Tout le droit des sociétés : droit commun des sociétés et régime propre aux différents types de sociétés

Droit des sociétés

1) Obligations de la société émettrice

Conformément à l'article L. 228-98 du Code de commerce, la société appelée à attribuer des valeurs mobilières donnant accès au capital ne peut, à dater de l'émission de celles-ci, modifier sa forme ou son objet, à moins d'y être autorisée par le contrat d'émission ou dans les conditions prévues à l'article L. 228-103 du Code de commerce. Sous les mêmes condi …

Dispositions particulières relatives aux valeurs mobilières donnant accès au capital

1) Obligations de la société émettrice

Conformément à l'article L. 228-98 du Code de commerce, la société appelée à attribuer des valeurs mobilières donnant accès au capital ne peut, à dater de l'émission de celles-ci, modifier sa forme ou son objet, à moins d'y être autorisée par le contrat d'émission ou dans les conditions prévues à l'article L. 228-103 du Code de commerce. Sous les mêmes conditions et sous réserve de prendre les dispositions nécessaires au maintien des droits des titulaires des valeurs mobilières donnant accès au capital dans les conditions définies à l'article L. 228-99, elle ne peut ni modifier les règles de répartition de ses bénéfices, ni amortir son capital, ni créer d'actions de préférence qui entraînent une telle modification ou un tel amortissement. En cas de réduction de son capital motivée par des pertes et réalisée par la diminution du montant nominal ou du nombre des titres composant le capital, les droits des titulaires de valeurs mobilières donnant accès au capital sont réduits en conséquence, comme s'ils les avaient exercés avant la date à laquelle la réduction de capital est devenue définitive. 

La société émettrice doit également prendre les mesures nécessaires à la protection des intérêts des titulaires des droits créés si elle décide de procéder à l'émission, sous quelque forme que ce soit, de nouveaux titres de capital avec droit préférentiel de souscription réservé à ses actionnaires, de distribuer des réserves, en espèces ou en nature, et des primes d'émission ou de modifier la répartition de ses bénéfices par la création d'actions de préférence. A cet effet, elle doit : soit mettre les titulaires de ces droits en mesure de les exercer, si la période prévue au contrat d'émission n'est pas encore ouverte, de telle sorte qu'ils puissent immédiatement participer aux opérations susmentionnées ou en bénéficier ; soit prendre les dispositions qui leur permettront, s'ils viennent à exercer leurs droits ultérieurement, de souscrire à titre irréductible les nouvelles valeurs mobilières émises, ou en obtenir l'attribution à titre gratuit, ou encore recevoir des espèces ou des biens semblables à ceux qui ont été distribués, dans les mêmes quantités ou proportions ainsi qu'aux mêmes conditions, sauf en ce qui concerne la jouissance, que s'ils avaient été, lors de ces opérations, actionnaires ; soit procéder à un ajustement des conditions de souscription, des bases de conversion, des modalités d'échange ou d'attribution initialement prévues de façon à tenir compte de l'incidence de ces opérations . Elle engage sa responsabilité contractuelle à l'égard des obligataires lorsqu’elle s'abstient, à la suite de la distribution de dividendes pour partie prélevés sur les primes liées au capital, de procéder à l'ajustement des parités de conversion ou de souscription des obligations convertibles et des bons de souscription d’actions et doit, pour réparer le préjudice qui en découle, accorder à ceux-ci une indemnité égale à la contrevaleur des actions dont il ont été privés du fait de l'absence d'ajustement . Le contrat d'émission peut prévoir des mesures de protection supplémentaires destinées à tous porteurs de valeurs mobilières donnant accès à des titres de capital .

