CA Pau, 2e ch. sect. 1, 8 juillet 1999, n° 98-00278
PAU
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Laser (SARL)
Défendeur :
Ahmida
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Pujo-Sausset
Conseillers :
MM. Roux, d'Uhalt
Avoués :
SCP Longin, SCP de Ginestet-Duale
Avocats :
Mes Picot, Capdevielle.
Par jugement en date du 6 janvier 1997, le Tribunal de commerce de Bayonne a notamment, en la condamnant à lui payer en outre la somme de 4 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile, débouté la Sarl Laser de ses demandes à l'encontre de Monsieur Mohamed Ahmida,
La Sarl Laser a régulièrement relevé appel de cette décision par acte du 20 janvier 1998 en sollicitant l'allocation de la somme de 68 500 F à titre de dommages et intérêts en compensation du préjudice subi et celle de 5 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile,
Monsieur Mohamed Ahmida a conclu pour sa part à la confirmation de ce jugement et à l'allocation de la somme de 20 000 F à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et matériel subi et de celle de 8 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile,
L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 février 1999,
Sur quoi, la Cour,
Attendu qu'il ressort des faits constants de la cause tels qu'ils sont établis par les écritures des parties et les documents versés aux débats que la Sarl Laser a fait assigner Monsieur Mohamed Ahmida par devant le Tribunal de commerce de Bayonne en réparation du préjudice causé par des actes de concurrence déloyale commis par celui-ci à son égard.
Attendu que la Sarl Laser fait valoir, à l'appui de son appel du jugement qui l'a déboutée de sa demande, que Monsieur Mohamed Ahmida a incontestablement commis des actes de concurrence déloyale à son égard dès lors que, alors qu'il est un de ses anciens salariés,
- il a profité de ses connaissances pour proposer à un de ses clients un marché d'un prix inférieur de 2 % à celui de son ancien employeur,
- il a tenté de débaucher des membres de son personnel et qu'il doit la réparation de cette captation déloyale de clientèle et de tentative de désorganisation de son entreprise,
Attendu que Monsieur Mohamed Ahmida fait plaider pour sa part :
- qu'il n'était pas soumis, du fait de son contrat de travail avec la Sarl Laser, à une clause de non-concurrence et qu'il a pu dès lors s'installer dans le même secteur d'activité que son employeur après son licenciement par celui-ci,
- que la Sarl Laser ne justifie pas des procédés déloyaux qu'elle lui prête dans le démarrage de la clientèle qui leur est commune, étant par ailleurs acquis que le seul client qui a rompu, à son profit, ses relations avec la Sarl Laser ne l'a fait qu'à la réception d'une lettre circulaire qu'il a envoyée à des clients potentiels plusieurs mois après son licenciement,
- que l'attestation de mademoiselle Martins n'apporte aucun élément permettant de caractériser un comportement déloyal de sa part,
- et que la procédure intentée par la Sarl Laser lui cause un incontestable préjudice en fragilisant son entreprise encore jeune,
Attendu que la Cour se référera par ailleurs pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties aux dispositions de la décision dont appel en ce qu'elles ne sont pas contraires à celles du présent arrêt ainsi qu'aux conclusions visées ci-dessus en référence et déposées au dossier de la procédure,
Attendu, en droit, que l'exercice de la libre concurrence entre commerçants doit se réaliser par des moyens loyaux.
