Le Droit de la concurrence, premier tome du Traité de droit économique, expose, en deux livres (Tome 1/2. Droit européen ; Tome 2/2. Droit français) l’ensemble des règles de concurrence : ententes et abus de domination, procédure de concurrence, concentrations, aides d’État, négociation commerciale, et concurrence déloyale.

Droit européen de la concurrence

Le droit européen ne saurait remettre en cause l'existence du monopole légal reconnu au titulaire d'un droit de propriété intellectuelle . Les autorités européennes affirment traditionnellement que si l'existence du droit exclusif ne saurait être contestée , ses conditions d'exercice peuvent en revanche être déclarées contraires au droit européen de la concurrence, en particulier lorsque le droit  …

Droits de propriété intellectuelle et libre concurrence.

V. PRIETO, L'application du droit de la concurrence aux contrats relatifs à la propriété intellectuelle, RDC, 2-2005, 311 ; CARRIER, Antitrust treatment of intellectual property rights, in Comparative competition law, Edward Elgar, 2015, 141 ; GRASSO, Standard Essential Patents: Royalty Determination in the Supply Chain, JECLAP 2017, 283 ; OLIVEIRA PAIS, RITZMANN, The Lundbeck case through the lens of probabilistic patents, Concurrences 2/2017, 41 ; SKA, WERNER, PAUL, Pay-for-delay Agreements: Why the EU Should Judge them by their Effects, JECLAP 2017, 437 ; CHAIEHLOUDJ, Les accords de report d'entrée : Contribution à l'étude de la relation du droit de la concurrence et du droit des brevets, Concurrences, 2019 ; GRYNFOGEL, Les comportements anticoncurrentiels du secteur pharmaceutique : une approche sévère des autorités de concurrence (en 2 parties), RJDA 01/2019, 3 et 02/2019, 89 ; HOTTE, Droit de brevet et pratiques anticoncurrentielles : actualité européenne, RLC 2019, n° 3613 ; IBANEZ COLOMO, Pay-For-Delay and the Structure of Article 101(1) TFEU: Points of Law Raised in Lundbeck and Paroxetine, JECLAP 2019, 591 ; PADILLA et WONG-ERVIN, An economic approach to antitrust analysis of discriminatory licensing, grantbacks and cross-licences, no-challenge clauses and patent tickets, Concurrences 3/2019, 44 ; TERCINET, Pay-for-delay Agreements within the EU, RLC 2019, n° 3670.

Le droit européen ne saurait remettre en cause l'existence du monopole légal reconnu au titulaire d'un droit de propriété intellectuelle . Les autorités européennes affirment traditionnellement que si l'existence du droit exclusif ne saurait être contestée , ses conditions d'exercice peuvent en revanche être déclarées contraires au droit européen de la concurrence, en particulier lorsque le droit exclusif apparaît comme “l'objet, le moyen ou la conséquence d'une entente” .

Le droit du titulaire d'un brevet ne peut ainsi être appréhendé par l'article 101 TFUE en l'absence de concertation . Il en va autrement lorsque le titulaire du brevet passe un accord de “pay for delay” avec des concurrents qui n'est pas objectivement nécessaire à la protection de son droit, puisqu'il pourrait atteindre ce résultat en intentant des actions en contrefaçon ou en négociant un règlement amiable avec eux sans entraîner leur exclusion du marché . En effet, si la conclusion d'un accord de règlement amiable avec un contrefacteur qui n'excède pas la portée et la durée de validité restant à courir du brevet constitue l'expression du droit de propriété intellectuelle de son titulaire, le brevet n'autorise pas ce dernier à conclure des accords contraires à l'article 101 TFUE ou à adopter des pratiques collusoires qui présentent un degré de nocivité suffisant pour être qualifiées de restriction par objet . De même, les actions d'un fabricant de logiciels, qui visent à empêcher l'importation de copies de ses produits, ne constituent pas un accord ou une pratique concertée avec ses revendeurs, dès lors qu'elles caractérisent l'exercice de droits d'auteur sur ces produits . L'obligation pour le licencié de respecter le savoir-faire du donneur de licence n'est pas davantage anticoncurrentielle dès lors qu'elle n'est pas exclusive, n'est qu'accessoire à l'objet principal de l'accord et permet de garantir que la technologie concédée sera exploitée de manière satisfaisante sur le plan technique . L'obligation faite au licencié de payer une redevance pour l'utilisation d'une technologie brevetée pendant toute la période d'effectivité de l'accord de licence, en cas d'annulation ou de non-contrefaçon du brevet en cause, n'est pas non plus contraire à l'article 101 TFUE pour autant que le licencié demeure libre de résilier le contrat moyennant un préavis raisonnable . Dans tous les cas, la règle de raison permet de valider les restrictions de concurrence qui sont justifiées par la qualité des produits , la préservation de la bonne réputation de la marque , la protection du secret du savoir-faire  ou la destination des obtentions végétales . Enfin, lorsque la licence accordée est ouverte et limitée aux rapports de droits entre le licencié et le titulaire du droit, l'exclusivité n'est pas en soi incompatible avec l'article 101 TFUE .

