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Décisions

CA Paris, 4e ch. B, 24 mars 1994, n° 93-7386

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Elmswake Enterprises Ltd (Sté), Stratex France (SARL)

Défendeur :

WW Distributers Ltd (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guerrini

Conseillers :

M. Ancel, Mme Regniez

Avoués :

SCP Fanet, SCP Teytaud

Avocats :

SCP Augendre-Renaud-Fourment, Me Golsenne.

T. com. Paris, 2e ch., du 26 juin 1993

26 juin 1993

Par contrat en date du 2 août 1990, expressément soumis à la loi française, la société française IDDH, coproducteur de la série télévisée Teenage Mutant Ninja Turtles ainsi que les Tortues Ninja, a concédé à la société de droit irlandais Elmswake Enterprises Ltd (ci-après Elmswake), dont le siège est à Dublin, le droit exclusif de fabriquer, faire fabriquer et vendre des articles textiles et vestimentaires adaptés des thèmes, des personnages accessoires et coutumes des Teenage Mutant Ninja Turtles et Tortues Ninja, dont les droits appartiennent à la société américaine Mirage Studios.

La licence, valable du jour de la signature au 31 décembre 1992, couvre la France et six cantons suisses limitativement énumérés.

Le contrat est contresigné par la société Mirage Studios et la société Licensing Inc (principal bailleur de licence).

La société Stratex France SARL (ci-après Stratex) est le distributeur exclusif de la société Elmswake, sur le territoire français.

Dans le courant de l'année 1991, la société de droit anglais WW Distributers Ltd (ci-après WWD) a livré à Stratex un certain nombre de vêtements ; ces livraisons ont donné lieu à l'émission de factures au nom d'Elmswake pour un montant total de 75 588 GBP.

La société WWD a assigné les sociétés Elmswake et Stratex pour avoir paiement du montant de ces factures avec intérêts légaux à compter du 30 juillet 1991 ainsi que d'une indemnité à titre de dommages-intérêts.

Les défendeurs ont conclu à la mise hors de cause de la société Stratex et décliné la compétence du tribunal saisi, estimant les juridictions irlandaises seules compétentes. Subsidiairement, elles ont fait valoir que WWD était licencié non exclusif des tortues Ninja pour le Royaume-Uni et qu'elle avait failli à ses obligations de loyauté dans le cadre de ses relations contractuelles avec la société Elmswake, en désignant la société Albert Trading International (ci-après Albert) comme son agent officiel en France et en écoulant ainsi des articles revêtus des personnages des séries animées " Tortues Ninja " sur le territoire français en violation des droits de la société Elmswake. Elles ont en conséquence demandé au tribunal de surseoir à statuer sur la demande en paiement de WWD et d'ordonner sous astreinte la communication par cette dernière des documents commerciaux et comptables relatifs aux ventes sur le marché français à compter du 1er janvier 1991 des articles en cause effectuées par elle-même ou par des sociétés du groupe " Pugler Berry Embesons " et notamment à la société Albert, ainsi que l'état des redevances rétrocédées sur la même période par la société WWD et/ou la ou les sociétés affiliées pour toute vente consentie en Europe.

La société WWD s'était opposée à ces prétentions, soutenant qu'elle n'avait nullement enfreint l'exclusivité dont se prévalait la société Elmswake puisque les produits qu'elle avait distribués en France correspondaient à la licence qu'elle avait obtenue de la société CPL et qui avait pour objet les articles textiles revêtus des personnages, décors et modèles Teenage Mutant Hero Turtles alors que les droits concédés à la société Elmswake portaient sur les Ninja Turtles et étaient donc selon elle distincts ; qu'au surplus, la société WWD aurait bénéficié d'une autorisation à elle donnée par son concédant, LPL, le 5 juin 1991 et que de toute façon, elle tenait des articles 36 et 85 du Traité de Rome la liberté d'importer en France des produits mis sur le marché en Grande Bretagne avec l'accord de CPL.

Par jugement du 26 juin 1993, le Tribunal de commerce de Paris a rejeté l'exception d'incompétence et condamné in solidum et avec exécution provisoire les sociétés Elmswake et Stratex à payer à la société WWD la somme de 75 588 Livres Sterling ou sa contre-valeur en francs français, avec intérêts légaux à compter du 15 octobre 1991, date de l'assignation ; il a alloué à la demanderesse la somme de 15 000 F en application de l'article 700 du NCPC et débouté les parties de leurs autres demandes.

