Livv
Décisions

CA Paris, 4e ch. B, 9 juillet 1992, n° 90-1979

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Volvo France (SA)

Défendeur :

Frainay

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Poullain

Conseillers :

MM. Ancel, Jacomet

Avoués :

SCP G & F Teytaud, Me Huyghe

Avocats :

Mes Richemond, Lecuyer.

T. com. Paris, 6e ch., du 26 mars 1990

26 mars 1990

Suivant acte en date du 1.1.86 la SA Volvo France a conclu un contrat de concession avec Monsieur Clause Frainay, garage des Sports.

L'article 6 de ce contrat précisait les conditions dans lesquelles celui-ci pouvait être résilié,

Par lettre en date du 9.02.87 la SA Volvo France a informé son concessionnaire qu'il lui était redevable de la somme de 785.564,58 F en le menaçant de poursuites judiciaires si une régularisation n'intervenait pas d'ici la fin du mois de février 1987. Elle lui a interdit par lettre du 25.02.1988 de vendre cinq véhicules qu'il avait en dépôt.

Par correspondance en date du 17.03.1988 la SA Volvo France, se référant à divers effets impayés écrivait au garage des sports en ces termes " en application de l'article 6 de votre contrat de concession nous nous voyons donc contraints de résilier ledit contrat à compter de ce jour, toutes relations contractuelles s'achevant à l'issue du préavis de 3 mois soit le 17.06.1988 ".

Par lettre en date du 12.04.1988 la SA Volvo France acceptait de reprendre à certaines conditions le stock de M. Frainay, objet de factures proforma 700468, 700469, d'un montant global de 267.022,25 F.

Cependant en définitive elle a retourné certains matériels, et n'a consenti une reprise qu'à hauteur de 112.350,03 F.

Par lettres successives en date du 15.04.1988, 5.05.1988 et 18.06.1988 la SA Volvo France a informé M. Frainay qu'à ces dates son solde débiteur était de 255.044,06 F ; 304.780,36 F ; 157.759,02 F.

En réponse à une lettre du 13.06.1988 de M. Frainay la SA Volvo France lui précisait par lettre du 20.06.1988, que compte tenu de son dernier solde débiteur, et la situation n'ayant donc pas été régularisée au 17.06.1988 elle cessait toutes relations contractuelles, et lui demandait de déposer toute identification faisant référence à la marque Volvo.

Au vu d'une assignation de M. Frainay dirigée contre la SA Volvo France, le Président du Tribunal de Commerce d'Evreux, statuant en référé par ordonnance en date du 7.06.1988, a désigné M. Flin, en qualité de constatant, pour faire le compte entre les parties.

Celui-ci a déposé son rapport le 12.11.1988 sans pouvoir effectuer un compte précis.

Au vu d'une assignation en date du 29.09.1988 de la SA Volvo France dirigée contre Claude Frainay, le Tribunal de Commerce de Paris par jugement en date du 26.03.1990 a enjoint à Claude Frainay de déposer tous panneaux et enseignes frappés de la marque Volvo figurant sur et à l'intérieur de ses bâtiments, de restituer à la SA Volvo France tout catalogue, imprimé, notice publicitaire portant sa marque, de supprimer toute référence à celle-ci sur les documents commerciaux et affiches publicitaires ; il a condamné Claude Frainay à payer à la SA Volvo France, en cas de récidive d'utilisation de la marque, la somme de 5.000 F par infraction constatée. Il a ordonné l'exécution provisoire de ces chefs ; débouté la SA Volvo du surplus de sa demande, constaté que celle-ci avait résilié de manière fautive le contrat de concession, et condamné la SA Volvo à payer à Claude Frainay la somme de 1.000.000 F. Il a partagé par moitié les dépens.

La SA Volvo a interjeté appel le 3.05.1990.

