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Décisions

CA Toulouse, 2e ch. sect. 1, 18 janvier 1999, n° 97-05095

TOULOUSE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Société Nouvelle Midi Capteurs (SA)

Défendeur :

Statipro (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Foulon

Conseillers :

MM. Boyer, Charras

Avoués :

SCP Malet, SCP Boyer-Lescat-Merle

Avocats :

Mes Ribaute, Junca.

T. com. Toulouse, du 22 sept. 1997

22 septembre 1997

La Société Nouvelle Midi Capteurs, cessionnaire du fonds de commerce exploité par la société Midi Capteurs mise en liquidation judiciaire, a ainsi repris l'industrialisation et la commercialisation d'un dispositif intitulé " baropodomètre électronique " destiné à procéder à des mesures statiques et dynamiques de la distribution des pressions plantaires.

Ayant appris qu'une société française dénommée " Statipro " distribuait un dispositif concurrent appelé " baropodomètre électrique ", la société Nouvelle Midi Capteurs l'a fait assigner le 9 juin 1997 devant le tribunal de commerce de Toulouse afin qu'il soit jugé que la société Statipro se livrait à ses agissements de concurrence déloyale en recherchant la confusion avec le baropodomètre de la société Nouvelle Midi Capteurs et en diffusant un matériel qui n'est qu'une copie servile de celui fabriqué par la société demanderesse. La société Nouvelle Midi Capteurs demandait ainsi l'interdiction de la vente des produits copiés, et le versement à titre principal de 200 000 F à titre de dommages-intérêts.

Par jugement en date du 22 septembre 1997, le tribunal de commerce a retenu sa compétence territoriale, a débouté la société Nouvelle Midi Capteurs de ses prétentions et l'a condamnée à verser 3 000 F à la société Statipro au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Prétentions et moyens de la société appelante

Pour critiquer cette décision et reprendre intégralement les moyens et prétentions qu'elle avait développés dans son assignation introductive d'instance, la société Nouvelle Midi Capteurs fait valoir que la société Statipro commercialise un produit qui n'est que la copie servile de celui qu'elle commercialise, et au sujet duquel elle entretient une confusion en faisant croire qu'il est le fruit de tests scientifiques qui en réalité sont inexistants. Elle ajoute que son action n'est pas une action en contrefaçon de brevet ou de marque, mais bien une action en concurrence déloyale pour copiage de produit.

Elle demande en conséquence :

- de dire que la société Statipro s'est rendue coupable de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société Nouvelle Midi Capteurs, en trompant les consommateurs sur les qualités substantielles du podomètre qu'elle diffuse, en recherchant la confusion avec le podomètre de la société Nouvelle Midi Capteurs et en diffusant un podomètre, copie servile de celui de la société Nouvelle Midi Capteurs.

Et en conséquence :

d'ordonner :

- l'interdiction de la vente des produits litigieux et de la diffusion des documents commerciaux litigieux,

- les mesures prescrites sous peine d'astreinte définitive de 1 000 F par infraction constatée.

de condamner la société Statipro à lui verser à la somme de 200 000 F en application des articles 1382 et suivants du code civil pour concurrence déloyale et parasitaire.

d'ordonner, à titre de complément de dommages et intérêts, la publication de l'arrêt au choix de la société Nouvelle Midi Capteurs et aux frais de la société Statipro, sans que le coût de ladite publication excède la somme de 40 000 F HT.

Et de condamner la société Statipro à lui verser la somme de 60 000 F en application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Prétentions et moyens de l'intimée

La société Statipro qui poursuit la confirmation du jugement et réclame 20 000 F au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile, soutient que la société appelante n'apporte aucune véritable critique du jugement. Elle précise qu'elle ne fait que commercialiser un produit fabriqué par la société de droit italien PSI.

Elle ajoute que l'appareil conçu par la société Nouvelle Midi Capteurs ne bénéficie d'aucune protection et qu'il n'y a donc pu y avoir une recherche d'antériorité.