Les sociétés Elmswake et Stratex ont relevé appel, autorisé à jour fixe.

Cet appel ne tend pas à remettre en cause la décision des premiers juges sur la compétence et la condamnation prononcée au profit de la société WWD, mais seulement à la réformation du jugement en tant qu'il a rejeté la demande reconventionnelle des sociétés Elmswake et Stratex.

Ajoutant aux prétentions et moyens exprimés en première instance et réitérés en appel, les sociétés appelantes invoquent à titre subsidiaire, pour le cas où la Cour écarterait le fondement contractuel de leurs demandes, en " raison notamment de l'extranéité de WWD par rapport aux obligations contractuelles unissant Elmswake aux sociétés CPL et IDDH ", les agissements de l'intimée, selon elle constitutifs de concurrence déloyale et de parasitisme. A ce titre, elles font grief à la société WWD d'avoir sans droits désigné la société Albert comme son agent officiel sur le marché français en vue d'écouler sur ce marché des stocks excédentaires à des conditions tarifaires qu'elle refuse de dévoiler et qui ont pour effet de saturer la demande et de priver les appelantes de leurs investissements et de leurs efforts de prospection, et d'avoir créé la confusion dans l'esprit des acheteurs en laissant croire à l'appartenance de la société Albert au réseau des licences de distribution d'articles revêtus des dessins des tortues Ninja.

Les sociétés appelantes demandent qu'avant dire droit soit ordonnée sous astreinte de 1 000 F par jour de retard à compter de la signification du présent arrêt la communication des documents et pièces comptables requise en première instance, et ce pour la période du 1er janvier 1991 jusqu'à la date de l'arrêt, et que la copie des rapports de redevances rétrocédées sur la même période par WWD comporte la ventilation par type de produits et par pays, conformément aux termes de la télécopie adressée le 5 juin 1991 par CPL à WWD.

La société WWD conclut à la confirmation du jugement, sauf en ce qui concerne le point de départ des intérêts de la somme allouée, qu'elle demande de fixer au 30 juillet 1991, date selon elle de la mise en demeure.

Elle s'oppose, pour les motifs exprimés en première instance, à la demande reconventionnelle des appelantes. Elle soutient que les contrats de licence par elle signés avec la société CPL auraient pour objet les marques et logos " Teenage Mutant Hero Turtles " et qu'elle aurait vendu uniquement des produits Hero Turtles, et en aucun cas des produits " Ninja Turtles ", ni aux sociétés Elmswake et Stratex ni à d'autres personnes ; que les contrats d'Elmswake et Stratex porteraient sur les produits de marque et de dessein " Teenage Mutant Ninja Turtles " et " Tortues Ninja " ; que l'appellation serait un élément essentiel de leurs droits exclusifs, de telle sorte que l'objet de l'exclusivité de ces deux sociétés étant différent de celui du contrat de la concluante, il ne pourrait y avoir violation desdits droits ; que les contrats passés entre WWD et Elmswake-Stratex ne faisaient aucune référence à l'exclusivité dont il est aujourd'hui fait état et ne comportaient aucun engagement de WWD de ne pas vendre les produits en cause à des tiers dans le territoire couvert par l'exclusivité ; que par ailleurs, elle tenait d'une télécopie en date du 5 juin 1991, l'autorisation de la société CPL, donnée selon elle avec l'accord d'IDDH, de livrer à la société Albert certains produits entrant dans le champ de l'exclusivité conférée à la société Elmswake ; que par une autre télécopie en date du 31 juillet 1991, CPL, revenant dans une certaine mesure seulement sur l'autorisation antérieure, avait rappelé la nécessité " de respecter la position de notre licencié français ", ce qui confirmerait encore l'existence de rapports contractuels directs entre CPL, IDDH et Elmswake ; que CPL, comme il résulterait encore de l'organigramme versé aux débats par les appelantes, était le concédant réel de licences pour toutes les parties en cause et avait donc qualité pour autoriser les ventes en France controversées ; que la concluante aurait été tenue envers la société Albert de respecter les engagements souscrits sur la foi de l'autorisation donnée le 5 juin 1991 et d'honorer les quelques commandes prises pour 1991 ; qu'en tout état de cause, CPL n'aurait nullement fait état de droits exclusifs qui lui auraient permis d'interdire à la concluante de vendre les marchandises litigieuses en France, pour la simple raison que ces droits exclusifs n'existaient pas en ce qui concerne les marchandises " Hero Turtles " ; qu'une attestation délivrée par M. Kemp, directeur des ventes pour l'Europe de WWD, viendrait confirmer la portée donnée à l'autorisation délivrée le 5 juin 1991, à savoir la permission de vendre à la société Albert des produits " Hero Turtles ", situation dont IDDH aurait été informée lors d'une réunion tenue à New York le 19 juin 1991 ; qu'enfin, rien ne prouverait que la société concluante ait désigné la société Albert comme son agent officiel ; que la preuve contraire serait administrée par la télécopie adressée le 11 juillet 1991 à la société Albert et par laquelle la société WWD d'une part lui transmettait l'autorisation donnée par CPL le 5 juin 1991 comportant le rappel de la qualité d'agent pour la France qui était de IDDH et d'autre part appelait l'attention de la destinataire sur le fait qu'elle n'avait pas d'exclusivité de diffusion ; qu'en toute hypothèse, la cession des droits à la société Albert, serait-elle établie, ce qui n'est pas le cas, serait conforme aux stipulations de l'article 7 (b) du contrat n° 3529 entre CPL et la concluante, qui permettent expressément une telle cession " aux seules fins de fabrication, distribution ou vente des articles sous licence pour le compte du concessionnaire " (la concluante) ; qu'en définitive, la société WWD était fondée à conclure que la société Elmswake avait, comme elle, une licence non exclusive concédée par CPL pour la vente des produits Hero Turtles alors qu'elle ignorait tout des termes de son contrat de licence Ninja Turtles et qu'en l'absence d'exclusivité, la vente par WWD à des tiers dans le même territoire, dûment autorisé par CPL de surcroît, ne pouvait être considérée comme un acte de concurrence déloyale ni comme un dol contractuel.

