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Décisions

CA Paris, 5e ch. A, 22 septembre 1992, n° 724-90

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Guille

Défendeur :

Pronuptia, Sinagra, Bellec, Scarlette (SA), Boutique du Mariage (SARL), Lagondais et cie "Complicité et Fête", Mariée Boutique (SARL), Penot, SEN (SARL), Le Floc, Félicité (SA), Carola (SARL), Frédéric (SARL), Dam et la Société Félicité (SARL), Complicité La Fête : La maison du mariage, Barthélémy (SARL), Delavacquerie, MOCQ (SARL), Dromer (Epoux), Amsterdam (SARL), Boutique Manela (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président (faisant fonction) :

M. Chavanac

Conseillers :

Mmes Briottet, Vigneron

Avoués :

SCP Narrat Peytavi, M. Gibou Pignot

Avocats :

Mes Bessis, Threard, Brunswick, Bensard

T. com. Paris, du 28 sept. 1989

28 septembre 1989

Par déclaration remise au Secrétariat Greffe le 22 novembre 1989, les Consorts Poisson/Guille ont interjeté appel du jugement du 28 septembre 1989, par lequel le Tribunal de Commerce de Paris a :

- mis hors de cause Monsieur Gourdain,

- dit que les Consorts Guille avaient unilatéralement et abusivement rompu le contrat de franchise les liant à la Société Pronuptia,

- dit qu'ils s'étaient rendus coupables de concurrence déloyale,

- les a condamnés à payer à la Société Pronuptia, deux années de redevances à titre de dommages et intérêts,

- ordonné la dépose des enseignes et la disparition de tous les signes de la marque Pronuptia sous astreinte définitive de 100.000 F par infraction,

- et, avant dire-droit sur le chiffrage des condamnations, a commis Mademoiselle HENAULT en vue de fixer le montant des redevances dues et de faire les comptes entre parties,

- a aussi ordonné l'exécution provisoire et réservé les dépens,

Ensemble sur la demande d'évocation présentée par les parties.

Après la clôture des débats, l'examen des pièces soumises à la Cour et l'étude des écritures prises par les parties ont fait apparaître qu'un certain nombre de déclarations d'appel concernaient les mêmes entités juridiques, celles-ci n'ayant été en fait regroupées selon les personnes juridiques véritablement en cause dans les écritures déposées aussi bien par les appelants que par la société intimée.

Les débats ont été réouverts à l'audience du 1er juillet 1992 aux fins de production par les parties des extraits du registre de commerce et présentation de toutes observations utiles.

Des pièces ainsi produites et des explications concordantes des parties, il résulte que par suite d'erreurs matérielles, certaines des déclarations d'appel ont été déposées pour des établissements secondaires appartenant à la même personne juridique ou au nom des gérantes de SARL, sociétés par ailleurs également appelantes.

C'est ainsi que doivent être considérées comme sans objet les déclarations d'appel diligentées au nom de :

- madame Jeannine Sinigra exerçant le commerce sous la dénomination " Complicité et Fête ", 5 rue de la Porte Notre Dame à CAMBRAI, le fonds exploité à cette adresse n'étant, qu'un établissement secondaire du fonds principal tenu par cette commerçante à Saint Quentin ;

- la société Félicité pour le fonds d'Épinal, établissement secondaire du fonds exploité par cette société à Reims 161/163 rue Vesles,

- la société Lagondais pour le fonds d'Amiens, établissement secondaire du fonds exploité à Compiègne, 35 rue St Corneille,

- la société Barthélémy pour le fonds de Tarbes , établissement secondaire du fonds situé à Pau, 18 rue des Cordeliers,

- la société Mancla pour le fonds de Tourcoing, établissement secondaire du fonds sis à Lille, 50 rue Faidherbe,

Par ailleurs, les appels diligentés séparément au nom de Monsieur Dromer et au nom de Madame Colette Dromer concernent le même fonds.

La déclaration déposée au nom de madame Louvel Henriette, épouse Penot concerne un fonds exploité en location gérance par la SARL SEN dont Madame Penot est la gérante et constitue un double de l'appel diligenté par cette société.

Il en est de même de la déclaration déposée par Madame Delavacquerie Janine épouse Mocq pour le fonds de Calais dont la société Mocq est locataire gérante et pour lequel cette société (gérée par Madame Mocq) a relevé appel. Cette même société étant aussi locataire gérante du fonds situé à Boulogne sur mer, simple établissement secondaire du commerce exploité à Calais.

Il apparaît ainsi que la Cour est en définitive saisie des appels diligentés par :

- Madame Odette Poisson épouse Guille, exerçant le commerce sous la dénomination " Mariages boutiques " à Alençon et à Flers ;

- Madame Janine Sinagra, exerçant le commerce sous la dénomination " Complicité et fête " à Saint Quentin et à Cambrai,

- Madame Monique Toyre épouse Bellec, exerçant le commerce sous la dénomination " Mariage Profession " à Evreux,

- la société Scarlette à Caen,

- la société Boutique du mariage à Bordeaux,

- la société Lagondais et cie à Compiègne et Amiens,

- la société Établissements Mariée Boutique à Douai,

- la société d'Exploitation Nouveautés (SEN) à Orléans,

- Madame Hupont Ghislaine épouse Le Floc'h à Saumur (actuellement à Marseille),

- la société Félicité à Reims et Épinal ;

- la société Carola à Reims (Charleville Mézières),

- la société Frédéric à Reims (Thionville)

- la société DAM à Reims-Nancy,

- la société La Maison du Mariage à Tours,

- la société Barthélémy à Pau et à Tarbes,

- la société Mocq à Calais, Boulogne sur Mer,

- M. et Mme Dromer à Rodez,

- la société Amsterdam 33 à Paris,

- la société Manela à Lille et à Tourcoing,

Spécialisée dans le commerce du prêt à porter relatif au mariage, la Société Pronuptia a mis en place un réseau de franchise sur l'ensemble du territoire français, puis l'a étendu à quelques pays étrangers essentiellement européens.

Des difficultés commerciales étant apparues en 1982, liées à la baisse du nombre des mariages, certains franchisés se sont regroupés au sein d'une " Amicale des Concessionnaires Pronuptia " afin de défendre leurs intérêts face au franchiseur.

Parmi les actions menées à l'intérieur du réseau par les franchisés membres de l'Amicales de 1983 à 185, plusieurs devaient aboutir à des décisions judiciaires, prononçant pour la plupart des condamnations à leur charge.

