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Décisions

Cass. crim., 11 mars 1991, n° 90-82.267

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Gunehec

Rapporteur :

M. Souppe

Avocat général :

M. Galand

Avocats :

SCP Tiffreau, Thouin-Palat

TGI Clermont-Ferrand, ch. corr., du 26 s…

26 septembre 1989

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par C Bernard, la SA X, civilement responsable, contre l'arrêt de la cour d'appel de Riom, chambre correctionnelle, en date du 7 mars 1990, qui a condamné le premier pour revente de produits à perte, à 5 000 francs d'amende et a déclaré la société tenue solidairement au paiement de cette amende. - Vu le mémoire produit commun aux deux demandeurs ; - Sur le moyen unique de cassation pris en sa seconde branche et de la violation des articles 1er de la loi n° 63-628 du 2 juillet 1963 modifié par l'article 32 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, 54 de ladite ordonnance, 485, 567, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :

" en ce que la cour d'appel déclare le prévenu coupable du délit de revente à prix illicite, le condamne à une peine d'amende et déclare l'employeur civilement responsable ;

" aux motifs que le prévenu a offert la vente des produits à des prix inférieurs aux prix d'achat portés sur les factures, sans avoir rapporté la preuve d'accords commerciaux d'où résulterait l'existence de ristournes, rabais ou remises non portés sur ces factures, ni pouvoir se justifier en invoquant des pratiques analogues de la concurrence ;

" alors que 1°) pour administrer la preuve de la réalité de ristournes et participations publicitaires résultant d'accords commerciaux passés avec des grossistes et non portées sur les factures d'achat, le prévenu avait produit une attestation du directeur de l'alimentation de la société X, expliquant et commentant un télex émanant du grossiste Y et détaillant les pourcentages par famille de produits détergents, adoucissants et savons incluant les produits litigieux, la lessive Ariel et l'adoucissant, Lénor, sur la base d'une convention d'approvisionnement et d'une coopération ; qu'en se bornant à déclarer ce télex abscons et imprécis faute de mentionner les marques des produits concernés, sans analyser ce document à la lumière des explications données par le directeur de l'alimentation ni rechercher si les produits litigieux ne relevaient pas des familles faisant l'objet des ristournes et accords de coopération spéciale expressément mentionnés par le télex qui en faisait ainsi la preuve, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

" alors que 2°) l'alignement des prix sur ceux pratiqués par la concurrence est licite dès lors que la partie poursuivante n'a pas rapporté la preuve de ce que le prévenu avait, lors de la revente de ses produits, eu connaissance de l'illicéité de ceux pratiqués par son concurrent ; qu'ainsi la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;

Vu lesdits articles ; - Attendu que l'article 1er de la loi du 2 juillet 1963, en son alinéa 1er, réprime la revente par un commerçant d'un produit en l'état, à un prix inférieur à son prix d'achat effectif ; qu'aux termes de l'alinéa 2 du même texte, ces dispositions ne sont pas applicables notamment aux produits dont le prix de revente est aligné sur le prix légalement pratiqué pour les mêmes produits par un autre commerçant dans la même zone d'activité ;

Attendu que C est poursuivi pour avoir offert à la revente dans le magasin des X qu'il dirige, deux produits à des prix inférieurs à leur prix d'achat effectif ;

Attendu que, pour répondre aux conclusions du prévenu alléguant que le prix de revente du second produit, inférieur au prix d'achat effectif, était aligné sur celui pratiqué par un concurrent, la cour d'appel énonce qu'il appartient au prévenu d'établir la licéité du prix constaté chez cet autre commerçant, laquelle ne pouvait se déduire de la seule absence de poursuites exercées contre ce dernier ;

Mais attendu qu'en se prononçant ainsi, alors que, pour se prévaloir de l'exception sus-énoncée, il suffit au revendeur d'apporter la preuve du prix sur lequel il prétend s'aligner, sauf à la partie poursuivante à établir le caractère illégal de ce prix, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte visé au moyen ; d'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs : et sans qu'il y ait lieu d'examiner la première branche du moyen ; casse et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Riom, en date du 7 mars 1990, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon.