Introduction

Convention écrite

Déséquilibre significatif

Rupture brutale des relations établies

Enquête de concurrence – Droit français

Action civile de concurrence

Droit français de la concurrence

Enquête de concurrence – Droit européen

Droit européen de la concurrence

Restrictions verticales

Droit de la distribution

Responsabilité du fait des produits défectueux

Droit de la consommation

Prohibition des mesures d’effet équivalent

Droit européen des affaires

Corruption

Compliance

Droit économique

Pacte d’actionnaires

Révocation des dirigeants

Abus du droit de vote

Sociétés

Action en contrefaçon

Droits conférés par la marque

Conditions de la brevetabilité

Propriété industrielle

Révision du loyer commercial

Renouvellement du bail commercial

Déspécialisation

Baux commerciaux

Réforme du droit des contrats

Réforme du droit des contrats spéciaux

Avant-contrat de vente

Obligation de délivrance conforme

Qualification du contrat d’entreprise

Effets du mandat à l’égard des tiers

Contrats d’affaires

Contrats en cours

Revendications

Plan de cession

Procédures collectives

Atteintes aux données personnelles

Droit pénal des affaires

Droit commercial

Le droit des affaires en 500 questions

L’article L. 463-6 du Code de commerce interdit “ la divulgation par l’une des parties des informations concernant une autre partie ou un tiers et dont elle n’a pu avoir connaissance qu’à la suite des communications ou consultations auxquelles il a été procédé ”.

Les juges du fond considèrent, cependant, que la communication des pièces ne constitue pas une divulgation au sens de l’article L. 463- …

La production des éléments de preuve recueillis dans le cadre d'une procédure de concurrence peut-elle constituer une divulgation ?

Les articles 101, paragraphe 2, TFUE et L. 420-3 du Code de commerce reconnaissent aux juridictions nationales le pouvoir de prononcer la nullité des clauses contractuelles contraires aux règles de concurrence contenues dans les articles 101, paragraphe 1, L. 420-1, L. 420-2, L. 420-2-1 et L. 420-2-2.

De cette compétence des juridictions civiles, la jurisprudence a déduit un droit à réparation des victimes d’infractions, et par conséquent la possibilité d’introduire une action civile de concurrence et de prononcer une sanction civile. A la différence de la sanction administrative de la pratique anticoncurrentielle, la sanction civile a pour objet la compensation d’un préjudice et non la dissuasion de la pratique. Elle apparaît comme un complément plutôt qu’un substitut de la sanction administrative à laquelle elle peut se superposer .

Traditionnellement, en droit français, une faute concurrentielle ne constituait pas nécessairement une faute civile car, contrairement à la solution retenue en droit européen où il était admis qu’une décision de la Commission valait présomption de faute, le juge français considérait que les décisions de l’Autorité de la concurrence, simple autorité administrative, ne liaient pas juridiquement les tribunaux .

Depuis l’entrée en vigueur de la loi Hamon du 17 mars 2014, en cas d’action de groupe, les manquements au droit français ou européen de la concurrence, constatés par une décision d’une autorité ou juridiction nationale ou de l’Union européenne, qui n’est plus susceptible de recours pour la partie relative à l’établissement de ces manquements, vaut présomption irréfragable de l’existence des manquements du professionnel concerné. Avec la transposition de la directive 2014-104 du 26 novembre 2014 par l’ordonnance 2017-303 du 9 mars 2017, la même présomption irréfragable fait son apparition dans le Code de commerce s’agissant des actions individuelles fondées sur une décision de l’Autorité de la concurrence. Même si en pratique, les décisions de cette dernière exerçaient une autorité certaine sur les juridictions en charge de l’indemnisation du préjudice, le nouvel article L. 481-2 du Code de commerce revient sans aucune ambiguïté sur la jurisprudence de la Cour de cassation .

Les collectivités locales et territoriales, victimes d’une pratique anticoncurrentielle, peuvent agir devant les juridictions administratives en réparation du préjudice subi sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle. Ainsi, un maître d’ouvrage public victime du dol résultant des concertations et échanges d’informations entre soumissionnaires concurrents préalables à un appel d’offres est fondé à demander réparation du préjudice correspondant au surcoût des travaux par rapport au prix réel déterminé par le libre jeu de la concurrence . Le juge administratif déduit plus volontiers la preuve des manœuvres dolosives de la décision définitive de l’Autorité de la concurrence ayant qualifié l’accord d’anticoncurrentiel. Le Tribunal des conflits a étendu le champ de compétence des juridictions administratives en cas de dommage concurrentiel lié à un contrat administratif. Le Tribunal semble considérer que le juge administratif, en tant juge du contrat, doit connaître de tous les litiges relatifs à la responsabilité des personnes, pour des comportements ayant pu “ altérer les stipulations ” d’un tel contrat et causer un préjudice à la personne publique. Il faut en déduire que la nature de l’action en responsabilité, qu’elle soit fondée sur l’article 1240 du Code civil ou sur le vice du consentement importe peu .

Le Conseil d’Etat a parachevé cette évolution en consacrant la compétence du juge administratif y compris lorsque l’action en réparation est exercée par une collectivité publique contre un entrepreneur de travaux publics qui n’a pas soumissionné à un marché et n’a donc pas conclu de contrat .

