CA Versailles, 12e ch. sect. 2, 27 avril 2000, n° 98-00308
VERSAILLES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Compagnie Radio Maritime Société Nouvelle (SA)
Défendeur :
Martec (SA), Tekelec Airtronic(SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Assié
Conseillers :
Mme Laporte, M. Fedou
Avoués :
SCP Lissarrague-Dupuis & Associes, SCP Jullien-Lecharny-Rol
Avocats :
Mes Vatel, Frenot.
Faits et procédure :
Par jugement en date du 29 septembre 1994, le Tribunal de Commerce de Nanterre a placé la société Compagnie Radio Maritime (CRM), distributeur d'équipements électroniques pour la marine, l'industrie et l'aviation, en redressement judiciaire.
Dans le cadre des tractations ayant précédé la reprise de la société CRM, il avait été prévu qu'un dossier de présentation de cette société serait soumis à la société Tekelec Airtronic ; un accord de confidentialité fut signé le 09 novembre 1994, aux termes duquel le Groupe Tekelec prenait l'engagement:
- de "prendre toutes les précautions nécessaires pour que la discrétion la plus absolue soit réservée aux éléments contenus dans ce dossier", et de conserver " une confidentialité totale " vis à vis des clients, des fournisseurs et des concurrents de la société CRM",
- de "ne pas transmettre à des tiers, à l'exception des responsables qualifiés" de Tekelec et de ses conseils "les indications qui y sont contenues, ni d'en user au préjudice de la société",
- et, au cas où Tekelec ne soumettrait pas d'offre d'achat ou que son offre ne serait pas retenue par le tribunal, de "n'entreprendre ultérieurement aucune action qui puisse porter préjudice à la société".
Le 15 décembre 1994, la société Geolink, société de vente de matériel de communication, déposait un projet de plan de cession du Groupe CRM par l'intermédiaire de sa filiale CRM SN.
Ce plan prévoyait notamment la reprise de trente-quatre salariés et envisageait la perspective d'un chiffre d'affaires prévisionnel de 39,9 millions de francs, constitué pour 11 millions de francs du chiffre d'affaires généré par la distribution des produits Skanti et Magnavox.
L'offre de la société Geolink, communiquée à l'administrateur judiciaire et au Président du Tribunal de Commerce de Nanterre, comportait une annexe 4 reprenant la liste des contrats indispensables à la continuation de l'exploitation, conformément à l'article 86 de la loi du 25 janvier 1985, dans cette liste figuraient les contrats de distribution exclusive Skanti et Magnavox.
Le 5 janvier 1995 était signé un contrat de distribution exclusive entre la société Skanti et la société Martec, filiale de la société Tekelec Airtronic, pour les produits dont l'exclusivité était auparavant dévolue à la société CRM.
Le 5 février 1995, la société Magnavox reportait à son tour l'exclusivité attribuée à la société CRM sur la société Martec.
Le 9 février 1995, le Tribunal de Commerce de Nanterre a agréé le plan de cession présenté par la société Geolink
Sur la liste établie au titre de l'article 86 de la loi du 25 janvier 1985 ne figuraient plus les contrats Skanti et Magnavox.
Invoquant les manœuvres de concurrence déloyale dont elle a été victime de la part des sociétés Tekelec et Martec, constituées par:
- un démarchage des fournisseurs principaux dont les noms figuraient au titre des informations confidentielles et plus particulièrement les sociétés Skanti et Magnavox;
- un mouvement de personnel de la société CRM vers la société Martec, filiale de la société Tekelec Airtronic, la société Compagnie Radio Maritime - Société Nouvelle (CRM SN) a, à la suite d'une mise en demeure adressée le 28 mars 1996 par la société Geolink et restée infructueuse, fait assigner par acte d'huissier du 11 juin 1996 les sociétés Martec et Tekelec devant le Tribunal de Commerce de Nanterre, pour voir constater que les agissements des défenderesses sont constitutifs d'actes de concurrence déloyale, et pour les voir condamner à lui payer la somme de 22 millions de francs à titre de dommages et intérêts correspondant à la perte moyenne du chiffre d'affaires consécutive à la rupture des deux contrats Skanti et Magnavox sur deux années (durée du plan homologué par le Tribunal de commerce de Nanterre), augmentée d'une indemnité de 50.000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par jugement en date du 24 septembre 1997, le Tribunal a :
- débouté la SA Compagnie Radio Maritime Société Nouvelle (CRM SN) de l'intégralité de ses demandes,
- débouté la SA Martec et la SA Tekelec Airtronic de leur demande reconventionnelle en dommages et intérêts,
- condamné la SA CRM SN à payer à chacune des défenderesses la somme de 15.000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- condamné la SA CRM SN aux dépens.