Les difficultés financières persistant, Pronuptia a informé l'ensemble des franchisés lors du congrès de Vittel en 1985 de son intention de faire appel à un nouvel actionnariat, toutefois, la Collection 1986 a été présentée et les commandes reçues.

Mais, les franchisés réunis au sein de l'Amicale, ont manifesté leur inquiétude en demandant par LR du 23 octobre 1985 des assurances fermes sur les livraisons à venir et les campagnes publicitaires à lancer.

Malgré un réponse apaisante de Pronuptia du 4 novembre 1985, un certain nombre de franchisés ont fait délivrer le 6 novembre 1985, sommation interpellative à Pronuptia d'avoir à justifier de l'impression du catalogue (collection printemps-été 1986), de l'accord des fournisseurs pour la fabrication et la livraison des modèles, à défaut de quoi, le contrat (dit " de concession ") serait considéré comme rompu.

Pronuptia a donné les assurances demandées, mais a été amenée, le 29 novembre 1985, à déposer le bilan ; une procédure de règlement judiciaire sous le contrôle du syndic Gourdain étant ordonnée par le Tribunal de Commerce de Paris le 9 décembre 1985.

Le 18 décembre suivant, la quasi totalité des franchisés appelantes ont fait délivrer à Pronuptia une nouvelle sommation interpellative dans laquelle, constatant que diverses prestations du franchiseur n'avaient pas été exécutées à leurs dates habituelles (absence de tableaux statistiques, de prévisions de stockage, de réunions régionales, de confirmation de commandes), elles faisaient part de leur décision de suspendre immédiatement le paiement des redevances ; en outre, si dans un délai de 4 jours, les marchandises commandées pour décembre n'étaient pas livrées et s'il n'était pas confirmé par écrit par les fournisseurs et par l'agence de publicité que les commandes pour les mois suivant seraient honorées et la publicité effective, elles constateraient la rupture du contrat du fait du franchiseur.

Par lettres recommandées avec avis de réception du 24 décembre 1985, signées conjointement par le Président Directeur Général et le syndic Gourdain, la société Pronuptia a notifié à chacun des franchisés objet de la présente instance, sur visa des dispositions de l'article 38 de la LOI du 13 juillet 1967, sa décision de rompre avec effet immédiat tout relation contractuelle.

Malgré l'injonction qui leur avait été faite de cesser d'utiliser la marque au 15 janvier 1986, il apparaît que certaines franchisés ont continué à se servir d'éléments distinctifs du franchiseur.

Par actes des 16, 20, 21, 22, 23 et 29 mai 1986, la société Pronuptia assistée de Gourdain, syndic au règlement judiciaire de la société, a fait assigner devant le Tribunal de Commerce de Paris en paiement de dommages intérêts l'ensemble des entreprises et sociétés franchisées énumérées en tête de la présente décision.

Pendant le cours de l'instance, un concordat devait être voté par les créanciers en faveur de Pronuptia.

Appelants du jugement rendu, les consorts Poisson concluent à la nullité des contrats de franchise pour indétermination du prix, imposition des prix tendant à une entente prohibée, absence de cause et infraction au droit communautaire ; à titre subsidiaire, ils concluent à la rupture des contrats du fait de Pronuptia et au débouté de cette société de ses demandes en indemnisation ; ils soulèvent l'irrecevabilité comme demande nouvelle en cause d'appel de la prétention de la société Pronuptia d'obtenir indemnisation pour concurrence déloyale ; la mesure d'expertise ordonnée en première instance ayant été conduite à bonne fin, ils sollicitent l'évocation par la Cour et concluent au débouté de la société Pronuptia de toutes ses prétentions et à la condamnation de cette société au paiement :

- à Madame Guille, de la somme de 309.713 F,

- à Madame Sinagra, de la somme de 337.759 F,

- à Madame Bellec, de la somme de 266.336 F,

- à la société Scarlette, de la somme de 482.683 F,

- à la Boutique du mariage, des sommes de 754.007 et 23.912 F,

- à la société Lagondais, de la somme de 458.948 et 11.221 F,

- à la société Mariée Boutique, de la somme de 408.977 F,

- à la société Sen, de la somme de 336.767 F,

- à Madame Le Floc'h, de la somme de 156.191 F,

- à la société la Maison du Mariage, de la somme de 431.421 F,

- à la société Mariée Boutique Ets Barthélémy, de la somme de 533.310 F,

- à Madame Mocq - Sté Mocq, de la somme de 255.410 F,

- à Madame Dromer, de la somme de 71.280 F,

- à la société Félicité, des sommes de 660.638 et 35.543 F,

- à la société Carola, des sommes de 230.539 et 8.645 F,

- à la société Frédéric, des sommes de 183.933 et 3.571 F,

- à la société Dam, des sommes de 437.253 et 14.197 F,

- à la société Amsterdam 33, les sommes de 266.134.828 et 246.276 F,

- à la société Manela, les sommes de 1.100.000 et 400.000 F avec publicité dans le journal " La Voix du Nord " d'un extrait du jugement de condamnation pour publicité diffamatoire ;

Enfin, chacune des entreprises appelantes sollicite l'octroi sur le fondement de l'article 700 du NCPC d'une somme de 20.000 F à l'exception d'Amsterdam 33 qui demande 30.000 F et de la société Manela qui requiert 50.000 F.

Par écritures séparées du 29 janvier 1992, la société La Maison du Mariage demande qu'il soit constaté que le montant théorique de la redevance pour l'année 1985 se serait élevé à 184.770 F ce qui après déduction de la participation publicitaire de Pronuptia ferait apparaître un solde TTC de 154.770 F.