2) Protection en cas d'absorption, fusion ou scission de la société émettrice

L'article L. 228-101 du Code de commerce prévoit que si la société appelée à émettre les titres de capital est absorbée par une autre société ou fusionne avec une ou plusieurs autres sociétés pour former une société nouvelle, ou procède à une scission, les titulaires de valeurs mobilières donnant accès au capital pourront exercer leurs droits dans la ou les sociétés bénéficiaires des apports. L'article L. 228-65 qui exige la tenue d'une assemblée d'obligataires n'est pas applicable, sauf stipulations contraires du contrat d'émission. Le nombre de titres de capital de la ou des sociétés absorbantes ou nouvelles auquel ils peuvent prétendre est déterminé en corrigeant le nombre de titres qu'il est prévu d'émettre ou d'attribuer au contrat d'émission en fonction du nombre d'actions à créer par la ou les sociétés bénéficiaires des apports. Le commissaire aux apports doit rendre un avis sur le nombre de titres ainsi fixé. En outre, l'approbation du projet de fusion ou de scission par les actionnaires de la ou des sociétés bénéficiaires des apports ou de la ou des sociétés nouvelles emporte renonciation par les actionnaires et, le cas échéant, par les titulaires de certificats d'investissement de ces sociétés, au droit préférentiel de souscription mentionné à l'article L. 228-35 ou, au deuxième alinéa de l'article L. 228-92, au profit des titulaires de valeurs mobilières donnant accès de manière différée au capital. Enfin, la ou les sociétés bénéficiaires des apports ou la ou les nouvelles sociétés sont substituées de plein droit à la société émettrice dans ses obligations envers les titulaires desdites valeurs mobilières.

Aux termes de l'article L. 228-103 du Code de commerce, les titulaires de valeurs mobilières donnant accès à terme au capital après détachement, s'il y a lieu, des droits du titre d'origine, sont groupés de plein droit, pour la défense de leurs intérêts communs, en une masse qui jouit de la personnalité civile et est soumise à des dispositions identiques à celles qui sont prévues, en ce qui concerne les obligations, par les articles L. 228-47 à L. 228-64, L. 228-66 et L. 228-90 . Il est formé, s'il y a lieu, une masse distincte pour chaque nature de titres donnant les mêmes droits. Les assemblées générales des titulaires de ces valeurs mobilières sont appelées à autoriser toutes modifications au contrat d'émission et à statuer sur toute décision relative aux conditions de souscription ou d'attribution de titres de capital déterminées au moment de l'émission . Si des porteurs représentant au moins le trentième des titres d'une masse peuvent demander une convocation de l'assemblée générale des porteurs, cette assemblée ne peut avoir pour objet de proposer à la société émettrice une modification du terme de ces titres . En revanche, une opération de réduction du capital à zéro et l'annulation consécutive des obligations remboursables en actions, qui affecte les conditions d’attribution de titres de capital déterminées au moment de l’émission, implique une convocation préalable de l'assemblée générale des obligataires .

Chaque valeur mobilière donnant accès au capital ouvre droit à une voix. Les conditions de quorum et de majorité sont déterminées aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 225-96, aux termes desquels l'assemblée ne délibère valablement que si les actionnaires présents ou représentés possèdent au moins, sur première convocation, le quart et, sur deuxième convocation, le cinquième des actions ayant le droit de vote. A défaut, la deuxième assemblée peut être fixée à une date postérieure de deux mois au plus à celle à laquelle elle avait été convoquée. Les statuts peuvent prévoir des quorums plus élevés. L'assemblée statue à la majorité des deux tiers des voix exprimées par les actionnaires présents ou représentés. Les voix exprimées ne comprennent pas celles attachées aux actions pour lesquelles l'actionnaire n'a pas pris part au vote, s'est abstenu ou a voté blanc ou nul. L’assemblée générale des porteurs d’obligations remboursables en actions doit être annulée lorsque, en violation des dispositions de l’article L. 228-61 du Code de commerce qui interdit à toute société qui détient au moins 10 % du capital de la société débitrice de voter à l'assemblée avec les obligations qu'elle détient, un actionnaire principal a, par l’entremise de sociétés qu’il contrôle, participé à un vote décisif . Les frais d'assemblée ainsi que, d'une façon générale, tous les frais afférents au fonctionnement des différentes masses sont à la charge de la société appelée à émettre ou attribuer de nouvelles valeurs mobilières représentatives de son capital social. 