La société Compagnie Radio Maritime Société Nouvelle (CRM SN) SA a interjeté appel de ce jugement.
Elle fait grief aux sociétés du Groupe Tekelec d'avoir, par leur comportement déloyal, obtenu indûment le bénéfice de deux contrats d'exclusivité et procédé sciemment au pillage des deux principales sources de chiffres d'affaires d'une entreprise en difficulté, sans se soumettre aux dispositions de la loi du 25 janvier 1985, laquelle édicte une procédure d'ordre public quant au sort du patrimoine de l'entreprise en difficulté, et encadre la compétition entre les repreneurs éventuels.
Elle explique qu'en l'occurrence ce comportement déloyal est amplement démontré par la prise de contact initiée auprès du Directeur Général de la société CRM par le Groupe Tekelec, le 9 novembre 1994 et concrétisée par la signature d'un accord de confidentialité à cette date (donc postérieurement au dépôt du bilan de la société CRM intervenu le 29 septembre 1994), alors même que, le 22 novembre 1994, soit moins de quinze jours après la signature de cet accord de confidentialité, Skanti retirait l'exclusivité attribuée à la société CRM pour la distribution de ses produits, en violation des dispositions de l'article 37 alinéa 5 de la loi du 25 janvier 1985.
Elle soutient également que cette attitude fautive est corroborée par le fait que les sociétés intimées ont obtenu l'exclusivité Skanti le 5 janvier 1995 et l'exclusivité Magnavox le 05 février 1995 en pleine connaissance de ce que les plans de cession avaient été déposés et comportaient en annexe la liste prévue par l'article 86 de la loi du 25 janvier 1985 sur laquelle figuraient les deux contrats de distribution exclusive Skanti et Magnavox, puisque, conformément aux articles 21 de ladite loi et 32 du décret du 27 décembre 1985, ce projet de plan de cession avait été rendu public par dépôt au Greffe.
L'appelante considère que, dans ces conditions, les intimées ont, en pleine connaissance de cause, conclu des contrats d'exclusivité avec les sociétés Magnavox et Skanti en s'exonérant de la procédure prévue par la loi du 25 janvier 1985.
Elle relève que leur comportement déloyal, conforté ultérieurement par l'embauche de deux anciens salariés de la société CRM, est d'autant moins tolérable qu'il s'est effectué, au détriment d'une société faisant l'objet d'une procédure collective, par des sociétés concurrentes n'ayant même pas jugé nécessaire de déposer une offre de cession.
Estimant qu'il existe à tout le moins un faisceau d'indices démontrant que la société Martec s'est appropriée les contrats d'exclusivité Magnavox et Skanti par des procédés déloyaux, la société Compagnie Radio Maritime (CRM SN) demande à la Cour d'infirmer en son entier le jugement entrepris et de dire que les agissements des sociétés Tekelec et Martec sont constitutifs de concurrence déloyale envers la société CRM.
Relativement à l'appréciation du préjudice subi par elle du fait de ces agissements déloyaux, l'appelante fait observer que l'abandon par elle, pour des raisons de commodités de procédure, de ses demandes de transmission forcée desdits contrats au titre de l'article 86 de la loi du 25 janvier 1985 est sans incidence sur l'existence et l'importance de son préjudice, lequel est suffisamment caractérisé par les éléments suivants :
- le détournement déloyal des fichiers de fournisseurs a provoqué une grave désorganisation commerciale de CRM, en raison de la perte de deux contrats nécessaires à l'exploitation de l'entreprise ;
- les agissements déloyaux des sociétés intimées ont généré une réduction importante de la marge bénéficiaire de la société CRM, du fait de l'augmentation des charges d'exploitation, due au coût plus élevé des nouveaux distributeurs;
- ces agissements ont compromis la réussite du plan de cession de la société Geolink agréé par le Tribunal de Commerce de Nanterre le 09 février 1995.
