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Décisions

CA Toulouse, 2e ch., 15 mai 1995, n° 4903-93

TOULOUSE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

de Baudouin

Défendeur :

Sonauto (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Foulon

Conseillers :

MM. Lebreuil, Kriegk

Avoués :

SCP Sorel Dessart, SCP Boyer Lescat

Avocats :

Cabinet Decker, Cabinet Catala.

T. com. Toulouse, du 13 sept. 1993

13 septembre 1993

M. de Baudouin s'est approvisionné au terme d'un contrat annuel en date du 6 mars 1991, suivant commande passée en octobre 1991 en vélos tout terrain et accessoires auprès de la société Sonauto, importateur de cycles,

La société Sonauto a fait assigner M. de Baudouin le 3 décembre 1992 pour avoir paiement de la somme principale de 114 755,05 F outre intérêt à compter de la mise en demeure en date du 6 juillet 1992,

M. de Baudouin a prétendu que la société Sonauto, en ne l'ayant pas fait bénéficier des tarifs avantageux annoncés au mois de décembre 1991, [Sonauto] s'est rendue coupable de pratiques discriminatoires justifiant sa condamnation à dommages et intérêts, ainsi qu'à la compensation de ceux-ci avec les sommes dues,

Par jugement en date du 13 septembre 1993, le Tribunal de commerce de Toulouse, rejetant cette argumentation, a condamné M. Marc de Baudouin à payer à la société Sonauto la somme de 114 755,02 F majorée des intérêts au taux légal depuis le 6 juillet 1992, a autorisé M. de Baudouin à se libérer de sa dette en 12 mensualités consécutives, de valeur constante pour le principal, la première intervenant le premier jour du mois suivant le prononcé du jugement, a dit que la déchéance du terme sera prononcée dès la première défaillance en paiement du principal et des intérêts y relatifs, a dit que M. de Baudouin pourra se libérer de sa dette par anticipation, sans aucune déduction d'escompte, et a condamné M. de Baudouin au paiement de la somme de 6 000 F en application de l'article 700 du NCPC.

M. de Baudouin a relevé appel de cette décision le 27 octobre 1993,

Il fait valoir que qu'il a commandé 250 vélos en raison des tarifs promotionnels pratiqués par la société, mais que deux mois plus tard, soit en décembre 1991 au moment où le volume des ventes est le plus importants de l'année, de nouveaux tarifs beaucoup plus intéressants ont été proposés,

Il soutient que les tarifs proposés au mois d'octobre 1991 à des " prix 1991 " devaient rester en vigueur toute l'année 1991, si bien que la société Sonauto aurait non seulement manqué à ses propres conditions générales de vente en modifiant les tarifs sans préavis, mais aurait pratiqué des conditions de vente discriminatoires vis-à-vis des distributeurs déjà engagés avec elle,

Il soutient encore que la société Sonauto a utilisé tous les moyens pour se défaire au meilleur prix d'un stock en vue de la cessation de son activité, cédée à la société Sintertrad,

En définitive, il demande, après avoir constaté l'infraction aux dispositions de l'article 36 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, de condamner la société Sonauto au paiement de justes dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, de dire et juger que ces intérêts ne sauraient être inférieurs à la différence de tarification telle que décomptée, soit la somme de 95 821,79 F, de condamner en outre la société Sonauto au paiement de la somme de 30 000 F à titre de dommages et intérêts, d'ordonner la compensation, et de condamner la société Sonauto au paiement de la somme de 10 000 F en application de l'article 700 du NCPC,

La SA Sonauto conclut pour sa part à la confirmation de la décision entreprise, et demande à titre incident la condamnation de M. de Baudouin à lui payer la somme de 10 000 F à titre de dommages et intérêts outre celle de 15 000 F en application de l'article 700 du NCPC,

La matérialité des allégations de M. de Baudouin n'est pas discutée, cependant, l'intimée soutient qu'elle reste maître de sa politique tarifaire, dans une conjoncture où il est normal de chercher, d'une saison à l'autre, à liquider des stocks de modèles démodés ; que le tarif de décembre 1991 ne peut valablement lui être opposé ; enfin, qu'elle ne s'est livrée à aucune politique discriminatoire,

Motifs de l'arrêt :

Il ne saurait être valablement contesté que la société Sonauto, afin de faire bénéficier ses revendeurs de prix attractifs dans le cadre d'une campagne promotionnelle de fin d'année, a adressé à tous ses revendeurs de nouveaux tarifs en octobre 1991 et décembre 1991, ce qui vide de sa substance le grief de pratique discriminatoire reposant sur la prétendue violation des dispositions de l'article 36 de l'ordonnance du 1er décembre 1986,

De plus, l'intimé souligne à juste titre que les tarifs pratiqués par la société Sonauto en décembre 1991 et par la société Sintertrad en février 1992 portent non pas sur la gamme complète des produits distribués (produits Scott USA, au nombre de 24 dans les précédentes tarifications), mais uniquement sur certains d'entre eux (au nombre de 13) ce qui suggère qu'ils étaient susceptibles de connaître une dépréciation,

Ni le contrat du 6 mars 1991, ni aucune règle n'imposent au distributeur de maintenir les prix qu'il propose pour une durée déterminée, et l'appelant ne peut soutenir que la société Sonauto se serait engagée en ce sens pour une période déterminée, quand bien même les tarifs porteraient-ils la mention " liste de prix ",

Il n'est pas discuté que M. de Baudouin ait bénéficié des tarifs en vigueur au moment où la commande a été passée,

Il ne démontre l'existence d'aucun agissement discriminatoire de nature à fonder le principe d'une condamnation à dommages et intérêts,

M. de Baudouin doit être débouté de toutes ses demandes, fins et conclusions,

S'agissant de la demande incidente présentée par la société Sonauto, il y a lieu de rappeler que le droit d'agir en justice n'est susceptible de donner lieu à dommages et intérêts que s'il dégénère en abus, ce qui n'est pas démontré en l'espèce,

La demande incidente en dommages et intérêts ne sera donc pas accueillie,

En revanche, l'équité commande d'ajouter en cause d'appel une somme de 3 000 F en application de l'article 700 du NCPC,

Par ces motifs, LA COUR, Reçoit l'appel jugé régulier, Déboute M. de Baudouin des fins de son appel, Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 13 septembre 1993 par le Tribunal de commerce de Toulouse, Déboute la SA Sonauto de sa demande incidente en dommages et intérêts, Met les dépens d'appel à la charge de M. de Baudouin et dit qu'ils pourront être recouvrés directement par la SCP Boyer Lescat, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du NCPC, Condamne M. de Baudouin à payer à la SA Sonauto une somme de 3 000 F en application de l'article 700 du NCPC.