Cass. ass. plén., 12 juillet 2000, n° 99-19.005
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Peugeot (SA)
Défendeur :
Canal Plus (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Premier président :
M. Canivet
Rapporteur :
M. Bargue
Avocat général :
M. Joinet
Avocats :
SCP Gatineau, SCP Lyon-Caen Fabiani Thiriez.
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 9 février 1999) rendu sur renvoi après cassation (Civ. 2, 2 avril 1997 Bull. n° 113) que la société Automobiles Peugeot a assigné la société Canal Plus en réparation du préjudice qu'elle estimait avoir subi du fait des propos prêtés à son président, M. Jacques Calvet, et qui auraient dénigré les produits de la marque, à l'occasion de la diffusion d'émissions télévisées des "Guignols de l'info" ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches : - Attendu que la société Automobiles Peugeot fait grief à l'arrêt attaqué, qui a rejeté ses demandes, d'avoir constaté la présence du greffier lors du délibéré et à l'arrêt rectificatif du 29 juin 1999 d'avoir ordonné la rectification des mentions de l'arrêt initial sur ce point, alors, 1°) qu'en énonçant dans l'arrêt du 9 février 1999 sous la mention "composition de la Cour lors des débats et du délibéré", le nom du greffier, d'où il ressortait que celui-ci avait assisté au délibéré, sans que l'arrêt rectificatif du 29 juin 1999 ait pu en rien rectifier cette cause de nullité de la décision du 9 février 1999, la Cour d'appel a violé les articles 447, 448, 454 et 458 du nouveau Code de procédure civile; 2°) que la Cour d'appel qui a considéré comme une erreur matérielle rectifiable la mention de l'arrêt du 9 février 1999 attestant la présence du greffier au délibéré, quand la raison ne commandait aucunement de considérer ce vice de fond comme une simple erreur matérielle, et sans à aucun moment relever le moindre élément dans le dossier permettant de s'assurer qu'il s'agissait effectivement d'une erreur matérielle, et que le délibéré était bien resté secret, a violé l'article 462 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il ne résulte pas des mentions de l'arrêt que le greffier, qui fait partie de la juridiction, ait assisté au délibéré ; que le moyen qui n'est pas fondé en sa première branche est irrecevable en sa seconde critiquant une rectification surabondante ;
Et sur le second moyen, pris en ses quatre branches : - Attendu que la société Automobiles Peugeot fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes alors, selon le moyen, 1°) qu'en relevant le caractère outrancier, provocateur et répété des propos tenus lors de l'émission litigieuse à l'encontre des véhicules produits et commercialisés par la société Automobiles Peugeot, sans pour autant reconnaître l'existence d'une faute commise par la société Canal Plus, la Cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et partant, violé l'article 1382 du Code civil; 2°) qu'en n'analysant pas, comme il lui était demandé, les propos prêtés à la marionnette de M. Calvet et dirigés contre les produits Peugeot, pour en conclure à tort que les moqueries ne visaient pas la société Automobiles Peugeot en tant qu'entreprise commerciale, mais les attitudes de son PDG, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et suivants du Code civil; 3°) qu'en affirmant que les moqueries étaient dirigées, non contre la société Automobiles Peugeot, mais contre les attitudes de son PDG, puis en reconnaissant l'existence de propos dirigés contre la production même de la société Automobiles Peugeot, la Cour d'appel a statué par des motifs contradictoires et partant privé sa décision de motifs; 4°) qu'en se bornant à affirmer sans s'en expliquer que les phrases désobligeantes prêtées à la marionnette de M. Calvet ne sauraient avoir aucune répercussion sur le téléspectateur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et suivants du Code civil;
Mais attendu que l'arrêt constate que les propos mettant en cause les véhicules de la marque s'inscrivaient dans le cadre d'une émission satirique diffusée par une entreprise de communication audiovisuelle et ne pouvaient être dissociés de la caricature faite de M. Calvet, de sorte que les propos incriminés relevaient de la liberté d'expression sans créer aucun risque de confusion entre la réalité et l'œuvre satirique ; que de ces constatations et énonciations, la Cour d'appel, répondant aux conclusions sans se contredire, a pu déduire que la société Canal Plus n'avait commis aucune faute et a ainsi légalement justifié sa décision;
Par ces motifs : rejette le pourvoi.