Elle demande la confirmation du jugement en ce qui concerne les mesures d'injonction, restitution de tout document portant la marque Volvo et suppression de toute référence à celle-ci, la condamnation en cas de récidive d'utilisation de la marque. Elle sollicite l'infirmation pour le surplus. Elle réclame la condamnation de Claude Frainay à lui payer les sommes de 36.186,45 F au titre du solde de son compte, 100.000 F de dommages-intérêts pour concurrence déloyale, atteinte à la réputation de la marque Volvo et à la qualité de son réseau de distribution, 30.000 F sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

Claude Frainay demande la condamnation de la SA Volvo France à lui payer 1.500.000 F de dommages-intérêts pour résiliation abusive, 50.000 F sur le fondement de l'article 700 du NCPC. Il s'en rapporte en ce qui concerne la condamnation à payer la somme de 36.136,45 F à la SA Volvo France et demande qu'il lui soit donné acte de ce qu'il a cessé toute utilisation de la marque Volvo tant sur les enseignes que sur ses documents commerciaux.

Sur ce

Considérant que pour un plus ample exposé des faits de la procédure, des moyens et prétentions il sera référé au jugement et aux écritures d'appel.

Sur la procédure

Considérant que les dernières conclusions de la société appelante ont été prises au nom de la SA Volvo Automobile France, venant aux droits de la société Volvo France, que cette qualité ne lui est pas contestée ; qu'il convient donc de lui donner acte à la SA Volvo Automobile France qu'elle est aux droits de la SA Volvo France.

Considérant que le contrat de concession du 1.01.1986 qui liait la SA Volvo France à Claude Frainay contenait une clause 6, " résiliation" .

Que celle-ci énonce " il est rappelé que la durée du préavis en cas de résiliation du présent contrat par l'une ou l'autre des parties est de un an comme prévu dans l'article 1.2. Durée. Toutefois, il est expressément convenu qu'en cas d'inexécution par l'une ou l'autre partie de ses obligations découlant du présent contrat, du plan opérationnel contractuel ou des avenants ou annexes en l'une quelconque de ses clauses le contrat pourra être résilié 3 mois après la date d'expédition d'une mise en demeure faite par lettre recommandée avec accusé de réception, et ce, sous réserve de tous autres droits. Par contre, le présent contrat de concession ne sera pas résilié si, dans un délai de 3 mois de l'envoi de la mise en demeure, le concessionnaire apporte la preuve qu'il a régularisé sa situation et qu'il n'est plus en infraction avec les clauses contractuelles.

La résiliation, après le délai de 3 mois, aura lieu notamment dans les cas suivants :

- dans le cas où le concessionnaire aurait laissé un titre de paiement impayé ainsi que dans le cas de dépôt de bilan, de mise en faillite, règlement judiciaire, liquidation volontaire ou si le concessionnaire se trouve virtuellement en cessation de paiement ..."

Considérant que Claude Frainay ne conteste pas qu'à la date du 17.03.488, son compte à l'égard de la SA Volvo France était largement débiteur et que certains effets qu'il avait émis étaient demeurés impayés.

Considérant que par la lettre en date du 17.03.1988 la SA Volvo France, compte tenu de cette situation a écrit à Claude Frainay en ces termes : " En application de l'article 6 de votre contrat de concession nous nous voyons contraints de résilier ledit contrat à compter de ce jour, toutes relations contractuelles s'achevant à l'issue du préavis de 3 mois soit le 17.06.1988.

Considérant que Claude Frainay indique que par une telle lettre la SA Volvo France, a résilié immédiatement le contrat, sans tenir compte d'une possibilité de régularisation, expressément prévue par l'article 6 du contrat.

Considérant qu'en dépit de la formulation de la lettre du 17.03.1988 Claude Frainay ne pouvait se méprendre sur l'intention de la SA Volvo France qui était de ne considérer la résiliation acquise qu'à défaut de régularisation ;

Considérant en effet que la SA Volvo France se réfère expressément à l'article 6 du contrat ; que c'est donc au vu de l'ensemble des dispositions de cet article que la lettre précitée doit être analysée.

Considérant que la première phrase de l'article 6 se borne à rappeler, la possibilité pour l'une ou l'autre des parties de résilier le contrat après un préavis d'un an, qui était déjà indiquée dans l'article 1.2. du contrat ;

Que les autres dispositions de l'article 6 sont toutes entières consacrées à la résiliation pour violation des obligations contractuelles ;

Qu'elles énoncent clairement que cette faculté de résiliation est ouverte à chacune des parties, 3 mois après l'envoi d'une mise en demeure que la résiliation ne sera pas prononcée si, au cours de ce délai, le concessionnaire prouve qu'il a régularisé sa situation avant de rappeler les cas, au nombres desquels figurent les échéances impayées par le concessionnaire, où la résiliation interviendra après le délai de 3 mois.

Considérant qu'en visant l'article 6 du contrat la SA Volvo France se référait nécessairement à l'ensemble de ces dispositions et notamment à la faculté de régulariser ouverte à son concessionnaire.

Considérant qu'il y a lieu de rappeler que le contrat conclu le 1.01.1986 avec effet à cette date, s'était substitué à un précédent contrat signé entre les mêmes parties, qui n'expirait que le 31.12.1986 et contenait en ce qui concerne la résiliation notamment pour violations contractuelles, des dispositions radicalement différentes ; que spécialement dans ce précédent contrat et au cas où le concessionnaire aurait laissé une échéance impayée, il était stipulé " la concession cessera de plein droit si bon semble à Volvo France SA et sans qu'il soit besoin d'une mise en demeure préalable, par la seule réalisation de l'événement ; "

Considérant que la modification de telles clauses n'avait pas échappé à Claude Frainay professionnel averti qui était concessionnaire depuis de nombreuses années de la SA Volvo France et qui disposait d'un exemplaire de chacun des contrats ;

Considérant que Claude Frainay pouvait d'autant moins se tromper sur les intentions de la SA Volvo France, qu'il avait fait l'objet déjà de menaces de poursuites judiciaires de la part de cette société, en 1987 compte tenu de ses difficultés financières, ce qui n'avait pu que le conduire à prendre connaissance de manière précise de la clause de résiliation précitée ;

Que Claude Frainay n'a pas manqué de tenter de réduire son solde débiteur et de régulariser sa situation, ainsi qu'en témoignent les différentes correspondances échangées et notamment l'offre de reprise par la SA Volvo France de partie de son stock de pièces de rechange ;

Que dans une lettre du 13.06.1988 il s'est prévalu de la régularisation de sa situation dans les délais prescrits en précisant " j'entends en conséquence continuer comme par le passé à représenter la marque ; " Que cette lettre, par les termes employés, montre bien qu'il avait parfaitement compris le sens de la mise en demeure du 17.03.1998 ;

Considérant d'ailleurs que la SA Volvo France n'a jamais soutenu avoir résilié le contrat dès le 17.03.88, que les correspondances échangées et l'ensemble des pièces versées aux débats montrent qu'elle n'a considéré la résiliation acquise que parce que Claude Frainay n'avait pas apuré, à la date du 17.06.88, son compte ;

Considérant qu'ainsi le grief de résiliation immédiate sans respect du préavis de 3 mois n'est pas fondé.

Considérant que le contrat du 1.01.1986 liant la SA Volvo France à Claude Frainay, a fait l'objet entre les mêmes parties d'un avenant du 31.04.1987 se référant notamment à la reprise par la société Volvo des pièces de rechanges : qu'il était précisé dans cet avenant, article 10 dernier alinéa : " Les modalités de reprise de stock en vu d'un assainissement sont fixées par le manuel Reprise et Assainissement des stocks édité le 12.3.86" .