Ces solutions, qui reviennent à étendre considérablement la sphère de compétence du juge administratif au détriment de celle du juge judiciaire, apparaissent critiquables. Elles sont cependant consacrées par l’ordonnance du 9 mars 2017 qui a introduit, au sein du Code de justice administrative, une série de dispositions relatives au régime de l’action en réparation devant le juge de droit public (CJA, art. L. 775-1, art. R. 775-1 à R. 775-3, R. 775-5, R. 775-12 à R. 775-15).

Toute personne est en droit de demander réparation du dommage que lui aurait causé un contrat ou un comportement susceptible de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence lorsqu'il existe un lien de causalité entre le préjudice et la pratique litigieuse.

CJCE, 3 juill. 2006, Manfredi, LawLex200600001682JBJ.

Une partie à un accord contraire à l'article 101 TFUE peut demander réparation du dommage que cet accord lui cause, à moins qu'elle n'ait pris une part significative dans la distorsion de concurrence qui en résulte.

CJCE, 20 sept. 2001, Courage, LawLex200200003534JBJ.

Le juge judiciaire n'est pas lié par les constatations de fait figurant dans la décision de l'Autorité de la concurrence pour statuer sur la demande de dommages et intérêts introduite dans la même affaire.

Cass. com., 17 juill. 2001, LawLex200200000095JBJ.

Un abus de position dominante constaté par une décision de l'Autorité de la concurrence constitue une faute civile au sens de l'article 1240 du Code civil dont son auteur doit réparation.

Paris, 24 févr. 2022, LawLex202200001185JBJ.

La décision de la Commission qui constate l'infraction, maintenue par le juge de l'Union, suffit à établir l'existence de manoeuvres dolosives de la part des entreprises soumissionnaires à un marché.

Cons. d’Et.,12 oct. 2020, LawLex202000002480JBJ.

La violation de l'article L. 420-1 du Code de commerce, sanctionnée par l'Autorité de la concurrence, constitue une faute au titre de l'article 1240 du Code civil, de sorte que le tribunal est uniquement tenu de se prononcer sur le lien de causalité entre cette faute et le préjudice allégué ainsi que sur l'existence et la quantification de celui-ci.

T. com. Paris, 20 févr. 2020, LawLex202000000275JBJ.

Une personne publique victime, de la part de son cocontractant, de pratiques anticoncurrentielles constitutives d'un dol qui ont vicié son consentement, peut saisir le juge administratif, alternativement ou cumulativement, d'une part, de conclusions tendant à ce que celui-ci prononce l'annulation du marché litigieux et tire les conséquences financières de sa disparition rétroactive, et, d'autre part, de conclusions tendant à la condamnation du cocontractant, au titre de sa responsabilité quasi-délictuelle, à réparer les préjudices subis en raison de son comportement fautif.

Cons. d’Et.,18 juin 2022, LawLex202200003165JBJ.

Les litiges relatifs à la responsabilité de personnes auxquelles sont imputés des comportements susceptibles d'avoir altéré les stipulations d'un contrat administratif et d'avoir ainsi causé un préjudice à la personne publique qui a conclu ce contrat, relèvent de la compétence de la juridiction administrative.

T. confl., 16 nov. 2015, LawLex201500001605JBJ.

Lorsqu'une personne publique est victime, à l'occasion de la passation d'un marché pu blic, de pratiques anticoncurrentielles, il lui est loisible de mettre en cause la responsabilité quasi-délictuelle non seulement de l'entreprise avec laquelle elle a contracté, mais aussi des entreprises dont l'implication dans de telles pratiques a affecté la procédure de passation de ce marché, et de demander au juge administratif leur condamnation solidaire.

Cons. d'Et., 27 mars 2020, LawLex202000000383JBJ.

Quel est le contexte de la réglementation ?

Deux cas de figure sont envisageables pour introduire une action civile de concurrence :

soit l’action est introduite en complément de l’action publique de l’autorité de concurrence, postérieurement à celle-ci et le demandeur pourra profiter de l’instruction menée par l’autorité (follow-on action) ;

soit l’action est exercée de manière autonome à titre principal devant le juge sans qu’une autorité de concurrence ne se soit prononcée préalablement sur les pratiques ou avant une telle décision (stand-alone action).

En cas d’action individuelle, le demandeur a le choix entre une follow-on action ou une stand-alone action. En revanche, en cas d’action de groupe, seule la follow-on action peut être introduite puisque la responsabilité du professionnel ne peut être engagée que sur le fondement d’une décision prononcée par les autorités ou juridictions nationales ou de l’Union européenne compétentes qui constatent les manquements et n’est plus susceptible de recours pour la partie relative à ces manquements.

Lorsque l’action civile est menée à titre principal devant le juge civil - stand-alone action, la victime devra apporter la preuve d’une infraction aux règles de concurrence. Or, le caractère technique du contentieux lié au droit de la concurrence suppose une expertise spécifique et des moyens d’investigation souvent importants. La preuve de la pratique anticoncurrentielle risque d’être difficile à apporter car l’atteinte à la concurrence que la victime devra établir exige notamment la fourniture d’informations permettant de définir le marché et de mesurer l’impact économique des pratiques dénoncées.

