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Décisions

CA Grenoble, ch. com., 11 mars 1998, n° 96-1060

GRENOBLE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Société Bureautique Informatique - Toshiba (SARL)

Défendeur :

Lance Services-Copyrex (SA), Rex Rotary (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Béraudo

Conseiller :

M. Baumet

Avoués :

SELARL Dauphin & Neyret, SCP Grimaud

Avocats :

Mes Eisler, Lugosi.

T. com. Grenoble, du 19 janv. 1996

19 janvier 1996

Attendu que le jugement déféré a condamné la société SBI Toshiba à payer à la société Lance Services la somme de 92.017,23 F pour prix d'un photocopieur de marque Rex Rotary loué à l'Office du Tourisme d'Allevard qu'elle avait repris et détruit afin de lui vendre un photocopieur de marque Toshiba, ainsi que 50.000 F, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice commercial causé ;

Que les premiers juges ont débouté la société Rex Rotary d'une demande de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;

Attendu que, devant la Cour, la société SBI Toshiba conclut ainsi qu'il suit :

" Plaise à la Cour :

La SARL société Bureautique Informatique (SBI) a régulièrement relevé appel d'un jugement rendu le 19 janvier 1996 par le Tribunal de Commerce de Grenoble, qui l'a condamnée à payer à la société Lance Services la somme de 92.017,23 F outre intérêts, et 50.000 F de dommages et intérêts, et encore 3.000 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et par ailleurs à la société Rex Rotary 3.000 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Cette décision sera nécessairement réformée.

Suivant acte d'huissier du 13 décembre 1994, les sociétés Rex Rotary et Lance Services ont assigné la société SBI devant le Tribunal de Commerce de Grenoble, en paiement de :

1°/ A la société Lance Services :

- 92.017,23 F au titre d'un prétendu préjudice matériel,

- 50.000 F au titre d'un prétendu préjudice commercial, et

- 11.186 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

2°/ A la société Rex Rotary :

- 80.000 F au titre d'un prétendu préjudice moral, et

- 11.186 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Exposé des faits :

Selon les termes de l'assignation du 13 décembre 1994, la société Rex Rotary vend des appareils photocopieurs, et la société Lance Services Copyrex loue ces mêmes appareils avec des contrats de fournitures copies.

La SARL société Bureautique Informatique (SBI), au capital de 60.000 F, et dont le siège est 38640 Claix, représente la marque Toshiba.

Elle n'a aucun rapport ni en droit, ni en fait avec la SA Rex Rotary au capital de 164.556.400 F dont le siège est dans la région parisienne, ni avec la SA Lance Services au capital de 35.810.800 F, dont le siège est à Paris.

Au vu des pièces versées aux débats, il a été signé le 14 mai 1993 entre l'Office Touristique et Thermal du Pays d'Allevard également dénommé Office du Tourisme d'Allevard, et le Groupe Rex Rotary, un contrat copies sur un appareil d'occasion désigné RR 8055 DZF pour une durée de 72 mois, avec redevances trimestrielles, nombre minimum de copies par période de 40.000 (c'est-à-dire par trimestre), facturé 0,22 F HT par copie.

Il est également indiqué : " contrat évolutif en matériel voir article 6 ".

Il s'agit selon les documents produits, de la faculté unilatérale pour le fournisseur, de changer le prix de la copie, le nombre de copies par période, ainsi que d'échanger le matériel !

Dans le cadre d'un travail de prospection, un VRP de la société SBI, représentant la marque Toshiba, a rencontré la responsable de l'Office du Tourisme d'Allevard.

La responsable de l'Office du Tourisme d'Allevard a fait part de ses doléances et de son mécontentement concernant les prestations fournies par Rex Rotary et s'est déclarée intéressée par le matériel Toshiba.

Naturellement, au cours de la discussion commerciale entre l'Office du Tourisme d'Allevard et le représentant de la société SBI, a été évoqué la question de la reprise du matériel Rex Rotary.

Selon une pratique courante, le vendeur reprend en effet le matériel en place pour le reconditionner et le revendre s'il peut avoir une valeur marchande, ou bien ensuite le met au rebut s'il n'a aucune valeur marchande, ou s'il n'est pas possible de le remettre en état.

L'Office du Tourisme a remis au représentant SBI, un document intitulé " Rachat en cours de location ", faisant apparaître une valeur de rachat au 30 novembre 1993 de 50.494,77 F.

La société SBI a accepté d'exercer une reprise pour le montant de la valeur rachat du matériel telle que indiquée par l'Office du Tourisme.

C'est dans ces conditions que l'Office du Tourisme a signé, avec la société SBI un contrat de vente d'un appareil Toshiba n° 2510 ADF, avec un contrat d'abonnement copies sur cinq ans.

La société SBI établissait donc à l'Office du Tourisme un avoir de 50.494,77 F, et lui remettait un chèque de ce montant exact.

Il appartenait à l'Office du Tourisme de solder son contrat avec le Crédit Universel, grâce à la somme versée par la société SBI Toshiba.

De son côté, au moment de la livraison du photocopieur Toshiba, la société SBI reprenait le matériel Rex Rotary, matériel ancien obsolète et quasiment invendable.

Il apparaît que après avoir signé le contrat avec SBI pour le matériel Toshiba, l'Office du Tourisme a donc écrit à Rex Rotary pour confirmer sa décision de rupture, indiquant qu'elle devrait donc verser la somme de 50.494,77 F, et demandant bien confirmation à Rex Rotary avant de faire parvenir le règlement.

