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Décisions

CA Paris, 13e ch. A, 17 novembre 1998, n° 98-00341

PARIS

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guilbaud

Conseillers :

Mme Petit, M. Remenieras

Avocat :

Me Martin.

TGI Paris, 31e ch., du 27 nov. 1997

27 novembre 1997

Rappel de la prévention :

La prévention :

N Sophie est poursuivie pour avoir à Paris depuis avril 1994 et jusqu'en avril 1995, effectué pour une activité professionnelle une ou des ventes de produits sans facture conforme.

Le jugement :

Le tribunal, par jugement contradictoire,

- a déclaré nulle la citation délivrée le 18 septembre 1997 à Mme N Sophie épouse W par le Procureur de la République,

- a constaté qu'il n'était donc pas valablement saisi

(du chef de la facturation non conforme - vente de produit, prestation de service pour une activité professionnelle, faits commis de avril 1994 à avril 1995, à Paris, infraction prévue par l'article 31 al. 2, 3, 4 ordonnance 86-1243 du 01-12-1986 et réprimée par l'article 31 al. 5, 6 ordonnance 86-1243 du 01-12-1986)

Les appels :

Appel a été interjeté par :

- M. le Procureur de la République, le 2 décembre 1997 contre Mme N Sophie.

Décision :

Rendue contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant sur l'appel relevé par le Ministère public à l'encontre du jugement précité auquel il convient de se référer pour l'exposé de la prévention ;

Sophie N épouse W, assistée de son conseil, sollicite de la Cour la confirmation du jugement déféré et subsidiairement, l'indulgence ;

Elle soulève, in limine litis, comme en première instance, la nullité de la citation du 18 septembre 1997 ;

Elle fait valoir que les exigences de l'article 551 du CPP n'ont pas été respectées ;

Elle souligne en effet que dans son exploit, l'huissier de justice n'a pas visé le procès verbal d'infraction, mais le mandement de citation dont les énonciations sont les suivantes :

" prévenue d'avoir à Paris, depuis avril 1994 et jusqu'en avril 1995, effectué pour une activité professionnelle, une ou des ventes de produits sans facture conforme, infraction prévue par l'article 31 alinéa 2, alinéa 3, alinéa 4 de l'ordonnance 86-1243 du 1-12-1986 et réprimée par l'article 31 alinéa 5, alinéa 6, article 55 alinéa 1 ordonnance 86-1243 du 1-12-86 " ;

Elle soutient que ce mandement, qui n'énonce pas avec précision les faits poursuivis ne saurait suppléer aux indications imposées par l'article 551 alinéa 2 du CPP ;

Elle expose qu'il ressort ainsi de ce mandement que l'on ne peut savoir quelle est la date précise et les faits précis qui sont reprochés à Mme Sophie N ;

Qu'il est en effet reproché à Mme Sophie N, une ou des ventes de produits sans facture conforme ;

Qu'au surplus, il n'est nullement indiqué dans le mandement en quoi la ou les factures seraient non conformes ;

M. l'avocat général s'en rapportant aux termes de la requête d'appel établie le 25 février 1998 par M. le Procureur de la République près le TGI de Paris, demande à la Cour de :

- réformer le jugement entrepris,

- dire et juger régulière la citation délivrée le 18 septembre 1997 à Mme W,

- déclarer Mme W coupable du délit de facturation non conforme.

Il s'en remet à l'appréciation de la Cour sur le quantum de la peine ;

Il fait valoir qu'il est manifeste que Mme W était parfaitement informée des faits qui lui étaient reprochés ;

Que d'ailleurs, lors de son audition par les fonctionnaires de police le 5 septembre 1996, elle a déclaré reconnaître l'infraction de facturation non conforme pour la période visée dans le procès verbal de la DGCCRF ;

M. André Marie, dûment mandaté par M. le Directeur départemental de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, directeur de Paris, souligne que l'infraction poursuivie est parfaitement établie ainsi qu'il ressort du procès verbal de délit du 3 juin 1996 ;

Considérant qu'après avoir délibéré, la Cour a joint l'incident au fond et statuera par un seul et même arrêt sur l'incident et sur le fond ;

Sur l'exception de nullité de la citation :

Considérant que lors d'un contrôle en date du 28 avril 1995, dans un restaurant à Vernon (P), les fonctionnaires de la DGCCRF découvraient des factures émanant de la SARL Supermarché Luxe rue au Maire, Paris 3e, qui présentaient des irrégularités au regard de la réglementation en vigueur ;

Que le 26 septembre 1995, Mme W, gérante de la société précitée, était entendue par les fonctionnaires de la DGCCRF sur la facturation en cause ;

Considérant que par lettre recommandée avec avis de réception en date du 20 mai 1996, Mme W était invitée à assister à la clôture du procès verbal relatant les faits et à signer celui-ci ;

Qu'elle expliquait lors de son audition par les fonctionnaires de police le 5 septembre 1996, qu'elle ne s'était pas déplacée car elle était en vacances ;

Que cependant, elle déclarait : " ... je suis parfaitement informée du procès-verbal établi par les inspecteurs de la Répression des Fraudes d'Evreux auprès de l'un de mes clients pour délivrance de factures non conformes... Je reconnais cette infraction et n'ai rien d'autre à ajouter " ;

Considérant qu'aux termes de l'article 551 du CPP la citation énonce le fait poursuivi et vise le texte de loi qui le réprime ;

Considérant qu'en l'espèce, la citation délivrée à Mme W, qui se combine avec le mandement de citation joint à l'exploit précité, correspond aux exigences de l'article 551 du CPP même si elle ne reprend pas le détail et la date précise de chaque facture concernée ;

Qu'en l'espèce, la Cour est convaincue que Mme W, qui était pleinement informée des faits qui lui étaient reprochés, n'a pu avoir le moindre doute sur l'objet et la portée de l'acte par lequel elle a été traduite devant le tribunal ;

Considérant qu'à tort, le tribunal, statuant sur l'exception de nullité soulevée, a déclaré nulle la citation délivrée le 18 septembre 1997 à Mme W et s'est déclaré non valablement saisi ;

Qu'il convient, dès lors, par application de l'article 520 du CPP, d'annuler le jugement entrepris, de rejeter l'exception de nullité soulevée et de statuer sur le fond ;

Sur le fond :

Considérant qu'il ressort du procès-verbal de délit du 3 juin 1996 que les factures litigieuses ne mentionnent aucune dénomination précise - hormis la désignation générique " alimentation " - ni la quantité des produits achetés par le restaurant P ainsi que la date de règlement et les conditions d'escompte;

Qu'elles sont manifestement contraires aux exigences de l'article 31 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et la concurrence;

Considérant que Mme Sophie N épouse W a d'ailleurs reconnu l'infraction lors de son audition du 5 septembre 1996 ;

Considérant que la Cour, par voie de conséquence, retiendra la prévenue dans les liens de la prévention et la condamnera à 15 000 F d'amende ;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Joint l'incident au fond, Annule le jugement déféré, Rejette l'exception de nullité soulevée, Evoque, Déclare Sophie N épouse W coupable d'avoir à Paris, depuis avril 1994 et jusqu'en avril 1995, effectué pour une activité professionnelle, une ou des ventes de produits sans facture conforme, Faits prévus et réprimés par les articles 31 et 55 de l'ordonnance 86-1243 du 1er décembre 1986, Condamne Sophie N épouse W à 15 000 F d'amende, Dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 800 F dont est redevable la condamnée.