En revanche, l'obligation d'obtenir l'agrément préalable du donneur de licence pour la mise sur le marché d'un produit non couvert par la licence mais complémentaire du produit breveté , de s'approvisionner exclusivement en produits non couverts par le brevet auprès du donneur de licence  ou de payer des redevances même après l'expiration du brevet , l'octroi de licences exclusives de savoir-faire et de brevet à une entreprise commune, assorties d'une interdiction de concéder des sous-licences sans l'accord préalable des deux entreprises fondatrices , la clause de l'accord de licence, qui interdit au licencié de fabriquer et de commercialiser les produits contractuels après la rupture des relations, en dépit de l'expiration du brevet , ou l'accord de règlement amiable d'un litige en matière de brevets qui comporte des clauses de non-contestation de brevets et de non-commercialisation de produits, qui ont par elles-mêmes un caractère restrictif , tombent sous le coup de l'interdiction de l'article 101 TFUE. De même, la licence de marque qui confère au licencié le droit exclusif d'utiliser la marque dans un État membre, ainsi que la qualité de distributeur exclusif , ou les clauses d'un contrat de licence exclusive entre le titulaire des droits de propriété intellectuelle et un organisme de radiodiffusion qui imposent au diffuseur de ne pas fournir de dispositif de décodage permettant l'accès aux programmes du titulaire en vue de leur visionnage à l'extérieur du territoire couvert par le contrat , crée une protection territoriale absolue contraire aux règles de concurrence . Une licence de savoir-faire ne peut, sans violer l'article 101, être concédée à titre exclusif pour l'ensemble du territoire d'un État membre à une seule entreprise . Il n'est pas non plus licite dans le cadre d'un accord de recherche-développement d'interdire l'octroi de sous-licences à des tiers .

V. art. 345 TFUE, aux termes duquel “les traités ne préjugent en rien le régime de la propriété dans les États membres”.

V. CJCE, 31 octobre 1974, Centrafarm (BV) c. Sterling Drug (Inc), aff. 15-74, LawLex200200004134JBJ.

Décision Comm. CE nº 88-563 du 13 octobre 1988, Delta Chemie/DDD, LawLex200400003492JBJ.

Décision Comm. CE nº 78-253 du 23 décembre 1977, Campari, LawLex200300001205JBJ ; nº 88-143 du 22 décembre 1987, Rich Products-Jus-rol, LawLex200300001140JBJ ; nº 88-563 du 13 octobre 1988, Delta Chemie/DDD, LawLex200400003492JBJ.

Décision Comm. CE nº 1999-6 du 14 décembre 1998, Sicasov, LawLex200200003675JBJ.

CJCE, 8 juin 1982, LC Nungesser (KG), aff. 258-78, LawLex200200004086JBJ, Gaz. Pal., 1983, 407, note BURST et KOVAR ; JCP E, 1984, I, 13389, obs. BONET et BLAISE ; D. 1984, 132-133, note Plaisant ; ECLR, 1983, 103, note TURNER ; Cah. dr. eur., 1983, 176, note VAN BAEL.

CJCE, 25 février 1986, Windsurfing international Inc, aff. 193-83, LawLex200300000778JBJ.

Décision Comm. CE nº 79-86 du 10 janvier 1979, Vaessen/Moris, LawLex200500003715JBJ.

Décision Comm. CE nº 76-29 du 2 décembre 1975, AOIP / Beyrard, LawLex200200004129JBJ.

Décision Comm. CE nº 88-555 du 11 octobre 1988, Continental/Michelin, LawLex200400002707JBJ.

CJCE, 12 mai 1989, Kai Ottung c. Klee & Weilbach A/S, aff. 320-87, LawLex200500003714JBJ.

TUE, 12 décembre 2018, Teva UK, aff. T-679/14, LawLex202000001905JBJ, qui exclut le caractère restrictif de concurrence de ces clauses lorsque leur insertion est justifiée par la reconnaissance par les partie de la validité du brevet et le caractère contrefaisant des produits génériques concernés, le caractère anticoncurrentiel de l'accord de règlement amiable supposant à la fois un avantage incitatif à l'égard de la société productrice de génériques et d'une limitation corrélative des efforts de celle-ci à faire concurrence au producteur du princeps.

CJCE, 18 février 1971, Sirena Srl c. Eda Srl, aff. 40-70, LawLex200200006278JBJ ; 15 juin 1976, EMI records limited c. CBS Grammofon A/S, aff. 86-75, LawLex200300003224JBJ ; 14 septembre 1982, Keurkoop BV c. Nancy Kean Gifts BV, aff. 144-81, LawLex200300003150JBJ.

Décision Comm. CE nº 77-129 du 21 décembre 1976, Theal-Watts, LawLex200300001004JBJ ; CJCE, 20 juin 1978, Tepea (BV), aff. 28-77, LawLex200200004110JBJ. - V. égal., pour un droit d'obtention végétale, Décision Comm. CE nº 78-823 21 septembre 1978, Droit d'obtention - semences de maïs, LawLex200300001035JBJ ; CJCE, 8 juin 1982, LC Nungesser (KG), aff. 258-78, LawLex200200004086JBJ.

