Cass. crim., 20 juin 1994, n° 93-83.037
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tacchella
Rapporteur :
Mme Mouillard
Avocat général :
M. Monestié
Avocats :
SCP Piwnica, Molinié.
LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par Y Robert, la SA Clinique X, civilement responsable, contre l'arrêt de la cour d'appel de Rouen, chambre correctionnelle, en date du 2 juin 1993, qui, pour infraction aux règles de la facturation, a condamné le premier à 30 000 francs d'amende et a dit que la seconde serait solidairement tenue au paiement de ladite amende. - Vu le mémoire produit ; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 62 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble violation des droits de la défense, défaut de motif, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Y coupable d'avoir accepté des factures dépourvues des mentions obligatoires et l'a condamné de ce chef ;
" aux motifs que les déclarations du prévenu du 5 février 1991 établissent la reconnaissance de remises inconditionnelles différées qui ne correspondent ni à une exclusivité de fourniture ni à un niveau de chiffre d'affaires déterminé, mais font l'objet d'avoirs dont le versement est différé ; que s'agissant d'une négociation antérieure à la vente, le principe en était acquis lors de la rédaction de la facture et le montant de la ristourne parfaitement chiffrable puisque le pourcentage, objet de la négociation, était nécessairement connu lors de l'accord ;
" alors que, d'une part, la seule obligation imposée par l'article 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 à l'acheteur est de réclamer une facture du vendeur ; qu'en condamnant l'acheteur en raison d'inexactitudes que comporteraient les factures établies par le vendeur sans constater la participation du prévenu à la réalisation desdites mentions qui seraient inexactes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" alors que, d'autre part, le délit prévu à l'article 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 n'est constitué que s'il est concrètement constaté que les ristournes devant figurer sur les factures ont été négociées antérieurement à la conclusion du contrat et que leur montant était chiffrable à cette date ; qu'en se fondant sur les seules explications fournies par le prévenu reconnaissant l'existence de remises faisant l'objet d'avoirs dont le versement est différé pour en déduire sans aucun autre élément concret et précis l'antériorité de la négociation et le caractère chiffrable du montant de la remise, les juges du fond ont renversé la charge de la preuve et méconnu la présomption d'innocence ;
" alors qu'enfin, la cour d'appel qui n'a pas constaté l'élément intentionnel du délit a privé sa décision de base légale ;
Attendu que pour déclarer Robert Y coupable d'infraction aux règles de la facturation, l'arrêt attaqué énonce qu'il a reconnu avoir, à l'occasion d'achats de matériel de prothèse effectués dans l'exercice de sa profession de directeur de clinique, obtenu des remises inconditionnelles différées, non mentionnées sur les factures établies par ses fournisseurs ; que la Cour relève qu'en s'abstenant, dans le dessein d'obtenir des remboursements majorés de la Sécurité sociale, de réclamer des factures sur lesquelles auraient dû figurer, conformément à l'article 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, ces remises dont le principe était acquis et le montant chiffrable, le prévenu a failli à l'obligation qui pèse sur l'acheteur en vertu de ce texte ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Qu'en effet, les dispositions de l'article 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, selon lesquelles tout achat de produits ou toute prestation de service pour une activité professionnelle doit faire l'objet d'une facture mentionnant, notamment, les rabais, remises ou ristournes dont le principe est acquis et le montant chiffrable au moment de la vente, s'imposent indistinctement au vendeur et à l'acheteur, tenus à des obligations complémentaires et réciproques; que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Rejette le pourvoi.