Considérant que si ce dernier document n'a pas été versé aux débats il est constant que la pratique de la reprise par la SA Volvo d'une partie du stock de son concessionnaire pour améliorer la gestion était courante ; que ce point n'a d'ailleurs pas été contesté ;

Considérant que la SA Volvo France prétend que Claude Frainay a demandé la reprise de la totalité de son stock dès le 14.03.1988 soit avant même qu'elle l'ait menacé par courrier du 17.03.1988 de résilier le contrat de concession s'il ne régularisait pas sa situation dans le délai de 3 mois ;

Considérant que la lettre du 14.03.1988 n'a pas été produite aux débats ;

Que Claude Frainay justifie avoir retourné diverses pièces objet des factures proforma 700.468, 700.469, qui avaient été établies le 30.03.1988 ; qu'il soutient avoir déposé lui-même les pièces le 9.05.1988 et que celles-ci ne constituaient pas l'ensemble de son stock ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que le montant global des deux factures proforma s'élevait à 267.022,85 F HT ; que ceci résulte des indications de ces factures dont le montant est porté TTC de la lettre de la SA Volvo déclarant accepter la reprise des matériels indiqués sur ces factures pour un tel montant sous réserve d'un contrôle qualitatif et quantitatif, et du rapport de Monsieur Flin désigné en qualité de constatant par le Président du Tribunal de Commerce d'Evreux, par ordonnance du 7.06.1988.

Considérant que la SA Volvo France, n'a pas contesté dans ses écritures que les matériels objets de ces factures proforma comprenant plusieurs dizaines de pages ont été déposées dans les ateliers le 9.05.88 ; que cette affirmation de Claude Frainay sera donc considérée comme vraie ; que celle-ci est d'ailleurs confirmée par une attestation d'un salarié de Claude Frainay, dont il n'y a pas lieu de mettre en doute la sincérité sur ce point ;

Considérant que la SA Volvo France soutient qu'en demandant la reprise des matériels objets des factures proforma Claude Frainay demandait la reprise de la totalité de son stock et s'interdisait, par là même, la poursuite de son activité de concessionnaire de la marque Volvo ;

Considérant que Claude Frainay a versé aux débats un inventaire valorisé, constitué par un listing de 16 pages, établi le 18.05.1988 pour une valeur de 174.955,12 F.

Qu'il est constant que celui-ci a été établi, quelques jours après que Claude Frainay ait remis les matériels objets des factures proforma qui ne pouvaient dès lors plus être comprises dans cet inventaire ;

Considérant que la SA Volvo France n'a d'ailleurs pas soutenu le contraire ;

Qu'une analyse même rapide de ce document suffit à établir que Claude Frainay possédait différents matériels qui lui permettaient de continuer l'exercice de son activité de concessionnaire pour la marque Volvo ;

Considérant surtout que l'acceptation du principe de la remise des pièces énoncées aux factures proforma, dont Volvo ne pouvait ignorer qu'elles étaient destinées à éteindre la dette dans le délai de régularisation, sans que la SA Volvo ait fait la moindre réserve sur les difficultés qu'aurait créés la privation de ces stocks chez le concessionnaire pour qu'il continue à exercer sa mission, implique que, contrairement à ce que soutient à présent Volvo, cette société ne voyait pas d'obstacle à la poursuite des relations antérieures alors que le concessionnaire n'aurait plus disposé que d'un stock ainsi diminué ;

Considérant que l'argument d'impossibilité de continuer le contrat en raison du manque de pièces pour le concessionnaire ne saurait donc être retenu ;

Considérant que Claude Frainay reproche à la SA Volvo d'avoir établi des " comptes fluctuants" ;

Qu'il est certes exact que la SA Volvo a fixé le solde débiteur de Claude Frainay par lettres successives à des sommes différentes ;

