Cass. com., 3 mai 2000, n° 97-20.888
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Minoterie de Saint-Vincent (SA)
Défendeur :
Moulins du Pacifique Sud (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Rapporteur :
Mme Champalaune
Avocat général :
Mme Piniot
Avocats :
SCP Monod, Colin, SCP Guiguet Bachellier Potier de La Varde.
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 24 juillet 1997), qu'en contrepartie d'aides à l'investissement accordées par l'Assemblée territoriale de Nouvelle-Calédonie par arrêté du 8 octobre 1987, la société Moulins du Pacifique Sud (Société MPS) a signé, le 8 avril 1988, une convention avec le directeur des affaires économiques du Territoire, aux termes de laquelle " le tarif et les conditions de vente, ainsi que toute modification du prix de vente seront soumis à l'examen et à l'approbation du directeur des affaires économiques " ; que, se plaignant de ce que les prix de vente de la farine pratiqués par la société MPS étaient inférieurs à son prix de revient, la société Minoterie de Saint-Vincent (société MSV) a assigné sa concurrente devant le tribunal de commerce de Nouméa pour concurrence déloyale ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche : - Vu les articles 1382 et 1383 du Code Civil ; - Attendu que pour rejeter la demande en paiement de dommages-intérêts de la société MSV, l'arrêt retient que les prix plafonds du kilogramme de farine fixés par l'Administration s'imposaient à la société MPS dans le cadre de la convention conclue ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, en l'absence de réglementation des prix de la farine sur le territoire de la Nouvelle-Calédonie, la société MPS n'engageait pas sa responsabilité en pratiquant des prix inférieurs à ses prix de revient en contrepartie de l'octroi d'aides financières qu'elle avait demandées, la cour d'appel a violé les textes susvisés;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche : - Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an VIII ; - Attendu que pour rejeter la demande en paiement de dommages-intérêts de la société MSV, l'arrêt retient aussi que si la réalité d'une vente à perte est établie, cet état de fait n'est que la conséquence de l'arrêté du 8 octobre 1987 et qu'il n'entre pas dans la mission d'une juridiction de l'ordre judiciaire statuant en matière commerciale de statuer sur la validité d'un acte administratif, même si celui-ci a pour effet de fausser le libre-jeu de la concurrence ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la solution du litige n'imposait pas qu'il soit statué sur la validité d'actes administratifs, la cour d'appel a violé, par fausse application, les textes susvisés ;
Et sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche : - Vu les articles 1382 et 1383 du Code Civil ; - Attendu que pour rejeter la demande en paiement de dommages-intérêts de la société MSV, l'arrêt retient également que la preuve d'actes de concurrence déloyale volontaires commis par la société MPS n'est pas rapportée ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'action en concurrence déloyale n'exige pas la constatation d'un élément intentionnel, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche : casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 juillet 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa, autrement composée.