Procédures collectives

L'article L. 654-2, 2° du Code de commerce sanctionne le fait d'avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif du débiteur par une mesure de banqueroute. Le délit est constitué lorsqu'un dirigeant cède les actifs de la société débitrice sans contrepartie , ou les revend à titre personnel et tire profit de leur vente , en dissimulant aux créanciers le produit de cette vente . Se rend égaleme …

Détournement d'actif

L'article L. 654-2, 2° du Code de commerce sanctionne le fait d'avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif du débiteur par une mesure de banqueroute. Le délit est constitué lorsqu'un dirigeant cède les actifs de la société débitrice sans contrepartie , ou les revend à titre personnel et tire profit de leur vente , en dissimulant aux créanciers le produit de cette vente . Se rend également coupable de banqueroute, le dirigeant qui s’octroie des rémunérations excessives au regard de la situation financière dégradée de la société débitrice , ou qui effectue des prélèvements excédant le montant de son compte courant d'associé  et encaisse sur ses comptes bancaires privés des sommes destinées à la société . Les transactions effectuées par le dirigeant avec les fonds ou les actifs de la société débitrice au profit d'autres sociétés qu'il dirige  ou dans lesquelles il détient des intérêts, soit directement, soit par personne interposée , peuvent également relever de l'article L. 654-2, 2°. 

La banqueroute par détournement d'actifs présente beaucoup de similarités avec le délit d'abus de bien sociaux sanctionné par les articles L. 241-3 et L. 242-6 du Code de commerce. La jurisprudence estime en effet que les mêmes faits peuvent revêtir la qualification d''abus de biens sociaux pour la période antérieure à la cessation des paiements et de banqueroute par détournements d'actifs pour la période suivante. Il en va ainsi, en particulier, lorsqu'un dirigeant, qui, par sa formation comptable, ne pouvait ignorer les risques encourus, a émis des chèques sans indication de destinataire, en rémunération de contrats de travail fictifs, bénéficiant à des tiers auxquels il était attaché par des liens patrimoniaux . De même, le dirigeant qui fait supporter par la société un salaire pour un travail fictif effectué par son épouse et qui abandonne des créances, sans contrepartie ni aucune garantie sérieuse de remboursement, au profit d'autres sociétés du groupe, se rend coupable d'abus de bien sociaux et de banqueroute par détournement d’actifs . L'assimilation des deux infractions s'arrête cependant là : en effet, alors que le délit d'abus de biens sociaux peut, au sein d'un groupe de sociétés, être justifié par l'intérêt du groupe, cette excuse n'est pas admise en matière de banqueroute .

La Cour de cassation a souligné que le délit de banqueroute par détournement d'actif n'implique pas que l'élément d'actif ait définitivement disparu du patrimoine soit par une destruction, soit par un acte de disposition, mais seulement qu'il ait  été volontairement caché ou soustrait de façon à empêcher qu'il ne soit appréhendé au profit des créanciers. Il peut dès lors être caractérisé par la  tentative, non menée à terme, de transmettre l'actif en cause à un tiers par constitution d'une fiducie .

L’élément intentionnel du délit de détournement d’actifs est constitué par la découverte d’une partie de l'actif de la société débitrice au domicile du dirigeant, qui démontre une volonté de soustraire ces actifs aux créanciers .  Il en va de même du professionnel indépendant, qui, de mauvaise foi, détourne une somme faisant partie de son actif personnel afin de le soustraire aux poursuites de ses créanciers, en omettant de le remettre aux organes de la liquidation judiciaire . 

Cass. crim., 3 octobre 1996, LawLex202200009140JBJ (LJ). 

Cass. crim., 9 février 2022, LawLex202200002255JBJ (LJ). - V. égal. Cass. crim., 20 octobre 2004, LawLex202100002015JBJ (LJ).

Cass. crim., 23 mai 2013, LawLex202100001896JBJ (LJ) ; 27 avril 2000, LawLex202100002035JBJ (RJ).

Cass. crim., 25 octobre 2023, LawLex202400001229JBJ (LJ), JCP E 2024, n° 1078, obs. SALOMON ; Gaz. Pal. 19 mars 2024, 79, obs. EECKHOUDT ; Gaz. Pal. 2 avril 2024, 57, obs. SAENKO ; RJDA 2024, n° 55.

Cass. crim., 30 novembre 1987, LawLex202100002772JBJ (LJ). 

Cass. crim., 21 mars 2018, LawLex202200000408JBJ (LJ). 

Cass. crim., 29 mars 2000, LawLex202100002773JBJ (LJ). - V. égal. a contrario, s'agissant d'un exploitant à titre individuel qui avait vendu des actifs de son patrimoine personnel à un prix raisonnable et affecté le produit de cette vente au paiement des créanciers, sans dissimuler la cession aux organes de la procédure, Cass. crim., 13 novembre 1989, LawLex202300008717JBJ.

Cass. crim., 18 juin 1998, LawLex202100002008JBJ (LJ). 

Cass. crim., 12 septembre 2018, LawLex202100001886JBJ (RJ). - V. égal. Cass. crim., 5 mars 2014, LawLex202100002022JBJ (LJ), estimant que les prélèvements effectués dans les caisses d'une entreprise ne disposant pas, dès l'origine, des sommes nécessaires au financement de son fonds de roulement et à la mise en œuvre des mesures de redéploiement industriel du site racheté, pour couvrir des dépenses étrangères à son exploitation ou à sa reconversion, constituent le délit de banqueroute par détournement d'actifs, dès lors qu'ils sont dépourvus de cause économique sérieuse au regard de l'intérêt social et ont provoqué l'état de cessation des paiements de la société ; 3 octobre 1997, LawLex202100002007JBJ (LJ), pour des versements dont il n'est pas justifié qu'ils constituent un remboursement de sommes avancées en vue d’une augmentation de capital restée à l’état de projet.

Cass. crim., 12 septembre 2018, LawLex202100001886JBJ (RJ). - V. égal. Cass. crim., 8 mars 2017, LawLex202300009047JBJ (LJ), sanctionnant l'encaissement, par le dirigeant, d'un chèque destiné à la société débitrice sur le compte d’une société dirigée par son frère ; 20 avril 2017, LawLex202100001891JBJ (LJ), pour l'encaissement d'un chèque ne correspondant, ni par son montant, ni par sa date, à un salaire.

Cass. crim., 23 octobre 1997, LawLex202100002009JBJ (RJ) ; 5 août 1998, LawLex202200010837JBJ (LJ), Rev. sociétés 1999, 175, obs. BOULOC ; 27 juin 2018, LawLex202100001887JBJ (LJ).

Cass. crim., 11 mai 1995, LawLex202200009139JBJ (LJ) ; 16 octobre 2019, LawLex202100001885JBJ (LJ).

Cass. crim., 14 décembre 2000, LawLex202200009269JBJ (LJ). 

Cass. crim., 20 février 2008, LawLex202100002018JBJ (LJ). 

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