Dans le cas de la follow-on action, la constatation de l’infraction par l’Autorité de la concurrence s’impose à la juridiction civile saisie en second aussi bien en cas d’action de groupe qu’en cas d’action individuelle, depuis l’ordonnance du 9 mars 2017. Il suffira donc à la victime de se fonder sur la décision de l’autorité et d’établir l’existence d’un lien de causalité entre cette infraction et le préjudice dont elle poursuit la réparation. Il en résulte pour cette dernière un allègement de la preuve. Ce système présente cependant un inconvénient majeur : des délais de procédure particulièrement longs puisqu’il faudra attendre que la décision de l’Autorité de concurrence soit devenue définitive pour la partie relative à la preuve des manquements au droit de la concurrence (C. com., art. L. 481-2).

Conseil : Opter pour l’action directe devant les tribunaux ou pour le follow-on en fonction de chaque dossier.

Lorsque les infractions sont complexes et les preuves difficiles à rassembler, on suscitera plutôt une instruction par les autorités de concurrence. Lorsque l’infraction est avérée, on saisira immédiatement le juge de l’indemnisation pour gagner du temps.

Follow-on action ou stand-alone action ?

Les actions civiles sont assez peu fréquentes car leur mise en œuvre se heurte à deux séries de difficultés. Les premières sont liées à l’ensemble des moyens de défense à l’action fondés sur le droit de la procédure et de la responsabilité civile : prescription, faute de la victime et passing-on defense notamment. Les secondes tiennent à l’administration de la preuve qui doit concilier des intérêts antagonistes : le droit des victimes à obtenir réparation et la volonté des autorités de concurrence de protéger les demandeurs à la clémence. La Cour de justice exige que les dispositions nationales applicables aux modalités procédurales des recours en indemnité et à l’étendue de la réparation respectent les principes d’équivalence et d’effectivité. En vertu du premier principe, les règles applicables aux recours destinés à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent de l’effet direct du droit de l’Union ne doivent pas être moins favorables que celles concernant des recours similaires de nature interne et, selon le second, elles ne doivent pas rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique de l’Union .

Toutefois, la Commission comme l’Autorité de la concurrence se montrent assez réticentes à communiquer les éléments du dossier en cas d’action civile. En favorisant le public enforcement, les autorités tentent à la fois d’inciter les entreprises à recourir à la procédure de clémence, d’assurer le bon déroulement de l’instruction et de préserver les secrets d’affaires . 

Aucune analyse économique ne démontre cependant que donner accès aux pièces de la procédure de clémence dissuaderait les entreprises de s’y soumettre alors que l’immunité d’amende qui en résulte représente un gain réel pour celui qui dénonce l’infraction.

La question fondamentale que pose l’action civile de concurrence consiste donc dans la recherche d’un difficile équilibre entre le public enforcement traditionnellement privilégié par les pays continentaux et le private enforcement, favorisé par les pays anglo-saxons, en plein développement en Europe aujourd’hui, afin de préserver l’efficacité du système existant tout en évitant de soumettre les entreprises à un double système répressif.

Une législation nationale ne peut subordonner l'accès au dossier de tiers qui souhaitent exercer une action en dommages- intérêts, y compris aux documents communiqués dans le cadre d'un programme de clémence, au consentement de l'ensemble des parties à la procédure, sans laisser aux juridictions nationales aucune possibilité d'effectuer une mise en balance des intérêts en présence.

CJUE, 6 juin 2013, LawLex201300000906JBJ.

Lorsqu’une juridiction nationale, en application d’un instrument procédural de droit national, reporte l’examen des preuves afin de savoir si elles contiennent des “ informations préparées par une personne physique ou morale expressément aux fins d’une procédure engagée par une autorité de concurrence ”, elle doit veiller à ce que le demandeur ou d’autres parties à la procédure et leurs représentants ne puissent pas y accéder, avant cette vérification, lorsque ces preuves relèvent de la liste blanche, ou, avant la clôture de la procédure devant l’autorité de concurrence, lorsqu’elles relèvent de la liste grise.

CJUE, 12 janv. 2023, LawLex202300000554JBJ.

Public enforcement ou private enforcement ?

La directive 2014/104 du 26 novembre 2014, relative à certaines règles régissant les actions en dommages-intérêts en droit national pour les infractions aux dispositions du droit de la concurrence des États membres et de l’Union a par les mesures qu’elle énonce, facilité l’introduction d’actions en réparation par les victimes de pratiques anticoncurrentielles.

En particulier, elle a favorisé l’accès des victimes à la preuve, conféré aux décisions définitives des autorités nationales de concurrence la force d'une preuve irréfragable de l’infraction devant les juridictions nationales et d'une preuve prima facie devant les juridictions des autres États membres, et consacré la théorie de la passing-on defense, qui permet au défendeur à l’action d’invoquer la répercussion, par le demandeur, du surcoût résultant de l’infraction. La directive a toutefois veillé à préserver les intérêts du public enforcement puisque les déclarations effectuées en vue d’obtenir la clémence et les propositions de transaction échappent au droit d’accès.

La directive a été transposée en droit interne par l’ordonnance 2017-303 et le décret 2017-305 du 9 mars 2017, dont les dispositions figurent aux articles L. 481-1 et suivants et R. 481-1 et suivants du Code de commerce.

Quelles sont les avancées de la directive sur les actions en dommages-intérêts et de sa transposition en droit interne ?

