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Décisions

CA Dijon, 1re ch. sect. 2, 30 avril 1999, n° 97-02446

DIJON

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Laboratoires Elp (Sté)

Défendeur :

Centre d'Approvisionnement Coiffeurs de l'Est (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bray

Conseillers :

Mmes More, Dufrenne

Avocats :

Mes Fourgoux, Gonzelmann

TGI Chalon-sur-Saône, du 15 juill. 1997

15 juillet 1997

Exposé de l'affaire :

Par jugement du 15 juillet 1997, auquel la Cour entend se référer pour l'exposé des faits, le Tribunal de Grande Instance de Chalon-sur-Saône saisi par la société Elp d'une action en contrefaçon et en concurrence déloyale contre la société CAC Est, a :

- reporté la clôture à la date de l'audience et rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société CAC Est,

- déclaré la société CAC Est responsable d'actes de concurrence déloyale à l'égard de la société Elp et l'a condamnée à lui payer 70.000 F de dommages et intérêts et 7.000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs autres demandes, plus amples ou contraires et condamné la société CAC Est aux dépens.

La société Elp a fait appel de cette décision. Elle demande que la Cour réformant partiellement le jugement, déclare la société CAC Est coupable de contrefaçon et la condamne à lui payer 500.000 F de dommages et intérêts, outre interdiction sous astreinte de poursuivre ses agissements. Elle conclut à la confirmation du jugement pour le surplus. en réclamant une majoration de l'indemnité qui lui a été allouée au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle soutient que les saisies sont régulières de sorte que le Tribunal de Grande Instance de Chalon-sur-Saône était compétent.

Pour la contrefaçon, elle expose que la marque " Elp " a été déposée avant la marque "CoiffElf" et que pour cette dernière l'élément déterminant est " Elf " qui ressemble phonétiquement et visuellement à "Elp" ; que l'adjonction de la syllabe " Coiff ", n'empêche pas une confusion entre les marques.

Elle fait également valoir que les deux sociétés sont concurrentes et que les marques concernent des produits identiques; que si lorsque la société CAC Est était son distributeur, des produits ont été commercialisés sous la marque " CoiffElf " avec son accord tacite, ceci est sans incidence, car elle en tirait profit.

Au sujet de la concurrence déloyale elle soutient que la société CAC Est commercialise des produits qui sont la reprise de ceux qu'elle distribuait pour elle, dans des conditions qui créent une confusion, même si les clients concernés sont des professionnels:

- permanente Coppela avec mention sur le contenant qu'il s'agit d'un "régulateur d'action", comme sur la permanente Andante (cette dernière étant le produit Elp),

- mousses utilisées à l'occasion de permanentes avec indication sur le contenant du produit de la société CAC Est "mousse régulatrice d'action universelle" et sur celui de la société Elp " régulateur d'action de permanente pour cheveux à sensibilisation variable ",

- produit " CoiffElf " avec indication sur le contenant qu'il s'agit de " soin restructurant au procollagène " alors que sur le produit "Sublimo" de la société Elp figure "restructurant au procollagène".

Enfin la société Elp explique qu'elle subit un préjudice Important.

La société CAC Est, appelante incidente, demande à la Cour d' annuler les procès-verbaux de saisie contrefaçon et de se déclarer incompétente au profit du Tribunal de Grande Instance de Metz. A titre subsidiaire, elle conclut au débouté de la société Elp et à sa condamnation à lui verser 100.000 F de dommages et intérêts en raison du préjudice que lui a causé cette affaire, outre intérêts et bénéfice de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle soutient que sans y être autorisés les huissiers ont procédé à des saisies réelles de sorte que leurs constatations sont nulles et que par voie de conséquence le tribunal qui devait être saisi était celui de son domicile.

Sur le fond elle réfute l'argumentation de la société Elp et conteste avoir commis une contrefaçon et des actes de concurrence déloyale.

Pour plus ample exposé des moyens et des prétentions des parties, la Cour se réfère aux conclusions que la société CAC Est a déposées le 3 mars 1989 et la société Elp, 16 mars 1999.

Discussion:

Attendu que la Cour fait siens les motifs du jugement dont il résulte que le Tribunal de Grande Instance de Chalon-sur-Saône était compétent ;

Attendu que la marque "Elp" a été déposée avant la marque "CoiffElf'; que cependant la Cour fait siens les motifs du jugement, autres que ceux relatifs à l'antériorité, et dont il résulte que la seconde marque n'est pas une contrefaçon de la première, étant ajouté que la société Elp l'a reconnu implicitement en conditionnant pour son adversaire des boîtiers aérosols dont elle savait qu'ils étaient commercialisés sous la marque "CoiffElf" (lettre du directeur général de la société Elp en date du 12 avril 1990) ; que la circonstance que la société ait pu tirer profit de cette opération ne réduit pas la portée de sa reconnaissance;

Attendu en ce qui concerne la concurrence déloyale, qu'il n'est pas allégué que le contrat de distribution que les sociétés avaient conclu, prévoyait qu'en cas de rupture, la société CAC Est ne devrait pas distribuer de produits concurrents de ceux qu'elle commercialisait pour la société Elp;

Attendu pour les permanentes Copella et Andante qu'il s' agit de produits qui sont vendus sous des noms bien distincts, dans des emballages totalement différents et que l'expression "régulateur d'action" n'a rien de spécifique et peut s'appliquer à nombre de produits;

Attendu pour les produits "Sublimo" et " CoiffElf " "restructurant au procollagène" que ceux-ci ont également des présentations totalement différentes et que leurs noms n'ont rien de commun ; que le mot "restructurant" qualifie un mode d'action tout à fait banal, au même titre que le terme " revitalisant " utilisé pour de nombreux cosmétiques ;

Que par ailleurs la société CAC Est justifie que dans le même secteur d'activités, d'autres fabricants mettent sur le marché des produits avec indication que ceux-ci contiennent du "collagène", du "procollagène" et même qu'il s'agit de "restructurant au procollagène" (Amilège, laboratoires Amima) ;

Attendu pour les mousses, que les emballages présentent des similitudes de forme mais que d'une façon générale les emballages de mousses sous pression ont des formes assez semblables; que les marques qui sont apposées sont différentes " Copret " et " Elp " ; que comme il vient de l'être dit l'expression "régulateur d'action" n'a rien de spécifique qu'enfin il apparaît clairement sur chacun des produits l'indication d'une utilisation différente : pour " permanente basique " dans un cas et pour " cheveux à sensibilisation variable " dans l'autre ;

Attendu enfin que les clients des sociétés sont des professionnels et en conséquence sont particulièrement aptes à voir la différence qui existe entre les produits ;

Attendu que dans ces conditions il apparaît à la Cour que l'existence d'actes de concurrence déloyale n'est pas établie et que la société Elp doit être déboutée de l'ensemble de ses prétentions;

Attendu que la société CAC Est ne justifie pas d'un préjudice autre que celui qui sera réparé par l'octroi du bénéfice de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

Décision

Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement sur la compétence et l'absence de contrefaçon, Réformant pour le surplus, Déboute la société ELP de l'ensemble de ses prétentions et la condamne à payer à la société CAC Est 15.000 F (soit 2 286,74 Euros) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, Déboute la société CAC Est de sa demande de dommages et intérêts, Condamne la société ELP aux dépens de première instance et d'appel.