Le Droit de la concurrence, premier tome du Traité de droit économique, expose, en deux livres (Tome 1/2. Droit européen ; Tome 2/2. Droit français) l’ensemble des règles de concurrence : ententes et abus de domination, procédure de concurrence, concentrations, aides d’État, négociation commerciale, et concurrence déloyale.

Droit français de la concurrence

La loi du 19 juillet 1977 n'avait institué qu'un contrôle sélectif des opérations de concentration, dont le déclenchement était subordonné au franchissement de certains seuils quantitatifs. Dès l'origine, le caractère conjoncturel de cette législation était souligné  : les circonstances de son adoption incitaient à penser qu'elle avait pour objet essentiel d'entraver l'essor de la proposition euro …

Origines et spécificité du système de contrôle français.

V. sur la loi du 19 juillet 1977 : JEANTET, La loi sur le contrôle des concentrations économiques en France, JCP CI, 1977, 12547, 461 ; PLAISANT, LASSIER, EPSTEIN, Le contrôle des concentrations en France : la loi nº 77-806 du 19 juillet 1977, D., 1978, chron. 99 ; GAVALDA, Le contrôle des concentrations d’entreprises selon la loi française nº 77-806 du 19 juillet 1977, Rev. soc., 1979, 473 ; LYON-CAEN, Le contrôle des concentrations : étude de la loi française et de la proposition européenne, RTD eur., 1979, 440 ; Le contrôle des opérations de concentration depuis 1977, RTD com., 1980, 421, obs. CHAMPAUD ; BOLZÉ, L’inefficacité du Titre II de la loi du 19 juillet 1977 sur le contrôle des concentrations ou le naufrage du droit antitrust français, in Hommage à René Roblot : Le contrôle des concentrations d’entreprises, LGDJ, 1995, 181. Sur la loi du 30 décembre 1985 : BURST, FERRIER, MOMÈGE, MOUSSERON, SÉLINSKY, Montagne ou souris - Commentaire de la loi du 30 décembre 1985 portant amélioration de la concurrence, JCP G, 1986, II, 14682. Sur l’ordonnance du 1er décembre 1986 : VOGEL, Le contrôle direct des opérations de concentration économique depuis l’ordonnance du 1er décembre 1986, JCP E, 1988, II, 15115. Sur la loi NRE : BRUNET et GIRGENSON, Le nouveau régime de contrôle des concentrations : les ambivalences d’une “révolution antitrust” à la française, D., 2002, 1638 ; CARAMALLI, L’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation relative au contrôle des concentrations en droit français, LPA, 16 mai 2002, nº 98, 4 ; VILMART et FOURGOUX, Le nouveau contrôle des concentrations en droit français, Gaz. Pal., 3 février 2002, 3 ; L. et J. VOGEL, Quelles sont les incidences du nouveau droit français des concentrations pour les entreprises ?, D., 2002, 1163. Sur la loi LME : ARHEL, Loi de modernisation de l’économie : une nouvelle réforme du droit de la concurrence, LPA, 7 août 2008, 3 ; CHEYNEL, Avant-projet d’ordonnance portant création de l’Autorité de la concurrence. Présentation synthétique, RLC, 2008/16, 64 ; DEBROUX, La création d’une Autorité de la concurrence aux compétences élargies : une réforme majeure et quelques scories, Contrats Conc. Consom., juillet 2008, Alerte 45 ; DUFOUR, Quand le Conseil de la concurrence s’apprête à laisser la place à l’Autorité de