Tout le droit des sociétés : droit commun des sociétés et régime propre aux différents types de sociétés

Droit des sociétés

La nullité des délibérations trouve son fondement tant dans le droit commun que dans le droit spécial des sociétés. En droit commun des sociétés, l'article 1844-10 du Code civil précise que la nullité des actes ou délibérations des organes de la société ne peut résulter que de la violation d'une disposition impérative du titre IX, relatif à la société (articles 1832 à 1873), à l'exception du derni …

Violation de règles impératives

La nullité des délibérations trouve son fondement tant dans le droit commun que dans le droit spécial des sociétés. En droit commun des sociétés, l'article 1844-10 du Code civil précise que la nullité des actes ou délibérations des organes de la société ne peut résulter que de la violation d'une disposition impérative du titre IX, relatif à la société (articles 1832 à 1873), à l'exception du dernier alinéa de l'article 1833 , ou de l'une des causes de nullité des contrats en général. En particulier, une assemblée générale doit être annulée lorsque des personnes n'ayant pas la qualité d'associés ont participé au vote, en violation des dispositions impératives de l'article 1844 du Code civil . 

En droit spécial des sociétés, l'article L. 235-1 du Code de commerce  distingue la nullité d'actes qui modifient les statuts, de la nullité des autres actes ou délibérations. La première ne peut résulter que d'une disposition expresse du Livre II du Code de commerce relatif aux sociétés commerciales et aux groupements d'intérêt économique ou des lois qui régissent la nullité des contrats. La seconde ne peut résulter que de la violation d'une disposition impérative du Livre II du même code, à l'exception de la première phrase du premier alinéa de l'article L. 225-35 et de la troisième phrase du premier alinéa de l'article L. 225-64, ou des lois qui régissent les contrats, à l'exception du dernier alinéa de l'article 1833 du Code civil . De fait, la violation d'une disposition d'un pacte d'associés, à la supposer caractérisée, n'est pas de nature à entraîner la nullité des résolutions adoptées lors d'une assemblée générale, qui ne peut procéder que d'une disposition expresse du Code de commerce ou des lois qui régissent les contrats . En revanche, le recours à des opérations de réduction/augmentation de capital, lorsqu'elles sont réalisées en fraude aux droits du minoritaire et visent à l'évincer, doit être sanctionné par la nullité des résolutions se rapportant à ces opérations .

Par ailleurs, les délibérations d’une assemblée générale ordinaire et extraordinaire de SAS ne peuvent être annulées, même si elles ont été prises sans que chaque associé ait eu le droit de participer aux décisions et disposé d'un nombre de voix égal à celui des parts qu'il possède, dès lors que les dispositions d'ordre public des articles L. 223-28 et L. 233-29 du Code de commerce, qui consacrent ces droits, ne sont pas applicables aux SAS .  En outre, par dérogation au principe général posé par l'article L. 235-1, la Cour de cassation a récemment procédé à un important revirement de jurisprudence pour décider que pour ces sociétés, dans lesquelles l'organisation et le fonctionnement social relèvent essentiellement de la liberté statutaire, la violation d'une disposition statutaire peut, au même titre que celle d'une disposition impérative du droit des sociétés, entraîner la nullité d'une délibération . 

En vertu duquel “[l]a société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité.”

Cass. 3e civ., 8 juillet 2015, LawLex202200005110JBJ.

"La nullité d'une société ou d'un acte modifiant les statuts ne peut résulter que d'une disposition expresse du présent livre ou des lois qui régissent la nullité des contrats. En ce qui concerne les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés par actions, la nullité de la société ne peut résulter ni d'un vice de consentement ni de l'incapacité, à moins que celle-ci n'atteigne tous les associés fondateurs. La nullité de la société ne peut non plus résulter des clauses prohibées par l'article 1844-1 du Code civil.

La nullité d'actes ou délibérations autres que ceux prévus à l'alinéa précédent ne peut résulter que de la violation d'une disposition impérative du présent livre, à l'exception de la première phrase du premier alinéa de l'article L. 225-35 et de la troisième phrase du premier alinéa de l'article L. 225-64, ou des lois qui régissent les contrats, à l'exception du dernier alinéa de l'article 1833 du Code civil."

Pour des applications, V. Cass. com., 13 janvier 2021, LawLex202200006428JBJ, considérant qu'une délibération de l'assemblée générale des associés d'une société qui octroie une rémunération exceptionnelle à son dirigeant ne peut être annulée qu'en cas de violation des dispositions impératives qui s'imposent aux sociétés commerciales ou de violation des lois qui régissent les contrats, et non au seul motif de sa contrariété à l'intérêt social, sauf fraude ou abus de droit commis par un ou plusieurs associés pour favoriser ses ou leurs intérêts au détriment de ceux d'un ou plusieurs autres associés ; 14 juin 2005, LawLex202300003622JBJ, précisant que la nullité des actes ou délibérations d'un groupement d'intérêt économique ne peut résulter que de la violation des dispositions impératives des textes qui régissent ce type de groupement ou de l'une des causes de nullité des contrats en général, et non de celles des statuts. - V. égal, a contrario, Cass. 3e civ., 19 juillet 2000, LawLex202200005986JBJ, retenant que le non-respect des stipulations des statuts ou du décret qui impose la signature du procès-verbal de l'assemblée au cours de laquelle un gérant est révoqué par ce dernier, qui ne constitue pas une disposition impérative, ne sont pas de nature à entrainer l’annulation des délibérations en cause ; Douai, 24 septembre 2020, LawLex202300003319JBJ, affirmant que l'article 15 de la loi du 6 janvier 1986 relative aux règles de vote des résolutions ayant une incidence sur les charges dues par les associés dans les sociétés d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé ne constitue pas une règle d'ordre public dont la violation est susceptible d'entraîner la violation de la délibération.

Paris, 13 février 2024, LawLex202400002204JBJ.

Cass. com., 15 mars 2023, LawLex202300004241JBJ, JCP E 2023, n° 1093, obs. DONDERO ; RJDA 2023, n° 263.

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