Le Droit de la concurrence, premier tome du Traité de droit économique, expose, en deux livres (Tome 1/2. Droit européen ; Tome 2/2. Droit français) l’ensemble des règles de concurrence : ententes et abus de domination, procédure de concurrence, concentrations, aides d’État, négociation commerciale, et concurrence déloyale.

Droit français de la concurrence

L'article L. 442-6 (ancien art. L. 442-5) du Code de commerce prohibe per se le fait pour toute personne d'imposer, directement ou indirectement, un caractère minimal au prix de revente d'un produit ou d'une prestation de services, ou à une marge commerciale. La liberté des prix instaurée par l'ordonnance de 1986 suppose la libre détermination du prix de vente par le revendeur. Ce principe s'impos …

Prohibition de la pratique de prix minimum imposés.

V. ACHACH, L'interdiction des prix imposés, survivance d'une conception désuète du droit de la concurrence ou application réaliste du principe nouveau de ce droit ? Rev. Conc. Consom., 1987, nº 40, 25 ; LEPAGE, Distribution sélective : une défense économique des clauses de prix imposés, RRJ, 1987, 523 ; JENNY, Pratiques restrictives, concurrence et efficience, Cah. dr. entr., 1999, nº 4, 5 ; GRANIER, Prix imposés, prix conseillés : le contrat de franchise à l'épreuve du droit de la concurrence, RTD com., 1991, 357 ; ARHEL, Prix imposés : les motifs économiques de l'interdiction, Rev. Conc. Consom., 1992, nº 68, 13 ; DELBARRE, Réglementation des prix imposés : pour la retraite à 40 ans, RJDA, 1993, 167 ; ARHEL, Lutte contre les pratiques de prix imposés en Europe, JCP E, 2000, 1799 ; DAVID, La complexité des choses simples : la fixation du prix de revente et le droit des ententes, RID éco., 2005, 389 ; OLBRICH et BUHR, Who benefits from the prohibition of resale price maintenance in European Competition Law? The case of food retailing, ECLR, 2005, 705 ; SÉLINSKI et MONTET, États-Unis : revirement sur les prix minima imposés, RLC, 2007/13, 14 ; ALESE, Unmasking the masquerade of vertical price fixing, ECLR, 2007, 514 ; KNEEPKENS, Resale price maintenance: Economics call for a more balanced approach, ECLR, 2007, 656 ; SPECTOR, Minimum resale prices: is a ban justified?, Concurrences, 3/2007, 28 ; AMARO, Les prix imposés en droit de la concurrence : un "pêché majeur" ?, AJCA 2015, 296 ; BENZONI, Le contrôle du niveau des prix : aspects économiques, AJCA 2015, 310 ; VIALA, Le contrôle du niveau des prix : aspects juridiques, AJCA 2015, 307 ; LAMBERT, La prohibition du "prix imposé" par l'article L. 442-6 du Code de commerce est-elle toujours nécessaire ?, JCP G 2019, n° 682 ; VOGEL, Prix imposés et droit de la concurrence : plaidoyer pour une réforme, in Mélanges Picod, Lefebvre Dalloz 2023, 405.

L'article L. 442-6 (ancien art. L. 442-5) du Code de commerce prohibe per se le fait pour toute personne d'imposer, directement ou indirectement, un caractère minimal au prix de revente d'un produit ou d'une prestation de services, ou à une marge commerciale. La liberté des prix instaurée par l'ordonnance de 1986 suppose la libre détermination du prix de vente par le revendeur. Ce principe s'impose à toute personne, fournisseur, grossiste, importateur, État, et vise tous les contrats, vente ou prestation de services. Le texte édicte ainsi une prohibition générale également applicable aux vendeurs étrangers qui interviennent sur le territoire français. Toutefois, comme toute règle pénale, il est d'interprétation stricte. Aussi bien, les prix ou marges maxima, ou les prix conseillés sont-ils exclus du champ d'application de l'interdiction dès lors que le revendeur dispose d'une marge de manœuvre et ne subit aucune pression de la part du fournisseur. De même, une clause qui a pour effet d'empêcher la distribution gratuite d'un produit ou d'un service ne peut  être assimilée à l'imposition d'un prix minimal ou d'une marge  commerciale minimale .