Les représentants de la masse des obligataires ont, sauf restriction décidée par l'assemblée générale des obligataires, le pouvoir d'accomplir au nom de la masse tous les actes de gestion pour la défense des intérêts communs des obligataires . Aux termes du premier alinéa de l'article L. 228-54 du Code de commerce, lorsqu'ils sont dûment autorisés par l'assemblée générale des obligataires, les représentants de la masse détiennent seuls qualité pour engager, au nom de ceux-ci, les actions en nullité de la société ou des actes et délibérations postérieurs à sa constitution, ainsi que toutes autres actions en justice qui ont pour objet la défense des intérêts communs des obligataires, et notamment demander la liquidation judiciaire de la société prévue à l'article L. 237-14 . Un porteur d'obligations convertibles en actions ne peut s'affranchir des dispositions impératives de l'article L. 228-54 . L'action engagée à titre individuel par le souscripteur d'obligations convertibles en actions à l'encontre de la société émettrice est dès lors irrecevable en vertu des dispositions de l'article L. 228-54 du Code de commerce si la faute alléguée procède d'un manquement aux stipulations du contrat d'émission et affecte les intérêts de l'ensemble des obligataires, qui sont nécessairement défendus par leur représentant . Les porteurs d'obligations convertibles, lorsqu'ils sont majoritaires au sein de la masse des obligataires, ne justifient pas d'un intérêt à agir distinct de celui de la masse, qui leur permettrait de se dispenser du représentant de celle-ci . La rémunération du représentant de la masse des porteurs de bons de souscription d'actions ne peut être fixée que dans les conditions prévues par les articles L. 228-56 et R. 228-63 du Code de commerce, sur renvoi de l’article L. 228-103 du même code et non par celles fixées par le Code de procédure civile pour les émoluments des auxiliaires de justice .  Les porteurs d'obligations remboursables en actions peuvent, même en cas de désignation de représentants, agir individuellement en annulation des délibérations de leurs assemblées .

4) Droit de communication des documents sociaux 

Les titulaires des valeurs mobilières donnant accès au capital disposent, auprès de la société émettrice des titres qu'ils ont vocation à recevoir, d'un droit de communication des documents sociaux transmis par la société aux actionnaires ou aux titulaires de certificats d'investissement ou mis à leur disposition . Ce droit de communication s'exerce dans les mêmes conditions que celles prévues pour les actionnaires des sociétés anonymes . Lorsque les droits à l'attribution d'une quote-part du capital social sont incorporés ou attachés à des obligations, le droit de communication est exercé par les représentants de la masse des obligataires, conformément à l'article L. 228-55 . Après détachement de ces droits du titre d'origine, le droit de communication est exercé par les représentants de la masse constituée conformément à l'article L. 228-103 . Dans tous les cas, les représentants des différentes masses ont accès à l'assemblée générale des actionnaires, mais sans voix délibérative. Ils ne peuvent, en aucune façon, s'immiscer dans la gestion des affaires sociales .

5) Protection en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire à l'égard d'une société émettrice 

Lorsqu'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire est ouverte à l'égard d'une société émettrice de valeurs mobilières donnant accès au capital dans les conditions de l'article L. 228-91, le délai prévu pour l'exercice du droit à attribution d'une quote-part de capital social est ouvert dès le jugement arrêtant le plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire, au gré de chaque titulaire, et dans les conditions prévues par ce plan . Le représentant de la masse n’a pas à justifier d’un pouvoir spécial ou d’une autorisation de l’assemblée générale des obligataires pour déclarer une créance des porteurs d'obligations convertibles . La déclaration de créance effectuée par le mandataire désigné par le tribunal pour assurer la représentation de celle-ci, dès le lendemain de sa désignation, alors que la loi lui accorde un délai de quinze jours pour y procéder, est régulière .

Paris, 25 novembre 2008, LawLex202300005302JBJ.