C'est alors seulement que Rex Rotary a indiqué à l'Office du Tourisme d'Allevard qu'il était titulaire d'un contrat de location simple à durée irrévocable de 72 mois, etc, et qu'elle refusait la résiliation.

La société SBI ignore exactement la nature des échanges et correspondances entre Rex Rotary et l'Office du Tourisme.

Il apparaît simplement en définitive, qu'une transaction est intervenue entre eux, moyennant le versement par l'Office du Tourisme d'une indemnité forfaitaire et définitive de 50.000 F.

Postérieurement, la société Rex Rotary a imaginé de s'adresser directement à la société SBI Toshiba pour dire que le matériel repris ne pouvait en réalité faire l'objet d'une option d'achat, qu'il était simplement loué, que l'option d'achat n'avait en réalité aucun rapport avec ce matériel là, et en définitive, la société Rex Rotary adressait à la société SBI Toshiba une facture artificielle de vente du copieur Rex Rotary d'occasion pour la somme extraordinaire de 92.017,23 F TTC.

Cette somme au demeurant n'a jamais été justifiée.

On ne sait même pas à l'origine, quel a été le prix facturé de Rex Rotary fournisseur à Lance Services loueur, lors du marché passé à l'origine avec l'Office du Tourisme d'Allevard.

Postérieurement, à une date et dans des conditions ignorées, les sociétés Rex Rotary et Lance Services d'une part, et l'office du Tourisme d'Allevard d'autre part, sont convenus d'un accord transactionnel moyennant le versement par l'Office du Tourisme d'une indemnité de 50.000 F.

L'Office du Tourisme se sera ainsi servi de la somme de 50.494,77 F versée par SBI Toshiba pour exercer l'option d'achat pour, en réalité, rompre ce qui serait le contrat de location du copieur Rex Rotary ;

Les sociétés Rex Rotary et Lance Services, après avoir transigé avec l'Office du Tourisme sur la rupture du contrat, et sur la non restitution du matériel, moyennant cette indemnité de 50.000 F, ont donc imaginé de venir réclamer à la société SBI Toshiba avec laquelle elles n'ont aucun lien de droit, la somme de 92.017,23 F, au titre d'un prétendu préjudice matériel (sans aucun justificatif probant), et la somme de 50.000 F au titre d'un prétendu préjudice commercial, et encore 80.000 F au titre du préjudice moral, outre d'excessives demandes en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Discussion

A/ Sur les rapports entre Lance Services et l'Office du Tourisme.

Les seuls documents produits par les demandeurs sont un contrat copies du 14 mai 1993 et un procès-verbal de réception du matériel du 10 juin 1993.

Au contrat copies sont jointes des Conditions Générales, au demeurant illisibles, et en tout cas non approuvées.

Selon l'apparence des documents produits, le coût total de l'opération représentait, avec un taux inchangé de TVA à 18,6 % sur la totalité du contrat, une dépense totale de plus de 250.000,00 F pour l'Office du Tourisme.

Il apparaît en effet que le contrat portait sur 400.000 copies par périodes trimestrielles, c'est-à-dire 160.000 copies par an et sur la durée du contrat 960.000 copies.

Le coût du contrat pour l'Office du Tourisme représentait donc

- 960.000 copies x 0,22 F = 211.200,00 F HT

- A rajouter TVA à 18,6 % (taux en vigueur en 1993) : 39.283,20 F

TOTAL TTC : 250.483,20 F

Il est compréhensible que l'Office du Tourisme ait pu penser qu'il lui avait été fourni un matériel inadapté à un coût particulièrement élevé.

C'est pourquoi, l'Office du Tourisme a ensuite préféré traiter avec la société SBI Toshiba.

B/ Sur les rapports entre l'Office du Tourisme et SBI Toshiba.

Lorsque le représentant SBI a rencontré l'Office du Tourisme, la Directrice a indiqué qu'elle possédait un copieur Rex Rotary, sans autre précision.

La Directrice a montré au représentant SBI un document du Crédit Universel montrant la valeur de rachat en cours de location.

La valeur de rachat au 30 novembre 1993 était de 50.494,77 F.

Le représentant SBI a proposé d'exercer l'option d'achat, et ce montant exact a été versé par SBI à l'Office du Tourisme pour l'exercice de l'option d'achat, à titre de reprise du matériel.

Il s'agissait visiblement d'un matériel ancien, et d'un modèle éprouvé, puisque déjà lorsqu'il avait été fourni à l'Office du Tourisme, c'était un matériel d'occasion.

L'Office du Tourisme a ensuite régulièrement passé contrat avec la société SBI, d'une part d'un contrat de vente d'un photocopieur Toshiba portant instructions spéciales : " solde du dossier Rex Rotary à un montant de 50.494,77 F TTC ", et d'autre part un contrat d'abonnement copies incluant 20.250 copies par trimestre moyennant une redevance de 2.085,15 F HT et facturation des copies supplémentaires au prix unitaire de 0,103 F HT.

Ainsi qu'il a été exposé, le coût mensuel est de deux fois inférieur, et le coût sur la durée du contrat est de quatre fois inférieur au système Rex Rotary.

Mais s'agissant d'abord de solder le contrat Rex Rotary, en toute bonne foi, au vu des documents qui avaient été présentés, la société SBI a versé la somme de 50.494,77 F, correspondant à l'option d'achat au 30 novembre 1993.

L'Office du Tourisme a bien reçu ce chèque, et l'a bien effectivement encaissé.

