Cass. crim., 27 février 1995, n° 94-82.178
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Gondre (conseiller le plus ancien faisant fonctions)
Rapporteur :
M. Roman
Avocat général :
M. Perfetti
Avocats :
SCP Tiffreau, Thouin-Palat
LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par X Michel, contre l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux, 3e chambre, en date du 22 mars 1994, qui, pour infractions aux règles de la facturation, l'a condamné à 40 000 F d'amende ; - Vu le mémoire produit ; - Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 31 et 55 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, 485, 567, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
" en ce que la cour d'appel déclare le prévenu coupable d'infraction à la réglementation des factures commerciales et le condamne à une peine de 40 000 F d'amende ;
" aux motifs qu'il résulte de la seule lecture du contrat de travail de Michel B que ce salarié a des fonctions de directeur de centrale, comportant des tâches uniquement d'organisation et gestion, tant sur le matériel que sur le personnel ; que la délégation de responsabilité qui lui est effectivement consentie ne vise qu'un contrôle de la régularité formelle des livraisons reçues et effectuées, y compris pour ce qui concerne les documents les accompagnant (mais) ne s'étend pas au pouvoir décisionnel nécessaire à la négociation avec les sociétés fournisseurs, en particulier sur les conditions de vente, ni au pouvoir de traiter et transiger dans le cadre de litiges commerciaux ; que les factures sont émises en représentation de remises n gociées en vertu d'accords commerciaux ou en représentation de litiges ; que, comme le pouvoir de Michel B en cette matière se borne à la vérification des factures accompagnant les livraisons ou, plus largement, aux responsabilités découlant de la vocation d'entrepôt de la société S, et des actes d'exécution qu'elle rend nécessaires (réception, rangement, gestion des stocks et gestion du personnel), la négociation des prix de livraison sortant des conditions de vente habituelles des fournisseurs sort à l'évidence de ses pouvoirs comme des responsabilités qui en découlent et sont énoncées au contrat de travail ; que toutes les responsabilités pénales y figurant et comprises dans la délégation du 4 janvier 1988 ne peuvent être entendues qu'en ce sens ; que, si Michel X est effectivement titulaire d'un mandat social au sein de la S, une telle position n'exclut nullement qu'il exerce un pouvoir de décision au sein de la société ; que de telles fonctions l'appellent naturellement et juridiquement à arrêter les décisions essentielles à la vie sociale ; qu'eu égard à la taille et à la fonction de la société, qui exploite une centrale d'achat, les négociations de rabais et des avoirs fournisseurs dans le cadre d'un litige rentrent précisément dans les attributions du président du conseil d'administration (v. arrêt infirmatif attaqué, pp. 4 et 5) ;
" alors qu'en ayant écarté l'existence d'une délégation de pouvoirs au motif inopérant tiré de ce que le directeur n'aurait pas eu le pouvoir de conclure les accords commerciaux avec les fournisseurs, après avoir relevé : d'une part, que le prévenu était " président du conseil d'administration ", mais sans avoir constaté qu'il disposait également de pouvoirs de direction générale ni qu'il aurait participé personnellement à la réalisation de l'infraction ; d'autre part, que la délégation de pouvoirs invoquée visait le " directeur de la centrale d'achat " exploitée par la société S, nécessairement pourvu en cette qualité de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires, et dont elle avait constaté que " la vérification des factures accompagnant les livraisons " relevait de ses pouvoirs ; enfin, que les poursuites visaient des " factures ne comportant aucune indication sur la nature des prestations concernées, la dénomination du service rendu, les quantités en cause ni les dates de prestations ", la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'un fonctionnaire du service de la répression des fraudes a constaté que la société dont Michel X est le président du conseil d'administration a adressé à l'un de ses fournisseurs trois factures n'indiquant ni la date des prestations de service, ni la dénomination précise, ni la quantité, ni le prix unitaire des services rendus; que Michel X, poursuivi pour infractions aux règles de la facturation, a été relaxé par le tribunal correctionnel, au motif qu'il avait délégué ses pouvoirs en la matière au directeur de la centrale d'achat exploitée par sa société ;
Attendu que, pour le déclarer coupable des infractions poursuivies, la cour d'appel, après avoir constaté que les factures litigieuses se rapportent en fait à des " remises négociées en vertu d'accords commerciaux ou en représentation de litiges ", relève que la délégation de pouvoirs consentie au directeur de la centrale d'achat se borne à la vérification des factures accompagnant les livraisons, mais " ne s'étend pas au pouvoir décisionnel nécessaire à la négociation avec les services fournisseurs, en particulier sur les conditions de vente, ni au pouvoir de traiter et transiger dans le cadre de litiges commerciaux " ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, relevant de leur pouvoir souverain d'appréciation de l'étendue de la délégation de pouvoirs invoquée, les juges du second degré ont justifié leur décision sans encourir les griefs allégués; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Rejette le pourvoi.