Que cependant on ne saurait reprocher une telle pratique à la société Volvo ; qu'en effet, compte tenu des relations entre les parties, des commandes faites, des garanties et retours de pièces, des dates d'échéances de traites, il était normal que, suivant la date à laquelle on se place, les sommes restant dues de part et d'autre soient différentes ;

Considérant que le solde débiteur admis par Claude Frainay dans sa lettre du 13 juin 1988 est très proche de celui qu'a retenu, quelques jours plus tard, la SA Volvo, dans sa lettre du 20 juin 1988 ;

Considérant qu'il est exact que, quelques jours plus tard, le 6 juillet 1988, la société Volvo a présenté un autre décompte dont il ressort que le solde débiteur était de 133.277,52 F ; que ce décompte était complété par une mention manuscrite " facture à déduire 50.467,84 F" (30 juin 1988) ramenant le solde à 82.759,63 F ;

Considérant cependant que ce compte établi le 6 juillet 1988 est plus précis que celui du 17 juin 1988 ;

Qu'en effet, ce dernier indique les dates des différentes opérations, leur numéro d'identification, leur montant, en distinguant celles qui devaient être inscrites au crédit et au débit de Claude Frainay, tandis que la première comprend, outre la date de l'opération, la date de l'échéance de la somme due pour cette opération ;

Qu'en outre, les mouvements de comptes postérieurs au 17 juin 1988, et notamment celui objet de la mention manuscrite figurant sur le compte du 6 juillet 1988, n'ont pas à être pris en considération puisque ce n'est qu'à cette seule date du 17 juin qu'il devait être apprécié si Claude Frainay avait régularisé son solde débiteur et évité ainsi la résiliation effective de son contrat de concession ;

Considérant que dans la lettre qu'il a adressée le 13 juin 1988 à la SA Volvo, Claude Frainay a indiqué " la situation comptable que je relève au 13 juin 1988, fait apparaître une somme de 152.427 F à laquelle n'a pas été déduite les avoirs de reprise de pièces détachées dont le montant communiqué par le service pièces aux Mureaux, se monte à 94.812 F Hors TVA, soit 112.448 F TTC. Le montant des sommes de garanties à créditer se monte à 60.130 F, photocopies jointes plus divers garanties, non encore traitées. Ma dette envers vous se trouve donc à ce jour apurée" ;

Considérant que Claude Frainay n'a pas émis la moindre réserve quant au montant du solde débiteur de 152.427 F, très proche de celui de 157.759,02 F que retiendra en définitive la société Volvo dans sa lettre du 20.06.1988, compte tenu de la non reprise de pièces pour un montant de 112.448 F TTC et du refus de prendre en compte une somme de 60.130 F au titre de garantie opposée par la société Volvo ;

Qu'ainsi le grief de l'imprécision des comptes de la société Volvo doit être écarté ;

Considérant que l'article 6 du contrat de concession précise " le présent contrat de concession ne sera pas résilié si dans le délai de 3 mois de l'envoi de la mise en demeure, le concessionnaire apporte la preuve qu'il a régularisé sa situation et qu'il n'est en infraction avec les clauses contractuelles ";

Considérant qu'il ressort de cette disposition qu'il appartient à Claude Frainay de rapporter la preuve qu'à la date du 17 juin 1988, son compte n'était plus débiteur ;

Considérant que la société Volvo soutient que les factures proforma n'ont pas de valeur contractuelle et qu'elle n'avait accepté la reprise de matériels que sous réserve de leur contrôle qualitatif et quantitatif ; qu'elle a informé Claude Frainay suffisamment tôt avant la résiliation effective du contrat qu'elle ne pouvait pas prendre en compte la totalité des articles faisant l'objet des factures proforma ;

Considérant qu'il résulte des documents versés aux débats que la société Volvo a contrôlé certaines des pièces objet des factures proforma le 8 juin 1988 ; qu'elle a réexpédié certains de ces matériels le 21 juin 1988, suivant un document intitulé : " Menue expédition" , que ceux-ci ont été transportés le 22 juin 1988 par la société Calberson Messagerie qui les a livrés le 23 juin 1988 au Garage des Sports ;

Considérant qu'il résulte de cette lettre qu'à la date du 13 juin 1988, Claude Frainay avait été informé que la société Volvo ne prendrait pas en compte au titre de la reprise des pièces objet des factures proforma une somme de 112.448 F ;

Qu'il ne saurait donc utilement soutenir qu'il n'a appris la décision prise à ce sujet par la société Volvo que le 23.06.1988, soit plusieurs jours après le délai de régularisation ;

Que d'ailleurs Claude Frainay n'a pas protesté quand la SA Volvo lui a retourné certains matériels, le 23.06.1988, en précisant que ceux-ci étaient impropres à la vente ou ne comportaient aucune référence ;

Qu'il se borne à produire une attestation établie par un de ses salariés et qui est contredite par celle d'un salarié de la société Volvo ;

Qu'aucune raison ne permet d'attribuer plus de valeur à l'une ou l'autre de ces attestations ;

Qu'ainsi Claude Frainay n'a pas rapporté la preuve qui lui incombait que la société Volvo aurait omis à tort de prendre en compte une somme de 112.448 F TTC à titre de reprise de pièces de rechange ;

Considérant d'ailleurs qu'il résulte des termes mêmes de la lettre de Claude Frainay que la prise en compte de cette somme n'aurait pas permis à elle seule d'apurer sa dette, même si l'on retenait le compte plus favorable pour Claude Frainay, établi le 6 juillet 1988 ;

Qu'en effet, il résulte de la lettre même de Claude Frainay, que son compte n'aurait pu être créditeur que par la prise en compte à son profit de " garanties" pour un montant de 60.130 F pour laquelle il aurait fourni des pièces justificatives ;

Considérant qu'à cette prétention, Volvo a répondu le 20.06.1988 ;

Que malgré l'imprécision des demandes toutes garanties restant dûes avaient été prise en compte et que Claude Frainay n'a en rien répliqué à cette lettre ;

Considérant que pas plus qu'il ne l'avait fait devant l'expert désigné dans la procédure de référé, Claude Frainay n'a pas, dans la présente instance, produit aux débats de documents justifiant que son compte aurait dû être crédité, au titre de garantie, d'au moins 60.130 F ;

Considérant qu'ainsi Claude Frainay n'a pas justifié de son droit a être crédité de l'une ou l'autre des sommes de 112.448 F et de 60.130 F qui auraient été nécessaires, l'une et l'autre, pour que son compte soit apuré le 17 juin 1988 ; que dès lors, il n'a pas rapporté la preuve qu'il aurait régularisé ;

Considérant que la SA Volvo Automobile France a réclamé à Claude Frainay la somme de 36.136,45 F arrêtée le 14.09.1989, résultant de la soustraction du compte fournisseur de ce concessionnaire et de son compte client ;

Que dans ses écritures, Claude Frainay a indiqué " aucune observation n'est à faire sur cette réclamation" ;

Qu'ainsi il ne conteste pas devoir cette somme, qu'il sera donc condamné à payer à la SA Volvo Automobile France ;

Considérant que la société Volvo a demandé la confirmation du jugement en ce qui concerne les interdiction d'utiliser toute référence à la marque et la condamnation de Claude Frainay à lui payer 100.000 F pour concurrence déloyale et atteinte à sa réputation ;

Considérant qu'il résulte du jugement et écritures de première instance que pour justifier sa demande, la société Volvo s'est fondée d'une part sur la violation des dispositions contractuelles, et d'autre part sur des actes de concurrence déloyale ;

Que dans ses écritures d'appel, elle s'est contentée de développer son argumentation relative aux actes de concurrence déloyale en l'explicitant ; que cependant dans la mesure où elle a demandé la confirmation du jugement, elle a implicitement repris les demandes du chef de la violation des dispositions contractuelles ;