La société SBI Toshiba n'avait absolument aucune raison de verser cette somme, si elle n'avait pas très précisément constitué l'option d'achat de l'utilisateur en cours du contrat, libérant ainsi l'acquisition du matériel, et permettant d'exercer la reprise, qui est un montant ne correspondant en aucune façon à la valeur réelle du matériel, mais une sorte de remise commerciale par le vendeur.

La société SBI n'a pas eu connaissance des prétendues Conditions Générales, au demeurant non approuvées, ni signées, concernant un contrat de location simple entre l'Office du Tourisme et la société Rex Rotary ou la société Lance Services.

Contrairement à ce qu'a estimé le Premier Juge, le tableau financier d'option d'achat pouvait parfaitement avoir une référence différente du contrat copies, le contrat copies et l'allocation financière pouvant parfaitement être conclus avec des interlocuteurs distincts.

Il est constant que l'acquéreur d'un matériel professionnel peut parfaitement s'adresser à une société financière ou un établissement financier distinct du fournisseur, et de son choix propre.

Il n'était donc pas anormal que l'Office du Tourisme ait pu en même temps être titulaire d'un contrat copies avec la société Lance Services Rex Rotary, et d'autre part ait conclu un financement avec le Crédit Universel.

En toute hypothèse, le vendeur de la société SBI n'a eu connaissance que du tableau de financement du Crédit Universel, à l'exclusion de tout autre document quel qu'il soit.

Rien ne permet d'établir, et encore moins d'affirmer, que la société SBI ait pu avoir connaissance des pratiques des sociétés Rex Rotary et Lance Services.

La société SBI Toshiba, qui n'a pas le moindre lien de droit avec les sociétés Rex Rotary et Lance Services, n'a vis-à-vis d'elles pas commis la moindre faute.

C/ Sur les prétendus préjudices

La société Rex Rotary et la société Lance Services sont convenues avec l'Office du Tourisme, d'une transaction moyennant le versement d'une indemnité forfaitaire de 50.000 F.

Comment peuvent-elles à nouveau, réclamer des prétendus préjudices à la société SBI, alors qu'elles sont déjà convenus de leur indemnisation.

Il est d'ailleurs extraordinaire de constater que l'indemnité versée par l'Office du Tourisme provenait en réalité de la somme versée par la société SBI, pour exercer l'option d'achat.

En définitive, c'est indirectement la société SBI qui a payé l'indemnité de résiliation du contrat entre le Groupe Rex Rotary et l'Office du Tourisme d'Allevard.

Par ailleurs, la société Rex Rotary prétend avoir elle-même à l'origine, vendu le matériel à Lance Services, aux fins de location à l'Office du Tourisme, suivant une facture qui aurait été établie le 14 mai 1993 pour un montant TTC de 92.017,23 F.

Ce montant n'est absolument pas justifié.

Comme par hasard, c'est le même montant qui sera facturé par Rex Rotary à SBI le 1er décembre 1993, et c'est encore le même montant, toujours pour le même matériel qui était déjà d'occasion, qui sera réclamé devant le Tribunal.

Le Tribunal va estimer que c'est le montant du préjudice de Lance Services.

Bien plus, le Tribunal va estimer que Lance Services a subi un manque à gagner en n'encaissant pas les loyers, et en perdant l'Office du Tourisme comme client !

C'est dans ces conditions invraisemblables que le Tribunal a accordé, outre la somme de 92.017 ,23 F non justifiée, une nouvelle indemnité de 50.000 F.

Il n'y a cependant pas la moindre faute, pas le moindre préjudice, et certainement pas le moindre lien de causalité.

La société Lance Services a effectivement perdu un client, mais elle ne peut s'en prendre qu'à elle-même.

La société Rex Rotary n'a rien perdu.

Elles ont encaissé la somme de 50.000 F.

Cette somme était déjà disproportionnée au regard de la valeur du matériel ancien, autrefois fourni d'occasion à l'Office du Tourisme d'Allevard.

La société SBI a loyalement traité avec l'Office du Tourisme d'Allevard.

L'office du Tourisme s'est servi de la somme qui lui était versée pour exercer l'option achat, pour transiger la rupture et la non restitution du matériel Rex Rotary.

Comment de tout cela estimer que la société SBI Toshiba devrait encore payer aux sociétés Rex Rotary et Lance Services la valeur exagérée et non justifiée du matériel, un prétendu préjudice commercial, et encore un invraisemblable préjudice moral.

La réformation s'impose.

Il doit être fait grief au Tribunal d'avoir pré-supposé la faute ou une prétendue mauvaise foi de SBI, alors que le seul examen des faits démontre que la société SBI Toshiba a agi d'une manière commerciale, loyale et normale dans ses rapports exclusifs avec son client l'Office du Tourisme d'Allevard.

Il n'y a pas eu la moindre action déloyale, ni de dénigrement, ni la moindre faute vis-à-vis des sociétés Rex Rotary et Lance Services.

Par ces motifs :

Déclarer la société SBI Toshiba recevable et bien fondée en son appel.

Réformer le jugement rendu le 19 janvier 1996 par le Tribunal de Commerce de Grenoble.

Déclarer les sociétés Rex Rotary et Lance Services irrecevables et en tout cas mal fondées en leurs demandes, et les en débouter.

Reconventionnellement les condamner conjointement et solidairement à payer à la société SBI Toshiba, la somme de 50.000 F à titre de dommages et intérêts, et celle de 10.000 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Les condamner solidairement aux dépens,

Et autoriser, pour ceux d'appel, la SELARL Dauphin et Neyret à les recouvrer directement contre la partie condamnée, conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ; "

Que, dans des conclusions du 11 décembre 1996, elle ajoute ceci :

" Plaise à la Cour.

