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Décisions

CA Colmar, ch. corr., 17 mars 1995, n° 09401080

COLMAR

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Krieger-Bour

Conseillers :

MM. Meyer, Cuenot

Avocat :

Me Caen

CA Colmar n° 09401080

17 mars 1995

Vu le jugement rendu le 15 septembre 1994 par le Tribunal Correctionnel de Strasbourg qui, sur l'action publique, a déclaré le prévenu coupable d'avoir à Illkirch-Graffenstaden, le 27 mars 1993, revendu en l'état 10088 laitues françaises au prix de 1 F pièce, soit un prix inférieur au prix d'achat effectif compris entre 2,66 F et 2,79 F pièce,

fait prévu et réprimé par l'article 1 de la loi 63-628 du 2 juillet 1963, qui en répression :

- l'a condamné à une peine d'amende de 5.000 F,

Vu les appels, réguliers et recevables, interjetés contre ce jugement le 20 septembre 1994 par le prévenu et par le Ministère Public,

LA COUR, après avoir à son audience publique du 17 mars 1995, sur le rapport de M. Meyer, Conseiller, accompli dans l'ordre légal les formalités prescrites par l'article 513 du Code de Procédure Pénale, le Ministère Public entendu et l'avocat du prévenu ayant eu la parole en dernier et après en avoir délibéré conformément à la loi, a statué comme suit :

Attendu que le prévenu a demandé, conformément aux dispositions de l'article 411 du Code de Procédure Pénale, d'être jugé en son absence ;

Que son défenseur ayant été entendu, l'arrêt sera rendu contradictoirement ;

SUR LA PREUVE DES FAITS ET LEUR QUALIFICATION PENALE

Attendu que c'est sans insuffisance ni contrariété de motifs et par une juste appréciation des faits et des circonstances de la cause tels qu'ils ont été relatés dans le jugement déféré en un exposé que la Cour adopte que les premiers juges ont déclaré fondée la prévention à l'encontre de X ;

Attendu que dans ses conclusions d'appel, le prévenu fait valoir qu'il n'a vendu aucune marchandise à perte puisqu'il était responsable uniquement des achats de la société Y, que l'infraction ne peut lui être imputée puisqu'il ne se trouvait pas à Illkirch le 27 mars 1993, lieu et date visés par la citation, que s'agissant de laitues la notion de revente à perte ne peut s'appliquer s'agissant d'un produit périssable, qu'enfin sa mauvaise foi n'est pas démontrée ;

Attendu que X n'a jamais contesté qu'en sa qualité de responsable des achats "fruits et légumes" de Y il était personnellement chargé, par délégation de pouvoirs de son chef d'entreprise, d'organiser pour le compte de ce dernier les achats de fruits et légumes mais également la vente de ceux-ci par la mise à disposition des marchandises auprès des différents magasins de la société ;

Que d'ailleurs c'est lui-même qui, le 28 juin 1993, a adressé à la Direction Générale de la Consommation et de la Répression de Fraudes, un mémoire en défense à la suite du procès-verbal dressé par ce service ;

Que dans cet écrit, il n'a jamais prétendu qu'il n'avait personnellement aucune responsabilité dans la revente des salades litigieuses ;

Attendu qu'il est certain que le magasin Z d'Illkirch fait partie de la Y ;

Que c'est dans ce lieu, le 27 mars 1993, que le Service de la Répression des Fraudes a établi un procès-verbal constatant que de nombreuses salades laitues avaient été vendues à un prix inférieur au prix d'achat ;

Que le prévenu étant personnellement responsable des achats et des ventes de légumes pour le compte de la Y, la prévention pouvait viser un lieu et une date quelconque correspondants à un magasin de la société Y participant à la vente de laitues pendant la période de campagne publicitaire, laquelle se terminait le 27 mars 1993;

Attendu qu'aux termes de la circulaire du 10 janvier 1978, modifiée le 9 octobre 1981, la vente de produits périssables, comme en l'espèce les laitues faisant partie de la catégorie des légumes et plantes potagères à l'état frais, échappe à l'interdiction de la revente à perte ;

Que néanmoins, il doit être rappelé que dans l'ordre juridique une circulaire ne peut déroger à la loi, visée à la prévention, laquelle a une valeur supérieure ;

Que d'ailleurs ce texte ministériel ne concerne que le cas où il existe un délai très court entre l'achat de la marchandise et sa revente au consommateur ;

Qu'en l'espèce, s'agissant d'une campagne publicitaire organisée de longue date, par les services d'une grande société de distribution, l'altération rapide des salades constituait nécessairement un élément dans la détermination du prix de vente;

Attendu qu'il résulte de la procédure que si pour la campagne publicitaire, le prévenu a acheté auprès d'un producteur étranger 38400 salades au prix unitaire de 0,90 F HT, il a, en raison de la forte demande de la clientèle, acheté en France d'autres laitues dont le prix d'achat variait entre 2,10 F et 2,70 F;

Que l'ensemble de ces marchandises, quelque soit l'origine, a été revendu au prix de 1 F pièce;

Attendu que l'hypermarché Z d'Illkirch, a indiqué par télécopie du 28 juin 1993 avoir vendu du 24 au 27 mars 1993, compte tenu d'une perte de quantité de 15 %, 10088 laitues françaises, soit celles acquises à un prix supérieur au prix de vente ;

Attendu que X a toujours affirmé qu'en raison de la forte demande, il avait à choisir entre commettre une publicité mensongère en ne livrant pas les salades au prix indiqué, pendant la période publicitaire soit de respecter l'engagement de prix en acquérant cette marchandise à prix supérieur à celui indiqué aux consommateurs ;

Que ce raisonnement et le choix effectué par le prévenu démontre, à l'évidence, qu'il a de façon délibérée commis le délit visé à la prévention ;

Attendu que dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement déféré en tant qu'il a déclaré coupable du délit de revente à perte;

SUR L'APPLICATION DE LA PEINE

Attendu que la peine infligée par les premiers juges constitue une sanction proportionnée à la gravité des faits, adaptée à sa personnalité et est conforme aux exigences de l'ordre public ;

Qu'ainsi le jugement déféré sera confirmé dans toutes ses dispositions pénales ;

Par ces motifs : Et ceux des premiers juges, LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, Déclare les appels réguliers et recevables en la forme, Au fond : Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, Le tout par application des articles visés dans le corps du présent arrêt.