La société Pronuptia, intimée, conclut au débouté des appelantes de l'intégralité de leurs demandes et, après évocation, à leur condamnation tant du fait de la rupture abusive des contrats que des actes de concurrence déloyale et de la violation des obligations de non-concurrence inhérentes aux contrats de franchise, au paiement avec les intérêts au taux légal à compter du jour de la demande, des sommes :

- Madame Poisson épouse Guille (pour les fonds d'Alençon et de Flers réunis) de 521.000 F à titre de dommages intérêts, la somme de 1.329 F due à Madame Guille ayant été prise en compte dans le cadre du concordat voté par les créanciers ;

- Madame Sinagra (pour les fonds de Cambrai et de St Quentin réunis) de 526.000 F, à titre de dommages intérêts, ainsi que des sommes de 5.792 F au titre des marchandises et 5.636 F au titre de redevances arriérées,

- Madame Bellec, de 384.500 F à titre de dommages intérêts,

- à la société Scarlett, de 733.000 F à titre de dommages intérêts,

- la Boutique du mariage, de 1.948.216 F dont 23.216 F au titre de solde impayé de redevances et de marchandises,

- la société Lagondais, (pour les fonds de COMPIEGNE ET d'AMIENS réunis) ; de 1.137.795 F dont 13.806 F pour redevances impayées et 8.489 F pour solde de marchandises non réglées ;

- la société Mariées Boutique (pour les fonds de Douai et de Béthune réunis) de 636.038 F dont 20.538 F au titre des marchandises impayées,

- les sociétés Hariette Boutique, SEN et Mme Penot (pour les fonds d'Orléans et de Blois réunis) de 827.335 F dont 12.335 F au titre des marchandises impayées,

- la société Félicité et M. Michaud solidairement, (pour les fonds de Reims et Epinal réunis) de 2.173.990 F dont 32.214 et 15.776 F au titre de redevances et de marchandises impayées,

- la société Carola et M. Michaud solidairement, de 599.752 F dont 16.752 F au titre de marchandises impayées,

- la société Frédéric et M. Michaud solidairement de 625.816 F dont 9816 F au titre de marchandises impayées.

- Les sociétés DAM et Félicité ainsi que M. Michaud solidairement de 1.520.176F dont 42.176F au titre des marchandises et redevances impayées,

- Madame Le Floc'h de 255.841 F dont 8.841 F au titre de marchandises impayées,

- la société la Maison du Mariage de 704.220 F dont 184.769 F au titre de redevances impayées et 450 F au titre de marchandises non réglées,

- la société Barthélémy (pour les fonds de Pau et de Tarbes réunis) de 772.600 F dont 4.600 F au titre de marchandises impayées,

- Madame Mocq et la société Mocq (pour les fonds de Calais et de St Omer réunis) de 458.649 F dont 96.000 F et 41.649 F au titre des marchandises et de redevances non payées,

- Mme Domer de 80.000 F,

- la société Amsterdam 33, de 682.058 F dont 7.058 F au titre des marchandises et de redevances impayées,

- la société Manela, de 2.064.481 F dont 100.481 F au titre des marchandises impayées ;

Elle demande en outre l'interdiction sous astreinte définitive de 1.000 F par jour de retard aux consorts Poisson d'exercer une activité concurrente durant une année à compter de l'arrêt, l'obligation de faire disparaître tous signes distinctifs de sa marque astreinte de 100.000 F par infraction constatée ;

Elle conclut enfin à la condamnation de chacune des appelantes au paiement de la somme de 50.000 F en remboursement des frais non compris dans les dépens.

Sur quoi, LA COUR :

1. Sur la nullité des contrats :

Considérant que selon les consorts Poisson, l'ensemble des contrats les liant à la société Pronuptia seraient atteints de nullité tout d'abord aux motifs :

Qu'aussi bien les prix d'achat des produits par les franchisés auprès des fournisseurs que le prix de vente au public auraient été fixés unilatéralement par Pronuptia, cependant qu'il aurait été fait obligation aux distributeurs de s'approvisionner exclusivement auprès des dits fournisseurs ; la lettre circulaire diffusée par le franchiseur le 17 septembre 1981 pour abolir cette obligation ne pouvant couvrir la nullité originelle des contrats, et la décision de la Commission des Communautés Européennes considérant les conventions comme non contraires au traité, étant sans incidence sur l'appréciation de cette nullité au regard des dispositions de l'article 1129 du Code civil ;

Qu'ils font valoir ensuite qu'en fait, Pronuptia après avoir fixé à ses distributeurs les prix d'achat et de vente, ainsi que précisé plus haut, leur aurait imposé de pratiquer ces prix, réduisant ainsi à néant tout initiative de leur part et dénaturant sur un élément essentiel de la détermination de la politique du commerçant, les contrats litigieux ;

Qu'en outre, une telle pratique permettant aux membres du réseau de connaître la politique tarifaire des concurrents, aboutirait à constituer une entente anticoncurrentielle entraînant la nullité des contrats ;

Qu'ils soutiennent ainsi que les conventions seraient sans cause, aucun savoir-faire véritable n'ayant jamais été transmis aux franchisés malgré la décision de la Commission de la CEE qui, ici non plus, ne saurait s'imposer au juge appelé à statuer en droit interne sur le fondement de l'article 1131 du Code Civil ;

Que, par ailleurs, les contrats auraient également été dénaturés à raison de la dépendance économique des franchisées résultant de la conjonction des éléments sus-indiqués : absence de cause, contrôle de la gestion et prix imposés ;

Qu'enfin, les contrats seraient contraires aux dispositions des articles 85-1 et 2 du Traité de Rome, l'exemption individuelle accordée par la Commission à Pronuptia ne régissant rétroactivement qu'au 22 avril 1983 alors que la plupart des conventions étaient antérieures ;

Considérant tout d'abord sur la nature juridique des contrats que, quelle que soit leur dénomination originale : simples contrats de distribution pour les premiers (MOCQ-Calais et Penot en 1967-69) contrats de concession pour les suivants (Barthélémy ; Dromer ; Bellec ; Carola ; Félicité ; Lagondais ; Mocq - Boulogne, en 1970-73), contrats de franchise pour les derniers (certains même étant purement verbaux), il résulte des éléments de fait versés aux débats (ensemble de la correspondance, qualité revendiquée par chacun aussi bien dans les instances antérieures que dans les sommations des 6 novembre et 18 décembre 1985), que la volonté commune des parties a été de les considérer dans leur dernier état au travers des ultimes reconductions dont ils ont fait l'objet, comme des contrats de franchise ;

Qu'en effet, cet examen fait apparaître que Pronuptia mettait à la disposition de ses cocontractants sur un territoire déterminé sa marque, ses connaissances acquises dans le domaine particulier de la vente de prêt à porter relatif au mariage, son assistance tant dans le choix des articles, que dans l'agencement et la gestion des fonds et assurait sur le plan national la promotion des produits, le tout moyennant le paiement d'une redevance par les commerçants (même non expérimentés) mais indépendantes ;

Que, cette évolution de fait dans les conventions à l'occasion de leur reconduction vers cette forme de distribution a suivi aussi bien le développement même du réseau que la généralisation en droit positif français des contrats de ce type ;