La SARL SBI maintient intégralement les termes et fins de ses conclusions précédemment signifiées le 17 juin 1996.

En complément et en réponse aux conclusions signifiées par la société Lance Services et Rex Rotary le 24 septembre 1996, elle formule les observations ci-après.

Les sociétés Rex Rotary et Lance Services confirment expressément que le contrat de crédit bail entre le Crédit Universel et l'Office du Tourisme d'Allevard se rapportait bien à un copieur de marque Rex Rotary.

Il s'agissait bien d'un contrat de crédit bail avec condition de rachat en cours de location.

C'est bien le document Crédit Universel intitulé Condition de Rachat en cours de location, qui a été remis par l'Office du Tourisme d'Allevard au représentant de la société SBI.

Bien tardivement, dans le cadre de la procédure de première instance, les sociétés Rex Rotary et Lance Services, ont produit un document valant facture du 24 mai 1993 de l'une à l'autre, concernant le copieur d'occasion pour un montant de 77.586,20 F HT.

En réalité, il s'agit uniquement d'une facturation interne.

Ce document n'a par définition jamais été communiqué à l'Office du Tourisme d'Allevard.

Il est remarquable de constater que la société Lance Services réclame au titre de son prétendu préjudice matériel, le montant TTC, alors qu'elle a déjà récupéré la TVA sur le matériel, et qu'elle a déjà, sur une certaine période, perçu les redevances de l'Office du Tourisme.

Mais cette facturation ne présente aucune garantie d'authenticité et ne saurait représenter la justification de quelque préjudice que ce soit, contesté tant dans son principe que dans son montant.

A suivre le raisonnement des sociétés Rex Rotary et Lance Services, et à examiner les clauses du contrat copies entre Lance Services et l'Office du Tourisme, le locataire doit globalement d'une part payer les redevances prévues au contrat, et d'autre part restituer le matériel en fin de contrat.

La société Lance Services reconnaît qu'une transaction est intervenue avec l'Office du Tourisme sur la résiliation du contrat, moyennant le versement d'une indemnité forfaitaire et transactionnelle de 50.000 F.

Indépendamment du fait que l'indemnité versée par l'Office du Tourisme l'a été avec les fonds remis par SBI au titre du rachat du contrat de location du Crédit Universel, cette transaction rend les sociétés Rex Rotary et Lance Services irrecevables à venir maintenant demander réparation de prétendus préjudices matériels, commerciaux et moraux, qui ne peuvent être que totalement contestés aussi bien dans leur principe que dans leur montant.

En conclusion, la société SBI n'a pas commis la moindre faute, et est bien restée dans le cadre d'une concurrence loyale en vendant un copieur à l'Office du Tourisme d'Allevard.

La procédure engagée par les sociétés Lance Services et Rex Rotary constitue en réalité une manœuvre d'intimidation et de pression qui ne saurait être admise.

Par ces motifs :

Adjuger de plus fort à la société SBI le bénéfice de ses précédentes écritures.

Condamner les sociétés Rex Rotary et Lance Services aux dépens. "

Attendu que les sociétés Lance Services et Rex Rotary concluent ainsi qu'il suit :

Plaise à la Cour :

I - Rappel des faits et de la procédure :

A - Les faits

La société Lance Services SA - Copyrex (ci-après dénommée " Copyrex "), sise 112 ter, rue Cardinet à Paris (75017 Paris), est une société de services, spécialisée dans l'achat de matériels de reprographie et de bureautique, commercialisés en France par la société Rex Rotary, matériels qu'elle donne en location à divers locataires.

En date du 14 mai 1993, l'Office du Tourisme et thermal du pays d'Allevard (ci-après dénommé " l'Office du Tourisme "), sis place de la Résistance à Allevard (38580), a souscrit auprès de Copyrex un contrat de location, à la copie, portant sur un photocopieur Rex Rotary n° 8055 DSF.

Le contrat de location est entré en vigueur le 10 juin 1993, date de réception définitive par l'Office du Tourisme du matériel. Ce contrat portait sur une durée irrévocable de 72 mois, période pendant laquelle le matériel ne pouvait être ni vendu, ni loué, ni déplacé, en vertu de l'article 5 (v) des Conditions Générales du Contrat.

La société Bureautique Informatique (ci-après dénommée " SBI ") a démarché l'Office du Tourisme. Afin de convaincre ce dernier de souscrire un nouveau contrat de location, ayant pour objet un matériel concurrent, soit un photocopieur Toshiba, SBI a prétendu que le contrat de location conclu avec Copyrex pouvait être valablement soldé.

Le 13 septembre 1993, SBI, profitant de l'ignorance liée à la qualité de non-professionnel de l'Office du Tourisme, a fait souscrire à ce dernier un contrat de location et lui a, parallèlement, versé une somme de 50.494,77 Francs TTC destinée, selon elle, à solder le contrat Copyrex.

SBI s'est, par ailleurs, saisi du matériel Rex Rotary n° 8055 qu'elle reconnaît avoir aussitôt détruit, au mépris du droit de propriété de Copyrex qu'en bon professionnel elle ne pouvait et ne devait ignorer.

L'Office du Tourisme a informé Copyrex de cette situation. Copyrex a opposé à l'Office du Tourisme les manquements à ses obligations contractuelles donnant lieu en vertu de l'article 7 des Conditions Générales du Contrat de location à une indemnité de résiliation.