En conséquence, la société CRM SN sollicite la condamnation solidaire des sociétés Martec et Tekelec Airtronic à lui payer la somme de 22 millions de francs à titre de dommages et intérêts correspondant à la perte moyenne du chiffre d'affaires consécutive à la rupture des deux contrats Skanti et Magnavox sur deux années, durée du plan homologué par le Tribunal de Commerce de Nanterre.
À titre subsidiaire, elle propose que soit désigné tel expert qu'il plaira à la Cour avec pour mission d'évaluer contradictoirement le préjudice subi par la société appelante en prenant en considération :
- la perte de clientèle de CRM SN au profit du Groupe Tekelec relativement aux produits Skanti et Magnavox;
- la marge perçue de CRM SN par le Groupe Tekelec pour s'approvisionner sur lesdits produits.
En toute hypothèse, elle conclut à la condamnation des sociétés Martec et Tekelec solidairement à lui payer la somme de 50.000 F en remboursement des frais non compris dans les dépens exposés par elle en première instance, outre une somme identique en remboursement des frais non compris dans les dépens exposés par elle en appel.
Les sociétés Martec SA et Tekelec Airtronic SA répondent qu'il n'a jamais été remis au Groupe Tekelec un dossier qui comprendrait notamment la liste du personnel employé, les chiffres d'affaires réalisés par produit, les marges effectuées, les documents comptables, les contrats en cours et plus généralement toutes les pièces d'usage correspondant à un véritable dossier de présentation d'une société en redressement judiciaire susceptible de faire l'objet d'une offre de reprise.
Tout en relevant qu'aucune preuve n'est rapportée de l'envoi d'un dossier, ni d'une demande de retour d'un tel dossier, elles contestent qu'il y ait eu la moindre captation d'informations purement confidentielles, et elles précisent que les informations ainsi que les contrats et conventions qui liaient CRM à Skanti et à Magnavox étaient sur la place publique et connus du milieu très spécifique dans le cadre duquel s'inscrit ce litige.
Elles font également valoir que c'est à tort que la société CRM SN prétend que, dans le cadre de la cession de l'entreprise CRM, un certain nombre de contrats ont fait l'objet d'une cession en application de l'article 86 de la loi du 25 janvier 1985, et que dans la liste de ces contrats figuraient les conventions Skanti et Magnavox, alors que :
- nulle mention n'est faite dans le jugement du Tribunal de Commerce de Nanterre en date du 9 février 1995, des contrats Skanti et Magnavox;
- ces conventions ne pouvaient être visées par le jugement de cession, dans la mesure où, à l'époque, elles n'étaient plus en vigueur.
Elles réitèrent que la résiliation du contrat conclu entre la société CRM et la société Skanti est intervenue dès le 22 novembre 1994 donc avant l'offre déposée par l'appelante, et qu'il n'existe aucune ambiguïté sur les conditions dans lesquelles Skanti a pris l'initiative de résilier, liée à la procédure collective dont CRM faisait l'objet et donc totalement étrangère à une intervention directe ou indirecte de la société Martec ou de la société Tekelec.
Elles contestent également avoir eu connaissance de l'existence des sociétés Skanti et Magnavox par le biais des informations soi-disant confidentielles qui leur ont été données début novembre 1994, alors qu'elles entretenaient depuis de nombreuses années des relations d'affaires et des relations commerciales avec lesdites sociétés.
Elles ajoutent qu'aucune conséquence ne peut être tirée du fait que la société Martec a embauché deux anciens salariés de CRM, Messieurs Alain Vezin et Guy Jacq, tous deux licenciés pour motif économique, dans la mesure où :
- ces deux salariés étaient libres de tout engagement, et leurs compétences professionnelles correspondaient au personnel spécifique hautement spécialisé recherché par les intimées
- le simple fait d'engager des salariés d'une société en liquidation judiciaire, eût-elle une activité concurrente, ne saurait caractériser un acte de concurrence déloyale.