Que d'ailleurs, la Commission des Communautés Européennes saisie par Pronuptia, après que la Cour de Justice des Communautés Européennes ait rendu dans le même sens un arrêt en faveur de cette société le 28 janvier 1986, le 17 décembre 1986, pris une décision qui, après avoir qualifié de contrat de franchise les conventions passées par la société, a constaté que les dits contrats tels qu'ils étaient appliqués, remplissaient les conditions de l'article 85-§ 3 du traité ;

Qu'enfin, dans la présente procédure, les parties qualifient elles-mêmes les conventions litigieuses de contrat de franchise et développent exclusivement des moyens fondés sur cette qualification ;

Considérant sur les divers moyens soulevés par les appelants, que, si les décisions communautaires reconnaissant la validité des contrats Pronuptia au regard des dispositions du traité de Rome n'interdisent pas toute recherche de cette même validité au regard du droit interne, il échet tout de même de relever que le moyen tiré de l'existence d'une entente anticoncurrentielle de fait résultant de la politique tarifaire du franchiseur, ne saurait être retenu comme matériellement caractérisé en droit français, alors que cette notion-similaire à celle prohibée par le Traité de Rome a été écartée par l'instance communautaire après examen de l'ensemble du système Pronuptia ;

Que de même, la décision d'exemption individuelle prise par la Commission le 17 décembre 1986 en application des dispositions de l'article 85§3 du traité, prenant effet rétroactivement au 22 avril 1983, écarte tout moyen de nullité tiré de la contrariété de certaines dispositions des contrats avec les prescriptions des articles 85-1 et 2, les conventions litigieuses-même conclues avant cette date, mais seulement chaque fois pour une durée de 3 ans, - ayant toutes fait l'objet d'une reconduction (et donc juridiquement d'un nouvel accord constitutif de droits et obligations) après le 22 avril 1983 ;

Considérant sur le moyen tiré de l'indétermination des prix, résultant de l'obligation faite aux franchisés de s'approvisionner exclusivement auprès des fournisseurs agréés aux prix fixés par Pronuptia qu'il convient - ainsi que l'ont fait d'ailleurs les organes de la Communauté Européennes et ainsi que le prescrit l'article 109 du Code de Commerce selon son interprétation constante (REQ 25 nov. 1903) - de rechercher au travers (mais aussi au-delà) du texte de la convention, l'application qui en a été faite par les parties, application révélatrice de leur volonté notamment à l'occasion de chacun des renouvellements tacites de la convention adaptant ainsi en fait le texte original aux circonstances commerciales nouvelles et à l'évolution des rapports selon le développement du réseau ;

Considérant qu'il apparaît ainsi que, quoiqu'il en soit de la nature juridique de l'obligation contractée par le franchisé au regard de l'importance relative de l'exploitation de connaissances et de méthodes commerciales (retenu par la Commission CEE comme élément fondamental et caractéristique de la franchise) ou des ventes successives impliquées par ce type de contrat (facteur paraissant jurisprudentiellement prépondérant en droit positif interne) il y a lieu de relever que ledit franchisé avait en fait la possibilité de choisir directement ses fournisseurs et de traiter librement avec eux pour les produits non exclusivement créés par le franchiseur sous sa marque pourvu qu'ils aient un niveau de qualité comparable (arrêt définitif de la Cour d'Appel de Paris du 6 juillet 1988, lettre de Pronuptia du 17 septembre 1981, agréée dans ses termes par les franchisés (lettre de l'Amicale du 30 avril 1982) et ainsi implicitement mais sûrement incluse dans les contrats reconduits, paragraphe 12 de la décision de la Commission CEE du 17 décembre 1986) ;

Qu'ainsi, l'exclusivité d'approvisionnement condition nécessaire de toute indéterminabilité de prix caractérisée, manque en fait ;

Que, par ailleurs, les quantités de produits commandés dépendaient de la seule volonté des franchisés ce qui les autorisait à débattre du prix définitif des produits acquis ;

Considérant sur la pratique de prix imposés, qu'il résulte des éléments de fait versés aux débats, que les prix étaient fixés librement par le franchisé pour les produits acquis par lui directement auprès des fournisseurs agréés (attestation Gaillard), cependant par avenant du 3 juin 1982, Pronuptia a substitué la notion de prix maximum à ne pas dépasser à la pratique antérieure du prix de détail conseillé;

Que d'ailleurs, la Commission CEE statuant sur le même point (après l'arrêt de la Cour de Justice du 28 janvier 1986) a constaté que les prix n'étaient qu'indicatifs (paragraphe 26 de la décision) ce qui corrobore les éléments susvisés, la Commission n'étant parvenue à cette conclusion qu'après un examen attentif du " contexte factuel " n'ayant pas révélé de pratique concertée entre franchiseur et franchisés visant à appliquer effectivement ces prix;

Qu'ainsi la dénaturation du contrat allégué par suppression de toute initiative commerciale du franchisé, n'est pas en fait établie, non plus que l'entente anticoncurrentielle qui en résulterait - celle-ci ayant déjà été déclarée inexistante par la Commission ainsi qu'exposé plus haut ;

Considérant sur la nullité résultant de l'absence de cause de la convention en raison d'une part de l'inexistence de tout savoir faire (contrepartie des obligations contractées par le franchisé) et d'autre part de la dépendance économique de celui-ci qui serait caractérisée à la fois par l'absence de transmission du savoir-faire susvisé, par le contrôle étroit de la gestion et de l'exploitation des magasins en franchise, par la pratique des prix imposés ou fortement conseillés, et par la désagrégation du réseau, dépendance qui entraînerait dénaturation du contrat;

Qu'il échet tout d'abord d'observer que l'ensemble des éléments de base au moyen ont déjà fait l'objet d'un examen par les organes de la Communauté Européenne ;

Que si cet examen se situait dans le cadre des dispositions du traité de Rome, c'est à dire essentiellement dans la perspective de leur comptabilité avec les règles du marché commun, et ne saurait à ce titre avoir un caractère déterminant sur l'appréciation du moyen fondé sur les prescriptions de l'article 1131 du Code Civil, il convient cependant de relever qu'après que la Cour de Justice Européenne ait précisé que la transmission de connaissance acquises dans un activité avec utilisation de l'enseigne et des méthodes commerciales constituait la définition même du contrat de franchise, la Commission dans sa décision du 17 décembre 1986 a constaté que Pronuptia remplissait toutes les conditions de ce type de distribution (paragraphe 34) ;