Compte tenu de la bonne foi de l'Office du Tourisme un accord amiable est intervenu : l'Office du Tourisme a versé à Copyrex une somme de 50.000 F TTC, environ, à titre d'indemnités transactionnelles.

B - Procédure :

Par exploit en date du 13 décembre 1994, la société Rex Rotary et la société Lance Services ayant pour nom commercial " Copyrex ", ont assigné la société " SBI " aux fins de la voir condamner à leur payer :

Pour la société Lance Services :

- la somme de 92.017,23 F TTC au titre de son préjudice matériel augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance,

- la somme de 50.000 F TTC en réparation de son préjudice commercial augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance,

- la somme de 11.186 F en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Pour la société Rex Rotary :

- la somme de 80.000 F à titre du préjudice moral augmentée des intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 1994, date de la mise en demeure,

- la somme de 11.186 F en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Il était demandé en outre d'ordonner l'exécution provisoire nonobstant appel ou opposition et sans caution ainsi que la condamnation de la société Bureautique Informatique aux entiers dépens.

Par jugement en date du 19 janvier 1996, le Tribunal de Commerce de Grenoble a :

- condamné la société " SBI " à payer à la société Lance Services la somme de 92.017,23 F outre les intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 1994, ainsi que la somme de 50.000 F de dommages et intérêts ;

- condamné la société " SBI " à payer à la société Lance Services la somme de 3.000 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- condamné la société " SBI " à payer à la société Rex Rotary la somme de 3.000 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- a rejeté le surplus des demandes ;

- a dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

- a condamné enfin la société " SBI " aux entiers dépens.

C'est dans ces conditions que la société " SBI " a interjeté appel de ce jugement invoquant une argumentation similaire à celle développée en première instance, et qui ne saurait valablement prospérer comme il va l'être démontré.

II - Discussion :

A - Sur la responsabilité de la société " SBI " :

Dans ses conclusions et pour tenter de se soustraire à sa responsabilité, la société SBI indique qu'elle n'a fait que racheter le photocopieur Rex Rotary n° 8055 DZFG conformément aux conditions de rachat en cours de location et à l'option d'achat de l'utilisateur.

Cependant, les éléments produits aux débats démontrent sans nul doute possible que ce matériel ne bénéficiait en aucune façon d'une telle possibilité de rachat en cours de location, et que la société SBI a sciemment tenté de créer une confusion dans l'esprit de l'utilisateur, l'Office touristique et thermal du pays d'Allevard, pour l'obliger à contracter.

En effet, le " contrat-copies " concernant le matériel Rex Rotary 8055 DZF et souscrit entre la société Lance Services ayant pour nom commercial Copyrex, et l'Office du Tourisme est un contrat de location pure et simple dont les conditions générales sont claires.

Ces conditions précisent expressément que d'une part le matériel objet du contrat, ne peut être vendu (article V - Obligations du client) et d'autre part que ce matériel reste la propriété de la société Lance Services (article X - Cessions du contrat).

Dans ses écritures, l'appelante tente de tromper la religion de la Cour en indiquant qu'en ce qui concerne les Conditions Générales produites aux débats, celles-ci seraient illisibles et en tout cas non approuvées. Cependant, la Cour notera avec attention que la totalité des pièces produites par les intimées sont parfaitement lisibles, et qu'il est expressément stipulé au recto du contrat du 14 mai 1993 : " Le client certifie l'exactitude de tous les renseignements fournis aux prestataires à l'appui de sa demande, et déclare avoir pris connaissance des conditions particulières et générales et les accepter .... ", ces conditions figurant au verso dudit contrat.

Ainsi, et dans la mesure où la société SBI est un professionnel en la matière, elle ne pouvait ignorer cette situation.

A cet égard, il convient de noter les termes particulièrement motivés employés par le Tribunal de Commerce de Grenoble qui, après avoir relevé expressément que les Conditions Générales susvisées étaient clairement le reflet d'un contrat de location simple, a pu en déduire valablement que : " Pour un professionnel averti telle que la SARL SBI Toshiba, le doute n'était donc pas permis. Elle n'avait absolument pas le droit de proposer à son client un rachat du contrat et de procéder à la reprise et la destruction du matériel appartenant à son concurrent ".

Aujourd'hui, la société " SBI " tente pour la première fois de faire croire qu'elle n'a jamais en connaissance, à l'époque des faits, de ces documents contractuels. Cependant, non seulement celle-ci n'en rapporte pas la preuve, mais encore, elle se devait, en professionnel averti, de s'informer précisément sur la nature juridique du contrat portant sur le matériel qu'elle a décidé de récupérer et de détruire ...

Elle ne saurait ainsi se fonder sur une pièce qui ne présente absolument aucun lien avec le matériel considéré.

Ainsi, la société SBI ne saurait fonder ses prétentions sur une pièce intitulée : " condition de rachat en cours de location ", dans la mesure où cette pièce ne concerne nullement le " contrat-copies " du 14 mai 1993, mais un autre contrat antérieur conclu entre le Crédit Universel et l'Office du Tourisme, qui, lui, était un contrat de crédit-bail ou contrat de location avec option d'achat.

En effet, antérieurement à la signature avec la société Lance Services d'un contrat de location, l'Office du Tourisme d'Allevard avait souscrit auprès du Crédit Universel un contrat de crédit-bail (ou contrat de location avec option d'achat) relatif à un copieur de marque Rex Rotary n° 8145.

