CA Paris, 14e ch. A, 22 novembre 2000, n° 2000-19457
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Sogec Gestion (Sté)
Défendeur :
Scan Coupon (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lacabarats
Conseillers :
Mme Charoy, M. Pellegrin
Avoués :
SCP Bernabé-Chardin-Cheviller, SCP Fisselier-Chiloux-Boulay
Avocats :
Mes Nemo, Villey.
Vu l'appel interjeté le 20 octobre 2000 par la Société Sogec Gestion d'une ordonnance de référé prononcée le 16 octobre 2000 par le président du tribunal de commerce d'Évry qui a notamment:
ordonné sous astreinte à Sogec Gestion de régler à Scan Coupon dans un délai maximum de 3 jours ouvrables les demandes de paiement reçues de Scan Coupon en exécution du mandat que celui-ci a reçu des distributeurs ;
ordonné sous astreinte à Sogec Gestion de cesser de se rendre coupable de tout acte de dénigrement et d'acte de concurrence déloyale au préjudice de Scan Coupon, notamment de cesser de publier des décisions non définitives ;
Vu l'assignation pour plaider à jour fixe devant la cour d'appel de Paris signifiée le 19 octobre 2000 par la société Sogec Gestion qui demande notamment à la Cour :
- de joindre les différentes instances dont la cour est saisie,
- de réformer les ordonnances entreprises,
- de dire les demandes de Scan Coupon irrecevables ou en tout cas de dire qu'il n'y a pas lieu à référé,
- de condamner Scan Coupon au paiement d'une somme de 30.000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Vu les conclusions signifiées le 25 octobre 2000 par la société Scan Coupon qui demande notamment à la Cour de confirmer partiellement l'ordonnance, de la réformer sur les mesures susceptibles de mettre fin à son préjudice et d'ordonner sous astreinte à Sogec Gestion d'adresser à chacun des distributeurs ayant été destinataires d'une lettre circulaire faisant état d'une décision de référé du 2 août 2000 une copie de "l'ordonnance" à intervenir, de condamner Sogec Gestion à payer la somme de 30.000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Sur le bien fondé de l'appel :
Considérant qu'aucune circonstance ne justifie la jonction des procédures sollicitée par Sogec Gestion :
Sur l'obligation de régler les demandes de paiement :
Considérant que par assignation du 10 octobre 2000 la société Scan Coupon a fait assigner en référé la société Sogec Gestion devant le président du tribunal de commerce d'Évry pour que la société défenderesse soit condamnée à reprendre le règlement de la totalité des demandes de paiement que Scan Coupon lui a déjà envoyées ou qu'elle est susceptible de lui adresser ;
Considérant cependant que la même demande avait été antérieurement présentée par Scan Coupon devant le président du tribunal de commerce de Paris, en réponse à une assignation en référé délivrée contre elle par la société Sogec Gestion ; que cette demande ayant été rejetée par une ordonnance du 2 août 2000, l'autorité attachée à une décision rendue entre les mêmes parties implique qu'elle ne puisse être contredite par une autre décision de référé qu'en cas de circonstances nouvelles non caractérisées en l'espèce, les faits incriminés par Scan Coupon devant le président du tribunal de commerce d'Évry étant par leur nature identiques à ceux antérieurement soumis au juge des référés du tribunal de commerce de Paris, même s'ils se seraient poursuivis depuis sa décision ; qu'il convient dès lors à ce point de vue d'infirmer la décision attaquée et de déclarer irrecevable la demande en cause ;
Sur l'obligation de cesser les actes de dénigrement :
Considérant que par la même assignation la société Scan Coupon fait grief à la société Sogec Gestion de s'être abusivement prévalue de l'ordonnance de référé du 2 août 2000 en adressant aux distributeurs une circulaire contenant des informations inexactes sur cette décision ;
Considérant que la société Sogec Gestion réplique à cet égard que le fait de se prévaloir d'une décision de justice ne saurait lui être reproché puisqu'elle doit des comptes à ses mandants sur les conditions dans lesquelles sera assuré le remboursement des bons de réduction ;
Considérant cependant que les lettres-circulaires adressées le 25 septembre 2000 à certains distributeurs par Sogec Gestion mentionnent seulement une interdiction de remboursement des bons de réduction prononcée à l'encontre de Scan Coupon "par le tribunal de commerce de Paris", sans faire état du caractère provisoire de l'ordonnance, alors que Sogec Gestion savait depuis le 20 septembre qu'un appel avait été formé contre celle-ci ;
Considérant que la diffusion publique d'une information incomplète sur une décision de justice, dans des conditions pouvant induire les tiers en erreur sur sa portée réelle, constitue un trouble manifestement illicite que le juge des référés a le pouvoir de faire cesser ;
Considérant qu'en l'espèce le juge des référés a exactement apprécié les circonstances de l'affaire en délivrant à Sogec Gestion l'injonction contestée ; qu'il n'y a pas lieu d'y ajouter, comme le requiert Scan Coupon, l'envoi à chaque distributeur ayant reçu la lettre circulaire susvisée d'une copie de la décision à intervenir, Scan Coupon ayant pris elle-même l'initiative de diffuser auprès de différents magasins, le 28 septembre 2000, des informations rectificatives sur l'objet de l'ordonnance de référé du 2 août 2000 et l'appel interjeté le 19 septembre précédent; que la décision attaquée doit, sur cette question, être confirmée ;
Considérant que compte tenu de la solution donnée au litige, il convient de laisser à chaque partie la charge de ses dépens et frais non compris dans les dépens ;
Par ces motifs, Rejette la demande de jonction des procédures, Infirme l'ordonnance du 16 octobre 2000, en ce qu'elle a ordonné sous astreinte à Sogec Gestion de régler à Scan Coupon les demandes de paiement reçues de celle-ci, Statuant à nouveau: Déclare irrecevable la demande présentée de ce chef par Scan Coupon, Confirme pour le surplus l'ordonnance, Laisse à chaque partie la charge de ses dépens et frais non compris dans les dépens.