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Décisions

CA Paris, 4e ch. B, 5 mars 1999, n° 1996-14822

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Alexandra (SARL)

Défendeur :

Alexandra (SARL), Alexandra Workwear Plc (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Boval

Conseillers :

M. Ancel, Mme Regniez

Avoués :

SCP Bernabe-Ricard, Me Blin

Avocats :

Mes Grégoire, Levy.

TGI Paris, 3e ch., du 5 avr. 1996

5 avril 1996

Appel a été interjeté par la société SARL Alexandra (actuellement SARL Kassandra) à l'encontre d'un jugement en date du 5 avril 1996 rendu par le tribunal de grande instance de Paris dans un litige l'opposant à la société de droit britannique Alexandra Workwear Plc et à la société Alexandra.

Alexandra Workwear est titulaire des marques suivantes pour désigner en classe 25 les " robes, robes-tabliers, surtouts, uniformes, tabliers, articles coiffants " : la marque Alexandra déposée le 12 octobre 1973 et renouvelée en dernier lieu le 6 octobre 1993, la marque Alexandra Prêt à Porter Professionnel déposée le 3 mars 1989. La société Alexandra, dont le siège social est situé au 162 rue du faubourg Saint-Honoré à Paris a été immatriculée sous cette dénomination le 25 août 1978 et exploite un fonds de commerce de prêt à porter.

Ayant appris l'existence d'une société Alexandra constituée fin 1993 dont le siège social est 27 rue Tiphaine à Paris et qui a pour activité la fabrication et la vente de vêtements, les deux sociétés ci-dessus mentionnées l'ont sommée par lettre recommandée du 17 février 1994 puis par sommation d'huissier du 14 février 1995 de modifier sa dénomination sociale. N'ayant pas eu de réponse à ses demandes, elles l'ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Paris sur le fondement de la contrefaçon et de la concurrence déloyale et parasitaire, pour obtenir outre des mesures d'interdiction, la modification de dénomination sociale et la dépose de son enseigne, et paiement de dommages intérêts.

La société défenderesse n'avait pas constitué avocat.

Par le jugement déféré, le tribunal a :

- dit qu'en adoptant la dénomination Alexandra comme dénomination sociale et enseigne, sans l'autorisation de la société Alexandra Workwear , la société Alexandra avait commis des actes de contrefaçon des marques Alexandra n° 1 252 390 et Alexandra Prêt à Porter Professionnel n° 1 564 350 dont la société est titulaire,

- dit qu'elle a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Alexandra demanderesse,

- prononcé des mesures d'interdiction,

- condamné la société Alexandra à payer à titre de dommages intérêts la somme de 100 000 F à Alexandra Workwear et celle de 50 000 F à la société Alexandra ainsi que celle de 8 000 F par application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Appelante de ce jugement, Alexandra (rue Tiphaine) ne conteste pas les actes de contrefaçon reprochés sauf à préciser qu'elle n'utilisait pas ce prénom à titre d'enseigne, qu'elle a actuellement modifié sa dénomination sociale et que le préjudice subi par les deux sociétés est en réalité inexistant. Elle souligne que son activité consiste seulement dans un atelier de retouches et que la société Alexandra ne serait qu'une société de vente par correspondance. Elle conclut au débouté et subsidiairement, prie la cour à titre subsidiaire, de fixer le montant des dommages intérêts à la somme de 1 F. Elle demande à la cour que lui soit allouée la somme de 8 000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Les sociétés défenderesses concluent à la confirmation du jugement et sollicitent de la cour paiement de la somme de 20 000 F par application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Sur ce, LA COUR :

Sur la contrefaçon

Considérant que l'appelante conteste seulement sur cette demande avoir fait un usage des marques à titre d'enseigne, admettant qu'en prenant la dénomination sociale Alexandra elle a contrefait les marques susvisées ;

Considérant que les intimées ne démontrent pas en cause d'appel que leur adversaire aurait exercé son activité en faisant usage de l'enseigne Alexandra (les seules photographies mises aux débats par l'appelante prouvant l'existence de cette enseigne) ; que le jugement sera confirmé sauf en ce qu'il a retenu une contrefaçon par l'usage des marques à titre d'enseigne ;

Sur la concurrence déloyale et parasitaire

Considérant que le tribunal a retenu qu'en choisissant la dénomination Alexandra comme dénomination sociale et comme enseigne, Alexandra (5 rue Tiphaine) avait usurpé la dénomination sociale de la société Alexandra (rue du Faubourg Saint-Honoré), que les deux sociétés ont en outre le même domaine d'activité et que les agissements sont constitutifs de concurrence déloyale;

Considérant que l'appelante fait valoir qu'elle n'exerce qu'une activité de retouches et n'est pas en situation réelle de concurrence avec la société Alexandra qui au surplus n'aurait suivant l'extrait K Bis mis aux débats qu'une activité de vente par correspondance, qu'elle reprend également l'argument selon lequel elle n'a pas d'enseigne au nom d'Alexandra ;

Mais considérant que cette argumentation ne saurait être suivie dès lors que contrairement à ce qu'elle affirme, l'appelante n'a pas seulement une activité de retouches mais vend des vêtements et que son adversaire a également selon l'extrait K Bis mis aux débats une activité de vente de vêtements;

Qu'il sera seulement rejeté, pour les motifs ci-dessus énoncés, que le jugement sera confirmé sauf en ce qui concerne l'usage à titre d'enseigne ;

Sur les mesures réparatrices

Considérant que compte tenu des éléments portés à la connaissance de la cour et de l'absence de précision comptable sur le préjudice qu'aurait subi la société Alexandra intimée du fait des actes de concurrence déloyale, la cour fixe à la somme de 20 000 F le montant des dommages intérêts dus à cette société ;

Considérant que le préjudice subi par Alexandra Workwear du fait de la contrefaçon des deux marques sera suffisamment réparé par l'allocation de la somme de 50 000 F ;

Considérant que les autres mesures réparatrices ordonnées en première instance seront confirmées ;

Considérant que l'équité commande que soit allouée aux intimées la somme de 10 000 F pour les frais d'appel non compris dans les dépens ;

Par ces motifs, et ceux non contraires des premiers juges : Confirme le jugement sauf sur le montant des dommages intérêts ; Réformant de ce chef, statuant à nouveau et ajoutant ; Condamne la société Kassandra à payer à titre de dommages intérêts, à la société Alexandra Workwear Plc la somme de 50 000 F et à la société Alexandra celle de 20 000 F ; La condamne à payer la somme de 10 000 F par application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile ; Rejette toute autre demande ; Condamne la société Kassandra aux entiers dépens qui seront recouvrés, le cas échéant, par la SCP Bernabe Ricard, avoué, selon les dispositions de l'article 699 du Nouveau code de procédure civile.