Tout le droit des sociétés : droit commun des sociétés et régime propre aux différents types de sociétés

Droit des sociétés

Aux termes de l'article L. 225-206 du Code de commerce, est interdite, la souscription par une société, de ses propres actions, soit directement, soit par une personne qui agit en son propre nom, mais pour le compte de la société . Cependant, dans les sociétés anonymes, l'article L. 225-206, II, du Code de commerce, autorise le rachat, par la société, de ses propres actions, dans les conditions et …

Principe

Aux termes de l'article L. 225-206 du Code de commerce, est interdite, la souscription par une société, de ses propres actions, soit directement, soit par une personne qui agit en son propre nom, mais pour le compte de la société . Cependant, dans les sociétés anonymes, l'article L. 225-206, II, du Code de commerce, autorise le rachat, par la société, de ses propres actions, dans les conditions et selon les modalités prévues aux articles L. 225-207 à L. 225-217 , pour les sociétés non cotées, et aux articles L. 22-10-61 à L. 22-10-65, pour les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation.

Les sociétés dont les actions ne sont pas admises aux négociations sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation peuvent procéder au rachat de leurs propres actions dans certaines hypothèses limitativement prévues par l'article L. 225-206 , parmi lesquelles ne figure pas la promesse de rachat d'actions souscrite par une société envers l'un de ses actionnaires .

En premier lieu, l'assemblée générale qui a décidé une réduction de capital non motivée par des pertes peut autoriser le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, à acheter un nombre déterminé d'actions pour les annuler . Conformément à l'article R. 225-153 du Code de commerce, la société doit proposer une offre d'achat à tous les actionnaires. A cette fin, un avis d'achat est inséré dans un support habilité à recevoir les annonces légales dans le département du siège social et, en outre, si toutes ses actions ne revêtent pas la forme nominative, au Bulletin des annonces légales obligatoires. En revanche, si toutes les actions de la société sont nominatives, ces insertions peuvent être remplacées par un avis adressé, par lettre recommandée et aux frais de la société, à chaque actionnaire. L'avis doit indiquer la dénomination sociale et la forme de la société, l'adresse du siège social, le montant du capital social, le nombre d'actions dont l'achat est envisagé, le prix offert par action, le mode de paiement, le délai pendant lequel l'offre sera maintenue et le lieu où elle peut être acceptée . Le délai ne peut être inférieur à vingt jours . Si les actions présentées à l'achat excèdent le nombre d'actions à acheter, il est procédé, pour chaque actionnaire vendeur, à une réduction proportionnelle au nombre d'actions dont il justifie être propriétaire ou titulaire . Si les actions présentées à l'achat n'atteignent pas le nombre d'actions à acheter, le capital social est réduit à due concurrence des actions achetées . Cependant, le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, peut décider de renouveler l'opération, dans les conditions prévues aux articles R. 225-153 et R. 225-154, jusqu'à complet achat du nombre d'actions initialement fixé sous réserve d'y procéder dans le délai indiqué par la délibération de l'assemblée générale qui a autorisé la réduction du capital . Enfin, les actions achetées par la société doivent être annulées au plus tard après l'expiration du délai de vingt jours qui correspond à la période pendant laquelle l'offre doit être maintenue . L'annulation doit être constatée par un virement à un compte d'ordre ouvert au nom de la société, soit chez elle, soit chez un intermédiaire mentionné à l'article L. 211-3 du Code monétaire et financier .

En second lieu, les sociétés en cause peuvent racheter leurs propres actions dans trois types de situations. Dans le premier cas, prévu par l'article L. 225-208, le rachat peut être effectué dans le but d'attribuer les actions à leurs salariés pour les faire participer à leurs résultats. Les actions doivent être attribuées dans le délai d'un an à compter de l'acquisition . Dans le second cas, visé à l'article L. 225-209-2, l'assemblée générale ordinaire peut autoriser le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, à acheter les actions de la société, pour les offrir ou les attribuer, dans l'année de leur rachat, aux bénéficiaires d'une opération mentionnée à l'article L. 225-208 ou qui intervient dans le cadre des articles L. 3332-1 et suivants du Code du travail ou, dans les cinq ans de leur rachat, aux actionnaires qui manifesteraient à la société l'intention de les acquérir à l'occasion d'une procédure de mise en vente organisée par la société elle-même dans les trois mois qui suivent chaque assemblée générale ordinaire annuelle. Dans ces deux hypothèses, le nombre d'actions acquises ne peut excéder 10 % de son capital. Enfin, l'offre ou l'attribution d'actions peut également intervenir dans les deux ans de leur rachat, en paiement ou en échange d'actifs acquis par la société dans le cadre d'une opération de croissance  externe, de fusion, de scission ou d'apport, à condition que le nombre d'actions acquises n'excède pas 5 % de son capital. L'assemblée générale doit préciser les finalités de l'opération et définir le nombre maximal d'actions dont elle autorise l'acquisition, le prix ou les modalités de fixation du prix ainsi que la durée de l'autorisation, qui ne peut excéder douze mois. Elle peut autoriser le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, dans le respect des délais applicables, à utiliser les actions rachetées pour une autre des finalités prévues à l'article L. 225-209-2  .