Alléguant que l'appelante est dans l'impossibilité de rapporter la preuve formelle d'agissements anticoncurrentiels et déloyaux commis par Martec et Tekelec dans la mesure où ces agissements n'existent pas, les intimées sollicitent la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les réclamations présentées par la société CRM SN
Se portant pour le surplus incidemment appelantes de ce jugement, les sociétés Martec et Tekelec demandent à la Cour de condamner la société Compagnie Radio Maritime Société Nouvelle à leur payer, à chacune d'entre elles, une somme de 100.000 F à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre une indemnité de 12.500 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, venant en complément de celle qui leur a été octroyée de ce chef en première instance.
Motifs de la décision :
Considérant qu'au soutien de son action en concurrence déloyale, la société Compagnie Radio Maritime Société Nouvelle (CRM SN) invoque en premier lieu la violation par le Groupe Tekelec de l'accord de confidentialité signé le 9 novembre 1994, dès lors que les sociétés de ce groupe ont pu alors se faire communiquer un dossier de présentation de la société CRM, ce qui leur a permis d'avoir une parfaite connaissance de la situation de cette société et d'exploiter les informations obtenues en détournant à leur profit les principales exclusivités dont bénéficiait CRM.
Considérant toutefois qu'outre le fait que l'accord de confidentialité signé par les parties prévoit qu'à titre confidentiel un dossier "sera" remis au Groupe Tekelec, il ne résulte nullement des documents produits aux débats qu'un tel dossier a été effectivement adressé aux sociétés intimées en vue de leur permettre de procéder à une évaluation approfondie de la situation de la société CRM dans la perspective d'une éventuelle acquisition ;
Considérant qu'en toute hypothèse, l'existence alléguée d'un manquement des sociétés Tekelec et Martec à l'obligation de confidentialité peut d'autant moins être retenue à leur encontre, qu'il est établi par des pièces versées par elles que ces sociétés se trouvaient déjà auparavant en relations d'affaires avec les sociétés Skanti et Magnavox elles-mêmes partenaires de la société CRM ;
Considérant qu'en l'absence de preuve d'une violation de cet accord de confidentialité, les sociétés intimées ne peuvent se voir valablement reprocher une utilisation de renseignements confidentiels leur ayant permis de transférer à leur profit les contrats de distribution exclusive qui liaient la société CRM à ses fournisseurs, les sociétés Skanti et Magnavox :
Considérant qu'en deuxième lieu, la société CRM SN fait grief aux sociétés Tekelec et Martec d'avoir en pleine connaissance de cause conclu des contrats d'exclusivité avec les sociétés Magnavox et Skanti en s'exonérant de la procédure prévue par la loi du 25 janvier 1985;
Mais considérant que, si aux termes de l'article 86 alinéa 1er de la loi du 25 janvier 1985, le tribunal détermine les contrats de crédit-bail, de location ou de fourniture de biens ou services nécessaires au maintien de l'activité, force est de constater que le jugement rendu le 9 février 1995 par le Tribunal de Commerce de Nanterre, ayant ordonné la cession totale de la société CRM au profit de la société Geolink ou de toute autre personne morale qu'elle se substituerait, énonce que le contrat Setsys est nécessaire au maintien de l'activité, sans faire mention des contrats Skanti et Magnavox;
Considérant qu'il est constant que, si lesdits contrats n'ont pas été visés par le jugement précité, c'est en réalité parce qu'ils n'étaient plus en vigueur à la date du 9 février 1995, la société Skanti ayant, en ce qui la concerne, résilié par courrier du 22 novembre 1994 le contrat de distribution exclusive qui la liait à la société CRM.
Considérant que les organes de la procédure collective ainsi que le repreneur étaient parfaitement conscients de la perte de ces contrats de distribution, puisque:
- aux termes de son rapport déposé dans le cadre des opérations de cession, Maître Segard, administrateur judiciaire de la société CRM, précise qu'il n'existe pratiquement plus de contrats d'exclusivité, ceux-ci ayant été résiliés soit antérieurement à l'ouverture de la procédure collective, soit postérieurement;
- par lettre adressée le 23 janvier 1995 à Maître Segard, le repreneur admet ne pas savoir si l'intégralité des contrats de distribution exclusive seront poursuivis, la plupart émanant de fournisseurs étrangers.