Cependant, et par la suite, après levée de l'option d'achat de ce matériel avant le terme prévu, l'Office du Tourisme d'Allevard a souscrit auprès de la société Lance Services " Copyrex " le contrat de location portant sur le copieur Rex Rotary n° 8055 en date du 14 mai 1993.

C'est ainsi que la société SBI a trompé la religion de l'Office du Tourisme d'Allevard en utilisant une pièce étrangère au véritable contrat applicable.

D'ailleurs, aucune mention sur ce document ne permet de faire un lien avec le contrat du 14 mai 1993 tant en ce qui concerne les parties au contrat, que la désignation du matériel, objet de la convention.

En effet, ce document intitulé " Conditions de rachat en cours de location " mentionne un numéro de contrat qui en correspond absolument pas à celui de la société Lance Services.

Par ailleurs, le Tribunal constatera que le logo qui figure sur ce document n'est pas celui des concluantes, et qu'enfin cette pièce contient une clause type in fine concernant des véhicules automobiles. Or, ce document ne peut concerner la société Lance Services qui ne fait que de la location de photocopieurs ...

C'est ainsi que le Tribunal de Commerce de Grenoble a pu aisément relever la tromperie faite par la société " SBI ", relevant expressément que : " Par ailleurs, la SARL SBI Toshiba n'a pas pu, toujours en sa qualité de professionnel, être trompée par le document intitulé " Rachat en cours de location ". Il s'agit en effet d'un feuillet simple, ne faisant aucunement référence au contrat de location du 14 mai 1993 et portant un numéro de dossier totalement différent du numéro du contrat. Elle a vraisemblablement utilisé ce document pour décider son client à conclure avec elle ".

Enfin, la malignité de la société SBI est démontrée par la production aux débats de l'avoir en date du 14 octobre 1993 établi en faveur de l'Office du Tourisme d'Allevard et concernant la reprise du matériel Rex Rotary n° 8055 DZF comme le reconnaît expressément la société SBI dans ses écritures.

Or, il est édifiant de constater que cet avoir fait état d'une reprise d'un matériel tout à fait différent, puisqu'il est indiqué dans ce document dans la rubrique désignation du matériel :

" Reprise des options suivantes : inadaptées pour le client KD 2002 n° 320621, trieuse Tandem n° 219535 ".

Ainsi, en agissant de la sorte et en évitant qu'il soit fait mention du matériel Rex Rotary n° 8055 DZF, la société SBI savait pertinemment que ce matériel était indisponible. Elle a donc préféré créer un document intégrant une désignation totalement fausse ...

En dernier lieu, il convient de relever l'argumentation particulièrement critiquable de la société SBI qui tente d'éviter le véritable débat en essayant de s'attaquer aux conditions du " contrat-copies " du 14 mai 1993 et à la prestation fournie par les concluantes.

Or, il est inutile de rappeler que ce dernier débat est parfaitement indifférent au litige exposé devant la Cour, et en conséquence les concluantes ne s'attarderont pas à répondre aux dires de la société SBI.

En conclusion, en se saisissant du matériel Rex Rotary n° 8055 et en le détruisant au mépris du droit de propriété de la société Lance Services ayant pour nom commercial " Copyrex ", la société SBI a commis une faute constitutive d'un acte de concurrence déloyale, engageant sa responsabilité délictuelle fondée sur les articles 1382 et suivants du Code Civil.

Rappelons à cet égard que la jurisprudence considère comme une faute tout acte fait en violation des usages du commerce qu'elle soit intentionnelle ou non, et une simple imprudence suffit.

A cet égard, il a été démontré que la société SBI avait agi de manière tout à fait consciente et volontaire.

En tout état de cause, étant un professionnel en la matière, cette société ne pouvait se limiter à la lecture d'un échéancier sans l'étude des documents contractuels, dont les pièces produites aux débats démontrent qu'elle en a eu connaissance.

B - Sur le préjudice subi par les intimées :

1) En ce qui concerne la société Lance Services ayant pour nom commercial " Copyrex " :

La société Lance Services est bien fondée à solliciter la condamnation de la société SBI à la somme de 92.017,23 F TTC au titre de son préjudice matériel du fait de la destruction du copieur Rex Rotary n° 8055.

En effet, ce montant correspond exactement au prix de la reprise du photocopieur Rex Rotary n° 8055 DZF comme l'attestent les documents produits aux débats.

Contrairement à ce que tente de faire croire la société " SBI " dans ses écritures, ce montant est justifié par la production de la facture de Rex Rotary en date du 14 mai 1993, et correspondant à l'achat du matériel détruit sciemment par l'appelante.

Cette situation n'a d'ailleurs pas échappé au Tribunal de Commerce de Grenoble qui a relevé expressément l'existence de cette facture, et qui fixe le préjudice matériel subi par la société Lance Services.

D'autre part, la société Lance Services est également bien fondée à solliciter la somme de 50.000 F TTC à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice commercial, dans la mesure où de par la faute de la société SBI, la concluante a perdu un client important en la personne de l'Office du Tourisme d'Allevard.

Cette perte d'un client est d'ailleurs reconnue expressément par la société " SBI " qui dans ses écritures (page 10) indique que " la société Lance Services a effectivement perdu un client ... ". Cette perte étant la conséquence directe des agissements de la société " SBI ".

En effet, il a été démontré que pour parvenir à ses fins, la société SBI a utilisé non seulement un démarchage mais aussi des manœuvres déloyales qu'il convient de réprimer.

Rappelons également que si le contrat de location établi entre l'Office du tourisme d'Allevard et la société Lance Services était arrivé à son terme, la concluante aurait pu récupérer un solde de 202.400 F HT non perçu du fait de la faute commise par la société SBI.