Les dispositions des articles L. 225-209-2, L. 225-206 et L. 22-10-62 ne sont pas applicables aux actions entièrement libérées, acquises à la suite d'une transmission de patrimoine à titre universel ou encore à la suite d'une décision de justice . Cependant, ces actions doivent être cédées dans un délai de deux ans à compter de leur date d'acquisition lorsque la société possède plus de 10 % de son capital. A l'expiration de ce délai, elles doivent être annulées .

L'article L. 225-210 prévoit que la société ne peut posséder, directement ou par l'intermédiaire d'une personne qui agit en son propre nom, mais pour le compte de la société, plus de 10 % du total de ses propres actions, ni plus de 10 % d'une catégorie déterminée. La règle se justifie par l'idée qu'une société ne peut être à la fois créancière et débitrice d'elle-même et que l'auto-détention de son capital risque de rendre celui-ci fictif. Ces actions doivent être mises sous la forme nominative, à l'exception de celles rachetées pour favoriser la liquidité des titres de la société, et entièrement libérées lors de l'acquisition. A défaut, les membres du conseil d'administration ou du directoire, selon le cas, sont tenus, de libérer les actions. L'acquisition d'actions de la société ne peut avoir pour effet d'abaisser les capitaux propres à un montant inférieur à celui du capital augmenté des réserves non distribuables . La société doit disposer de réserves, autres que la réserve légale, d'un montant au moins égal à la valeur de l'ensemble des actions qu'elle possède. Les actions possédées par la société ne donnent pas droit aux dividendes et sont privées de droits de vote.

Enfin, en cas d'augmentation du capital par souscription d'actions en numéraire, la société ne peut exercer elle-même le droit préférentiel de souscription. L'assemblée générale peut décider de ne pas tenir compte de ces actions pour la détermination des droits préférentiels de souscription attachés aux autres actions. A défaut les droits attachés aux actions possédées par la société doivent être, avant la clôture du délai de souscription, soit vendus en bourse, soit répartis entre les actionnaires au prorata des droits de chacun. Toutefois, les actions doivent être cédées dans un délai de deux ans à compter de la date d'acquisition lorsque la société possède plus de 10 % de son capital. A l'expiration de ce délai, elles doivent être annulées.

Toutes les actions possédées en violation de ces dispositions doivent être cédées dans un délai d'un an à compter de leur souscription ou de leur acquisition. A l'expiration de ce délai, elles doivent être annulées . Cependant, la nullité encourue n'est pas automatique, elle nécessite un vote de l'assemblée générale . De plus, les actions autodétenues par la société doivent faire l'objet d'une cession . 

Pour autant, aucun texte ne prévoit que la violation du principe d'interdiction du rachat par une société de ses propres actions doit être sanctionnée par l’annulation de l'opération . Par conséquent, le fait pour une association de céder les actions qu'elle détient dans une société anonyme à un prête-nom de cette dernière, en violation de l'article L. 225-206, II du Code de commerce, ne peut entraîner la nullité de l’acquisition . De même, le rachat de ses actions par une SA, destiné à satisfaire un engagement pris par cette dernière à l'égard de l'un de ses actionnaires, n'est sanctionné par la nullité de l'acquisition que si l'opération n'est pas suivie de la procédure prévue en cas de réduction du capital, qui implique l'information de l'ensemble des actionnaires et une décision de l'assemblée générale .

2) Sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation

Conformément à l'article L. 22-10-62 du Code de commerce, l'assemblée générale d'une société dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation peut autoriser le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, à acheter un nombre d'actions qui représente jusqu'à 10 % de son capital. Elle définit les finalités et les modalités de l'opération, ainsi que son plafond. L'autorisation ne peut être donnée pour une durée supérieure à dix-huit mois. Le comité social et économique doit être informé de la résolution adoptée par l'assemblée générale.

Une société cotée peut également procéder au rachat de ses propres actions, dans la limite de 10 % du capital social, afin de favoriser la liquidité dans les conditions définies par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers.

