Cass. com., 18 avril 2000, n° 97-18.438
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Comptoir général de matières premières (SA), Sernap (SA)
Défendeur :
Kaysersberg (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Rapporteur :
Mme Garnier
Avocat général :
M. Feuillard
Avocats :
Me Bertrand, SCP Thomas-Raquin, Benabent.
LA COUR : - Donne acte à la société Comptoir général de matières premières de ce qu'elle se trouve aux droits des sociétés CGMP-MAP et Sernap, par suite d'une fusion-absorption ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 29 mai 1997), que la société Sodikay, aux droits de laquelle se trouve la société Fort James France (société FJF) antérieurement nommée société Kaysersberg, fabrique et vend sous les dénominations "Arcade", "Marine" et "Orchidée" des serviettes en papier sur lesquelles figurent divers dessins ; qu'alléguant que les sociétés Sernap et Comptoir général de matières premières (société CGMP MAP) commercialisaient des serviettes en papier reproduisant les caractéristiques essentielles de ses dessins, la société FJF a assigné ces sociétés en contrefaçon d'œuvres de l'esprit et en concurrence déloyale ;
Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches et le second moyen, pris en sa première branche, les moyens étant réunis : - Attendu que les sociétés Sernap et CGMP MAP font grief à l'arrêt d'avoir dit qu'elles avaient commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Sodikay, et de leur avoir fait défense d'exploiter les dessins litigieux, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en se fondant sur "la composition même du catalogue" des deux parties, cependant qu'aucune d'entre elles, notamment la société Sodikay, n'avait fait état d'un quelconque catalogue ni à plus forte raison d'une comparaison de la "composition" des catalogues des parties, la cour d'appel s'est fondée sur un fait qui n'était pas dans le débat, en violation de l'article 7 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, qu'en retenant que ce catalogue "comportait des motifs identiques" et en reprochant aux appelantes une "imitation particulière", tout en constatant que "chacun d'eux se trouve différemment réalisé" et qu'"aucune reproduction ou imitation ne peut être reprochée aux sociétés appelantes qui ont fait figurer sur leurs modèles d'autres dessins", la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction, qui la prive de motifs en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, en outre, qu'en décidant que celui qui n'a imité aucun des trois modèles revendiqués pourrait être cependant déclaré avoir imité leur ensemble, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui découlaient de ses propres constatations, en violation de l'article 1382 du Code civil ; alors, par ailleurs, qu'en leur reprochant d'avoir reproduit "la gamme préexistante de la société Sodikay, après [avoir] constaté tout à la fois, par motifs propres, qu'en ce qui concerne le modèle "Arcade", elles justifiaient avoir utilisé le motif ornement avant la diffusion de ce modèle et, par motifs propres adoptés, que "rien ne permet de définir quelle est la partie qui bénéficie de l' antériorité", la cour d'appel a de nouveau entaché sa décision d'une contradiction, qui la prive de motifs en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, enfin, que la cour d'appel, qui a retenu qu'"aucune imitation ne peut être "reprochée aux sociétés appelantes qui ont fait figurer sur leurs modèles d'autres dessins", qui a constaté que "chacun d'eux se trouve différemment réalisé" et qui a relevé en outre qu'elles justifiaient, pour l'un des trois motifs ornementaux litigieux, d'une exploitation antérieure à la "création" de la société Sodikay, pour n'attacher de caractère fautif qu'à leur réunion en une "gamme, ne pouvait ainsi confirmer une interdiction qui s'applique même à l'exploitation individuelle et isolée de chacun des motifs en cause, pourtant en elle-même non fautive, sans méconnaître la portée de ses propres constatations en violation de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel, en utilisant comme synonymes, pour qualifier l'ensemble des produits objets du litige, les mots gamme, catalogue et collection, n'a pas méconnu les dispositions de l'article 7 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu, en second lieu, qu'ayant relevé que la gamme de serviettes, constituée par les sociétés Sernap et CGMP-MAP comporte, même s'ils sont réalisés autrement, les mêmes motifs que la collection préexistante de la société Sodikay et est identique à celle-ci, l'arrêt retient qu'en réalisant la même gamme de produits, les sociétés Sernap et CGMP-MAP ont créé les conditions d'une confusion destinée à capter la clientèle attachée à une société concurrente dont la collection jouissait d'une réputation reconnue sur le marché ; qu'au vu de ces constatations et appréciations motivées sans aucune contradiction, la cour d'appel a pu statuer comme elle l'a fait, notamment en prononçant l'interdiction critiquée au moyen ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le second moyen, pris en sa seconde branche : - Attendu que les sociétés Sernap et CGMP MAP reprochent à l'arrêt de les avoir condamnées au paiement de dommages-intérêts, alors, selon le pourvoi, qu'en fixant à une somme forfaitaire le montant du préjudice cependant qu'il incombe à la victime, même en matière de concurrence déloyale, d'en établir l'étendue, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu que sous couvert d'une violation de la loi, le pourvoi ne tend qu'à remettre en question l'appréciation souveraine des juges du fond sur le montant du préjudice au vu des éléments de preuve qui leur étaient soumis ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi.