CA Montpellier, ch. corr., 10 juin 1987, n° 1028-87
MONTPELLIER
Arrêt
PARTIES
Défendeur :
Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes du département de l'Hérault
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Pinsseau
Conseillers :
MM. Cutajar, Jammet
LA COUR,
Après en avoir délibéré conformément à la loi et composée des magistrats devant lesquels l'affaire a été plaidée, a statué en ces termes :
Vu le jugement contradictoire à signifier rendu le 2 septembre 1985 par le Tribunal correctionnel de Montpellier qui a déclaré Armand W coupable du délit d'achats sans factures, l'a condamné, en répression à une peine d'amende de 25 000 F, a dit que la SARL A dont il est le gérant répondrait solidairement du paiement de l'amende et des frais,
Vu la signification qui lui en a été faite par exploit du 9 janvier 1986 ;
Vu l'appel qu'il en a déclaré au greffe du tribunal le 20 janvier 1986 et l'appel incident interjeté le même jour par le Procureur de la République de Montpellier ;
Attendu que le prévenu comparaît à l'audience ; qu'il soutient que tous les achats effectués, même sans factures en raison de la qualité des vendeurs, figurent sur ses livres comptables et qu'il n'a donc pas eu l'intention de dissimuler ses opérations commerciales ; qu'il plaide la relaxe ;
Attendu que le représentant de la Direction de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes conclut à la confirmation du jugement qui est également requise par le Ministère public ;
Attendu que les appels ont été déclarés dans les formes et délais de la loi ; qu'ils sont donc réguliers et recevables ;
Attendu, au fond, qu'il est reproché à Armand W gérant de la SARL A dont le siège social est situé à Castelnau le Lez, 134, route de Nîmes d'avoir effectué des achats de meubles en vue de leur restauration et de leur revente sans solliciter la délivrance de factures en contravention aux dispositions des ordonnances du 30 juin 1945 ;
Attendu que lors d'un contrôle effectué au mois de juin 1982 les fonctionnaires du service régional de Police judiciaire de Montpellier ont effectivement relevé, à la suite de leurs investigations dans les locaux de la société, que W ne détenait qu'une faible partie des factures d'achat du mobilier qu'il destinait à la vente ;
Attendu qu'ils ont noté que quelques cartes de visite chiffrées ou des feuilles de papier sans entête tenaient lieu de preuves des transactions ; qu'ils ont cependant indiqué que le livre de police obligatoire présenté était bien tenu et que la comptabilisation des règlements en espèces de ces achats était également effectuée correctement sur les livres de caisse de l'entreprise ;
Attendu que l'on ne saurait faire grief au prévenu de ne pas obtenir de ses vendeurs habituels, brocanteurs, chineurs, commerçants de petite envergure très souvent illettrés, des factures au sens littéral du terme pour des transactions ponctuelles ; que le document présenté par W à l'audience est évocateur des difficultés que ces vendeurs rencontrent pour établir de véritables factures, difficultés qui ont conduit le prévenu à mettre en place un système d'autofacturation ;
Attendu qu'il est établi que malgré l'absence matérielle des factures toutes les opérations effectuées par W ont été reportées sur les livres comptables et de police de son entreprise, de sorte que le contrôle de ses activités était toujours possible;
Attendu dès lors, que l'intention coupable n'est pas établie etqu'il échet dans ces conditions de relaxer W et de le renvoyer des fins de la poursuite sans peine ni dépens;
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement contradictoirement et en matière correctionnelle ; Reçoit les appels ; Infirmant le jugement déféré ; Relaxe et Renvoie Armand W des fins de la poursuite sans peine ni dépens ; Le tout en application des dispositions des articles 470 et 512 et suivants du nouveau code de procédure civile.