Procédures collectives

La date de cessation des paiements peut être reportée une ou plusieurs fois , sans pouvoir être antérieure de plus de dix-huit mois à la date du jugement d'ouverture de la procédure . Le juge peut, sans excéder ses pouvoirs ni méconnaître l'objet du litige qui lui est soumis, souverainement reporter la date de cessation à une date autre que celle préconisée par le liquidateur judiciaire . En revan …

Report de la date de cessation des paiements

La date de cessation des paiements peut être reportée une ou plusieurs fois , sans pouvoir être antérieure de plus de dix-huit mois à la date du jugement d'ouverture de la procédure . Le juge peut, sans excéder ses pouvoirs ni méconnaître l'objet du litige qui lui est soumis, souverainement reporter la date de cessation à une date autre que celle préconisée par le liquidateur judiciaire . En revanche, la date de cessation des paiements ne peut être reportée à une date antérieure à celle d’un arrêt revêtu de l'autorité de la chose jugée qui avait retenu que le débiteur ne se trouvait pas en cessation des paiements à la date où la cour statuait , ni à une date où la société débitrice n'était pas encore immatriculée . De même, sauf cas de fraude, l'article L. 631-8 prévoit que la date de cessation des paiements ne peut être reportée à une date antérieure à la décision définitive ayant homologué un accord amiable à l'issue d'une procédure de prévention des difficultés . En revanche, l'ouverture d’une procédure de conciliation au profit du débiteur n'empêche pas le report de la date de cessation des paiements à une date antérieure en cas d’échec de celle-ci . En effet, dans une telle hypothèse, la décision qui ouvre la procédure de conciliation du débiteur n'est pas revêtue de l'autorité de chose jugée quant à la date de cessation des paiements . 

Le juge saisi d'une demande de report de la date de cessation des paiements doit, pour apprécier la situation, se placer, non au jour où il statue, mais à celui auquel le report est envisagé . Afin de reporter la date de cessation des paiements, les juges du fond peuvent se fonder sur tous les renseignements contenus dans le rapport d’un expert, même s'il ne vaut pas rapport d'expertise judiciaire, lorsqu'il a été régulièrement versé aux débats et soumis à discussion contradictoire . Lorsqu'il reporte la date de cessation des paiements d'un groupe de sociétés, le juge doit constater que le montant des actifs disponibles à la date qu'il retient ne permettait pas à chacune des sociétés de faire face à son passif exigible .

Le report de la date de cessation des paiements apparaît justifié lorsqu'il est établi qu'à la date initialement fixée, le débiteur bénéficiait d’une réserve de crédit qui lui permettait de faire face à son passif exigible . Même en l'absence de faits nouveaux, une demande de report de la date de cessation des paiements peut être présentée sur le fondement d'une nouvelle analyse d'éléments déjà connus, dont il ressort que l'impossibilité de faire face au passif exigible avec l'actif disponible était caractérisée à la nouvelle date proposée . La date de cessation des paiements peut être reportée à une date antérieure à celle de l'arrêt total du service de caisse lorsqu'il est établi que le débiteur n'a pu honorer ses paiements jusqu'à cette date qu'à l'aide d'un crédit artificiel et illégitime . Mais la date de la cessation des paiements peut également être reportée au jour où le créancier demande effectivement le paiement d'une créance antérieurement exigible . Pour la détermination de la date de report, seules peuvent être exclues du passif exigible les dettes incertaines, telle une  créance litigieuse dont le sort définitif est lié à une instance pendante devant un juge du fond ou résultant d'une décision susceptible de recours . En revanche, le seul fait qu'une créance soit contestée par le débiteur, en défense à une demande tendant au report de la date de cessation des paiements, ne suffit pas à la rendre litigieuse .

Le juge ne peut reporter la date de cessation des paiements du débiteur à une date antérieure à celle initialement fixée sans rechercher si le débiteur bénéficiait d'un actif disponible suffisant pour faire face au passif exigible à cette date, tel que des liquidités , un compte bancaire affichant un solde créditeur disponible, postérieurement à la date de report demandée  ou des moratoires fiscaux et sociaux ainsi que des concours bancaires . Ne suffisent pas à démontrer que le débiteur se trouvait dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, à la date de report demandé, les déclarations de créances de l'URSSAF et des organismes sociaux, faisant apparaître des cotisations impayées par le débiteur, et les premières inscriptions de privilèges .  

L'article L. 631-8, alinéa 3 , précise que le tribunal peut être saisi par l'administrateur, le liquidateur judiciaire ou le ministère public. Non visés par le texte, ni les associés  , ni le commissaire à l'exécution du plan , n'ont qualité pour demander le report de la date de cessation des paiements. Le tribunal se prononce après avoir entendu ou dûment appelé le débiteur . Le débiteur est seul recevable à invoquer, le cas échéant, l’inobservation de cette formalité . En revanche, l'ancien dirigeant, même assigné à tort en report de la date de cessation des paiements, n'a pas à être entendu par le juge, dès lors qu’il n’est plus le représentant légal de la société .

En l'absence de précisions dans les textes quant à la forme de la demande en report de la date de cessation des paiements, la Cour de cassation estimait que la demande était valablement présentée par voie de requête, et n'avait pas à être formée par voie d'assignation . Désormais, elle juge qu'à défaut de remise au greffe d'une requête conjointe ou de présentation volontaire des parties constatée par la signature d'un procès-verbal , le débiteur soumis à une procédure collective, qui dispose d’un droit propre à se défendre à l’action tendant au report de la date de cessation de ses paiements, doit nécessairement être assigné . Le dirigeant d'une société en procédure collective conserve le pouvoir de la représenter jusqu’au jugement de clôture, de sorte qu'il a qualité pour recevoir une assignation en report de la date de cessation des paiements, qu'il soit une personne physique ou morale . En revanche, la demande en report de la date de cessation des paiements est irrecevable, lorsqu’elle est présentée contre le dirigeant à titre personnel  , ou contre un ancien dirigeant . 