Les sociétés doivent déclarer à l'Autorité des marchés financiers les opérations qu'elles envisagent d'effectuer en application des dispositions de l'article L. 22-10-62. La déclaration est réputée avoir été réalisée lorsque les sociétés l'ont effectuée en application de l'article 5 du règlement 596/2014 du 16 avril 2014  ou des dispositions d'une pratique de marché admise par l'Autorité des marchés financiers en application de l'article 13 du même règlement . Elles rendent compte chaque mois à l'Autorité des marchés financiers des acquisitions, cessions, annulations et transferts qu'elles ont effectués . L'Autorité des marchés financiers peut leur demander à ce sujet toutes les explications ou les justifications qu'elle juge nécessaires . S'il n'est pas satisfait à ces demandes ou lorsqu'elle constate que les transactions enfreignent les dispositions de l'article L. 22-10-62, l'Autorité des marchés financiers peut prendre toutes mesures pour empêcher l'exécution des ordres que ces sociétés transmettent directement ou indirectement . En revanche, l'Autorité des marchés financiers n'est pas compétente pour connaître de manquements relatifs au respect des prérogatives de l’assemblée générale des actionnaires et assurer la prévention du risque de fictivité du capital social et d’autodésignation des dirigeants sociaux, par la limitation à 10 % du pourcentage de détention par une société de ses propres titres et la neutralisation des effets du non-respect de ce plafond, obligations qui concernent au premier chef le bon fonctionnement des sociétés et non la protection des investisseurs et le bon fonctionnement du marché .

Dans les conditions et selon les modalités fixées par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers, toute société dont des actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé qui souhaite procéder au rachat de ses propres titres de capital doit informer préalablement le marché .

Avant le début des opérations dans le cadre d'un programme de rachat de ses titres, tout émetteur publie, selon les modalités fixées à l'article 221-3 du règlement général de l'AMF , le descriptif du programme conformément aux dispositions du règlement délégué 2016/1052 du 8 mars 2016 . Pendant la réalisation du programme de rachat, toute modification de l'une des informations énumérées dans le descriptif doit être portée, le plus tôt possible, à la connaissance du public selon les modalités fixées à l'article 221-3. 

Enfin, les sociétés qui font participer les salariés aux fruits de l'expansion de l'entreprise par l'attribution de leurs propres actions, celles qui attribuent leurs actions dans les conditions prévues aux articles L. 225-197-1 à L. 225-197-3 et L. 22-10-59 du Code de commerce, ainsi que celles qui entendent consentir des options d'achat d'actions à des salariés peuvent utiliser à cette fin tout ou partie des actions acquises dans les conditions prévues ci-dessus. Elles peuvent également leur proposer d'acquérir leurs propres actions dans les conditions prévues par les articles L. 3332-1 et suivants du Code du travail.

Pour une illustration, V. Paris, 31 janvier 2003, LawLex202300006096JBJ, retenant que l’achat, par une première société, de 2 % du capital d’une deuxième  société, qui détient 3 % du capital d’une troisième, ne peut être  analysé comme un rachat, même indirect, par cette dernière de ses  propres actions par personne interposée, du seul fait que la première  société est sa filiale à près de 100 %, dès lors qu'il n'est pas établi  qu'elle n'agit pas en toute indépendance et pour son propre compte.

Paris, 18 mai 2017, LawLex202300006091JBJ.

C. com., art. R. 225-154, sur renvoi de l'art. R. 225-158, al. 3.

V. cep., Montpellier, 25 juin 2013, LawLex202300006198JBJ, considérant qu'une société ne viole pas l'interdiction de diminuer le montant de ses capitaux propres en deçà du montant du capital social par le rachat de ses propres actions, lorsqu'il est prévu que ce rachat sera suivi d'une annulation des actions acquises et d'une réduction du capital social.

Cass. com., 12 mai 2021, LawLex202200005596JBJ, approuvant Versailles, 2 avril 2019, LawLex202300006088JBJ.

Versailles, 23 juin 2015, LawLex202300006090JBJ, estimant que l'engagement pris par une SA de racheter les actions de l'un de ses salariés en cas de licenciement dans l'année est illicite dès lors qu'il ne correspond à aucune des hypothèses prévues par l'article L. 225-206 du Code de commerce.

Montpellier, 13 décembre 2007, LawLex202300006092JBJ.

Cass. 1re civ., 17 décembre 2009, LawLex202200005593JBJ.

Rennes, 15 janvier 2019, LawLex202300006191JBJ.

Règ. 596/2014 du 16 avril 2014 sur les abus de marché.

C. com., art. L. 22-10-64, al. 1er. ; CMF, art. L. 451-3 ; RGAMF, art. 241-1 et s.

AMF, 5 juillet 2018, LawLex202300006091JBJ.

Cass. com., 3 mars 2021, LawLex202200005595JBJ ; Cass. 1re civ., 15 novembre 2010, LawLex202200005594JBJ.

Aux termes duquel “L'émetteur s'assure de la diffusion effective et intégrale de l'information réglementée définie à l'article 221-1 à l'exception de l'information visée au m du 1° de l'article 221-1 dont la diffusion effective et intégrale est assurée par l'AMF sur son site internet. L'émetteur met en ligne sur son site internet les informations réglementées dès leur diffusion à l'exception de l'information visée au m du 1° de l'article 221-1 qui est diffusée par l'AMF sur son site internet”.

RGAMF, art. 241-2, al. 1er ; Règl. délégué 2016/1052 du 8 mars 2016 complétant le règlement 596/2014 par des normes techniques de réglementation concernant les conditions applicables aux programmes de rachat et aux mesures de stabilisation.

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