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Décisions

Cass. crim., 22 février 1996, n° 95-81.171

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Gunehec

Rapporteur :

M. Roman

Avocat général :

M. Amiel

Avocat :

Me Prado

Cass. crim. n° 95-81.171

22 février 1996

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par Y Gilles, prévenu, la société M, civilement responsable, contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, 7e chambre, en date du 18 janvier 1995, qui, pour revente à perte et infractions aux règles de la facturation, a condamné Gilles Y à 40 000 F d'amende, solidairement avec la société M déclarée civilement responsable, a ordonné la publication de la décision et a prononcé sur les intérêts civils ; - Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1er de l'ordonnance du 2 juillet 1963, tel que modifié par l'ordonnance du 1er décembre 1986, 485 et 593 du Code de procédure pénale, renversement de la charge de la preuve, contradiction et défaut de motifs, et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Gilles Y coupable du délit de revente à perte des produits visés à la prévention, l'a condamné, in solidum avec la société M, à payer une amende de 40 000 F et à payer à l'association des Nouveaux Consommateurs du Rhône 2 000 F à titre de dommages-intérêts et 1 500 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;

" aux motifs, sur l'existence des ristournes, rabais et remises, que, sur les cadenciers fournisseurs produits par Gilles Y, il est seulement indiqué le taux et la périodicité de versement, aucune dénomination de la remise n'étant précisée sur le document ; que les balances mensuelles de ristournes distribuées et à recevoir mentionnent des taux de remise de fin d'année versées soit au Z, centrale de référencement à laquelle sont affiliés les magasins L, soit à la W, centrale d'approvisionnement dont dépendent les magasins L de la région Rhône-Alpes, soit au magasin ; que l'examen de ces documents ne permet de déterminer, ni la conditionnalité ou l'inconditionnalité des remises, ni leur nature ; qu'au surplus, il n'est pas démontré que les remises versées par les fournisseurs au Z et à la W aient été reversées intégralement au magasin ; qu'ainsi ces remises, rabais et ristournes, dans la mesure où ils ne sont ni certains en leur principe, ni chiffrables en leur montant, ne peuvent être pris en compte pour le calcul du seuil de revente à perte, et que l'accord de coopération commerciale ne précise pas la nature et la durée du service ; que les factures de coopération commerciale produites sont très imprécises dans leur rédaction ; qu'en effet elles ne mentionnent pas la dénomination exacte et le prix unitaire hors taxe des produits vendus et des services rendus ; qu'ainsi ces factures ne sont pas suffisamment probantes pour être prises en compte dans le calcul du seuil de revente à perte ;

" alors que, si l'article 1er de la loi du 2 juillet 1963, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 1er décembre 1986, édicte une présomption selon laquelle le prix d'achat effectif d'un produit est celui porté sur la facture d'achat, majoré de divers éléments que ce texte précise, cette présomption est susceptible de preuve contraire ; qu'ayant constaté que Gilles Y justifiait, d'une part, de l'existence de ristournes, rabais et remises versés par les fournisseurs au Z, à la W et au magasin de Meyzieu, et, d'autre part, de l'existence d'un accord de coopération commerciale, éléments d'où il s'évinçait que le prix d'achat des produits porté sur les factures ne correspondait pas au prix d'achat effectif de ces produits, la cour d'appel aurait dû en conclure que le prévenu avait renversé la présomption édictée par l'article 1er de la loi du 2 juillet 1963, tel que modifié par l'ordonnance du 1er décembre 1986, et aurait dû le relaxer en conséquence des fins de la poursuite ; qu'en statuant autrement, et en retenant Gilles Y dans les liens de la prévention, au prétexte que les documents en question ne permettaient pas de déterminer " la conditionnalité ou l'inconditionnalité des remises, ni leur nature " et qu'il n'était pas démontré que les remises versées par les fournisseurs au Z et à la W étaient reversées intégralement au magasin de Meyzieu, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen " ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance et de contradiction et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous leurs éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, les infractions dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice découlant de ces infractions; d'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits de la cause et de la valeur des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.