Considérant qu'au demeurant, Maître Segard s'est expliqué sur l'option prise par lui de ne pas exiger la poursuite desdits contrats, en faisant observer aux termes de son rapport que "les co-contractants étant tous d'origine étrangère, l'application des dispositions de l'article 37 (de la loi du 25 janvier 1985) est en grande partie inconcevable";
Considérant qu'au surplus, la société Skanti a, aux termes d'une attestation en date du 10 septembre 1998, certifié que la résiliation dont elle avait pris l'initiative le 22 novembre 1994 "avait pour seul motif, la faillite de la société en question et le défaut de règlement consécutif de ses factures impayées...";
Considérant qu'eu égard à ces éléments, lesquels ne mettent pas en évidence une intervention directe ou indirecte des sociétés Tekelec et Martec en vue de s'approprier les contrats d'exclusivité Magnavox et Skanti, il n'apparaît pas que le retrait de l'exclusivité jusque-là attribuée à la société CRM pour la distribution des produits Magnavox et Skanti, et le report de cette exclusivité sur les sociétés intimées (respectivement le 5 janvier 1995 en ce qui concerne la société Skanti et le 5 février 1995 en ce qui concerne la société Magnavox) ont été le résultat de procédés déloyaux auxquels les sociétés du Groupe Tekelec auraient eu recours en vue de nuire à une société faisant l'objet d'une procédure collective.
Considérant que, par ailleurs,aucune conséquence ne peut être tirée de l'embauche par la société Martec de deux anciens salariés de la société CRM, Messieurs Jacq et Vezin, étant observé que ces deux salariés, licenciés pour motif économique faute d'avoir été repris par le cessionnaire, n'étaient à leur départ nullement liés par une clause de non-concurrence;
Considérant, en effet, que s'il n'est pas contesté que la société CRM SN et les sociétés du Groupe Tekelec exercent leur activité dans le même secteur professionnel hautement technique et se trouvent donc en situation de concurrence économique, la preuve n'est toutefois nullement rapportée que l'embauche de ces deux salariés aurait été dictée par la volonté des sociétés intimées d'exploiter les connaissances acquises par ces salariés auprès de leur ancien employeur en vue de détourner la clientèle de celui-ci.
Considérant qu'en fonction de ce qui précède, les premiers juges ont à bon droit relevé que, si une concurrence normale existait depuis plusieurs années entre les intimées et la société CRM eu égard à leur identité d'activité, les sociétés Martec et Tekelec ne peuvent toutefois être tenues pour responsables d'agissements fautifs constitutifs de concurrence déloyale envers la société CRM.
Considérant que le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté la société CRM SN de l'ensemble de ses demandes;
Considérant qu'en l'absence d'éléments caractérisant un abus par l'appelante de son droit d'ester en justice, il convient de confirmer le jugement entrepris également en ce qu'il a débouté les sociétés intimées de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive;
Considérant que l'équité commande cependant d'allouer en appel à chacune des sociétés Martec et Tekelec sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, une indemnité de 10.000 F, venant en complément de celle qui leur a été octroyée en première instance;
Considérant qu'il n'est en revanche pas inéquitable que la société CRM SN conserve la charge de l'intégralité des frais, non compris dans les dépens, exposés par elle tant en première instance qu'en appel;
Considérant que l'appelante, qui succombe dans l'exercice de son recours, doit être condamnée aux entiers dépens.
Par ces motifs, La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Déclare recevable l'appel interjeté par la SA Compagnie Radio Maritime Société Nouvelle - CRM SN -; le dit mal fondé, Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré, Y ajoutant : Condamne la SA Compagnie Radio Maritime Société Nouvelle - CRM SN - à payer à la SA Martec et à la SA Tekelec Airtronic, pour chacune d'entre elles, sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, une indemnité égale à 10.000 F, en remboursement des frais non compris dans les dépens exposés par elles en appel, Condamne la SA Compagnie Radio Maritime Société Nouvelle - CRM SN - aux entiers dépens de première instance et d'appel, et Autorise la SCP Jullien-Lecharny-Rol, société d'avoués, à recouvrer directement la part la concernant, conformément à ce qui est prescrit par l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.