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Décisions

CA Paris, 4e ch. A, 15 décembre 1999, n° 1998-18082

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Art Centrale Diffusion (SARL)

Défendeur :

MBDB (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Marais

Conseillers :

M. Lachacinski, Mme Magueur

Avoués :

SCP Monin, Me Olivier

Avocats :

Mes Benissan, Casalonga.

TGI Paris, 3e ch., 1re sect., du 8 avr. …

8 avril 1998

Faits et procédure :

La société MBDB, spécialisée dans la fabrication et la vente d'article de joaillerie en métaux précieux qui exerce ses activités commerciales sous l'enseigne Planète Or est propriétaire de la marque " Planète Bijoux " qu'elle a déposé le 20 septembre 1996 et qui a été enregistrée sous le n° 96 642 949 en classe 14 ;

Après avoir constaté qu'une société utilisait une dénomination sociale et un nom commercial identique à sa marque et à son enseigne pour exploiter des activités commerciales aux siennes et que ces faits constituaient selon elle des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale, la société MBDB l'a assignée le 17 novembre 1997 devant le Tribunal de grande instance de Paris, notamment en paiement de la somme de 300 000 F pour chacune des infractions reprochées ;

Par jugement réputé contradictoire du 8 avril 1998 assorti de l'exécution provisoire en ce qui concerne la mesure d'interdiction, le tribunal a :

- dit que la société Planet Bijoux en exploitant sous la dénomination sociale, enseigne et nom commercial Planète Bijoux pour la fabrication et le négoce de bijoux en matériaux précieux et fantaisie avait commis des actes de contrefaçon par reproduction de la marque Planète Bijoux appartenant à la société MDBD,

- dit qu'elle avait commis des actes de concurrence déloyale,

- interdit à la société Planet Bijoux de faire usage de la dénomination Planet Bijoux à quelque titre que ce soit pour l'activité de fabrication et de négoce de bijoux sous astreinte de 1 000 F par infraction constatée à compter de la signification du jugement,

- autorisé la société MDBD à faire publier en entier ou par extraits le dispositif du jugement dans trois revues ou journaux de son choix aux frais de la société Planet Bijoux sans que le coût ne puisse excéder la somme de 60 000 F HT,

- condamné la société Planet Bijoux à verser la somme de MDBD les sommes de 50 000 F en réparation du préjudice causé par la contrefaçon de marque de 50 000 F pour le préjudice causé par la concurrence déloyale,

- condamné la société Planet Bijoux à payer à la société MDBD la somme de 15 000 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Vu l'appel interjeté par la société Planet Bijoux le 2 juillet 1998 et ses conclusions signifiées le 2 novembre 1998 et celles du 18 octobre 1999 signifiées par la société Art Centrale Diffusion venant aux droits de la société Planète Bijoux aux termes desquelles elle sollicite, outre la condamnation de la société intimée à lui payer la somme de 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, la réformation du jugement aux motifs que le préjudice subi par la société MBDB au titre des actes de contrefaçon de sa marque doit être fixé à la somme de un franc, l'atteinte portée à celle-ci étant " quasi inexistante " et que le grief de concurrence déloyale qui lui est imputé n'est pas démontré ;

Vu les conclusions signifiées le 8 janvier 1999 par la société MBDB tendant à la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions et à la condamnation de la société appelante à lui payer la somme de 25 000 F pour ses frais hors dépens ;

Sur quoi, LA COUR

- Sur la contrefaçon de la marque :

Considérant que la société Planet Bijoux qui a pour activités le négoce en bijoux et fabrication en métaux précieux et fantaisie ayant utilisé à titre de dénomination sociale et d'enseigne à compter de la date de son immatriculation au registre du commerce et des sociétés intervenue le 23 juin 1997 la dénomination que la société MBDB avait régulièrement déposée à titre de marque le 20 septembre 1996 dans la classe 14, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que s'appliquant à des produits et des services identiques, elle avait commis des actes de contrefaçon par reproduction de sa marque, l'absence de la lettre " e " muet dans le terme anglais Planet n'étant pas de nature à exclure l'existence de la reproduction alléguée ;

