LawLex202200000125JBJ.

Cass., 3e civ., 5 juillet 2011, LawLex202200001006JBJ ; 29 mars 2000, LawLex202200001007JBJ.

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