Livv
Décisions

CA Versailles, 5e ch. B, 22 novembre 1996, n° 95-23936

VERSAILLES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Société Nouvelle des Appareils Paris Express (SARL)

Défendeur :

Barreiros, Angelo Po (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Jeannoutot

Conseillers :

M. Lagarde, Mme Gautrat

Avocats :

Mes Lacamp, Halpern, Bartok, Mourre.

Cons. prud'h. Versailles, du 21 juin 199…

21 juin 1995

Reprochant à son ancien directeur commercial, Monsieur Barreiros, démissionnaire le 23 février 1993, d'avoir commis des agissements constitutifs de concurrence déloyale en entrant deux mois après sa démission au service de la Société Angelo fabriquant des produits concurrents, et ce en violation d'une clause de non concurrence figurant dans son contrat de travail, la Société Nouvelles des Appareils Paris Express (SNAPE) a saisi le Conseil de Prud'hommes de Versailles d'une action en concurrence déloyale à l'encontre de Monsieur Barreiros et de la société Angelo Po.

Par jugement du 21 juin 1995 le Conseil de Prud'hommes s'est déclaré incompétent au profit du collège arbitral à désigner par les parties, conformément à l'ordonnance rendue le 22 décembre 1993 par le Président du Tribunal de Commerce de Versailles et dont la SNAPE n'a pas interjeté appel.

Pour statuer comme il l'a fait le Conseil a considéré qu'il résultait d'une jurisprudence bien établie que l'action en concurrence déloyale contre l'entreprise qui se serait rendue complice de la démission abusive du salarié qui est entré à son service échappait à la juridiction du Conseil de Prud'hommes.

Revendiquant la compétence de la juridiction prud'homale pour connaître du litige, la SNAPE a formé contredit le 5 juillet 1995 à l'encontre de cette décision.

Monsieur Barreiros et la société Angelo Po demandent à la Cour :

A titre principal :

De déclarer le contredit irrecevable,

A titre subsidiaire :

De rejeter des débats les conclusions de la SNAPE,

A titre infiniment subsidiaire :

De confirmer en tous points le jugement du Conseil de Prud'hommes de Versailles du 21 juin 1995.

La Société Angelo Po sollicite en outre l'octroi de la somme de 10.000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Sur ce,

Considérant que pour voir déclarer le contredit irrecevable les défendeurs invoquent son absence de motivation en alléguant que dans sa lettre du 5 juillet 1995 la société SNAPE se borne à analyser la décision d'incompétence sans faire état d'aucun moyen de nature à justifier la compétence alléguée ; que ce n'est que postérieurement à l'expiration du délai de contredit que la Société a, dans des conclusions écrites soulevant des moyens radicalement nouveaux, tenté de motiver celui-ci ;

Mais considérant que dans sa lettre du 5 juillet 1995 formant contredit la Société SNAPE d'une part, invoque une erreur de lecture commise par le Conseil de Prud'hommes de l'ordonnance de référé du Tribunal de Commerce du 22 novembre 1993 ; d'autre part, critique la portée juridique de l'ordonnance de référé, et enfin, expose que c'est bien le Conseil de Prud'hommes qui est compétent dans la mesure où les actes de concurrence déloyale reprochés à la Société Angelo Po ont été commis avec son ancien salarié, Monsieur Barreiros ; qu'il en résulte que le contredit est suffisamment motivé ;

Considérant qu'en application des dispositions de l'article 85 du Nouveau Code de Procédure Civile le demandeur au contredit a la faculté de compléter et de parfaire sa motivation en y ajoutant au besoin des moyens nouveaux par des conclusions ultérieures qu'il s'ensuit que la motivation invoquée par la société SNAPE dans ses conclusions postérieures doit être retenue ;

Considérant qu'à juste titre la Société SNAPE faisant valoir que les agissements prétendument reprochés à Monsieur Barreiros sont liés à la violation de la clause de non concurrence figurant dans son contrat de travail, il en résulte que contrairement à l'opinion du premier Juge la juridiction prud'homale est compétente pour accueillir l'action introduite à la fois contre son ancien salarié et contre le nouvel employeur de ce dernier bénéficiaire de ses agissements fautifs;

Considérant qu'il convient dés lors, en infirmant le jugement entrepris, de dire la juridiction prud'homale compétente pour connaître du litige et de renvoyer la cause et les parties devant le Conseil de Prud'hommes de Versailles ;

Considérant qu'il y a lieu de condamner solidairement les défendeurs au paiement de la somme de 3.000 F à la SNAPE au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Par ces motifs, La Cour, Statuant publiquement et contradictoirement. Déclare recevable le contredit formé par la Société SNAPE à l'encontre du jugement rendu le 21 juin 1995 par le Conseil de Prud'hommes de Versailles. Infirme le jugement entrepris et, statuant à nouveau: Déclare la juridiction prud'homale compétente pour statuer sur l'action en concurrence déloyale formée par la Société SNAPE à l'encontre de Monsieur Barreiros et de la Société Angelo Po, Renvoie la cause et les parties devant le Conseil de Prud'hommes de Versailles, Déboute la Société Angelo Po de sa demande formée en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Condamne solidairement Monsieur Barreiros et la Société Angelo Po au paiement de la somme 3.000 F (trois mille francs) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Les condamne solidairement aux dépens.