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Décisions

Cass. crim., 21 juin 2000, n° 99-86.433

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gomez

Rapporteur :

Mme de la Lance

Avocat général :

M. Launay

Avocats :

SCP Waquet, Farge, Hazan

TGI Guigamp, ch. corr., du 8 juin 1998

8 juin 1998

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par Z Yves, contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, 3e chambre, en date du 23 septembre 1999, qui, pour infraction aux règles de la facturation, l'a condamné à 30 000 francs d'amende et a ordonné la publication de la décision ; - Vu le mémoire produit ; - Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1 du Code pénal, 31, alinéas 2 à 6, et 55 de l'ordonnance 86-1243 du 1er décembre 1986, 118 et suivants de la loi du 24 juillet 1966 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Yves Z coupable d'avoir effectué pour une activité professionnelle un ou des achats de produits sans facture conforme, et en répression, l'a condamné à la peine de 30 000 francs d'amende ;

"aux motifs que l'article 124 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 dispose que dans les sociétés anonymes pourvues d'un directoire ou d'un conseil de surveillance, le directoire est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir, en toute circonstance, au nom de la société ; qu'il n'est pas contesté qu'à la période visée par la prévention, Yves Z était non seulement membre du directoire de la SA X, mais encore président en exercice de cet organe ; que c'est à bon droit qu'il a été poursuivi à ce double titre ; qu'il lui appartenait en effet, ès-qualités, d'exercer son contrôle sur la politique commerciale et financière de l'entreprise, ainsi que sur les modalités de facturation des produits achetés par elle et de faire en sorte que les factures délivrées par les fournisseurs soient conformes à la loi ;

"alors, d'une part, qu'aux termes de l'article 124 de la loi du 24 juillet 1966, le directoire est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toutes circonstances au nom de la société ; qu'en revanche, le président du directoire, désigné par le conseil de surveillance n'a pas un pouvoir plus étendu que celui des autres membres du directoire en sorte que la responsabilité pénale est assumée collectivement par tous les membres du directoire et que la responsabilité pénale du président n'est retenue qu'eu égard aux tâches lui incombant personnellement ; qu'en l'espèce, en retenant la responsabilité d'Yves Z, en sa seule qualité de président du directoire de la société X, sans constater qu'il ait eu particulièrement en charge le respect des règles de facturation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

"alors, d'autre part, que le contrôle sur la politique commerciale et financière de l'entreprise est une tâche qui incombe au conseil de surveillance dont la mission est, selon l'article 128 de la loi du 24 juillet 1966, d'exercer le contrôle permanent de la gestion de la société par le directoire, ce contrôle portant aussi bien sur l'opportunité que sur la régularité de la gestion, dans tous ses aspects comptables, financiers, techniques et commerciaux ; que dès lors, en imputant à faute à Yves Z en sa seule qualité de président du directoire, le défaut d'exécution d'une tâche qui n'incombait ni à lui-même, ni à l'organe qu'il présidait, la cour d'appel a derechef privé sa décision de toute base légale" ;

Attendu que, pour retenir la responsabilité pénale d'Yves Z, médecin anesthésiste, en sa qualité de président du directoire de la société X pour des achats de produits sans facture conforme, les juges du second degré énoncent que, selon l'article 124 de la loi du 24 juillet 1966, le directoire, dans une société anonyme, est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir, en toutes circonstances, au nom de la société ; qu'à la période visée à la prévention, Yves Z était non seulement membre du directoire, mais encore son président en exercice et qu'il lui appartenait, es-qualités, d'exercer son contrôle sur la politique commerciale et financière de l'entreprise, ainsi que sur les modalités de facturation des produits achetés par la société ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors qu'à défaut de délégation de pouvoirs établie, le président du directoire d'une société anonyme est responsable pénalement en tant que chef d'entreprise, auquel il appartient de veiller au respect de la législation, la cour d'appel a justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 31 de l'ordonnance 86-1243 du 1er décembre 1986 modifiée et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Yves Z coupable d'avoir effectué pour une activité professionnelle un ou des achats de produits sans facture conforme, et en répression, l'a condamné à la peine de 30 000 francs d'amende ;

"aux motifs que les trois fournisseurs et la SA X ont conclu des accords aux termes desquels la seconde s'engageait contractuellement à régler de manière anticipée par rapport aux conditions générales de ventes les factures émises par les premiers, en contrepartie de l'octroi par ceux-ci d'escomptes à des taux plus avantageux que ceux résultant de ces même conditions générales de vente ; que ces escomptes doivent, dès lors, s'analyser comme constituant des réductions de prix acquises à la date de chaque vente et directement liées à ces opérations de vente, au sens de l'alinéa 3 de l'article 31 de l'ordonnance 86-1243 du 1er décembre 1986, modifiée par la loi 96-588 du 1er juillet 1996 ; qu'il convenait en conséquence de faire mention de ces escomptes sur les factures ;

"alors que la réduction de prix qui doit être mentionnée sur la facture est la réduction de prix acquise à la date de l'opération ; que tel n'est pas le cas de la réduction de prix assortie d'une condition suspensive ; qu'Yves Z faisait valoir dans ses écritures que l'escompte dont bénéficiait la société auprès des fournisseurs n'était pas acquise à la date de la vente puisqu'il dépendait de la date à laquelle la société honorait les factures et du choix qui lui appartenait de procéder ou non à un paiement anticipé ; qu'en omettant de répondre à ces arguments péremptoires, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Attendu que, pour déclarer Yves Z, président du directoire de la société X, coupable d'avoir effectué, pour une activité professionnelle, des achats de produits sans facture conforme, les juges du second degré se prononcent par les motifs repris au moyen et énoncent, notamment, que la société s'étant engagée à régler de manière anticipée les factures de ses fournisseurs en contrepartie d'escomptes à des taux avantageux, ces escomptes, acquis à la date de la vente, constituaient des réductions de prix devant figurer sur les factures; qu'en cet état, la cour d'appel, qui a souverainement analysé, sans insuffisance ni contradiction, les accords commerciaux intervenus entre la société et ses fournisseurs, a justifié sa décision; que le moyen ne saurait donc être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.