C'est ainsi que contrairement à ce que tente de faire croire la société " SBI ", la transaction intervenue entre la société Lance Services et l'Office du Tourisme pour une somme de 50.000 F ne permet nullement de compenser le préjudice véritablement subi par la concluante.

Le Tribunal de Commerce de Grenoble a pu ainsi en déduire que la demande de dommages et intérêts présentée par la société Lance Services à l'encontre de la société " SBI " à hauteur de 50.000 F paraissait comme légitime.

2 - Sur le préjudice subi par la société Rex Rotary :

Le Tribunal de Commerce de Grenoble a cru bon devoir débouter la société Rex Rotary de sa demande au titre de son préjudice subi.

Cependant, le préjudice est indéniable dans la mesure où le matériel détruit est de marque Rex Rotary, matériel volontairement détruit au profit de la marque Toshiba représentée par la société " SBI ".

Ces deux marques étant en concurrence directe, il est clair que de tels agissements fautifs préjudicient à l'image même de la société Rex Rotary.

En conséquence, il conviendra d'infirmer le jugement du Tribunal de Commerce de Grenoble sur ce point, et de condamner la société " SBI " à payer à la société Rex Rotary la somme de 80.000 F augmentée des intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 1994, date de la mise en demeure.

C - Sur les frais irrépétibles :

Il serait manifestement inéquitable de laisser à la charge des concluantes l'ensemble des frais irrépétibles qu'elles ont du engager pour la présente instance, et qui s'élèvent à la somme de 15.000 F pour chacune.

Par ces motifs :

Déclarer l'appel interjeté par la société " SBI " mal fondé.

En conséquence, débouter la société SBI de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Grenoble en ce qu'il a condamné la société SBI Toshiba à payer à la société Lance Services la somme de 92.017,23 F, outre les intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 1994 ainsi que la somme de 50.000 F à titre de dommages et intérêts.

Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Rex Rotary de sa demande de paiement à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi.

En conséquence, condamner la société SBI Toshiba à payer à la société Rex Rotary la somme de 80.000 F à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi augmentée des intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 1994, date de la mise en demeure.

En tout état de cause, condamner la société SBI Toshiba à payer à la société Lance Services la somme de 15.000 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Condamner la société SBI Toshiba aux entiers dépens de la procédure, et autoriser, pour ceux d'appel, la SCP Grimaud à les recouvrer directement contre la partie condamnée ".

Que, dans des conclusions additionnelles du 15 avril 1997, elles ajoutent ceci :

" Plaise à la Cour :

Les présentes écritures ont pour objet de répondre brièvement aux écritures de la société SBI dont l'argumentation ne saurait valablement prospérer.

En page 8 de ses premières conclusions, la société SBI indique : " qu'il n'était donc pas anormal que l'Office du Tourisme ait pu en même temps être titulaire d'un contrat-copies avec la société Lance Services-Rex Rotary, et d'autre par ait conclu un financement avec le Crédit Universel ".

Cependant, la société SBI tente ici de faire un amalgame entre la société Lance Services (ayant pour nom commercial Coyrex) et la société Rex Rotary.

Or, ces deux sociétés sont juridiquement distinctes et une activité différente puisque la première est un établissement financier alors que la seconde est le fournisseur du matériel.

Ainsi, et dans la mesure où la société Crédit Universel est également un établissement financier, la société Lance Services se trouve en concurrence directe avec cet organisme. Il est donc inconcevable que l'Office du Tourisme ait pu en même temps être titulaire d'un contrat-copies avec la société Lance Services et d'autre part avoir conclu un financement avec le Crédit Universel sur le même matériel.

Par ailleurs, et en ce qui concerne l'argumentation de la société SBI développée dans son deuxième jeu d'écritures selon laquelle l'Office du Tourisme d'Allevard aurait remis au représentant de la société SBI le document Crédit Universel intitulé " conditions de rachat en cours de location ", cette observation ne permet pas d'exonérer la société SBI de sa responsabilité.

En effet, et à supposer cette situation établie, il convient de rappeler que la société SBI est un professionnel de même spécialité que la société Rex Rotary et ne pouvait donc, en tant que professionnel averti, se contenter d'un tel document qui ne présentait aucune indication ou référence par rapport au matériel détruit.

Or, il a déjà été indiqué que la jurisprudence en la matière considère qu'une simple imprudence suffit à constituer une faute engageant la responsabilité de son auteur.

En tout état de cause, il a été démontré en l'espèce que la société SBI avait agi de manière tout à fait consciente et volontaire, et le Tribunal de Commerce de Grenoble a pu ainsi valablement en déduire que la société SBI avait utilisé le document susvisé pour décider l'Office du Tourisme d'Allevard à conclure avec elle.

Dans ses dernières écritures, la société SBI indique que la facturation produite aux débats ne présenterait aucune garantie d'authenticité.

Cependant, non seulement c'est à la société SBI de rapporter la preuve de l'établissement d'un faux, mais encore la Cour constatera que la facture susvisée est un document comptable engageant la responsabilité tant pénale que fiscale de son auteur ...

Enfin, il est normal que la société Lance Services réclame au titre de son préjudice matériel, un montant TTC dans la mesure où elle se trouve soumise au régime de la TVA.

En dernier lieu, il est juridiquement inconcevable de prétendre que la transaction faite entre la société Lance Services et l'Office du Tourisme d'Allevard a eu pour effet d'effacer la responsabilité de la société SBI, et le préjudice subi par les concluantes.

