CA Paris, 13e ch. B, 13 novembre 1996, n° 96-04379
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Ministère Public, Direction de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes de la Région Île-de-France
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Bertolini
Conseillers :
Mmes Barbarin, Marie
Avocat :
Me Bonnard.
RAPPEL DE LA PROCÉDURE :
LA PREVENTION :
C Bernard est poursuivi pour avoir à Paris courant octobre 1994, imposé directement ou indirectement un caractère minimal au prix de revente d'un produit ou d'un bien, au prix d'une prestation de service ou à une marge commerciale;
LE JUGEMENT :
Le Tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré C Bernard
coupable d'imposition d'un prix de revente minimum ou d'une marge minimale - bien ou prestation de service, faits commis courant 1994, à Paris, infraction prévue et réprimée par l'article 34 Ord. 86-1243 du 01/12/1986 ;
et, en application de ces articles,
l'a condamné à 50 000 F d'amende
a ordonné la publication, par extraits, du présent jugement dans le journal "Le Figaro" (supplément économique) sans que le coût de cette insertion puisse excéder 25 000 F ;
a dit que cette condamnation est assujettie au droit fixe de procédure de 600 F dont est redevable le condamné.
LES APPELS:
Appel a été interjeté par :
- M. C Bernard, le 26 Avril 1996 ;
- M. le Procureur de la République, le 26 Avril 1996 contre M. C Bernard ;
Monsieur Bernard C a été cité devant le Tribunal de Paris sous la prévention d'avoir, à Paris, courant octobre 1994, imposé, directement ou indirectement, un caractère minimal au prix de revente d'un produit ou d'un bien, au prix d'une prestation de service ou à une marge commerciale, faits prévus et réprimés par les articles 34 et 55 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 ;
Par jugement en date du 17 avril 1996, le Tribunal l'a condamné, de ce chef, à 50 000 F d'amende et a ordonné la publication du jugement dans le journal "Le Figaro" (supplément économique) sans que le coût de cette insertion puisse excéder 25 000 F;
Appel de ce jugement a régulièrement été interjeté par le prévenu et par le ministère public ;
A l'audience de la Cour du 9 octobre 1996, le prévenu, assisté de son conseil, reconnaît l'infraction qui lui est reprochée et sollicite l'indulgence, faisant valoir qu'il a pris toutes les dispositions utiles pour y mettre fin ;
Il soutient qu'il a voulu, avant tout, assurer la qualité de la prestation fournie par Y, ce qui suppose que les franchiseurs disposent d'un fichier important et correctement géré. Il sollicite une réduction de l'amende prononcée par les premiers juges, compte-tenu de ses revenus propres et l'infirmation de la décision en ce qui concerne la publication.
Le ministère public observe que l'infraction est reconnue et caractérisée ; il demande à la Cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Mme Talbot-Joulain, munie d'un pouvoir du Directeur Régional de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes d'Ile-de-France, Direction de Paris, aux fins de le représenter à l'audience, souligne que les franchisés sont des commerçants indépendants et que l'infraction reprochée au prévenu porte atteinte tant à l'intérêt des consommateurs qu'à la libre concurrence.
Sur ce, LA COUR
Considérant que la société anonyme "X" dont M. C est Président du conseil d'administration, qui a pour activité le courtage matrimonial, gère sous l'enseigne "Y" trois cabinets en exploitation directe, qu'elle a cinq concessionnaires et qu'elle est liée à huit sociétés par un contrat de franchise ;
Considérant que le 14 juin 1995, un Commissaire et un Contrôleur de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes en résidence à Paris, dressaient procès-verbal à l'encontre de M. C pour avoir imposé, directement ou indirectement, un caractère minimal au prix d'une prestation de service ou à une marge commerciale, faits prévus et réprimés par l'article 34 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence ;
Qu'il résultait en effet des contrôles qu'ils avaient effectués auprès de quatre sociétés franchisées X ayant leur siège dans la région parisienne et du franchiseur, qu'un prix minimum leur était imposé sur les contrats proposés à la clientèle, à savoir le contrat adhérent Y, le contrat "Essentiel" et le contrat "Jeunes" ;
Considérant, s'agissant de la matérialité des faits, qui n'est d'ailleurs pas contestée, que l'imposition par le franchiseur d'un prix minimum des prestations offertes aux consommateurs résulte clairement, comme l'a rappelé le Tribunal, des termes de l'article 2- 2 du contrat de franchise et des avenants à ces contrats, puisqu'il est indiqué dans ces documents que le contrat Y ne peut être inférieur à 10 500 F HT, le contrat Essentiel à 5000 F HT et que le prix du contrat Jeunes est fixé forfaitairement à 1163,58 F HT;
Qu'il résulte également des constatations effectuées par les agents verbalisateurs que ces tarifs sont respectés par les franchisés, lesquels adressent au franchiseur, en fin de mois, copie des contrats signés et des statistiques;
Considérant, s'agissant du caractère volontaire de l'infraction visée à la prévention que, comme l'ont dit, à juste titre, les premiers juges, les contrôles et rappels à l'ordre des franchisés par X démontrent le caractère impératif des prix minimaux applicables aux prestations de service offertes à la clientèle (notamment les courriers adressés les 12 juillet et 8 septembre 1994 aux franchisés) alors que ceux-ci sont des commerçants indépendants ;
Que, d'autre part, les franchisés paient au franchiseur une redevance mensuelle basée sur 8,5 % du chiffre d'affaires HT du mois précédent, ce qui démontre à l'évidence que X avait intérêt, non seulement à exiger des prestations de qualité, mais aussi à imposer un prix plancher;
Considérant que l'infraction visée à la prévention est imputable au prévenu, Président du conseil d'administration de la société X, qui ne conteste d'ailleurs pas sa responsabilité ; qu'il convient, dès lors, de confirmer le jugement déféré sur sa déclaration de culpabilité ;
Considérant qu'il y a lieu de confirmer également le montant de l'amende prononcée par les premiers juges, qui est justifiée compte-tenu de la gravité des faits ;
Considérant qu'il y a lieu, en revanche, de réformer le jugement déféré en ce qu'il a ordonné la publication de la décision de condamnation, Monsieur Bernard C n'ayant jamais été condamné et ayant pris des mesures pour éviter le renouvellement de l'infraction ; qu'au surplus, une telle mesure serait de nature à porter atteinte aux intérêts des sociétés franchisées ;
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement : Reçoit les appels du prévenu et du ministère public, Confirme le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité du prévenu et sur la peine d'amende prononcée à son égard, Le réformant pour le surplus : Dit n'y avoir lieu à publication de la décision de condamnation, Dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 800 F dont est redevable le condamné. Le tout par application des articles 34 et 55 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, des articles 512, 514, 515 du CPP.