Elle affirme ne s'être livrée à aucun acte de concurrence déloyale et être de parfaite bonne foi.

Sur quoi, LA COUR,

Attendu qu'il convient au préalable de relever que n'est plus discutée la compétence du tribunal de commerce de Toulouse ;

Attendu sur le fond du litige, que la société Nouvelle Midi Capteurs ne demande pas la sanction d'une atteinte portée à son droit privatif de propriété intellectuelle puisqu'elle explique qu'elle ne tient pas ses droits d'un brevet ou d'une marque, mais qu'elle cherche à obtenir la réparation d'un dommage causé par un acte déloyal d'un concurrent (la société Statipro) ;

Attendu que pour l'exercice de l'action en concurrence déloyale fondée sur l'imitation servile, le demandeur doit rapporter la preuve, d'une part de la similitude entre ses produits et ceux du prétendu imitateur et d'autre part, que cette similitude a pour objet ou pour effet de créer dans le public une " confusion " entre les productions;

Attendu en l'espèce, qu'il n'est pas contesté que le fabricant du produit litigieux est une société PSI de droit italien, tandis que la commercialisation et la distribution dudit produit sont assurées en France par la société Statipro ;

Attendu que le dispositif litigieux, qui de l'aveu même de la société Nouvelle Midi Capteurs est désormais dans le domaine public après avoir été protégé par le brevet déposé par l'Anvar, consiste dans un revêtement souple et conducteur, une matrice d'électrodes comportant une pluralité d'électrodes réparties sur une face du revêtement souple et connectées chacune à un conducteur de sortie appelé à délivrer un signal électrique mesurable ;

Que si le constat d'huissier effectué le 25 mars 1997 et portant sur trois appareils : un de marque société Nouvelle Midi Capteurs, l'autre de marque PSI et le troisième de marque BJL, montre la similitude d'équipement de caoutchouc mousse conducteur, et des circuits imprimés comprenant tantôt 136 ou 215 circuits intégrés, l'examen des photographies jointes à ce constat ne permet pas, comme le fait péremptoirement l'huissier de justice, de conclure à la similitude exacte entre les seuls produits PSI et société Nouvelle Midi Capteurs, alors que le produit réalisé par BJL procède du même principe de fabrication dont l'utilisation des composants est nécessairement conditionnée par les nécessités techniques de l'application;

Que contrairement à ce qu'elle soutient, la société Nouvelle Midi Capteurs ne fournit aucune document lisible permettant de constater que la société Statipro rechercherait et entretiendrait une confusion dans la présentation du produit qu'elle commercialise, alors que le public concerné n'est pas néophyte mais est composé de personnels médicaux et paramédicaux capables d'évaluer et préciser exactement leur besoin;

Que le fax adressé par la société PSI à Statipro concernant l'existence d'un brevet international pour la production d'un baropodomètre électronique et indifférent à la solution du litige puisque celui-ci ne porte ni sur la protection d'un droit privatif, ni sur la démonstration de l'antériorité de tel ou tel droit ;

Qu'en l'état de la présente procédure, la Cour peut seulement constater que la société appelante ne rapporte pas la double preuve qui lui incombe pour justifier du bien fondé de ses prétentions ; qu'elle sera donc déboutée de ses demandes ;

Qu'enfin, l'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile en faveur de la société intimée pour le montant fixé dans le dispositif ;

Par ces motifs Déclare la société Nouvelle Midi Capteurs recevable mais mal fondée en son appel ; Confirme, par substitution de motifs, le jugement déféré ; Condamne la société Nouvelle Midi Capteurs aux entiers dépens de l'instance, ainsi qu'à payer à la société Statipro la somme de 7 000 F (sept mille francs) au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile. Accorde à la SCP d'avoués Boyer-Lescat-Merle qui le demande, le bénéfice de l'article 699 du Nouveau code de procédure civile.