Cass. crim., 23 janvier 1995, n° 94-80.453
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Gondre (faisant fonction)
Rapporteur :
M. Mordant de Massiac
Avocat général :
M. Le Foyer de Costil
Avocats :
SCP Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde
LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par G Jean-Paul, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Metz, chambre correctionnelle, en date du 18 novembre 1993, qui, pour le délit de revente à perte, l'a condamné à 15 000 francs d'amende. - Vu le mémoire produit ; - Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 1-II de la loi n° 63-628 du 2 juillet 1963 modifiée, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que Jean-Paul G a été déclaré coupable de revente à perte ;
" aux motifs qu'en vendant la boîte de raviolis Buitoni pur boeuf à 8,55 francs, prix supérieur de 0,80 franc à celui pratiqué par son concurrent, le prévenu ne rapporte pas la preuve de ce qu'il a été contraint à revendre à perte par la nécessité de s'aligner sur la concurrence ;
" alors que, pour se prévaloir de l'exception d'alignement prévue à l'article 1-II de la loi du 2 juillet 1963 modifiée, il suffit au revendeur d'apporter la preuve du prix, inférieur ou égal à son propre prix de vente, sur lequel il prétend s'être aligné ; qu'en décidant, qu'eu égard à son propre prix, supérieur au prix de référence qu'il invoquait, Jean-Paul G ne prouvait pas avoir été contraint de revendre à perte par la nécessité de s'aligner sur ce prix, ce qu'il ne lui incombait pourtant pas d'établir, la cour d'appel n'a pas donné une base légale à sa décision ;
Vu lesdits articles ; - Attendu que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction dans les motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que, dirigeant d'une société exploitant un supermarché, Jean-Paul G a été poursuivi, du chef de revente à perte, pour avoir commercialisé une marque de conserve à un prix inférieur à son coût d'achat ; que pour sa défense, il a fait valoir que le prix de 8,55 francs la boîte qu'il avait affiché et qui s'avérait inférieur de quelques centimes à son coût de revient, résultait de ce qu'il s'était efforcé de s'aligner sur le prix de vente de 7,75 francs pratiqué par son concurrent le plus direct ;
Attendu que, pour écarter les conclusions de Jean-Paul G et le déclarer coupable des faits visés à la prévention, la cour d'appel énonce que ce dernier ne pouvait se prévaloir de l'exception d'alignement prévue à l'article 1-II de la loi du 2 juillet 1963, dès lors que le prix auquel il avait commercialisé son produit était supérieur de 80 centimes au prix pratiqué par son concurrent ;
Mais attendu qu'en prononçant par ces seuls motifs, alors que le texte susvisé n'exige pas, en cas de revente à perte justifiée par un alignement sur la concurrence, que le prix pratiqué soit égal au prix servant de référence, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ; d'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, casse et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Metz, en date du 18 novembre 1993, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi ; renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel de Nancy.