Concernant l'existence du préjudice invoqué par les appelantes, la société intimée se réfère aux constatations consignées dans le procès verbal dressé, à la requête des appelantes et sur habilitation du président du Tribunal de commerce, par Maître Potot, huissier de justice, dans les locaux du magasin Carrefour de Créteil, le 20 décembre 1991, d'où il ressortirait que les appelantes avaient à faire face à des importations parallèles de produits de marque " Ninja Turtles " qui ne pouvaient par conséquent avoir pour origine les ventes de la concluante.

La société WWD s'oppose enfin aux mesures d'instruction sollicitées et conclut à la condamnation des appelantes à lui payer la somme de 30 000 F de dommages-intérêts pour résistance et appels abusifs.

Chacune des parties revendique l'application à son profit de l'article 700 du NCPC.

Sur ce, LA COUR, qui pour plus ample exposé se réfère au jugement et aux écritures d'appel,

Considérant que ni la compétence des premiers juges ni la condamnation prononcée ne sont contestées en cause d'appel ;

Considérant, en ce qui concerne le point de départ des intérêts de la somme allouée en première instance, que la lettre simple adressée le 30 juillet 1991 par le conseil de l'intimée aux appelantes ne peut valoir mise en demeure ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement ;

Considérant, sur l'appel des sociétés Elmswake et Stratex, qu'il convient d'observer à titre liminaire qu'aucun dépôt de marque ou de modèle couvrant la France n'étant invoqué, les droits des parties, - exclusifs et concernant la France pour ceux que la société Elmswake tient du contrat signé le 2 août 1990 avec IDDH, non exclusifs pour ceux conférés par la société CPL à la société WWD au terme du contrat de licence n° 3529 conclu le 13 juillet 1989 pour les territoires du Royaume-Uni et la République d'Irlande, portent sur la reproduction et l'exploitation des personnages et accessoires désignés par les termes Teenage Mutant Ninja Turtles ainsi que Ninja Turtles - pour Elmswake -, et Teenage Mutant Hero Turtles en ce qui concerne la société WWD, dont il n'est pas contesté qu'ils bénéficient de la protection au titre du droit d'auteur ;