En vertu des articles 101, paragraphe 2, TFUE et L. 420-3 du Code de commerce, les juridictions civiles peuvent prononcer la nullité des clauses, accords ou décisions interdits par les règles de concurrence sans indication des juridictions compétentes en la matière.

En effet, les autorités de concurrence sont investies que d’un pouvoir de décision qui se limite au prononcé de mesures conservatoires, d’injonctions ou de sanctions pécuniaires. Très tôt, la Cour de justice a souligné qu’il revenait aux juridictions nationales de tirer les conséquences de la nullité des clauses contractuelles contraires à l’article 101 TFUE .

L’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2014-104 précise désormais que les actions en dommages et intérêts sont intentées devant les juridictions nationales. La victime de pratiques anticoncurrentielles qui souhaite obtenir réparation du préjudice subi devra saisir les juridictions de l’ordre judiciaire ou administratif pour être indemnisée ou obtenir l’annulation de la convention.

En France, une spécialisation des juridictions au profit de huit tribunaux judiciaires et tribunaux de commerce a été instituée dans l’ordre judiciaire pour l’application du droit de la concurrence (art. L. 420-7 et R. 420-3 C. com.), ces règles de compétence impératives s’appliquant même en matière de référé. La Cour d’appel de Paris est seule compétente pour connaître des appels contre les jugements de ces juridictions spécialisées . L’incompétence du jue saisi, fondée sur l’article L. 420-7 du Code de commerce peut être soulevée même lorsque les règles afférentes aux pratiques anticoncurrentielles sont invoquées comme simple moyen de défense ou à titre accessoire. Seules les juridictions visées par les articles R. 420-3 à R. 420-5 du Code de commerce ont le pouvoir de statuer sur le moyen de défense tiré des articles L. 420-1 du même code et 101 TFUE soulevé par l’une des parties. En matière de pratiques restrictives de concurrence la Cour de cassation a récemment opéré un revirement de jurisprudence pour préciser que les règles qui désignent les seules juridictions spécialisées pour connaître de l'application des dispositions de l'article L. 442-1 du Code de commerce, instituent une règle de compétence d'attribution exclusive et non plus une fin de non-recevoir . Nul doute que la solution est transposable aux actions fondées sur lezs dispositions des articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce.

Une clause attributive de juridiction qui donne compétence à une juridiction non spécialisée ne s’applique pas à un litige fondé sur l’article L. 420-1, L. 420-2, L. 420-2-1 ou L. 420-2-2, en raison du caractère d’ordre public que revêt l’attribution de compétence aux tribunaux spécialisés prévue par l’article L. 420-7 du Code de commerce. En revanche, dans l’ordre international, les clauses attributives de compétence retrouvent à s’appliquer, à condition qu’elles se réfèrent aux violations du droit de la concurrence lorsque la victime se plaint du dommage causé par une entente, et sans restriction lorsqu’un abus de position dominante est allégué . La compétence des juridictions spécialisées pour connaître des litiges relatifs aux pratiques anticoncurrentielles cède également en présence d'une clause d'arbitrage.

A côté des juridictions civiles ou commerciales, les juridictions administratives jugent les actions en responsabilité relevant de leur compétence (CJA, art. L. 775-1) . Enfin, les juridictions pénales compétentes au titre du délit de participation frauduleuse, personnelle et déterminante à une entente ou un abus de domination peuvent également connaître des actions civiles liées à ces délits (C. com., art. L. 420-6).

Conseil : Éviter les erreurs de compétence.

En France, seuls huit tribunaux spécialisés de l’ordre judiciaire sont compétents pour accorder des dommages-intérêts en matière de concurrence. Le juge doit même relever d’office cette règle d’ordre public, qui constitue une fin de non-recevoir.

Les conséquences de la nullité de clauses contractuelles contraires à l'article 101 TFUE sur les livraisons faites et les obligations de paiement qui en découlent ne relèvent pas du droit européen mais doivent être appréciées par la juridiction nationale selon son propre droit.

CJCE, 14 déc. 1983, LawLex200300000746JBJ.

Une cour d'appel autre que la Cour d'appel de Paris ne peut être saisie du recours formé contre un jugement rendu par une juridiction spécialisée.

Cass. com., 10 juill. 2018, LawLex201800001104JBJ.

La Cour d'appel de Paris est seule compétente, conformément aux articles L. 420-7 et R. 420-5 du Code de commerce, pour connaître des appels formés contre les décisions rendues par les juridictions spécialisées en matière de pratiques anticoncurrentielles, que celles-ci aient été rendues au fond ou par le président du tribunal saisi d'une requête aux fins de mesures d'instruction in futurum fondée sur l'existence de pratiques concertées.

Bordeaux, 28 févr. 2023, LawLex202300003080JBJ.

Les textes qui désignent les seules juridictions spécialisées pour connaître de l'application des dispositions de l'article L. 442-1 du Code de commerce, instituent une règle de compétence d'attribution exclusive et non une fin de non-recevoir, de sorte que lorsqu'un défendeur à une action fondée sur le droit commun présente une demande reconventionnelle en invoquant les dispositions de l'article L. 442-1, la juridiction saisie, si elle n'est pas une juridiction désignée par l'article D. 442-2, doit, si son incompétence est soulevée, selon les circonstances et l'interdépendance des demandes, soit se déclarer incompétente au profit de la juridiction désignée par ce texte et surseoir à statuer dans l'attente que cette juridiction spécialisée ait statué sur la demande, soit renvoyer l'affaire pour le tout devant cette juridiction spécialisée.

