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Décisions

Cass. crim., 3 avril 1995, n° 94-81.893

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gondre

Rapporteur :

M. Culié

Avocat général :

M. Libouban

Avocats :

SCP Waquet, Farge, Hazan

TGI Lure, ch. corr., du 15 oct. 1993

15 octobre 1993

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par P Daniel, contre l'arrêt de la cour d'appel de Besançon, chambre correctionnelle, en date du 8 mars 1994, qui, pour achat sans facture conforme, l'a condamné à la peine de 5 000 F d'amende ; - Vu le mémoire produit et les observations complémentaires ; - Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 510, 511, 591 et 592 du Code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué ne donne aucune précision quant à la composition de la Cour lors des débats et du délibéré ;

" alors que les décisions des chambres correctionnelles des cours d'appel doivent être rendues en présence de l'ensemble des trois magistrats du siège ayant instruit la cause et délibéré ou à tout le moins de l'un d'entre eux ; qu'en ne précisant pas que la composition de la Cour lors du prononcé de l'arrêt était la même que lors des débats et du délibéré, l'arrêt attaqué ne satisfait pas aux conditions essentielles de son existence légale ;

Attendu que l'arrêt mentionne qu'il a été jugé et prononcé par la cour d'appel où siégeaient M. Rognon, président, Mme Badinand et M. Bangratz, conseillers, que M. Rognon a été entendu en son rapport et qu'il a été délibéré conformément à la loi ;

Attendu qu'en l'état de ces mentions, dont il se déduit que la composition de la juridiction était la même lors des débats, du délibéré et du prononcé de la décision, l'arrêt attaqué ne saurait encourir le grief du moyen, lequel ne peut qu'être écarté ;

Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 31 et 55 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré P coupable d'infractions à la législation en matière de facturation ;

" aux motifs que si P excipe d'une délégation de pouvoirs consentie au chef du rayon alimentaire de l'hypermarché concernant la détermination des prix et des conditions de vente, la facturation ne relève pas de ces fonctions ; qu'étant partie intégrante de la comptabilité commerciale du vendeur et de l'acheteur, la facturation est un élément fondamental de l'organisation de l'entreprise et de ses relations avec clients, fournisseurs et tiers ; qu'admettre que la charge de ces règles impératives et d'ordre public puisse être déléguée reviendrait à réduire le rôle des administrateurs à celui de simples exécutants qui n'auraient plus aucune responsabilité commerciale, fiscale ou pénale ;

" alors, d'une part, que hors les cas où la loi en dispose autrement, le chef d'entreprise qui n'a pas personnellement pris part à la réalisation de l'infraction peut s'exonérer de sa responsabilité pénale s'il rapporte la preuve qu'il a délégué ses pouvoirs à une personne pourvue de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires ; qu'en affirmant, par une motivation abstraite et générale, qu'un dirigeant d'entreprise ne saurait s'exonérer en matière économique de la responsabilité pénale découlant de ses obligations relatives à la facturation, la cour d'appel a méconnu les principe et textes susvisés ;

" alors, d'autre part, que P avait versé aux débats les documents contractuels attestant de ce qu'il avait confié à M. Dorson la mission de procéder à l'achat des produits et qu'il lui avait délégué ses pouvoirs en vue de faire appliquer la législation en vigueur sur les prix ; que les conditions de facturation étant étroitement liées à la détermination des prix pratiqués, la cour d'appel qui a condamné P nonobstant l'existence de cette délégation parfaitement régulière a méconnu les textes et principe susvisés ;

Attendu que pour déclarer Daniel P coupable, en qualité de président de la SA L distribution, d'achat sans facture conforme, par application de l'article 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, et écarter les conclusions du prévenu faisant valoir qu'il avait délégué l'ensemble des attributions de gestion du rayon épicerie à Philippe Dorson, la cour d'appel observe que cette délégation ne mentionne nullement les règles de la facturation ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations relevant de son pouvoir souverain d'appréciation des faits et circonstances de la cause soumis au débat contradictoire, et abstraction faite de motifs erronés mais surabondants, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués; d'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.