la concurrence. La plus importante réforme de la concurrence depuis 1986, Gaz. Pal., 12-17 juillet 2008, 2 ; VILMART, Réflexions sur le projet d’ordonnance portant création de l’Autorité de la concurrence, JCP E, 2008, 326, 3 ; VILMART et LEGUIN, La loi de modernisation de l’économie du droit français de la concurrence, JCP E, 2008, 1997, 17 ; LASSERRE, Vers un contrôle indépendant des concentrations économiques, RLC, 2009/21, 102 ; BOSCO, Un an après la loi LME, quelle continuité du droit français des concentrations ?, Contrats Conc. Consom., 2010, repère n° 6. Sur les Lignes directrices relatives à l’analyse des concentrations : PONSARD et MARCINKOWSKI, Le projet de lignes directrices de la DGCCRF, les points délicats lors du contrôle des opérations de concentration (Présentation générale), Contrats Conc. Consom., 2003, chron. n° 3 ; L. et J. VOGEL, Le projet français de lignes directrices relatives à l’analyse des concentrations et aux procédures de contrôle, JCP E, 2003, 502 ; MONTALCINO, Les nouvelles lignes directrices du régime interne des concentrations, Concurrences, 3/2005, 60 ; PELLET et CUZIAT, Lignes directrices sur les concentrations nationales : un guide pratique à l’usage des entreprises, RLC, 2006/6, nº 4109 ; ANADON, Lignes directrices de l’Autorité de la concurrence relatives au contrôle des concentrations, RLDA, 2010/46, 33 ; PALOMINO, Aspects économiques du contrôle des concentrations : ce que nous indiquent les lignes directrices de l’Autorité de la concurrence par rapport à l’approche communautaire, RLC, 2010/23, 9 ; VILMART, L’intérêt des lignes directrices pour réduire l’imprévisibilité des sanctions en droit de la concurrence, JCP E, 2010, 130 ; JAUNET, SARRAZIN, KERBRAT, Lignes directrices de l’ADLC relatives au contrôle des concentrations : panorama des principales dispositions, Contrats Conc. Consom., 2010, étude n° 8 ; LASSERRE, Trois ans de contrôle des concentrations par l'Autorité de la concurrence : Bilan et perspectives, Concurrences, 3/2012, n° 48163 ; JALABERT DOURY et de MUIZON, Quatre années de contrôle des concentrations par l’Autorité de la concurrence, bilan et perspectives, RLC, 2013/34, 91 ; REDON et COURSIERE-PLUNTZ, Révision des lignes directrices relatives au contrôle des concentrations, BRDA, 17/13, 16 ; REDON et EL DINE-POMAR, Lignes directrices révisées en matière de concentrations : précisions sur les opérations notifiables et le risque financier, D., 2013, 2540 ; VILMART, Les nouvelles lignes directrices sur le contrôle des concentrations, Contrats Conc. Consom., 2013, étude, 13 ; De SILVA, La modernisation et la simplification du contrôle des concentrations, étude, JCP E 2018, 460 ; CHARPIN et POUILLE, Fusions horizontale : deux pistes d'amélioration du contrôle des concentrations, RLC 2019/80, n° 3526 ; COURSIERE-PLUNTZ, REDON et LORIEUL, Contrôle des concentrations - Quelles évolutions dans la pratique de l'Autorité de la concurrence ?, JCP E 2020, étude, 21 ; ERESEO, Le banquier et le droit de la concurrence : retour sur une singulière exclusion, Mélanges en l'honneur de Jean-Patrice et Michel Storck, Dalloz/Joly, 2021, 239.