Attendu que Sarl Laser fait valoir que Monsieur Mohamed Ahmida a, pour le concurrencer de manière déloyale dans le domaine d'activité du nettoyage industriel qui leur est commun en détournant à son profit sa clientèle et en tentant de débaucher ses salariés, utilisé divers renseignements dont il n'avait pu avoir connaissance que dans le cadre de son emploi à son service,
Attendu que Monsieur Mohamed Ahmida fait plaider pour sa part
- qu'il a démarché de manière loyale, sans utiliser les pratiques habituellement retenues par la jurisprudence pour caractériser la concurrence déloyale, un ensemble de clients potentiels dont le magasin Monoprix de Saint-Jean-de-Luz,
- et que l'attestation de Mademoiselle Martins ne justifie de la tentative de débauchage qui lui est reprochée,
Attendu qu'il apparaît, à l'examen des documents versés aux débats par les parties,
- que Monsieur Mohamed Ahmida, licencié au mois de décembre 1994 de son emploi par Sarl Laser, s'est inscrit au Répertoire des Métiers le 17 mars 1995 en déclarant exercer, à compter du 2 mai 1995, sous le nom commercial ABS, une activité de nettoyage de locaux et de traitement des sols
- que le directeur du magasin Monoprix de Saint-Jean-de-Luz a, par courrier en date du 27 mars 1995, fait savoir à la Sarl Laser qu'il ne reconduirait pas, à son échéance du 13 juin 1995, le contrat de nettoyage sugné entre eux le 13 juin 1990
- que Monsieur Mohamed Ahmida et le directeur du magasin Monoprix de Saint-Jean-de-Luz ont signé, le 2 mai 1995, un contrat de nettoyage,
Attendu, par ailleurs, que la comparaison des deux contrats nettoyage, d'un prix identique, fait apparaître un supplément important de prestations au profit de Monsieur Mohamed Ahmida,
Attendu enfin, que le directeur du magasin Monoprix de Saint-Jean-de-Luz a, par une attestation en date du 30 mars 1996, indiqué " qu'il n'avait pas hésité à confier à Monsieur Mohamed Ahmida cette tâche très importante... compte tenu des prestations proposées et surtout des qualités requises par Monsieur Mohamed Ahmida pour assurer ces fonctions, déjà appréciées par l'ensemble du personnel et de moi-même par son souci de bien faire ",
Attendu qu'il apparaît ainsi que tant le démarchage de Monsieur le directeur du Monoprix de Saint-Jean-de-Luz par Monsieur Mohamed Ahmida, qui s'est fait alors que celui-ci n'était plus le salarié de la Sarl Laser, que la conclusion du contrat, qui s'est réalisé en raison, non seulement du nombre important de prestations fournies mais aussi des qualités professionnelles de Monsieur Mohamed Ahmida appréciées par le directeur du magasin Monoprix, ont été tout à fait loyaux et que la Sarl Laser, qui ne justifie d'aucun autre élément permettant d'en caractériser la déloyauté de la concurrence, à son égard, de Monsieur Mohamed Ahmida, ne pourra qu'être, dès lors, déboutée de ses moyens d'appel qui s'avèrent mal fondés à ce titre.
Attendu enfin, que l'attestation de Mademoiselle Martins ne justifie pas de l'existence de manœuvres de désorganisation de l'entreprise de la Sarl Laser par le débauchage de son personnel et que les moyens de cette société seront, de ce chef également rejetés comme inopérants,
Attendu que le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a, par une exacte analyse des faits de la cause, débouté la Sarl Laser de ses prétentions,
Attendu qu'il sera par ailleurs fait droit, en équité et pour le quantum sollicité, à la demande, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile, de Monsieur Mohamed Ahmida qui sera par contre, débouté de sa demande en allocation de dommages et intérêts qui n'est pas justifiée si ce n'est par une motivation de pur principe,
Par ces motifs, et ceux non contraires des premiers juges, la Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, reçoit la Sarl Laser en son appel de la décision rendue le 6 janvier 1997 par le Tribunal de commerce de Bayonne, déboute la Sarl Laser de ses moyens d'appel, confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, condamne la Sarl Laser à payer à Monsieur Mohamed Ahmida la somme de 8 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile, rejette comme inutiles ou mal fondées toutes demandes plus amples ou contraires des parties, condamne la Sarl Laser aux entiers dépens et autorise la SCP de Ginestet-Duale, avoués associés, à recouvrer directement ceux d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de Procédure Civile.