Que, par ailleurs, il est constant que Pronuptia constitue une enseigne notoirement connue et diffusée sur l'ensemble du territoire (148 points de vente) ; que, ciblée sur une clientèle très précise et un produit spécifique (prêt à porter relatif au mariage), cette société a mis au point dans les 7 magasins directement gérés par elle, des méthodes commerciales originales en fonction de la clientèle recherchée et du produit proposé, méthodes en constante évolution afin de suivre les goûts de la clientèle ; que l'expérience ainsi acquise essentiellement constituée d'informations pratiques, est constamment mise à la disposition des franchisés tant par la remise d'un manuel opératoire que par la diffusion de circulaires, de cahiers regroupant chaque année les informations techniques nouvelles et de réunions périodiques des franchisés en congrès pour échanges directs ;

Qu'en outre, à chaque collection, un catalogue de nouveautés sélectionnées en fonction de la ligne de la marque est mis au point par le franchiseur, créant ainsi un style diffusé sur le plan national au moyen de supports et de campagnes publicitaires adaptés ;

Qu'enfin, une assistance technique et commerciale constante est apportée aux franchisés aussi bien quant à l'agencement des magasins qu'en ce qui concerne la gestion financière et les stocks (assistance considérée même par les franchisés dans leurs écritures comme excessive et s'apparentant à un véritable contrôle) ;

Considérant que les contrats n'étaient donc pas dépourvus de cause au sens de l'article 1131 du Code Civil, les franchisés pour la plupart en relations contractuelles avec Pronuptia depuis de nombreuses années, ne s'étant au surplus jamais plaint d'une carence de ce genre de la part de leur franchiseur tout au long de leurs rapports ;

Considérant sur la dépendance économique constitutive d'une dénaturation de la convention, qu'écartée par la Commission, elle ne saurait être regardée comme démontrée en droit interne, chacun des éléments avancé pour l'établir s'étant révélé inexistant : absence de transmission de savoir faire, pratique de prix imposé, contrôle étroit de la gestion, désagrégation du réseau (l'action des appelants en décembre 1985 étant la seule opération présentant un risque de désorganisation) ;

Considérant enfin que les consorts Poisson soutiennent que la plupart des contrats litigieux ayant été conclu avant l'entrée en vigueur de l'exemption individuelle du 17 décembre 1986 (soit le 22 avril 1983), leur nullité devrait être prononcée à raison de leur non conformité avec le règlement 67-67 antérieurement applicable ;

Mais considérant qu'aussi bien la Cour de Justice de la CEE dans son arrêt du 28 janvier 1986 que la Commission dans sa décision du 17 décembre de la même année, ont formellement exclu l'application du règlement susvisé aux contrats de franchise, le dit règlement ne concernant que les conventions de concession ;

Considérant que, non fondés, les moyens tirés de la nullité des contrats litigieux, ne peuvent être accueillis ;

2 - Sur la rupture des contrats :

Considérant que Pronuptia soutient que par les lettres de cessation des relations commerciales du 24 décembre 1985 adressées à chacune des franchisés parties au litige, le syndic Gourdain (par le contreseing apposé) n'aurait fait - tout en se fondant sur les dispositions de l'article 38 de la loi du 13 juillet 1967 - que tirer les conséquences de l'attitude oppositionnelle manifestée par les dites franchisées, attitude valant rupture de fait des contrats, et partant génératrice de dommages intérêts ;

Considérant que les appelantes font valoir que leurs interventions, plus anxieusement interrogatives que critiques et comminatoires, avaient seulement pour but de faire prendre position au syndic sur la poursuite des conventions tout en sauvegardant leurs intérêts, les lettres du 24 décembre 1985 constituant la réponse attendue et une indemnisation leur étant due ;

Considérant que l'examen des lettres litigieuses fait apparaître que, rédigées conjointement par le Président Général de la société Pronuptia et par le syndic Gourdain, elles se placent délibérément par leur premier paragraphe dans le cadre des dispositions de l'article 38 de la loi du 13 juillet 1967 (d'ailleurs applicables de plein droit en raison de leur caractère d'ordre public) dispositions donnant au syndic la faculté de poursuivre l'exécution des contrats en fournissant la prestation promise ;

Que dans le 2e paragraphe - toujours situé dans le même cadre - il est précisé que les prestations contractuelles ne seront pas poursuivies (et donc que le syndic ne continuera pas l'exécution des contrats) à l'égard des franchisés ne respectant pas leurs obligations ;

Que ce principe posé, il est ensuite entrepris une démonstration tendant à établir que les franchisés signataires de la sommation interpellative ont violé leurs obligations notamment en suspendant unilatéralement la paiement des redevances pour des motifs fallacieux et en présentant des demandes non conformes aux contrats ;

Que le paragraphe qui suit (7ème §), malgré une rédaction maladroite ne fait que tirer la conclusion de la démonstration en déclarant rompue toute relation avec le franchisé auteurs de ces manquements ;

Que cette " rupture " n'est donc que la manifestation de la décision prise dans le cadre des dispositions légales sur les procédures collectives alors en vigueur, de ne pas poursuivre l'exécution des contrats, décision justifiée par l'attitude fautive des franchisées;

Considérant qu'il découle de cette analyse, d'une part, que, prise dans le cadre de la procédure collective par son organe légal, cette décision ne saurait, par elle-même, être génératrice d'indemnisation au profit de la masse ;

Que, d'autre part, si le bien fondé des motifs invoqués était démontré, se trouverait, par le fait même, écarté tout droit à dommages intérêts au profit des contractantes franchisées, du fait de l'arrêt des prestations de la société en règlement judiciaire ;

Considérant que telle est bien la situation de fait créée par les appelantes qui, loin de manifester envers le franchiseur l'esprit de collaboration qui doit présider aux rapports entre commerçants liés par des intérêts complémentaires (les uns distribuant des produits sélectionnés par l'autre sous sa marque) ont, notamment par les sommations des 6 novembre et 18 décembre 1985, signifié à Pronuptia leur décision commune de suspendre le paiement des redevances (paiement qui constitue leur principale obligation), alors qu'aucun manquement grave n'était établi à l'encontre du franchiseur en dehors de troubles mineurs nés de l'ouverture de la procédure collective;

