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Décisions

Cass. com., 28 novembre 1995, n° 93-20.970

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Queyraud (SARL), LeclerCC

Défendeur :

Juif

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Gomez

Avocat général :

M. de Gouttes

Avocat :

Me Choucroy.

T. com. Meaux, du 23 avr. 1993

23 avril 1993

LA COUR : - Sur le moyen unique pris en ses deux branches : - Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, rendu en référé, (Paris, 5 octobre 1993), que M. Juif, exploitant un fonds de commerce de pompes funèbres, a assigné la société Queyraud et M. Michel Leclerc en leur faisant grief de la concurrence déloyale résultant de l'affichage par panneaux publicitaires d'un logo et de la photographie de M. Michel Leclerc, relatant l'ouverture prochaine d'un magasin de pompes funèbres Roc'eclerc ;

Attendu que la société Queyraud et M. Michel Leclerc font grief à l'arrêt d'avoir interdit à la société Queyraud l'utilisation du nom et de la photographie de M. Michel Leclerc, alors, selon le pourvoi, d'une part, que ne saurait constituer un trouble manifestement illicite par concurrence déloyale ou publicité mensongère le fait par un concurrent d'utiliser comme enseigne une marque régulièrement déposée dont l'usage lui a été concédé par son titulaire et sur laquelle son concurrent ne possède aucun droit ; et qu'en l'espèce, ainsi que le rappelaient leurs écritures, la dénomination et le logo Roc'eclerc constituaient une marque régulièrement déposée par M. Michel Leclerc dans le domaine des pompes funèbres et dont la société Queyraud avait la jouissance à titre d'enseigne en vertu d'un contrat de franchise, tandis que M. Juif ne pouvait prétendre à aucun droit à son égard ; que l'arrêt a donc violé les articles 873, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, 1382 du Code civil et 44-1 de la loi du 27 décembre 1973 ; et alors, d'autre part, que le fait par une société d'utiliser dans sa publicité le nom patronymique accompagné du prénom, ainsi que la photographie de son directeur commercial ne constitue pas non plus un trouble manifestement illicite par concurrence déloyale ou publicité mensongère, dès lors qu'une éventuelle confusion par homonymie ne concerne pas le concurrent mais seulement un tiers étranger aux débats, exerçant de surcroît une activité commerciale différente ; et qu'en l'espèce donc la société Queyraud pouvait normalement utiliser dans sa publicité le nom, le prénom et la photographie de son directeur commercial, M. Michel Leclerc, sans que la confusion éventuelle avec le patronyme de son propre frère Edouard Leclerc puisse interférer dans leurs rapports avec M. Juif qui n'avait aucun droit sur ce patronyme ; que l'arrêt a donc également violé les articles 873, alinéa 1, du nouveau Code de procédure civile, 1382 du Code civil et 44-1 de la loi du 27 décembre 1973 ;

Mais attendu que l'arrêt constate qu'il n'est pas contesté qu'ont été apposés, en face de l'entreprise de pompes funèbres de M. Juif, plusieurs panneaux d'affichage portant la photographie de M. Michel Leclerc, la mention et un logo Roc'Eclerc et la photographie de M. Michel Leclerc, accompagnés de la mention "pensez à ceux qui vous ont quitté -marbrerie pompes funèbres-" et qu'a été publié, dans un quotidien local, un message publicitaire relatant l'ouverture d'un " supermarché de funéraires sur mille mètres carrés -Roc'Eclerc directeur Michel Leclerc- prix discount " accompagné du même logo ; qu'il relève qu'entre le mot " Roc " et le mot " Eclerc " le " l " de Leclerc est remplacé par le dessin d'une aile ; que la cour d'appel, qui retient que l'acheteur d'attention moyenne, s'il connaît le nom Leclerc qui évoque nécessairement les centres de cette marque, ignore les dissensions existant entre les frères Leclerc et n'a pas la notion exacte des secteurs commerciaux dans lesquels le groupe Leclerc exerce son activité, a pu, après en avoir déduit que l'utilisation de la marque Roc'Eclerc, du logo et des expressions l'accompagnant traduisaient, par une confusion sciemment entretenue, la volonté de profiter abusivement de la renommée des centres Leclerc, décider que ces publicités constituaient une concurrence déloyale et un trouble manifestement illicite; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.