Cass. com., 18 oct. 2023, LawLex202300012489JBJ.

Une clause attributive de compétence s'applique à une action en indemnisation fondée sur une violation des articles 102 TFUE et L. 420-2 du Code de commerce même si elle ne se réfère pas expressément au différends relatifs à la responsabilité encourue du fait d'une infraction au droit de la concurrence.

Cass. 1re civ., 30 janv. 2019, LawLex201900000168JBJ.

Un litige qui a pour objet l'engagement de la responsabilité de sociétés et de leurs préposés en raison d'agissements susceptibles d'avoir conduit une région à passer des marchés publics à des conditions de prix désavantageuses et tend à la réparation du préjudice qui résulterait de la différence entre les termes des marchés publics effectivement conclus et ceux auxquels ils auraient dû l'être dans des conditions normales de concurrence relève de la compétence de la juridiction administrative.

Quelles sont les juridictions compétentes ?

La question s’est posée, devant la Cour de justice, de la détermination du juge compétent pour connaître des actions en réparation introduites par les victimes de pratiques anticoncurrentielles contre leurs auteurs lorsqu'ils sont établis dans des États membres différents. Selon la Cour, une action en réparation du préjudice concurrentiel revêt un caractère délictuel , qui la fait relever de compétence de la juridiction du lieu où le fait dommageable s’est produit ou risque de se produire (Règl. Bruxelles I bis, art. 7).

En présence de plusieurs participantes à une entente, établies dans divers Etats membres, la victime peut porter l’action devant le tribunal du domicile de l’une quelconque de ces entreprises. Elle peut également saisir le tribunal du lieu de conclusion de l’entente ou d’un arrangement particulier sous-tendant cette entente ou celui du lieu de son propre siège social.

Le juge internationalement et territorialement compétent pour connaître, au titre du lieu de la matérialisation du dommage, d’une action en réparation du préjudice concurrentiel, est celui du lieu où les prix du marché ont été faussés , soit, en cas d’achats effectués dans plusieurs lieux, celui dans le ressort duquel se trouve son siège social .

L'action qui vise à faire cesser certains agissements mis en œuvre dans le cadre d'une relation contractuelle, fondée sur une allégation d’abus de position dominante commis par l'une des parties, relève de la matière délictuelle au sens du règlement Bruxelles I bis.

CJUE, 24 nov. 2020, LawLex202000003168JBJ.

Dans le cadre d'une action en réparation d'un préjudice causé par une entente de prix, le “lieu où le fait dommageable s'est produit” est le lieu où les prix du marché ont été faussés, même si la demande est dirigée contre un participant à l'entente avec lequel la victime n'a pas établi de relations contractuelles.

CJUE, 29 juill. 2019, LawLex201900000979JBJ.

En cas d'action en réparation d'un préjudice causé par des comportements anticoncurrentiels, le lieu de l'évènement causal à l'origine du dommage peut être soit le lieu de la conclusion d'un accord anticoncurrentiel contraire à l'article 101 TFUE, soit le lieu où les prix prédateurs ont été appliqués et proposés, lorsque ceux-ci ne se limitent pas à une mise à exécution de l'accord mais constituent une infraction distincte à l'article 102 TFUE.

CJUE, 5 juill. 2018, LawLex201800001026JBJ.

Aux termes de l’article 7, point 2, du règlement 1215/2012, au sein du marché affecté par des arrangements collusoires sur la fixation et l’augmentation des prix de biens, est internationalement et territorialement compétente pour connaître, au titre du lieu de la matérialisation du dommage, d’une action en réparation du dommage causé par ces arrangements contraires à l’article 101 TFUE soit la juridiction dans le ressort de laquelle l’entreprise s’estimant lésée a acheté les biens affectés par lesdits arrangements, soit, en cas d’achats effectués par cette entreprise dans plusieurs lieux, la juridiction dans le ressort de laquelle se trouve le siège social de celle-ci.

CJUE, 15 juill. 2021, LawLex202100004530JBJ.

Quelle est la juridiction territorialement compétente en cas d'action contre des sociétés établies dans différents États membres ?

D’ordre public en droit français et de plein droit en droit de l’Union, la nullité encourue est la nullité absolue. Tout particulier est susceptible de s’en prévaloir, y compris les parties à l’entente ou les participants à l’infraction. Une convention peut être annulée même si tous les contractants n’ont pas participé à la pratique anticoncurrentielle. La nullité peut viser :

les seuls éléments de l’accord frappés de l’interdiction ;

l’accord dans son ensemble lorsque les éléments incompatibles sont indissociables  ;

la convention, consécutive à l’entente, avec un tiers qui avait connaissance de l’illicéité des pratiques.

L’illégalité d’une pratique concertée n’exerce en revanche aucune influence sur les contrats conclus pour la mettre en œuvre car la nullité des article 101, paragraphe 2, et L. 420-3 ne concerne que les accords entre entreprises interdits par les articles 101, paragraphe 1, ou L. 420-1 . En outre, les clauses non conformes à un nouveau règlement d’exemption peuvent être annulées par le juge national dès lors qu’elles ne remplissent pas les conditions de l’exemption et présentent un caractère anticoncurrentiel.