La légitimité de l'interdiction per se de la pratique de prix minimum imposé a été contestée en doctrine. Dans certains cas, des prix minima pourraient être justifiés d'un point de vue économique, notamment en cas de lancement de nouveaux produits. En outre, l'interdiction per se des prix minima imposés au titre des pratiques restrictives paraît délicate à maintenir dès lors que le droit des pratiques anticoncurrentielles ne les condamne pas lorsque les distributeurs auxquels de tels prix sont imposés ne sont pas situés sur la même zone de chalandise . Enfin, la jurisprudence relative à la sanction pénale des prix minimums imposés est en général assez ancienne. Elle applique des critères qui apparaissent aujourd'hui décalés par rapport au triple test, appliqué par les autorités de concurrence, qui implique que les prix soient conseillés ou discutés, qu'ils soient appliqués de manière significative et fassent l'objet d'une police des prix ou d'une intervention en vue de les faire respecter. En pratique, l'incrimination pénale des prix de vente imposés est quasiment tombée en désuétude . Cependant, elle demeure inscrite dans les textes et une application au cas d'espèce apparaît toujours possible.

La réforme du droit des pratiques restrictives par l’ordonnance 2019-359 du 24 avril 2019 a laissé sans changement de fond l’incrimination per se des prix imposés, désormais interdits par l’article L. 442-6 au lieu de l’être sur la base de l’article L. 442-5. Il s’agissait pourtant de la règle qui correspondait le mieux au but de l’article 17, I, 1° de la loi EGalim autorisant le gouvernement à supprimer “ les dispositions devenues sans objet ”. L’obsolescence de cette disposition devrait conduire à son abrogation pure et simple , ce d’autant plus qu’elle fait double emploi sur le plan pénal avec l’article L. 420-6 du Code de commerce qui sanctionne le fait de prendre frauduleusement une part personnelle et déterminante dans la conception, l’organisation ou la mise en oeuvre de pratiques visées aux articles L. 420-1, L. 420-2 et L. 420-2-2.

Paris, 18 novembre 2020, LawLex202000003120JBJ.

Lorsque les distributeurs ne sont pas situés dans la même zone de chalandise, le Conseil de la concurrence exclut la qualification de prix imposés illicites : V. not. Décision Cons. conc. nº 97-D-48 du 18 juin 1997, LawLex200200002657JBJ ; nº 03-D-39 du 4 septembre 2003, LawLex200300003480JBJ. Contra : un courant de jurisprudence minoritaire a vu le jour qui, dans le secteur des aliments secs haut de gamme pour chiens, refuse de tenir compte, pour une relation verticale, du fait que les revendeurs sont situés dans les zones de chalandise différentes, Paris, 4 avril 2006, LawLex200600001057JBJ, Concurrences n° 3-2006, 140, obs. MICHEL-AMSELLEM ; Concurrences 3/2006, 95, obs. SPECTOR et WACHSMANN ; RLC 2006/8, n° 546, obs. WINCKLER et GENEVAZ ; RJDA, 2006, n° 837. S'agissant d'une décision isolée, il est difficile de savoir s'il s'agit d'un revirement de jurisprudence.

V. Bilan de jurisprudence civile et pénale de la DGCCRF pour l'année 2017 : au plan pénal, la DGCCRF ne comptabilise aucun PV d'infraction, transaction ou jugement au cours de l'exercice. Au plan civil, le Bilan de jurisprudence de la Faculté de Montpellier pour 2017 ne recense, pour cette année, qu’une décision.

En ce sens déjà, DELBARRE, “Réglementation des prix imposés : pour la retraite à 40 ans”, RJDA 1993, 167. - L. et J. VOGEL, Droit de la négociation commerciale : une réforme courageuse mais perfectible, AJ Contrat, 2019, 208.

Une seule exception à l'interdiction des prix imposés a été introduite par le législateur. Tout éditeur ou tout importateur de livres a en effet l'obligation de fixer un prix de vente au public, sur lequel le distributeur ne peut accorder qu'une remise maximale de 5 % . En outre, le texte de l'article L. 442-6 (ancien art. L. 442-5) devant s'interpréter strictement, le fait pour un producteur, un importateur ou un grossiste de recommander au détaillant un prix de revente ne tombe pas sous le coup de la prohibition de l'article L. 442-6 s'il ne revêt aucun caractère obligatoire. Cependant, la dénomination prix “conseillés” ou “indicatifs” ne doit pas avoir pour effet de tourner par un biais l'interdiction de prix minimum . Si tel est le cas, le délit de l'article L. 442-6 est caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériel qu'intentionnel .

L. 81-766 du 10 août 1981, mod. L. 85-500 du 13 mai 1985.

Cass. crim., 25 novembre 1991, LawLex200200000303JBJ ; Gaz. Pal., 1992, 1, somm. 166 ; 22 août 1995, LawLex200200000302JBJ, RJDA, 1996, nº 77.

Droit français de la concurrence

274. Prohibition de la pratique de prix minimum imposés.(1)

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