Qu'en effet, les griefs allégués pour justifier cette décision unilatérale ne portent que sur des points secondaires ne constituant pas des obligations essentielles du franchiseur : non tenue de réunions régionales alors que le congrès national avait régulièrement eu lieu à Vittel courant septembre 1985 ; absence de communication des tableaux statistiques de chiffres d'affaires (pratique purement administrative) ; absence de stock et de prévisions de stockage (non démontrée en fait) ; pas de confirmation de commandes et de précisions sur les dates de livraison (alors que celles-ci ne débutent pour la collection printemps qu'à compter du 15 décembre de l'année précédente) ; absence de confirmation écrite avalisée par le syndic de la date de livraison du catalogue collection printemps 1986 (alors que celui-ci, en cours d'impression, ne devait être diffusé qu'au début janvier 1986) ; enfin, disparition de " l'intuitu personae " inhérent à la nature même du courant de franchise " en raison du prononcé du règlement judiciaire et de la nomination d'un syndic (motif en opposition avec les dispositions de l'article 38 Loi du 13 juillet 1967) ;

Qu'enfin, par leur sommation du 18 décembre 1985, les franchisées appelantes enfreignaient sinon leurs autres obligations contractuelles du moins le texte même de l'article 38 susvisé en signifiant au syndic et à Pronuptia que, faute par eux de satisfaire dans un délai de 4 jours à plusieurs chefs de demandes (par ailleurs prématurés pour les livraisons et non contractuelles pour les justifications écrites et diligences), ils constateraient la rupture unilatérale des contrats ; qu'une attitude similaire a été prise dans la sommation du 6 novembre 1985 par la gérance de la société MOCQ, non présente parmi les requérantes de l'acte extra judiciaire du 18 décembre suivant ;

Qu'ainsi donc, les motifs invoqués par le syndic moins pour justifier sa décision de ne pas poursuivre les contrats (décision dépendant de ses seuls pouvoirs légaux) que pour l'expliciter au regard de son refus de toute indemnisation des cocontractants se trouvent démontrés, l'attitude des franchisés en cause étant contraire tant à leurs obligations nées de la convention que de la Loi du 13 juillet 1967 ;

Qu'au surplus, il n'est pas établi que les appelantes aient produit (avant l'homologation du concordat) même pour mémoire, au passif de Pronuptia pour les chefs de préjudice, dont elles requièrent indemnisation ;

Considérant qu'aucun dédommagement ne pouvant être prévu pour la non poursuite des contrats litigieux tant au profit de Pronuptia que des franchisées, la disposition du jugement allouant des dommages intérêts de ce chef doit être réformée ;

Considérant en ce qui concerne Madame Dromer, non partie ni à l'une ni à l'autre des sommations, qu'il résulte du rapport d'expertise déposé par Madame Henault qu'un accord est intervenu entre cette franchisé qui a cessé toute activité professionnelle) et la société franchiseur pour solder l'ensemble de leurs comptes ;

3. Sur la concurrence déloyale :

Considérant que les consorts Poisson soulèvent l'irrecevabilité de la demande formée de ce chef par Pronuptia au motif que, fondée sur les dispositions de l'article 1382 du Code Civil, elle aurait été introduite dans les débats par la société intimée au moyen d'écritures déposées devant le Premier juge seulement le 8 mars 1988; que, non reprise dans les conclusions dites récapitulatives du 1er juin 1989, elle devait être regardée comme abandonné, de sorte qu'en s'y référant, le Tribunal de Commerce aurait statué ultra petita ;

Que sa reprise devant la Cour constituerait une demande nouvelle et donc irrecevable ; le même moyen étant développé à l'occasion des demandes formées au titre de la violation des clauses de non-concurrence ;

Mais considérant que pour être regardée comme définitive, la renonciation à un chef de demande doit être claire et non ambiguë ;

Que le seul fait que les demandes litigieuses n'aient pas été reprises dans les dernières écritures dont le Tribunal non plus, que le texte même des conclusions n'énoncent le caractère récapitulatif et exclusif (disposition qui au surplus ne concerne que les moyens développés par les avoués devant la Cour : art 954 du NCPC) et alors que le Premier juge a lui-même fait état de ces demandes dans l'exposé des prétentions de Pronuptia (jugt. P. 20) ne suffit pas à les faire considérer comme abandonnées et, partant, comme nouvelles devant la Cour ;

Qu'au surplus, elles tendent aux mêmes fins que celles retenues dans les assignations : indemnisation du fait des agissements des franchisés tant à raison de la cessation même des contrats qu'à l'occasion des suites de cet arrêt des relations commerciales ;

Que, non fondé, le moyen ne peut être accueilli ;

Considérant que Pronuptia fait grief aux franchisées d'avoir pratiqué à son égard une concurrence déloyale en maintenant sur leur boutique (de même que sur le réseau télématique) au delà du 15 janvier 1986 (date limite fixée par les lettres du 24 décembre 1985), les enseignes et signes distinctifs de la marque, tout en poursuivant (et ce contrairement aux clauses de non-concurrence incluses dans la plupart des contrat) , dans les mêmes lieux, toujours agencés suivant les normes de la marque et selon ses méthodes commerciales spécifiques, la vente de produits similaires acquis auprès des mêmes fournisseurs et ce, en vue de créer une confusion dans l'esprit des clients avec les vêtements portant la marque Pronuptia ;

Qu'elle soutient que les franchisées auraient même constitué un réseau directement concurrent dénommé " Complicité La Fête" afin de coordonner leur action dans le sens ainsi décrit, rendant leur attitude encore plus préjudiciable à son égard ;

Considérant que les appelantes soutiennent que les clauses de non-concurrence invoquées seraient soit inexistantes dans les contrats conclus de manière purement verbale par 5 franchisées (ou même formellement annulée pour une sixième) soit illicites comme excédant la durée de une année retenue par la décision d'exemption individuelle de la Commission CEE du 17 décembre 1986 ou non installées dans l'espace (interdiction de s'installer dans " route zone concurrençant un autre point de vente Pronuptia ") ;

Qu'ils font valoir en outre que la persistance des signes distinctifs de la marque sur certaines boutiques ou le maintien de leur inscription sur le Minitel seraient sans incidence dommageable notable ;

Qu'enfin, la création du réseau " Complicité La Fête " aurait déjà été jugée comme non constitutive d'acte de concurrence déloyale par la Cour d'Appel de paris dans son arrêt du 6 juillet 1988 ;