Cass. com., 7 avril 2010, LawLex202200011357JBJ.

Paris, 13 mars 2012, LawLex202200011489JBJ.

Paris, 29 septembre 2016, LawLex202300005529JBJ.

Cass. com., 7 mai 2019, LawLex202200011511JBJ ; Montpellier, 16 janvier 2020, LawLex202300005669JBJ, retenant que le président du tribunal judiciaire ne peut être valablement saisi par le représentant de la masse de porteurs de bons de souscription d'actions d'une demande de fixation de sa rémunération que par voie de requête enregistrée par le greffe et notifiée à la partie adverse.

Cass. com., 13 juin 1995, LawLex202200011313JBJ.

Cass. com., 26 février 2020, LawLex202300005426JBJ, considérant qu'un créancier porteur d'obligations Océane ou d'obligations high yield ne peut contester que la régularité de la tenue des assemblées d'obligataires, leur composition ou la régularité des votes, et non le plan de sauvegarde de la société émettrice lui-même.

Paris, 14 décembre 2021, LawLex202300005540JBJ, précit.

Bastia, 14 décembre 2016, LawLex202300005994JBJ.

Versailles, 17 novembre 1994, LawLex202200011314JBJ, retenant que comme les obligataires, les porteurs d’obligations remboursables en actions, qui ne deviennent actionnaires qu’à terme, jouissent des droits liés à la propriété d’obligations, et notamment de celui d’être groupés de plein droit dans une masse, et partagent les mêmes caractéristiques que les obligataires jusqu’au remboursement ; Cass. com., 13 juin 1995, LawLex202200011313JBJ.

Paris, 14 décembre 2021, LawLex202300005540JBJ, considérant que l’assemblée générale des obligataires ne peut être annulée du seul fait qu’il ne ressort pas de son procès-verbal qu'elle a été convoquée par le conseil d’administration de la société émettrice, dès lors que l'ensemble des obligataires y ont assisté, et précisant que la désignation d’un représentant de la masse par l'assemblée générale des obligataires ne peut être annulée du seul fait qu'il ne ressort pas du procès-verbal de la délibération que l'assemblée a été convoquée par le conseil d’administration de la société émettrice, dès lors que tous les obligataires y ont assisté.

Douai, 23 janvier 2020, LawLex202300005464JBJ.

Cass. com., 10 juillet 2012, LawLex202200004119JBJ.

Versailles, 17 novembre 1994, LawLex202200011314JBJ ; Cass. com., 13 juin 1995, LawLex202200011313JBJ, affirmant que l’interdiction faite à une société qui détient au moins 10 % du capital de la société débitrice, de voter à l'assemblée des obligataires, ne peut résulter que de sa participation directe dans le capital de cette société et non de celle de plusieurs de ses filiales ne détenant pas individuellement 10 % de participations.

C. com., art. L. 228-53. - V., pour une application, Cass. com., 10 juillet 2012, LawLex202200004119JBJ, considérant que lorsque le capital d’une société débitrice est réduit à zéro, en vue de son augmentation ultérieure, le représentant de la masse des porteurs d'obligations remboursables en actions demeure en fonction, dès lors que la masse subsiste tant qu’il n’a pas été définitivement statué sur ses droits.

Cass. com., 10 décembre 2013, LawLex202200011346JBJ, précisant qu'est réservée au représentant de la masse, l’action qui tend à obtenir la réparation du préjudice lié au défaut d’ajustement d'obligations convertibles en actions, dès lors qu'elle est de nature à intéresser l’ensemble des obligataires placés dans la même situation ; Douai, 23 janvier 2020, LawLex202300005464JBJ, retenant que seul le représentant de la masse, dûment habilité pour assurer la défense des intérêts communs des souscripteurs de bons de souscription d'actions remboursables, est recevable à agir en réparation du préjudice financier que cause à certains d'entre eux le refus de convocation d’une assemblée générale des porteurs pour statuer sur la conversion de leurs titres.

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