Considérant que les pièces mises aux débats démontrent que les objets protégés sont les mêmes dans les contrats en cause, ainsi que le soutiennent à juste titre les appelantes ; que la dénomination Hero Turtle a en effet été substituée au Royaume-Uni à l'appellation Ninja Turtle, à la suite du mot Ninja, qui signifie " tueur à gage ", en vue de la diffusion des dessins animés ; qu'une lettre de la société CPL à Elmswake du 25 juillet 1991 fait état de " la campagne de licence The Teenage Mutant Hero Turtles / The Teenage Mutant Ninja Turtles " ; que dans une lettre circulaire en date du 1er mars 1991, IDDH se prévaut à l'égard des acheteurs de sa qualité de " producteur et ayant droit du concept (logo et personnages) Tortues Ninja (Teenage Mutant Ninja ou Hero Turtles ...) " ; qu'une invitation de Mirage Licensing ou European Licensing Group BV à une réunion de présentation du programme de licence européen 1993 porte en cartouche l'appellation " Teenage Mutant Hero " et dans le corps de l'annonce la dénomination Tortues Ninja " ;

Considérant qu'il ressort des productions des parties qu'il existait au moment des faits un réseau de distribution européen des produits protégés ; que ce réseau apparaît parfaitement intégré en 1993, selon un organigramme non contesté fourni par les appelantes et d'où il résulte que European Licensing Groupe (ELG), qui tient ses droits de Mirage Studios USA et de Surge Licensing USA, a seul qualité désormais pour délivrer des licences ou procéder au renouvellement de celles accordées, notamment aux parties en cause ; qu'en revanche, à la date des contrats de licence et des faits invoqués en l'espèce, il n'est pas justifié de ce qu'une personne autre que la société IDDH ait eu qualité pour concéder des droits d'exploitation concernant la France ;

Considérant que les sociétés Elmswake et WWD tiennent de personnes distinctes - IDDH pour la première et CPL pour la seconde - des droits couvrant des territoires différents ; qu'elles n'ont d'autres relations contractuelles que celles résultant des commandes passées par la société Elmswake à la société WWD et dont il n'est pas contesté qu'elles ont été ponctuellement exécutées par cette dernière ; que dans ces circonstances les sociétés Elmswake et Stratex ne sont pas fondées à soutenir qu'en procédant à des ventes en France au profit de la société Albert, la société intimée aurait manqué à la bonne foi requise dans l'exécution des contrats et par son comportement dolosif engagé sa responsabilité contractuelle ; qu'il en est d'autant plus ainsi que les sociétés appelantes n'ont pas estimé utile, sur le terrain contractuel, d'invoquer la stipulation pour autrui contenue à l'article 15 (d) du contrat n° 3529 liant CPL et la société WWD, aux termes duquel, " sous réserve des dispositions du Traité de Rome, le concessionnaire ne doit pas (sans avoir demandé et obtenu le consentement écrit du titulaire) distribuer ou vendre les articles sous licence ... en dehors du territoire ou à toute partie tierce ... ") ;

Considérant en revanche, sur le terrain de la responsabilité délictuelle, que la société WWD ne peut sérieusement soutenir qu'elle n'avait pas connaissance de la situation juridique exacte de la société Elmswake, alors qu'en particulier la télécopie reçue de CPL le 5 juin 1991 lui rappelait la qualité de donneur de licence pour le marché français qui était celle de la société IDDH ; qu'il lui appartenait en tout cas, si tant est que cela fût nécessaire, de s'informer auprès de cette dernière sur la teneur des droits conférés à la société Elmswake ;

Considérant que la concession exclusive accordée pour la France à la société Elmswake est opposable aux tiers, lesquels répondent de leurs actes illicites de nature à contrarier la mise en œuvre des droits et obligations liant les parties contractantes ;

Considérant que la société intimée invoque les articles 36 et 85 du Traité de Rome, comme justifiant, sans autre précision, les ventes par elles faites à la société Albert ;

