Livv
Décisions

Cass. crim., 6 mai 1996, n° 95-83.350

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Culie

Rapporteur :

M. Schumacher

Avocat général :

M. Le Foyer de Costil

Avocats :

SCP Peignot, Garreau

TGI Douai, ch. corr., du 8 juill. 1994

8 juillet 1994

LA COUR : - Statuant sur les pourvois formés par C Jean-Louis, la SNC X, civilement responsable, contre l'arrêt n° 294 de la cour d'appel de Douai, 6e chambre, du 23 février 1995 qui, pour revente à perte, a condamné le premier à 20 000 francs d'amende et déclaré la seconde solidairement tenue au paiement de cette amende ; - Joignant les pourvois en raison de la connexité ; - Vu le mémoire produit, commun aux deux demandeurs ; - Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 1er de la loi n° 63-268 du 2 juillet 1963 modifié par l'article 32 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Louis C coupable du délit de revente à perte ;

" aux motifs que l'opération illégale ayant été organisée à l'échelon régional du groupe, Jean-Louis C, directeur du magasin, avait, à raison de sa qualité, seul le pouvoir de s'opposer à l'application, dans l'établissement dont il était le premier responsable, de ladite opération ;

" alors que, sauf si la loi en dispose autrement, le chef d'entreprise qui n'a pas personnellement pris part à la réalisation de l'infraction peut s'exonérer de sa responsabilité pénale s'il rapporte la preuve qu'il a délégué ses pouvoirs à une personne pourvue de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires ; que, dès lors, ayant constaté qu'une subdélégation de pouvoirs en matière de réglementation économique avait été consentie au chef du secteur épicerie, la cour d'appel ne pouvait, sans relever un acte de participation personnelle du prévenu, imputer à ce dernier le délit de revente à perte ;

Vu lesdits articles ; - Attendu que, hors le cas où la loi en dispose autrement, le chef d'entreprise qui n'a pas personnellement pris part à la réalisation de l'infraction peut s'exonérer de sa responsabilité pénale s'il rapporte la preuve qu'il a délégué ses pouvoirs à une personne pourvue de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, par procès-verbal du 20 juillet 1992, la direction générale de la concurrence a constaté que l'hypermarché X de Flers, revendait certains produits à un prix inférieur à leur prix d'achat effectif ;

Attendu que, poursuivi pour infraction à l'article 1er de la loi du 2 juillet 1963, Jean-Louis C, directeur du magasin, a, sans contester la matérialité des faits, versé aux débats une subdélégation de ses pouvoirs, en matière de réglementation économique, au chef du secteur " épicerie " ;

Attendu que, pour retenir la culpabilité du prévenu, tout en admettant que les prix litigieux avaient été fixés dans le cadre d'une opération publicitaire régionale par des commissions d'achat composées de chefs de secteurs et de chefs de rayons des différents magasins, l'arrêt attaqué énonce que le directeur de l'hypermarché avait seul le pouvoir, en raison de sa qualité, de s'opposer à l'application d'une opération illégale dans l'établissement dont il était le premier responsable ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'aucune disposition légale n'interdit au chef d'entreprise de déléguer ses pouvoirs en matière de fixation de prix, et sans constater la participation personnelle du prévenu à l'infraction, la cour d'appel a méconnu les textes et principe susvisés; d'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs, Casse et annule en toutes ses dispositions, l'arrêt de la cour d'appel de Douai, du 23 février 1995, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi, renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel d'Amiens, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.