CJUE, 4 octobre 2011, Football Association Premier League LTD, aff; C-403-08, LawLex201100001542JBJ.

V. égal. TUE, 12 décembre 2018, Groupe Canal + SA, aff. T-873-16, LawLex201800001901JBJ, Europe 2019, n° 87 et RDC 2019/2, 70, obs. IDOT ; Concurrences 2/2019, 70, obs. DEBROUX, retenant que si le titulaire de droits d'auteur peut concéder à un licencié unique le droit exclusif de radiodiffuser par satellite, pendant une période déterminée, un objet protégé en vertu d'un tel droit à partir d'un seul État membre d'émission ou à partir de plusieurs États membres, les clauses de l'accord ne peuvent, sans enfreindre l'article 101, paragraphe 1, TFUE, prévoir qu'il s'oblige à interdire à tous ses cocontractants sur le marché de l'EEE de procéder à des ventes passives à destination des marchés géographiques situés en dehors de l'État membre pour lequel il leur accorde une licence exclusive.

Décision Comm. CE nº 94-770 du 6 octobre 1994, Pasteur Mérieux-Merck, LawLex200300000506JBJ.

Décision Comm. CE nº 91-38 du 12 décembre 1990, KSB/Goulds/Lowara/ITT, LawLex200400002700JBJ.

CJCE, 29 février 1968, Parke, Davis and Co. c. Probel, aff. 24-67, LawLex200500003716JBJ.

TUE, 8 septembre 2016, H. Lundbeck A/S, aff. T-472-13, LawLex201600001392JBJ, Europe 2016, n° 408 et RDC 2017, 116, obs. IDOT ; Concurrences 4/2016, 90, obs. BERNARDEAU. V. également, sur les accords de règlement amiable de litiges en matière de brevet, TUE, 12 décembre 2018, Lupin Ltd, aff. T-680/14, LawLex201800001906JBJ, Mylan Laboratories Ltd, aff. T-682/14, LawLex201800001907JBJ, et sur pourvoi, CJUE, 27 juin 2024, Mylan Laboratories Ltd et Mylan Inc., aff. C-197/19 P, LawLex202400004771JBJ, qui retient que si ces accords peuvent n'avoir aucune incidence négative sur la concurrence, tel n'est pas le cas de l'accord par lequel une société de génériques accepte des restrictions de sa capacité et de ses incitations à rivaliser avec ses concurrents en échange d'un transfert de valeur, sous la forme du versement d'une somme d'argent significative ou d'une autre incitation significative, comportant des clauses de non-contestation des brevet et de non-commercialisation des produits contrefaisant ces brevets, l'existence d'une incitation des sociétés de génériques à se soumettre à ces clauses permet de constater une restriction par objet, même s'il existe un véritable litige, que la portée des clauses de non-contestation et de non-commercialisation est limitée au brevet litigieux et que ce dernier peut légitimement être estimé valide par les parties à l'accord au moment de son adoption ; CJUE, 1re ch., 27 juin 2024, Servier SAS, aff. C-176/19 P, LawLex202400004765JBJ, qui rappelle que si la conclusion par le titulaire d’un brevet d’un accord de règlement amiable d’un litige avec un fabricant de médicaments génériques accusé de contrefaçon constitue certes l’expression du droit de propriété intellectuelle de ce titulaire et l’autorise, notamment, à s’opposer à toute contrefaçon, il n’en demeure pas moins que ledit brevet n’autorise pas son titulaire à conclure des contrats qui violeraient l’article 101 TFUE.

CJUE, 25 mars 2021, Merck KGaA et Generics (UK) Ltd, aff. C-614/16 P, LawLex202100000884JBJ ; Xellia Pharmaceuticals ApS at Alpharma LLC, aff. C-611/16 P, LawLex202100000881JBJ.

TPICE, 16 décembre 1999, Micro Leader Business, aff. T-198-98, LawLex200200003603JBJ.

Décision Comm. CE nº 90-186 du 23 mars 1990, Moosehead/Whitbread, LawLex200400002856JBJ ; nº 90-410 du 13 juillet 1990, Elopak/Metal Box - Odin, LawLex200200004007JBJ.

CJUE, 7 juillet 2016, Genentech Inc, aff. C-567-14, LawLex201600001249JBJ, Contrats Conc. Consom. 2016, n° 220 et RJ com. 2016, 461, obs. DECOCQ ; Europe 2016, n° 354, obs. IDOT ; Concurrences 4/2016, 83, obs. CHONE-GRIMALDI ; Concurrences 4/2016, 158, obs. LACRESSE ; JECLAP 2016, 679, obs. HOPSON ; LPA 2 mai 2017, 6, obs. ARHEL.

Décision Comm. CE nº 78-253 du 23 décembre 1977, Campari, LawLex200300001205JBJ, pour une clause imposant au licencié de suivre les instructions du concédant relatives à la fabrication.

Droit européen de la concurrence

166. Droits de propriété intellectuelle et libre concurrence.(1)

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