Mais considérant que, quoiqu'il en soit de l'existence ou de la validité des clauses de non-concurrence (effectivement contraires à la décision de la Commission pour celles incluses dans les contrats écrits), il échet de relever que la mise en place d'un réseau directement concurrent, comme l'ont fait les dirigeants des sociétés franchisées ; la Boutique du mariage, Félicité, CAROLA, Frédéric et DAM sous l'appellation " Complicité La Fête ", en vendant des produits similaires (prêt à porter relatif au mariage) dans des locaux géographiquement inchangés et toujours agencés selon les normes Pronuptia, avec souvent maintien sur les magasins de signes de la marque, produits acquis auprès d'entreprises anciennement ou toujours fournisseurs de Pronuptia (Annie Couture, Dressing, Zeitoun) et dont la promotion était assurée par des moyens publicitaires simplement transposés de ceux suivis par l'ancien franchiseur, que cette mise en place d'un réseau dans ces conditions constitue une action concertée à caractère fautif génératrice de dommages intérêts par la confusion ainsi volontairement et minutieusement entretenue dans la clientèle en vue de son détournement, entre les produits proposés et ceux antérieurement fournis par Pronuptia;

Considérant que l'allégation des appelants selon laquelle la création de ce réseau parasitaire aurait déjà été jugée comme non constitutive de concurrence déloyale, ne peut être retenue l'arrêt visé du 6 juillet 1988 ne portant que sur des faits d'utilisation de la marque Pronuptia sur un catalogue créé par les mêmes sociétés antérieurement à une assignation délivrée en mai 1985 et portant sur des articles acquis librement (comme il a été relevé plus haut) en dehors de la gamme proposée par le franchiseur) que les faits relatifs à la constitution du réseau

"Complicité La Fête" ont été écartés des débats, Pronuptia ayant alors précisé devant la Cour (arrêt p. 6 avant dernier paragraphe) que " le problème était actuellement en cours devant la Tribunal de Commerce " ; qu'en conséquence, dans son dispositif, la juridiction d'appel avait infirmé la décision déférée, qui; en retenant à la charge des sociétés susvisées des actes de concurrence déloyale, avait fait allusion à la constitution de ce réseau ;

Considérant que la Cour se trouve donc régulièrement saisie des faits décrits plus haut et habile à apprécier leur caractère fautif ;

Considérant qu'outre les sociétés créatrices et animatrices de ce groupe, il convient de relever que toutes les sociétés ou personnes physiques appelantes (à l'exception de Madame Dromer et des Sociétés Amsterdam 33 et Manela dont le cas sera examiné plus loin) ont adhéré (au moins temporairement) à ce réseau ou se sont livrées individuellement aux actes fautifs susvisés ;

Considérant que les éléments d'évaluation du préjudice, supporté par Pronuptia - préjudice qui doit être estimé en fonction du chiffre d'affaires de chaque société (le redevance payée par chacune au franchiseur étant à l'égard de celui-ci la concrétisation du dommage) - sont versés aux débats par la production du rapport de l'expert ;

Considérant qu'il échet, en vue d'une bonne administration de la justice de mettre fin à l'instance et de faire droit à la demande d'évocation présentée par l'ensemble des parties ;

Considérant qu'au vu des éléments ainsi fournis, il y a lieu de fixer comme suit les indemnités (non productrices d'intérêts) dues par les anciens franchisés à Pronuptia en réparation du préjudice subi :

- Madame Poisson épouse Guille, la somme de 154.886 F,

- Madame Bellec, la somme de 133.168 F,

- la société Lagondais, la somme de 229.474 F,

- la société Mariée boutique, la somme de 204.488 F,

- la société SEN, la somme de 168.384 F,

- Madame Le Floc'h, la somme de 78.095 F,

- la Société la Maison du Mariage, la somme de 215.710 F,

- la société Barthélémy, la somme de 266.655 F,

- Société Mocq, la somme de 127.705 F,

- Madame Sinagra, la somme de 168.880 F,

- la Société Scarlette, la somme de 241.341 F,

- La société la Boutique du mariage, la somme de 754.007 F,

- la société Carola, la somme de 230.540 F,

- la société La Félicité, la somme de 660.572 F,

- la société Frédéric, la somme de 183.934 F,

- la société DAM, la somme de 437.254 F,

Considérant en ce qui concerne la société Manela, exploitante de plusieurs fonds à Lille et à Tourcoing qu'il résulte des éléments versés aux débats, que cette entreprise a conservé pendant plusieurs mois après le 15 janvier 1986 sur ses boutiques et sur les articles vendus, des signes distinctifs de son ancien franchiseur ; que fin 1987, elle était encore portée sur l'annuaire électronique du Minitel sous la rubrique Pronuptia , que la société Manela franchiseur ayant lacé à Lille dans un des magasins de Manela un nouveau concept de vente sous la dénomination " Espace Blanc ", la société appelante a servilement copié cette idée promotionnelle en l'intitulant " Espace Mariée, et en reprenant point par point les éléments caractéristiques des documents publicitaires Pronuptia ;

Que par ces faits joints à la poursuite (non répréhensible en elle-même en l'absence de toute clause de non-concurrence, mais confortative de l'effet recherché) dans les mêmes locaux, agencés selon les normes Pronuptia, de la vente de produits similaires, Manela a cherché à entretenir dans l'esprit de la clientèle une confusion certaine en vue de son détournement ;

Que ces faits à caractère fautif, assimilables à des actes de concurrence déloyale et parasitaire, générateurs de dommages pour Pronuptia, sont de nature à faire allouée à cette société (sur les bases légales plus haut) une indemnisation de 440.959 F ;

Considérant en ce qui a trait à la société Amsterdam 33, qu'en dehors de la poursuite d'une activité similaire, dans les mêmes locaux certes, mais sous une dénomination spécifique " Rêve d'un jour " - poursuite non blâmable en elle-même dans la mesure où la clause de non-concurrence insérée au contrat apparaît comme illicite en raison de sa durée nettement supérieure (trois ans) à celle (I an) fixée par la décision d'exemption de la Commission et de sa non limitation dans l'espace - aucun fait caractéristique de déloyauté commerciale n'est démontré à la charge de cette société ;

Considérant que de même aucune attitude répréhensible de cette nature n'est établie à la charge de M. Dromer qui, d'ailleurs a cessé toute activité peu après le 24 décembre 1985 ;

4. Sur les comptes entres parties :

Considérant qu'il résulte des éléments de fait versés aux débats par les parties ainsi que du rapport de l'expert Henault ( et des dires annexés) qu'à la cessation des relations commerciales le 24 décembre 1985, Pronuptia était créancière nette envers certains franchisés soit à titre de redevances impayées, soit pour des marchandises ou prestations non réglées, des sommes suivantes :