Les conséquences de la nullité des clauses incompatibles relèvent du droit national, qui peut retenir que l'application d'un contrat nul de plein droit peut causer un préjudice à l'une des parties  ou engendrer un droit à remboursement des frais exposés pour sa mise en œuvre .

La nullité de plein droit de toutes les stipulations contractuelles incompatibles avec l’article 101, paragraphe 1, TFUE ne s’étend à l’ensemble de l’accord qui les renferme que si elles ne paraissent pas séparables de l’accord lui-même.

CJUE, 20 avr. 2023, LawLex202300005509JBJ.

La nullité prévue par l'article L. 420-3 du Code de commerce ne vise que l'accord anticoncurrentiel et ne s'étend pas au marché public conclu ultérieurement aux conditions tarifaires résultant de l'entente.

Cass. com., 13 sept. 2017, LawLex201700001412JBJ.

L'application d'une clause qui oblige le concessionnaire à respecter des tarifs applicables à certains comptes et clients négociés et à respecter le tarif de vente conseillé par le concédant, peut avoir causé un préjudice aux cocontractants, bien qu'elle soit nulle de plein droit.

Cass. com., 28 sept. 2022, LawLex202200007677JBJ.

En cas d'annulation du contrat en raison d'une pratique anticoncurrentielle imputable au cocontractant, ce dernier doit restituer les sommes que lui a versées la personne publique mais peut prétendre, en contrepartie, sur le terrain quasi-contractuel, au remboursement des dépenses qu'il a engagées et qui ont été utiles à celle-ci.

Cons. d'Et., 17 juin 2022, LawLex202200003165JBJ.

Quelle est la nature et l'étendue de la nullité ?

En vertu du principe d’autonomie procédurale, il appartient au droit national de régler la procédure de nullité. En droit français, la prescription de l’action en nullité relève des dispositions de l’article 2224 du Code civil .

Sauf lorsqu’il est établi que la victime en avait pleinement connaissance auparavant, la prescription ne court qu’à compter de la décision de l’Autorité de la concurrence, qui fixe la date certaine de la découverte de l’entente .

La nullité d'ordre public prévue par l'article L. 420-3 du Code de commerce relève non des règles de prescription édictées par l'article 1304 du Code civil (NDLR : depuis lors abrogées}, mais de celles prévues par l'article 2224 du même code.

Paris, 2 juill. 2015, LawLex201500000873JBJ.

L'action en nullité d'un marché public conclu à des prix déterminés par une entente doit être exercée dans les cinq ans de la publication de la décision de condamnation des entreprises participantes par l'Autorité de la concurrence, qui confère à la victime une connaissance suffisamment certaine de l'étendue des pratiques anticoncurrentielles.

CAA Lyon, 3 déc. 2020, LawLex202000003603JBJ.

Quel est le délai de prescription de l'action en nullité ?

Les victimes de pratiques anticoncurrentielles doivent, pour obtenir réparation de leur préjudice, saisir les juridictions compétentes. Toute personne est en droit de demander réparation du dommage que lui aurait causé un contrat ou un comportement contraire aux règles de concurrence, même si elle est directement ou indirectement  partie à l'accord, à condition qu’elle n’ait pas pris une part significative dans la distorsion de concurrence. Peu importe qu’elle n’ait pas contracté avec les membres de l’entente , notamment lorsque du fait de celle-ci, ses propres fournisseurs ont augmenté leurs prix (préjudice d’ombrelle) .

La Commission peut elle-même exercer une action en dommages-intérêts devant les juridictions nationales au nom des institutions de l’Union, victimes d’une entente de prix. De même, des personnes qui n’interviennent pas en qualité de fournisseur ou d’acheteur sur le marché concerné par une entente peuvent demander la réparation du dommage résultant du fait que, en raison de cette entente, elles ont dû accorder des subventions plus importantes que si elle n’avait pas existé et n’ont, par suite, pas pu employer ce différentiel dans des investissements plus lucratifs.

En revanche, si une union de syndicats agricoles a intérêt à agir pour défendre l’intérêt collectif de la profession envisagée dans son ensemble , elle ne peut représenter les intérêts individuels de ses membres. De même, une société holding n'est pas recevable à agir en réparation au titre de la perte de chance subie par sa filiale, mais seulement au titre d'un préjudice qu'elle a personnellement subi.

Lorsque le préjudice de la personne publique résulte de pratiques anticoncurrentielles auxquelles ses organes dirigeants ont participé, de sorte qu’en raison de leur implication, elle n’a pu faire valoir ses droits à réparation, la prescription ne peut courir qu’à compter de la date à laquelle, après le remplacement de ceux-ci, les nouveaux organes dirigeants, étrangers à la mise en œuvre des pratiques, ont acquis une connaissance suffisamment certaine de leur étendue.

Cons. d'Et., 17 mai 2023, LawLex202300007174JBJ.

L'absence de liens contractuels entre les entreprises poursuivies et la victime du comportement infractionnel est indifférente dès lors que l'action en responsabilité est fondée sur les dispositions de l'article 1240 du Code civil.

T. com. Lyon, 27 oct. 2022, LawLex202200010136JBJ.

La personne publique victime, à l'occasion de la passation d'un marché public, de pratiques anticoncurrentielles, peut mettre en cause la responsabilité quasi-délictuelle non seulement de l'entreprise avec laquelle elle a contracté, mais aussi de celles qui n'ont pas présenté d'offre, mais dont l'implication dans les pratiques a affecté la procédure de passation, et demander au juge administratif leur condamnation solidaire.

