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Décisions

CA Riom, ch. corr., 7 mars 1990, n° 720-89

RIOM

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Ministère public

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Barnoud

Conseillers :

MM. Vermorelle, Azoulay

Avocat :

Me Meyzonnade

TGI Clermont-Ferrand, ch. corr., du 26 s…

26 septembre 1989

Poursuivi pour avoir à Clermont Ferrand le 20 juin 1988 revendu en l'état des produits, en l'espèce des barils de 5 kg de poudre à laver Ariel et des flacons de deux litres d'adoucissant pour textiles Lenor, à un prix inférieur à un prix d'achat effectif tel qu'il était porté sur les factures d'achat majoré de la TVA, faits prévus et punis par l'article 1er de la loi de finances 63-628 du 2 juillet 1963 modifié par l'article 32 de l'ordonnance 86-1243 du 1er décembre 1986 et l'article 54 de la même ordonnance, Bernard C par jugement du tribunal correctionnel de Clermont Ferrand rendu contradictoirement en application de l'article 411 du Code Pénal le 26 septembre 1989 a été relaxé pour les faits de revente à prix illicite des barils de poudre à laver Ariel et condamné pour la revente à prix illicite des flacons d'adoucissant Lenor à la peine de 5 000 F d'amende.

Le Directeur de la Société Anonyme X était déclaré civilement responsable du prévenu.

Bernard C et son civilement responsable relevaient appel de ce jugement le 6 octobre 1989 suivis le lendemain par le Ministère public à titre incident.

Le prévenu sollicite sa relaxe soutenu par son civilement responsable.

La Direction Départementale de la Concurrence, de la Consommation et de la répression des fraudes conclut à la culpabilité du prévenu pour l'ensemble des faits et suggère à la Cour de faire application de l'article 54 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 en déclarant le civilement responsable solidairement tenu au paiement de l'éventuelle condamnation à l'amende.

Le Ministère public abonde en son sens et requiert l'application de la loi.

Sur quoi

Attendu qu'il résulte des éléments du dossier et notamment des constatations opérées par la Direction Départementale de la Concurrence et de la Consommation du Puy de Dôme les 20 et 30 juin 1998 que Bernard C, directeur du Magasin " X " de Clermont Ferrand et à ce titre pénalement responsable des infractions à la réglementation économique, offrait à la vente des barils de 5 kg de lessive Ariel au prix de 52 F 30 et des flacons de 2 litres d'adoucissant Lenor au prix de 12 F 50 alors qu'il ressortait de l'examen des factures que le prix d'achat de ces deux produits s'élevaient respectivement à 59 F 61 et 12 F 83 ;

Attendu que Bernard C soutient que le prix du flacon d'adoucissant Lenor était inférieur à celui porté sur la facture d'achat en tenant compte de diverses ristournes supplémentaires effectuées par la centrale d'achat X, et une réduction de 2,25 % accordée à titre de participation publicitaire par le fournisseur ;

Que le prix d'achat de ce produit TTC outre transport était ainsi ramené à 11 F 84 rendant licite le prix de vente ;

Attendu que pour renverser la présomption crée par l'article 1er de la loi du 2 juillet 1963, le prévenu doit rapporter la preuve de l'existence de ristournes, rabais et remises hors factures, certaines en leur principe lors de la revente, ainsi que la preuve écrite des accords de coopération commerciale définissant avec précision leur étendue et leur affectation au produit concerné ;

Attendu que l'existence de ces remises différées, n'était pas mentionnée au moins dans leur principe sur la facture ;

Que le prévenu ne les a pas davantage mentionnées lors de l'enquête mais se borne à produire devant la cour, pour fonder les déclarations d'un responsable des X un télex émanant de la Centrale d'achats du groupe particulièrement abscons et imprécis faute de mentionner les marques des produits concernés ;

Qu'enfin le prévenu ne produit pas le contrat de coopération commerciale par lequel son fournisseur s'engageait à lui ristourner précisément au cours de cette période 2,25 % du prix d'achat du produit en contrepartie d'un service non clairement explicite ;

Que la preuve nécessaire n'étant pas rapportée par le prévenu, il convient de confirmer sur ce point, la décision du premier juge qui a tiré des circonstances de la cause les conséquences juridiques qui s'imposaient en déclarant le prévenu coupable pour ce produit du délit de revente à prix illicite.

Attendu que les mêmes arguments invoqués au soutien de la limite du prix d'achat du baril de poudre de lessive Ariel sont d'autant plus inopérants qu'ils ne permettaient pas d'en abaisser le seuil au dessous du prix de revente effectivement pratiqué ;

Attendu que le prévenu invoque cependant en sa faveur l'exception d'alignement de son prix de vente sur celui pratiqué par d'autres distributeurs dans la zone d'achalandage ;

Attendu que le prévenu n'établit nullement comme il a l'obligation de le faire et la possibilité d'y parvenir par application des dispositions de l'article 33 de l'ordonnance précitée le caractère licite du prix à 48 F 50 pratiqué par son concurrent voisin les Établissements Stoc;

Que l'absence de poursuites, ou le classement sans suite de la procédure établie par l'Administration, après enquête ayant permis d'établir la matérialité de l'infraction n'est pas de nature à rendre licite ce prix;

Que le jugement entrepris sera donc sur ce point reformé, le prévenu étant déclaré coupable du délit de revente à perte sur le baril de lessive Ariel ;

Attendu qu'en ce qui concerne la peine, il apparaît à la Cour que la peine d'amende de 5 000 F constituera une sanction adaptée à la gravité des faits, compte tenu des circonstances particulières de la cause, et de la personnalité du prévenu ;

Attendu qu'en application de l'article 54 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 le civilement responsable sera tenu solidairement au paiement de l'amende afin de l'inciter à améliorer les procédures de transparence des prix voulues par le législateur de 1986 dans les relations avec les fournisseurs afin d'assainir les pratiques concurrentielles, particulièrement dangereuses pour les distributeurs les plus vulnérables ;

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, Reçoit les appels comme réguliers en la forme, Au fond : Sur la culpabilité : Réformant, déclare le prévenu coupable du délit de revente à prix illicite, pour le surplus : Confirme le jugement entrepris ; Sur la peine : Confirme le jugement entrepris ; Déclare le Directeur de la société X en la présence de son Président Directeur Général ou Président du Directoire civilement responsable et dit qu'il sera solidairement tenu au paiement de l'amende et des frais ; Condamne le prévenu aux dépens et dit que l'éventuelle contrainte par corps s'exercera selon les modalités légales. Le tout en application des articles susvisés, 473-477, 749-750 du code de procédure pénale.