- la société Lagondais : 16.295 F,

- la société Mariée Boutique : 20.538 F,

- la société SEN : 12.335 F,

- Madame Le Floc'h : 8840 F,

- la société la Maison du Mariage : 185.219 F,

- la société Barthélémy : 4.600 F,

- la société Mocq : 41.648 F,

- la société Boutique du mariage : 23216 F,

- la société Carola : 16.752 F,

- la société Félicité : 47.990 F,

- la société DAM : 42.176 F,

- la société Frédéric : 9816 F,

- la société Manela : 100.481 F,

- la société Amsterdam 33 : 7.058 F,

- Madame Sinagra : 11.428 F,

Qu'il échet de condamner chacune de ces débitrices au paiement des sommes sus-indiquées avec les intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;

Considérant sur les demandes diverses présentées par les sociétés appelantes au titre de créances sur Pronuptia, qu'après les comptes et compensations opérés par l'expert, subsistent les prétentions élevées au titre de participation de Pronuptia à la campagne cinéma 1985, par six sociétés (Lagondais, Boutique du mariage ; et Groupe Félicité) ; que ces franchisés estimant que la répartition faite par le franchiseur des sommes affectées à l'achat d'espaces " cinéma " sur le plan local, leur était défavorable au regard de leur activité, assiette des redevances, avaient chacun émis une facture du montant de la différence, factures dont ils demandent le règlement à Pronuptia ;

Mais considérant qu'outre le fait que la dépense publicitaire ressort de la liberté de gestion du franchiseur et non de droits acquis localement et individuellement par chaque franchisé, il échet de relever que les sociétés demanderesses n'établissent pas avoir produit au passif de Pronuptia pour ces créances antérieures à l'ouverture de la procédure collective ;

Considérant que pour le même motif, les demandes formées par Amsterdam 33 en paiement d'indemnité pour non reprise du stock ou en remboursement de redevances doivent être déclarées irrecevables ;

Considérant que les demandes présentées par Manela pour contre publicité diffamatoire avec publication dans la presse de la décision, ne sont pas fondées en l'état des documents soumis à l'appréciation de la Cour et doivent être rejetées ;

Considérant qu'en raison de l'illicéité de la clause de non-concurrence insérée dans certains contrats la demande de Pronuptia tendant à voir ordonner à ces anciennes franchisées la cessation de toute activité concurrente durant l'année, en peut être accueillie ;

Considérant de même que doit être déclarée sans objet la demande de la société intimée visant l'injonction de faire disparaître, sous astreinte, tout signe distinctif de la marque, les enseignes et autres éléments spécifiques de Pronuptia ayant en fait été ôtés à la date où la Cour statue :

Considérant qu'au vu des faits de la cause, il serait inéquitable de laisser à la charge de Pronuptia les frais non compris dans les dépens exposés par cette société tant en première instance qu'en cause d'appel et que la Cour est en mesure de fixer à 8.000 F pour chacun des appelants à l'exception de Madame DROMER ;

Considérant que succombant en leur appel et tenues de supporter les dépenses, les appelantes peuvent voir accueillies leurs demandes en remboursement de frais irrépétibles ;

Par ces motifs :

LA COUR ; Réforme ce jugement déféré en ce qu'il a déclaré que les entreprises franchisées avaient rompu unilatéralement et abusivement les contrats de franchise les liant à la Société Pronuptia et en ce qu'il a reconnu Madame Dromer et la société Amsterdam 33 coupables de concurrence déloyale ; Et statuant à nouveau de ces chefs : Déclare que les contrats litigieux ont cessé de produire leurs effets en application des dispositions de la loi du 13 juillet 1967, Déboute la société Pronuptia de ses demandes à l'encontre de Madame Dromer, Confirme le jugement en ses autres dispositions en précisant que les actes qualifiés de concurrence déloyale par la décision déférée constituent des actes fautifs générateurs de dommages-intérêts, Et évoquant, Déclare la société Pronuptia recevable en ses demandes en indemnisation ; La déclare non fondée en sa demande présentée de ce chef à l'encontre de la société Amsterdam 33, Condamne respectivement à payer à la société Pronuptia à titre de dommages-intérêts ; - Madame Poisson épouse Guille, la somme de 154.856 F, - Madame Bellec, la somme de 133.168 F, - la société Lagondais, la somme de 229.474 F, - la Société Mariée boutique, la somme de 204.488 F, - la société SEN, la somme de 168.384 F, - Madame Floc'h, la somme de 78.095 F, - La société La maison du mariage, la somme de 215.710 F,- la société Barthélémy, la somme de 266.655 F, - la société Mocq, la somme de 127.705 F, - Madame Sinagra, la somme de 168.880 F, - la société Scarlette, la somme de 241.341 F, - la société La Boutique du mariage, la somme de 754.007F, - la société Carola, la somme de 230.540 F, - la société Félicité, la somme de 660.572 F, - la société Frédéric, la somme de 183.934 F, - la société DAM, la somme de 437.254 F, - la société Manela, la somme de 440.959 F, Condamne respectivement à payer à la société Pronuptia avec les intérêts au taux légal à compter de l'assignation :- la société Lagondais, la somme de 16.259 F, - la société Mariée boutique, la somme de 20.538 F, - la société SEN, la somme de 12.335 F, - Mme Floc'h , la somme de 8840 F, - la société La maison du mariage, la somme de 185.219 F, - la société Barthélémy, la somme de 4.600 F, - la société Mocq, la somme de 41. 648 F, - Mme Sinagra, la somme de 11.428 F, - la société La Boutique du mariage, la somme de 23.216 F, - la société Carola, la somme de 16.752 F, - la société Félicité, la somme de 47.990 F, - la société Frédéric, la somme de 9816 F, - la société DAM, la somme de 42.176 F, - la société Manela, la somme de 100.481 F, - la société Amsterdam 33, la somme de 7.058 F, Déclare irrecevables les demandes en paiement de factures présentées par les sociétés Lagondais, Boutique du mariage, Félicité, Carola, Frédéric et DAM, ainsi que les demandes en paiement formées par la société Amsterdam 33 ; Rejette toutes autres demandes des parties plus amples ou contraires à la motivation retenue, notamment les demandes en injonctions et défenses formées par la société Pronuptia, les demandes en dommages intérêts et en remboursement de frais irrépétibles présentées par les appelantes.