Considérant que l'article 85 précité, en soi, ne fait pas obstacle à l'existence d'une concession exclusive ; que la Cour de justice a dit pour droit que les articles 30 et 36 du Traité CEE sont à interpréter en ce sens que l'autorité judiciaire d'un Etat membre ne saurait interdire, en vertu d'un droit d'auteur (ou d'un droit de marque), la commercialisation, sur le territoire de cet Etat, d'une marchandise couverte par un de ces droits lorsque cette marchandise a été écoulée de manière licite, sur le territoire d'un autre Etat membre, par le titulaire de ces droits ou avec son consentement (CJCE Dansk Supermarket/Imerco 22 janvier 1981, A66 58-80 Rec. p. 181) ; que l'épuisement du droit de reproduction et l'impossibilité qui en résulte pour la société Elmswake de faire obstacle à l'importation parallèle en France de produits protégés mis de façon licite dans le commerce en Grande Bretagne par la société WWD, autre licencié, ne va pas cependant jusqu'à autoriser ce dernier à organiser en France une concurrence active en instituant au détriment du licencié exclusif, un réseau de distribution parallèle avec un tiers, la société Albert, auquel est conférée la qualité d'agent officiel, comme cela résulte de la lettre circulaire, mise aux débats, que ce dernier a diffusé le 2 août 1991, mentionnant que " le département Albert Trading International intervient sur le marché français comme agent officiel (du) licencié britannique " ; que la circonstance, seule invoquée par la société intimée, qu'elle aurait, le 11 juillet 1991, reproché à la société Albert de laisser dire par ses représentants qu'elle avait l'exclusivité des produits en cause, est de ce point de vue inopérante ;

Considérant que la société intimée ne peut s'exonérer de sa responsabilité en invoquant l'autorisation qu'elle aurait obtenue de la société CPL le 5 juin 1991 ; qu'il n'est tout d'abord pas démontré que la société IDDH, seule habilitée, ait été associée à cette décision ; qu'il convient en effet d'accorder un crédit réservé à l'attestation de M. Kemp, directeur des ventes de WWD pour l'Europe et par conséquent salarié de l'intimée, selon laquelle la société IDDH aurait été informée le 19 juin 1991 de la permission donnée de vendre à la société Albert ; que de surcroît, une autorisation n'eut été nécessaire que pour légitimer les actes de concurrence active à juste titre reprochés par les appelantes ; que le document en cause ne contient rien de tel ;

Considérant qu'en mettant en place un réseau de distribution parallèle au mépris des droits des sociétés appelantes et sans y être autorisée, et en s'appropriant ainsi indûment les efforts de prospection de la clientèle déployés par les appelantes, pour partie privées du bénéfice de leurs investissements, la société intimée a engagé sa responsabilité extra contractuelle;

Considérant que la communication de pièces commerciales et comptables requises par les sociétés appelantes apparaît nécessaire, dans les limites ci-dessous précisées, en vue de la détermination du préjudice que ces sociétés ont subi en raison de la seule commercialisation en France illicite, à savoir celle effectuée par WWD ou des tiers agissant pour son compte, par le canal de la société Albert ou d'autres distributeurs éventuels, membres du réseau mis en place par la société intimée ; qu'il n'y a lieu cependant d'évoquer ;

Considérant qu'il s'ensuit de ce qui précède le rejet, comme mal fondée, de la demande de dommages-intérêts formée par la société intimée ;

Considérant qu'il y a lieu, en équité, d'allouer aux sociétés appelantes les sommes mentionnées ci-après, en application de l'article 700 du NCPC.

Par ces motifs : Statuant dans les limites de l'appel, Confirme le jugement quant au point de départ des intérêts légaux de la somme allouée à la société WWD Distributers Ltd ; Réformant pour le surplus ; Dit que la société WW Distributers Ltd a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaires à l'encontre des sociétés appelantes, Ordonne à la société WW Distributers Ltd, sous astreinte de 1 000 F par jour de retard à l'expiration du délai d'un mois qui suivra la signification du présent arrêt, de communiquer aux appelantes : - l'intégralité des documents commerciaux et comptables, notamment les factures de ventes d'articles textiles revêtus du dessin des tortues Ninja ou Hero, consenties par la société WW Distributers Ltd ou des sociétés agissant pour son compte, à destination du marché français et notamment les factures relatives aux ventes consenties à la société Albert Trading International, pour la période du 1er janvier 1991 jusqu'au présent arrêt ; - la copie du rapport des redevances rétrocédées sur la même période par la société WW Distributers Ltd ou des sociétés affiliées pour toute vente consentie en France. Condamne la société WW Distributers Ltd à payer à chacune des sociétés Elmswake et Stratex la somme de 15 000 F en application de l'article 700 du NCPC. La condamne à la moitié des dépens de première instance et aux dépens d'appel et accorde à la SCP d'avoués Fanet le bénéfice de l'article 699 du NCPC.