Cons. d'Et., 27 mars 2020, LawLex202000000377JBJ.

La victime peut obtenir réparation par les membres de l'entente du dommage subi, même en l'absence de liens contractuels avec ces derniers.

CJUE, 5 juin 2014, Kone AG, LawLex201400002043JBJ.

Rien n'exclut par principe la possibilité pour un syndicat professionnel d'agir en réparation d'un préjudice économique causé par une pratique anticoncurrentielle dès lors que celui-ci n'est pas l'agrégat de préjudices individuels des professionnels mais correspond strictement à celui subi par la collectivité qu'ils forment.

Paris, 22 nov. 2023, LawLex202300014112JBJ.

Qui a qualité pour agir en réparation ?

La victime de pratiques anticoncurrentielles qui souhaite obtenir réparation du préjudice subi du fait d’une pratique anticoncurrentielle devra démontrer que les trois conditions classiques de la responsabilité sont remplies : une faute, un préjudice et le lien de causalité entre la faute et le préjudice subi.

La faute doit être le facteur déterminant dans la production du dommage, la jurisprudence retenant généralement de préférence la théorie de la causalité adéquate, qui considère que seuls les facteurs constituant les causes déterminantes du dommage doivent être qualifiés de fait générateur, plutôt que celle de l’équivalence des conditions, qui retient comme cause du dommage l’ensemble des facteurs sans lesquels il ne serait pas intervenu.

Quelles sont les conditions de mise en œuvre d'une action en réparation ?

Avant la transposition de la directive sur la réparation du préjudice concurrentiel, la faute était caractérisée selon les critères de l'article 1240 du Code civil. Aux termes de l'article L. 481-1 du Code de commerce, issu de l’ordonnance de transposition du 9 mars 2017, tout comportement qui constitue une violation du droit européen ou interne de la concurrence caractérise une faute. Contrairement au droit européen, l’action en réparation du droit français n’est pas limitée aux ententes  et abus de position dominante mais peut aussi s’étendre aux préjudices causés par un abus de dépendance économique (C. com., art. L. 420-2, al. 2), une pratique de prix abusivement bas (art. L. 420-5), une exclusivité d’importation dans les collectivités d’outre-mer (L. 420-2-1) ou l’obtention d’une exclusivité par une centrale de réservation au détriment d’un entreprise qui exécute des prestations de transport public particulier de personnes ou des services occasionnels de transport collectif de personnes effectués au moyen de véhicules légers (L. 420-2-2).

En pratique, il convient de déterminer l’incidence de la décision rendue dans le cadre de la procédure de concurrence sur la caractérisation de la faute. Il faut distinguer selon que la procédure de concurrence a donné lieu à des engagements, à une transaction en cas de reconnaissance des griefs ou une condamnation pure et simple.

Des pratiques d'entente sanctionnées par l'Autorité de la concurrence constituent une faute civile au sens de l'article 1240 du Code civil.

Paris, 17 mai 2023, LawLex202300007182JBJ.

Une pratique anticoncurrentielle telle qu’un abus de position dominante constitue une faute civile à l’égard de sa victime.

Cass. com., 13 sept. 2017, LawLex201700001428JBJ.

Quels sont les éléments constitutifs d'une faute ?

 La procédure d’engagements intervient sans constat d’infraction ou d’absence d’infraction. Dès lors, la décision adoptée sur le fondement de l’article 9 du règlement 1/2003 n’empêche pas un tiers affecté par l’engagement rendu obligatoire de saisir les juridictions nationales pour qu’elles apprécient si les clauses neutralisées par la Commission sont effectivement contraires à l’article 101, paragraphe 1, TFUE. Il en va de même en droit français. Cependant, l’entreprise qui accepte de prendre des engagements dans le cadre de l’article L. 464-2, I du Code de commerce, ne reconnaît pas avoir commis une pratique anticoncurrentielle . Si un opérateur qui s’estime victime de la pratique en cause conserve son droit à agir en réparation, il devra supporter seul la charge de la preuve de la faute devant les juridictions civiles .

Avant la loi Macron du 6 août 2015, la procédure de concurrence pouvait déboucher sur une non-contestation des griefs par l’entreprise, qui impliquait l’infliction d’une sanction réduite. L’Autorité de la concurrence, comme la Cour d’appel de Paris, considéraient que la non-contestation des griefs ne s’apparentait ni à des aveux, ni à une reconnaissance de culpabilité. La Cour de cassation semblait toutefois remettre en cause cette analyse et estimer que la non-contestation équivalait à une reconnaissance de l’infraction .

La solution devrait en principe évoluer avec la substitution à la procédure de non-contestation des griefs d’une procédure de transaction qui permet au rapporteur de proposer à l’entreprise qui ne conteste pas les griefs une transaction fixant le montant maximal et le montant minimal de la sanction pécuniaire envisagée. L’entreprise qui participe à une transaction reconnaît en effet sa participation à l’infraction, reconnaissance de responsabilité en contrepartie de laquelle sa sanction pécuniaire est réduite. La transaction devrait donc par voie de conséquence constituer une preuve de l’infraction dont la victime pourra se prévaloir devant le juge civil. Pour l'heure cependant, aucune décision n'a été rendue dans ce cas de figure.