En revanche, la société Lance Services aurait pu réclamer à l'encontre de la société SBI une somme supérieure en l'absence de cette transaction dont la somme a été mise en compte dans l'évaluation du préjudice subi par la concluante.

Il convient de rappeler que sans l'intervention fautive de la société SBI, la société Lance Services aurait pu récupérer un solde de 202.400 F HT si le contrat de location était arrivé à son terme ...

Par ces motifs

Adjuger aux concluantes le bénéfice de leurs précédentes écritures.

Débouter la société SBI de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions. "

SUR CE :

Attendu qu'il est constant que la société SBI Toshiba a vendu un photocopieur de sa marque à l'Office du Tourisme d'Allevard qui utilisait un photocopieur de marque Rex Rotary ;

Qu'une telle vente aurait pu être le résultat d'une activité commerciale normale tant il est vrai que le premier fournisseur ne saurait considérer le client comme captif de sa marque ;

Mais que la vente réalisée par la société Toshiba n'a pu se faire qu'à la suite de la résiliation par l'Office du Tourisme d'un contrat de location d'une durée irrévocable de soixante douze mois conclu le 14 mai 1993 avec la société Lance Services portant sur un photocopieur Rex Rotary ;

Et que la société SBI Toshiba a joué un rôle actif dans cette résiliation qu'elle a affirmé à l'Office du Tourisme prendre à sa charge en remettant un chèque de 50.494,77 F destiné, selon elle, à clore régulièrement le contrat de location, en reprenant le matériel et en le détruisant ;

Attendu que le comportement de la société SBI Toshiba caractérise plusieurs actes de concurrence déloyale :

- en ce qu'il incite un client d'une marque concurrente à rompre un contrat avant le terme contractuellement prévu ; qu'il est indifférent au regard du droit de la concurrence déloyale que le client ait pu se libérer moyennant un dédit ;

- en ce qu'il fournit la somme nécessaire au paiement du dédit ; que la remise de cette somme au client ajoute au caractère déloyal de l'incitation à rompre le contrat ;

- en ce qu'il conduit à retirer des mains du client un photocopieur concurrent ;

- en ce qu'il a pour résultat de détruire un photocopieur concurrent ;

Attendu que le juge ne saurait tolérer qu'un commerçant élimine un concurrent en rachetant ses produits et en les détruisant ; que l'attitude de la société SBI Toshiba vise une fin identique en l'aggravant par le détournement de la clientèle incitée à résilier le contrat conclu avec le concurrent ;

Attendu que la société SBI Toshiba a, en agissant ainsi, commis une faute délictuelle tant à l'égard de la société Lance Services dont le contrat de location a été résilié prématurément et le matériel détruit que la société Rex Rotary dont la marque a été l'objet d'une tentative d'élimination du marché, réalisée avec succès, au moins une fois ;

Attendu sur le préjudice subi par la société Lance Services, que la transaction intervenue avec l'Office du Tourisme est inopposable à la société SBI Toshiba ; que cette dernière ne saurait se prévaloir de concessions consenties à un client qu'un commerçant s'efforce de fidéliser ;

Que la société Lance Services est en droit de réclamer la réparation de son entier préjudice ;

Que le contrat conclu pour soixante douze mois moyennant un prix de vingt-deux centimes par copie avec un minimum de 40.000 copies par trimestre devait permettre à la société SBI un gain de 8.800 F par trimestre ;

Que la résiliation intervenue en novembre 1993 alors que le contrat avait été conclu en mai 1993 a fait perdre à la société Lance Services le revenu de quinze trimestres, soit : 132.000 F ;

Qu'en outre, la société Lance Services a perdu la valeur résiduelle du photocopieur ;

Qu'il y a donc lieu de faire droit à sa demande de confirmation du jugement qui a condamné la société SBI Toshiba à lui payer 92.017,23 F en réparation de son préjudice matériel ;

Que le détournement de la clientèle de l'Office du Tourisme d'Allevard ainsi que la perte du gain normalement attendu du contrat justifient, également, la confirmation du jugement en ce qu'il a alloué à la société Lance Services 50.000 F en réparation de son préjudice commercial ;

Attendu, sur le préjudice de la société Rex Rotary, que la destruction du matériel portant sa marque, alors qu'il était en l'état de marche et faisait l'objet d'un contrat devant s'achever plus de cinq ans après, caractérise de façon indubitable, de la part de la part de la société SBI Toshiba, le dénigrement du produit d'un concurrent ;

Qu'outre le préjudice moral ainsi souffert par la société Rex Rotary, cette dernière devra supporter le coût d'éventuelles méventes et des efforts commerciaux nécessaires à la reprise de la clientèle perdue ; que la Cour chiffre son préjudice à 50.000 F ;

Attendu, sur les sommes demandées au titre de l'article 700 du NCPC, que l'identité de dossier et d'avocat conduit la Cour à faire droit aux demandes à hauteur de 8.000 F pour chacun des deux intimés ;

Par ces motifs : LA COUR : Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, Après en avoir délibéré conformément à la loi, Confirme le jugement en ce qui concerne les condamnations de la société SBI Toshiba au profit de la société Lance Services, Y ajoutant : Condamne la société SBI Toshiba à payer 50.000 F (cinquante mille francs), à titre de dommages et intérêts à la société Rex Rotary ; Condamne la société SBI Toshiba à payer, au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, 8.000 F (huit mille francs), à la société Lance Services et 8.000 (huit mille francs), à la société Rex Rotary ; La condamne aux dépens dont distraction au profit de la SCP d'avoués Grimaud.