La loi du 19 juillet 1977 n'avait institué qu'un contrôle sélectif des opérations de concentration, dont le déclenchement était subordonné au franchissement de certains seuils quantitatifs. Dès l'origine, le caractère conjoncturel de cette législation était souligné  : les circonstances de son adoption incitaient à penser qu'elle avait pour objet essentiel d'entraver l'essor de la proposition européenne portant sur le même sujet. Le contrôle ainsi créé n'eut qu'une efficacité limitée : entre 1977 et 1987, la Commission de la concurrence ne fut saisie qu'à neuf reprises et ne rendit que huit avis ; durant cette période, un seul arrêté ministériel enjoignit à une société de ne pas donner suite au projet de concentration qu'elle avait formé . Prenant acte de l'inefficacité pratique du système de contrôle de la concentration, la loi du 30 décembre 1985 “portant amélioration de la concurrence” apporta différentes modifications au texte originaire en vue d'élargir son champ d'application.

Parallèlement à une réforme d'ensemble du droit de la concurrence, l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence inaugurait un nouveau système de contrôle des opérations de concentration en France (Titre V de l'ordonnance). Bien qu'elle abroge la loi du 19 juillet 1977, cette ordonnance n'a pas marqué de véritable rupture. Pour faire face au renversement du rapport des forces entre le secteur de la production et celui de la distribution , les rédacteurs de l'ordonnance ont d'emblée rejeté toute modification substantielle des règles relatives à la concentration et se sont contentés d'élargir le champ d'application du contrôle en l'adaptant aux caractéristiques spécifiques des grandes entreprises de distribution. Leur prudence se manifeste également sur le plan institutionnel. En dépit des demandes de certains des membres du groupe d'experts chargé de rédiger le projet d'ordonnance, le Conseil de la concurrence - qui a remplacé la Commission de la concurrence -, n'a pas été doté, en matière de concentration, d'un véritable pouvoir de décision. À l'inverse de l'évolution institutionnelle constatée en matière d'ententes et d'abus de domination, le ministre a même vu ses pouvoirs renforcés - au détriment de ceux du Conseil de la concurrence - au motif que les considérations de politique économique et sociale sont, dans le domaine du contrôle de la concentration, plus impérieuses.

La loi 2001-420 du 15 mai 2001 a modifié les dispositions de l'ordonnance de 1986 incluses dans le Code de commerce (art. L. 430-1 s. applicables aux opérations engagées irrévocablement postérieurement à la date de publication du décret d'application du titre III relatif aux concentrations). Cette modification a eu principalement pour objet d'aligner le droit français des concentrations sur le droit européen. En particulier, la notification devient préalable et obligatoire, une procédure à deux vitesses est instituée et la définition européenne de l'entreprise commune est adoptée. Néanmoins, la spécificité du système français de contrôle des concentrations, qui justifie qu'il ne puisse être cumulé avec un contrôle fondé sur le droit des ententes , demeure. Dans la mesure où il est conçu pour faire une large part aux appréciations d'opportunité, le contrôle organisé sous l'empire de la loi NRE est essentiellement de nature administrative : le ministre est le maître de la procédure ; le Conseil de la concurrence ne dispose que d'un pouvoir consultatif ; la répression pénale est absente.

La loi LME du 4 août 2008 modifie les dispositions du Code de commerce sur le contrôle des concentrations sur deux plans. Sur le fond, le nouvel article L. 430-2 pose d'abord des règles spécifiques aux concentrations dans la grande distribution. Le texte revoit ensuite les conditions du contrôle des opérations se déroulant outre-mer, auparavant limité au secteur de la distribution, en étendant leur champ d'application à toute opération répondant aux seuils de contrôlabilité, quel que soit le secteur dans lequel elle intervient. 

Sur la forme, l'ensemble de la procédure de contrôle des concentrations relève désormais de la compétence de l'Autorité de la concurrence, qui remplace le Conseil de la concurrence. Le ministre de l'Économie conserve cependant un pouvoir important : dès qu'il est informé de la décision de l'Autorité de la concurrence, le ministre dispose, dans un délai de cinq jours ouvrés, du droit de demander un examen approfondi de l'opération, s'il n'y a pas été procédé, et, dans un délai de vingt-cinq jours, d'un droit d'évocation pour des motifs d'intérêt général autres que le maintien de la concurrence, tels que le développement industriel, la compétitivité des entreprises en cause, la création ou le maintien de l'emploi. 

Enfin, si l'Autorité de la concurrence procède à l'examen approfondi d'une opération dans le secteur bancaire, le secteur des assurances ou celui de l'audiovisuel, elle doit, dans les deux premiers cas, recueillir l'avis de l'Autorité de contrôle prudentiel et, dans le dernier, celui du Conseil supérieur de l'audiovisuel. 

V. LYON-CAEN, Le contrôle des concentrations : étude de la loi française et de la proposition européenne, RTD eur., 1979, 1 et 440.

Arrêté du 19 juin 1984, Ashland Chemical France SA-Cabot Corporation, Rapport pour 1984, 47.

Avis Comm. conc. du 14 mars 1985 relatif aux centrales d'achat et à leurs regroupements, LawLex200300001300JBJ, Rapport pour 1985, 19.

En ce sens, Paris, 28 juin 1994, LawLex200200002039JBJ, BOCC, 14 juillet 1994, 268 ; Contrats Conc. Consom., 1994, nº 169, obs. VOGEL.

Droit français de la concurrence

589. Origines et spécificité du système de contrôle français.(1)

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