Considérant que la société Art Centrale Diffusion se prévaut de la lettre datée du 12 janvier 1998 dans laquelle la société MBDB lui donnait acte de ce qu'elle avait modifié sa dénomination sociale et de ce que le litige pouvait être clos à la suite du versement d'une somme de 10 000 F correspondant aux frais de procédure et de conseil pour prétendre que la société intimée n'est pas fondée à revendiquer un droit à son encontre au titre de la contrefaçon de marque et se prévaloir de ce fait d'un quelconque préjudice ;

Mais considérant que l'absence d'une telle demande en dommages-intérêts ne saurait équivaloir de la part de la société MBDB à une renonciation univoque à se prévaloir des droits dont elle dispose sur sa marque ;

Que le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu'il a déclaré la société Planet Bijoux responsable d'actes de contrefaçon de la marque Planète Bijoux ;

- Sur la concurrence déloyale :

Considérant que pour conclure au rejet de la demande formée contre elle au titre des actes de concurrence déloyale, la société Art Centrale Diffusion soutient que son ancienne dénomination sociale et son enseigne Planet Bijoux ne reproduisent pas l'enseigne Planète Or de la société MBDB dans la mesure où s'il existe des ressemblances entre les termes Planet Bijoux et Planète Or, elle n'en constitue toutefois pas une copie de nature à produire un risque de confusion, et a fortiori, un détournement de clientèle ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que les deux sociétés opposées exercent leurs activités dans le même domaine ainsi que dans le même secteur géographique, la société appelante du fait qu'elle a son siège social à Paris dans le 11ème arrondissement, la société intimée parce qu'elle possède un établissement secondaire au magasin Le Printemps à Paris ;

Considérant que la société MBDB fait justement remarquer que dans chacune des enseignes et dénominations sociale, le terme Planète ou Planet est l'élément attractif placé en première position lequel retient immédiatement l'attention à la différence des termes Bijoux et Or dont la signification est commune dans l'esprit du public qui associera nécessairement les bijoux à l'or ;

Que la société appelante qui soutient, d'une part que l'analyse des termes contenus dans les enseignes et les dénominations sociales doit être globale, d'autre part que la ressemblance alléguée ne constitue pas pour autant une copie, admet toutefois dans ses écritures " qu'il est permis de considérer que Planet Bijoux et Planet Or sont deux expressions ressemblantes " ;

Que les premiers juges ont par conséquent pertinemment estimé que l'utilisation de la dénomination sociale Planet Bijoux constitue un acte de concurrence déloyale distinct de la contrefaçon commis au préjudice de la société MBDB;

Considérant que la société Art Centrale Diffusion est cependant fondée à soutenir que l'utilisation de la mention Planet Bijoux à titre d'enseigne dans le Kbis ne pouvait en aucune cas à lui seul constituer un acte de concurrence déloyale dans la mesure où il n'et pas démontré que son utilisation a effectivement engendré une captation de clientèle ;

- Sur le préjudice :

Considérant que s'il est démontré par le procès-verbal d'assemblée générale que la société Art Centrale Diffusion a le jour même de l'assignation qui lui a été signifiée le 17 novembre 1997 procédé à la modification de sa dénomination sociale, il n'en demeure pas moins qu'elle a exercé ses activités commerciales sous cette enseigne depuis le 23 juillet 1997.

Qu'il doit en outre être considéré que la seule atteinte à une marque justifie la condamnation du contrefacteur à réparer le préjudice qu'il a causé de son fait ;

Que c'est par une exacte appréciation des faits que les premiers juges ont fixé le préjudice subi par la société MBDB à la somme de 50 000 F ;

Que le jugement déféré doit par conséquent être confirmé dans toutes ses dispositions ;

- Sur les frais non compris dans les dépens :

Considérant que ses frais mis à la charge de la société Art Centrale Diffusion doivent être fixés à la somme de 25 000 F ;

Que la demande formée au même titre par la société appelante doit être rejetée ;

Par ces motifs : Confirme le jugement rendu le 8 avril 1998 par le Tribunal de grande instance de Paris en toutes ses dispositions ; Rejette l'ensemble des demandes formées par la société Art Centrale Diffusion ; Condamne la société Art Centrale Diffusion à payer à la société MBDB la somme de 25 000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; Condamne la société Art Centrale Diffusion aux entiers dépens d'appel dont distraction a profit des avoués de la cause dans les conditions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.