La demande de modification de date doit être présentée au tribunal dans le délai d'un an à compter du jugement d'ouverture de la procédure . L'assignation en report de la date de cessation des paiements a pour effet d'interrompre la prescription. Dès lors, la date mentionnée dans l'assignation peut être modifiée par l'auteur de la saisine, par voie de demande additionnelle, jusqu'à ce que la juridiction saisie se prononce .

Enfin, l'article R. 631-13  prévoit que la décision par laquelle le tribunal modifie la date de cessation des paiements doit être notifiée au débiteur et communiquée aux mandataires de justice désignés, au procureur de la République et au directeur départemental ou, le cas échéant, régional des finances publiques du département dans lequel le débiteur a son siège et à celui du département où se trouve le principal établissement. La décision de report fait également l'objet des publicités prévues à l'article R. 621-8, telles que l'insertion d'un avis du jugement au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC) .  

Cass. com., 29 septembre 2021, LawLex202100005433JBJ (LJ), JCP E 2021, n° 1539, obs. HOUSSIN ; JCP E 2022, n° 1010, 1, obs. TEHRANI ; LEDEN novembre 2021, 3, obs. RUBELIN ; 8 juillet 2003, LawLex202100004297JBJ (LJ), considérant que l’existence d’une décision d’irrecevabilité ou de rejet d’une première demande de report de la date de cessation des paiements, fût-elle revêtue de la force de chose jugée, ne fait pas obstacle à l’introduction d’une nouvelle demande en ce sens, dès lors que l'article L. 631-8 du Code de commerce autorise des reports multiples. 

C. com., art. L. 631-8, al. 2, applicable à la procédure de liquidation judiciaire sur renvoi de l'art. L. 641-1, IV. - V. pour une application, Cass. com., 12 janvier 2022, LawLex202200000574JBJ (LJ), retenant que la cour d'appel qui réforme un jugement de liquidation judiciaire et prononce le redressement judiciaire du débiteur ne peut reporter la date de cessation des paiements que dans la limite de dix-huit mois avant son propre arrêt, qui constitue le jugement d’ouverture de la procédure collective. 

Cass. com., 8 juin 1999, LawLex202100001808JBJ (RJ).

Cass. com., 9 mai 2018, LawLex202100004274JBJ (LJ). 

Basse-Terre, 28 mars 2022, LawLex202200006451JBJ (LJ).  

Cass. com., 12 mai 2009, LawLex202100003725JBJ (LJ). 

Cass. com., 28 avril 1998, LawLex202100004134JBJ (LJ).  

Cass. com., 9 décembre 2020, LawLex202400003329JBJ (LJ).

Cass. com., 22 novembre 2023, LawLex202400003320JBJ (LJ).

Cass. com., 24 mars 2004, LawLex202100002063JBJ (LJ). 

Cass. com., 13 novembre 2007, LawLex202100004287JBJ (RJ). - V. égal. Cass. com., 3 octobre 2018, LawLex202100004283JBJ (LJ), rejetant une demande de report à une date antérieure à celle fixée par le juge au motif que les difficultés invoquées ont été résolues dès le mois suivant.

Cass. com., 8 mars 2017, LawLex202100004289JBJ (LJ). 

Cass. com., 3 avril 2019, LawLex202100001866JBJ (LJ). 

Cass. com., 27 mai 2014, LawLex202100004284JBJ (LJ). 

Applicable à la procédure de liquidation judiciaire sur renvoi de l'art. L. 641-1, IV.

Angers, 20 mai 2014, LawLex202100005584JBJ (RJ). 

Cass. com., 4 octobre 2005, LawLex202100001874JBJ (RJ).

Cass. com., 31 mai 2016, LawLex202100004306JBJ (LJ). 

Cass. com., 17 juin 2020, LawLex202100004314JBJ (LJ). 

Cass. com., 16 février 1999, LawLex202100001861JBJ (RJ). 

Cass. com., 1er mars 2005, LawLex202100001875JBJ (LJ).

Cass. com., 24 mai 2005, LawLex202100004305JBJ (LJ) ; 22 mars 2017, LawLex202100001878JBJ (LJ).

Cass. com., 20 juin 1995, LawLex202100004299JBJ (RJ). 

Cass. com., 12 juin 2019, LawLex202100004307JBJ (LJ) ; 10 juillet 2019, LawLex202100004309JBJ (LJ) ; 3 octobre 2018, LawLex202100001868JBJ (LJ) ; 17 février 2015, LawLex202100004308JBJ (LJ).

Cass. com., 19 mai 2015, LawLex202100001877JBJ (LJ).

C. com., art. L. 631-8, al. 4 - V. pour une application, Cass. com., 27 novembre 2019, LawLex202100004310JBJ (RJ). 

Cass. com., 28 janvier 2014, LawLex202100004312JBJ (LJ). 

Applicable à la procédure de liquidation judiciaire sur renvoi de l'art. R. 641-1.

Cass. com., 15 mai 1990, LawLex202100004322JBJ (RJ). 

Cass. com., 1er février 2000, LawLex202100004296JBJ (RJ). 

Cass. com., 22 mai 2013, LawLex202100001858JBJ (LJ). 

Ibid. - V. aussi Cass. com., 14 mai 2002, LawLex202100004301JBJ (RJ).

Cass. com., 9 décembre 2020, LawLex202400003329JBJ (LJ) ; 5 octobre 2022, LawLex202200008642JBJ (LJ). 

Cass. com., 15 février 2000, LawLex202100004235JBJ (LJ). 

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