CA Paris, 13e ch. A, 13 décembre 1989, n° 89-5862
PARIS
Arrêt
Infirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Skop
Conseillers :
M. Martinez, Mme Petit
Avocat :
Me Guelot
Rappel de la procédure :
Le jugement a rejeté les conclusions de relaxe déposées par le conseil de C ;
Le jugement a déclaré C Maurice coupable du délit de vente d'un produit par un commerçant à un prix inférieur à son prix de revient ;
Faits commis à Paris, le 22 juin 1988 ;
Et par application des articles 1 de la loi 63-628 du 2 juillet 1963, 55 al. 1 de l'ordonnance 86-1243 du 1er décembre 1986 ;
L'a condamné à dix mille francs d'amende ;
A déclaré la société X solidairement responsable de Maurice C ;
Le jugement a condamné le prévenu aux frais envers l'Etat liquidés à la somme de 370,34 F en ce compris les droits de poste et fixe ;
Appels :
Appel a été interjeté par :
1) C Maurice et la SA X, le 14 juin 1989 ;
2) le Procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Paris le 14 juin 1989.
Décision :
Rendue contradictoirement après en avoir délibéré, conformément à la loi :
Il est rappelé que M. C, président directeur général de la SA X et ladite société considérée comme solidairement responsable ont été citées devant la juridiction répressive pour avoir à Paris le 22 juin 1988 au magasin Y revendu un produit en l'état à un prix inférieur à son prix d'achat en l'espèce un baril de lessive Ariel 5 Kg au prix de 49,95 F (TTC) alors que le prix d'achat était de 56,81 F ;
La poursuite ainsi diligentée est fondée sur un procès-verbal en date du 10 octobre 1988 établi par un Commissaire Principal des Services Extérieurs de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes qui certifie que le 22 juin 1988 à 9 h 30 il s'est présenté au magasin Y et a demandé que lui soient communiqués divers documents nécessaires pour déterminer le prix d'achat du baril Ariel. Le procès-verbal précise que ces documents sont parvenus à l'Administration entre le 22 juin et le 27 septembre et qu'ils ont permis d'établir que le prix de vente du produit concerné était inférieur à son prix d'achat et que le 27 septembre 1988, lors d'une nouvelle visite au magasin Y, son directeur avait déclaré que le prix de vente du baril Ariel avait été aligné sur les prix de ses concurrents et voisins G 20 et Franprix et ce depuis le 20 juin 1988 ;
Dans les conclusions qu'il a déposées devant les premiers juges, le Directeur de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes estime que M. C et la SA X ne peuvent invoquer l'exception d'alignement car la SA X n'a pas justifié avoir vérifié directement la licéité du prix pratiqué par le Supermarché G 20 et les Etablissements Franprix et n'a pas informé l'Administration préalablement à cet alignement ;
Le jugement soumis à la censure de la Cour sur appel de M. C, de la SA X et du Parquet relève que M. C n'a effectué aucune démarche préalable auprès de l'Administration malgré les termes d'une circulaire du 30 mai 1970, qu'il n'établit pas que le prix pratiqué par l'établissement concurrent était licite, qu'il n'a pas permis à l'Administration d'effectuer les vérifications qui s'imposaient auprès de la concurrence pour apprécier dans quelle mesure l'alignement était possible et licite et qu'en conséquence il devait être retenu dans les liens de la prévention ;
M. C qui a comparu en personne avec l'assistance d'un conseil sollicite sa relaxe ;
Dans des conclusions déposées en son nom et au nom de la SA X son conseil articule que le commerçant désirant bénéficier de la possibilité de l'alignement n'est pas obligé de procéder à une déclaration préalable et qu'il appartenait aux agents de l'Administration de diligenter auprès de la concurrence les enquêtes nécessaires ;
Sur ce,
Considérant qu'en l'espèce il n'est pas contesté que M. C et la société dont il est le président directeur général ont le 22 juin 1988, au magasin Y à Paris vendu, en l'état, le baril de lessive Ariel à un prix inférieur à son prix d'achat effectif ;
Mais considérant que l'article 1er II de la loi du 2 juillet 1963 (rédaction de l'ordonnance du 1er décembre 1986) précise que les dispositions de son article 1er I qui répriment pénalement les ventes à perte ne sont pas applicables notamment " aux produits dont le prix de revente est aligné sur le prix légalement pratiqué pour les mêmes produits par un autre commerçant dans la même zone d'activité " ;
Considérant, en droit, que M. C n'était pas tenu d'informer l'Administration avant de mettre en application sa décision de procéder à un alignement qu'il affirme avoir été motivée par une chute de son chiffre d'affaires;
Considérant qu'aucune diligence n'a été effectuée à l'effet de vérifier la réalité des prix pratiqués, en ce qui concerne le baril de lessive Ariel, par les commerçants dont M. C au cours de l'enquête administrative puis lors de son audition à la requête du Parquet révélait les noms et les adresses et d'en apprécier la légalité;
Considérant qu'aucun élément de la procédure ne permet de conclure que les commerçants ainsi désignés pratiquaient eux-mêmes des ventes à perte;
Considérant dès lors qu'il échet de dire que M. C ne s'est pas rendu coupable du délit qui lui est imputéet, infirmant la décision des premiers juges, de le relever des fins de la poursuite ;
Par ces motifs, Infirme la décision entreprise, Relaxe C Maurice des fins de la poursuite ; Laisse les dépens de première instance et d'appel à la charge du Trésor Public.