CA Poitiers, 2e ch. civ., 14 décembre 1999, n° 9600309
POITIERS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Chevrechard (SA)
Défendeur :
Gireaud
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lerner
Conseillers :
M. Andrault, Pascot
Avoués :
SCP Paille-Thibault, SCP Landry-Tapon
Avocats :
Mes Falourd, Brugière.
Faits et procédure,
Vu le jugement prononcé le 4 décembre 1995 par le Tribunal de Grande Instance de Bressuire qui a débouté Monsieur Gireaud de sa demande tendant à indemniser son préjudice financier ; qui l'a reçu en sa demande en réparation de son préjudice relatif à son image de marque commerciale et a condamné la Société Chevrechard à payer une somme de 15.000 Frs ; qui a, de plus, interdit à la Société Chevrechard de commercialiser les fromages de chèvre sous l'étiquetage portant numéro et adresse de Monsieur Gireaud.
Vu l'acte d'appel formé le 24 Janvier 1996 par la Société Chevrechard,
Vu les conclusions déposées le 21 Mai 1996 par la Société Chevrechard,
Vu les conclusions déposées le 21 Mai 1996 par la Société Chevrechard,
Vu les conclusions déposées le 04 Septembre 1996 par Monsieur Gireaud,
Vu les conclusions déposées par la SA Chevrechard le 30 Septembre 1999,
Vu les conclusions déposées par Monsieur Gireaud le 18 Octobre 1999 et le 20 Octobre 1999,
Vu l'ordonnance de clôture en date du 21 Octobre 1999.
Attendu que Monsieur Christian Gireaud est fabricant de fromages et que ces derniers ont été livrés pendant plusieurs années à la Société Chevrechard (Pièces n° 38 à 42, 45) ;
Attendu que ces produits étaient fournis nus à la Société Chevrechard sans étiquette et que les relations commerciales ont cessé courant février 1992 ;
Attendu que Monsieur Gireaud soutient que la Société Chevrechard continuait à commercialiser des fromages de chèvre avec une étiquette portant son nom et son adresse et avec imitation de l'étiquette que lui-même apposait sur ses fromages ;
Attendu, qu'après plainte déposée auprès du Directeur de la Répression des Fraudes, le Tribunal Correctionnel de Bressuire, par jugement en date du 18 Janvier 1994 la Société Chevrechard a été condamnée pour avoir effectué une publicité comportant des indications, allégations ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur l'identité du fabricant de fromages de chèvre en indiquant sur l'étiquette dudit fromage destiné à la vente au public : " fromage de chèvre fermier Gireaud Christian" en réalité fabriqué par la Société Chevrechard ;
Attendu que Monsieur Gireaud ne s'est pas constitué partie civile devant le Tribunal Correctionnel et que par voie de conséquence son action devant la juridiction civile est recevable ; que le moyen tiré des articles 4 et 5 du Code de Procédure Pénale sera rejeté ;
Sur la concurrence déloyale,
Attendu qu'à l'évidence, la Société Chevrechard après rupture des relations commerciales ne pouvait utiliser les étiquettes au nom de Monsieur Gireaud ; qu'en l'espèce la Société Chevrechard a fait fabriquer par l'Imprimerie Garnaud, des étiquettes au nom de Monsieur Gireaud et, qu'il résulte des pièces versées aux débats que la Société Chevrechard a remplacé simplement le nom de Gireaud Christian par le sien ;
Attendu que cela résulte d'une confirmation de commande par l'imprimerie Garnaud où il est indiqué "Etiquettes Gireaud modifiées en Chevrechard" et où il est même précisé "Fin de modification du cliché modèle Gireaud" ; qu'il ne s'agit pas d'une erreur mais d'un fait volontaire de la Société Chevrechard ;
Attendu qu'il est constant que Monsieur Gireaud et la Société Chevrechard vendent tous les deux des fromages, étant précisé que Monsieur Gireaud a un élevage de chèvres, pratique la fabrication, l'affinage et la vente alors que la Société Chevrechard a pour seule activité l'affinage et la vente que cela résulte d'un rapport de la Direction de la Répression des Fraudes donnant les résultats d'analyses de prélèvements (Pièce n° 50) ;
Attendu que le produit litigieux avait été vendu aux Etablissements Rechard de la Chapelle Saint-Laurent à la Société "La Tradition Française" portant l'étiquette de Monsieur Gireaud, alors qu'il ne provenait pas de son atelier de fabrication ;
Attendu qu'il est constant que les relations ont été rompues entre la Société Chevrechard et Monsieur Gireaud en 1992 etque les livraisons au nom de Monsieur Gireaud avec une étiquette à son nom ont persisté plusieurs mois après jusqu'en 1993;
Attendu qu'il convient de constater que seuls les fromages fabriqués par Monsieur Gireaud pouvaient avoir appellation de fromages fermiers et que ceux de la Société Chevrechard ne pouvaient utiliser que l'appellation de fromages pasteurisés ;
Attendu que la Société Chevrechard a tenté de continuer la vente de fromages faussement dénommés fermiers avec l'étiquette de Monsieur Gireaud, qu'il s'agit d'une usurpation de nom commercial pour détourner les dispositions de l'article 10.D.4 du Décret du 30 Décembre 1988 ;
Attendu qu'il y a en l'espèce confusion des signes d'identification entre deux entreprises fonctionnant dans une spécialité identique dans le même rayon géographique ; qu'il y a concurrence déloyale au sens de l'article 1382 et 1383 du Code Civil;
Attendu qu'en ce qui concerne le préjudice, Monsieur Gireaud soutient que pour l'année 1989 il a vendu 35.000 chabis et cabris et 28.300 en 1990 ; que pour l'année 1991 soutient-il, son préjudice économique résulte de ce manque à gagner ;
Attendu que Monsieur Gireaud chiffre son préjudice économique sur la base de 5.50 Frs l'unité à 155.771 Frs ; que la Cour dispose des éléments suffisants d'appréciation pour chiffrer son préjudice à la somme de 50.000 Frs ;
Sur l'atteinte à l'image de marque :
Attendu que le jugement déféré sera confirmé par les motifs pertinents que la Cour adopte et que la Société Chevrechard sera condamnée à payer une somme de 15.000 Frs ;
Par ces motifs : LA COUR ; Reforme le jugement déféré ; Statuant à nouveau ; Condamne la Société Chevrechard à payer à Monsieur Gireaud la somme de 50.000 Frs + 15.000 Frs soit 65.000 Frs au titre de dommages et intérêts pour atteinte à l'image de marque et concurrence déloyale ; Confirme le jugement déféré pour le surplus ; Condamne la Société Chevrechard à payer à Monsieur Gireaud une somme de 6.000 Frs sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile en cause d'appel ; Condamne la Société Chevrechard aux dépens de première et d'appel lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.