Conseil : Rassembler les preuves des pratiques anticoncurrentielles.

L’obtention des preuves constitue un exercice difficile. La décision administrative de condamnation de l’entente est souvent très laconique, surtout en présence d’entreprises qui ont obtenu la clémence. Il faudra se battre pied à pied pour obtenir du juge la production forcée des éléments de l’entente ou l’autorisation de les produire soi-même car, à défaut, l’action en indemnisation risque de tourner court.

L'entreprise qui agit en réparation de son dommage concurrentiel ne peut, pour établir la position dominante de l'auteur des pratiques, se fonder sur une décision d'acceptation d'engagements qui ne retient à aucun moment l'existence d'une telle position mais qui, tout au plus, ne l'exclut pas sur un marché secondaire.

Paris, 9 mars 2022, LawLex202200001532JBJ.

Une décision d’engagements ou de mesures conservatoires prise par l’Autorité de la concurrence ne peut servir de fondement à la caractérisation d’une pratique anticoncurrentielle devant les juridictions civiles, dès lors qu’elle ne constitue qu’un commencement de preuve de celle-ci.

Paris, 12 déc. 2018, LawLex201800001974JBJ.

La non-contestation des griefs par certaines parties à l'entente limite le champ de la discussion pour les autres parties à la seule question de leur participation à la pratique anticoncurrentielle reprochée.

Cass. com., 29 mars 2011, LawLex201100000708JBJ.

Y a-t-il une reconnaissance de l'infraction en cas de procédure d'engagements ou de transaction ?

Le droit français adoptait, jusqu’à la transposition de la directive 2014/104, une position nuancée. Devant les juridictions civiles et commerciales, la condamnation par l’Autorité de la concurrence ne caractérisait pas nécessairement une faute dans le cadre de l’action en réparation lorsqu’il s’agissait d’une action individuelle. Les décisions de l’Autorité de la concurrence étant des décisions administratives, elles ne liaient pas le juge civil qui pouvait décider de ne pas condamner une entreprise pour des pratiques qualifiées d’entente par l’Autorité. En pratique, celui-ci estimait dans la majeure partie des cas que la condamnation par l’Autorité de la concurrence caractérisait, ou au moins, faisait présumer la faute. La jurisprudence administrative avait, quant à elle, tendance à déduire de la condamnation administrative l’existence d’une faute.

Lorsque l’action en réparation introduite postérieurement à la procédure de concurrence est une action de groupe, la constatation d’une infraction aux règles de concurrence dans une décision définitive constitue, en vertu de la loi Hamon du 17 mars 2014, une présomption irréfragable de faute.

Par ailleurs, le constat de l’infraction par les autorités européennes s’imposait aux juridictions nationales : les manquements au droit de l’Union devaient donc être considérés comme des fautes civiles selon le droit français .

Depuis la transposition de la directive 2014/104 par l’ordonnance du 9 mars 2017, la question de la preuve de la faute ne se pose plus dans les mêmes termes. En effet, l’article L. 481-2 du Code de commerce prévoit désormais que :

une pratique anticoncurrentielle est présumée établie de manière irréfragable dès lors qu’elle a été constatée par une décision définitive de l’Autorité de la concurrence ou de la juridiction de recours  ;

une décision définitive d’une autorité de concurrence ou d’une juridiction de recours d’un État membre constitue un moyen de preuve de la commission de la pratique anticoncurrentielle devant les juridictions françaises ;

une juridiction nationale saisie d’une action en dommages-intérêts ne saurait prendre une décision qui irait à l’encontre d’une décision définitive de la Commission rendue sur le fondement des articles 101 ou 102 TFUE .

En application de l'article 16 du règlement 1-2003, le constat de la violation du droit de l'Union par les autorités européennes s'impose aux juridictions nationales saisies d'une action en dommages-intérêts par l'entreprise victime d'un refus de vente illicite.

Paris, 23 juin 2013, LawLex201300001042JBJ.

Une décision de l'Autorité de la concurrence qui caractérise et sanctionne les pratiques anticoncurrentielles des sociétés cibles établit, en vertu de l'article L. 481-2 du Code de commerce, la preuve du dol commis par la société cédante, qui a attesté dans l'acte de cession que ses filiales respectaient le droit de la concurrence.

Paris, 6 avr. 2023, LawLex202300005053JBJ.

Cons. d'Et., 12 oct. 2020, LawLex202000002480JBJ.

L'existence d'une faute est établie lorsque l'entente a été caractérisée par une décision définitive de la Commission.

TGI Rennes, 7 oct. 2019, LawLex201900001280JBJ.

La condamnation de l'entreprise dans une procédure de concurrence suffit-elle à établir la faute ?

Les règles de la responsabilité civile imposent la preuve de l’existence non seulement d’une faute mais aussi d’un préjudice, qui doit être né et actuel. Lorsqu’il s’agit d’un dommage concurrentiel, la jurisprudence se montre plus libérale dans l’exigence d’un préjudice. Ainsi, certains juges du fond admettent que le préjudice s’infère nécessairement de la faute .

Le droit des affaires en 500 questions

142. La production des éléments de preuve recueillis dans le cadre d'une procédure de concurrence peut-elle constituer une divulgation ?

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Les décisions de justice citées dans ce paragraphe :

Les notions juridiques connexes

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