Considérant que par lettre du 13.06.1988, Claude Frainay ayant prétendu avoir régularisé sa situation à l'égard de la société Volvo France, a indiqué qu'il entendait continuer comme par le passé à représenter la marque ;

Que la société Volvo, par lettre en date du 20.06.1988 a, quant à elle, estimé le contrat résilié de cette date, en précisant " votre situation financière à notre égard n'ayant donc pas été régularisée au 17.06.1988, toutes relations contractuelles entre nous se sont donc achevées à cette date. Conformément aux termes de votre contrat, vous voudrez bien déposer toute identification faisant référence à notre marque et nous remettre tout matériel ou véhicule qui serait resté votre propriété. A cette fin, des collaborateurs de la division automobiles prendront contact avec vous dans les meilleurs délais ";

Considérant que Claude Frainay a contesté les termes de cette lettre et notamment la résiliation du contrat de concession qui en résultait, en assignant par acte du 27.06.1988 la société Volvo aux fins de faire désigner un consultant pour établir qu'il avait régularisé sa situation ; que cette demande n'a plus d'objet puisque, comme il a été vu, le contrat a été valablement résilié à compter du 17 juin 1988 ;

Considérant que l'article 32.3. identification de contrat précité énonce :

" A l'expiration du contrat ou en cas de résiliation, le concessionnaire s'engage, sans pouvoir réclamer une indemnité quelconque

1 - Immédiatement déposer les panonceaux et enseignes de la marque, faire disparaître toute inscription Volvo de ses formulaires imprimés et correspondances et d'une façon générale tout signe indiquant une activité passée de concessionnaire Volvo. Egalement seront retournés à Volvo France SA les enseignes propriété du conciliant, les catalogues imprimés et notices publicitaires sous astreinte de 500 F par jour de retard ;

2 - Ne faire aucun obstacle en aucune façon au démontage des enseignes lumineuses et des publicités routières par l'entreprise commise pour ce faire par Volvo France SA ;

3 - Faire déposer les panneaux de ces agents ;

Dans le cas où il ne serait pas procédé dans les conditions indiquées ci-dessus, la société Volvo France pourra agir par toutes les voies et moyens de droit pour obliger l'ancien concessionnaire à respecter ses engagements et ce, sans préjudice de dommages et intérêts que la société Volvo France pourrait être amenée à lui réclamer ;

Considérant que, par acte d'huissier remis à la personne de Claude Frainay, en date du 2.09.1988, la SA Volvo a fait sommation à ce dernier de procéder immédiatement à l'enlèvement des panneaux affectés et de tout sigle commercial concernant la marque Volvo ;

Que par lettre du même jour, la SA Volvo a précisé à Claude Frainay, en se référant à la cessation de leurs relations contractuelles que Monsieur Leroy, conseiller après-vente de la zone IV passerait le 16 septembre à son garage pour récupérer toute documentation devant revenir à Volvo France, selon les termes du contrat de concession ;

Que par acte d'huissier en date du 24.01.1989, un autre huissier qui s'est présenté dans le garage de Claude Frainay a indiqué : " j'ai noté la présence sur le fronton du hall d'exposition d'une enseigne Volvo partiellement démontée. Il restait les lettres Volvo mais le cachet de couleur entre les lettres avait été retiré. Il n'y avait plus aucun autre panneau Volvo ni drapeau, que cet officier ministériel a relevé la présence de 3 véhicules de marque Volvo neufs et qu'il a indiqué que Claude Frainay s'était opposé à ce qu'il pénètre dans les lieux ;

Considérant que pour justifier qu'il a déposé l'enseigne Volvo, Claude Frainay verse aux débats un devis du 28.12.1988, accepté le 25.01.1989, tendant à la pose d'une nouvelle enseigne, précisant que celle-ci devait être livrée en février 1989 ;

Considérant qu'ont été versés aux débats par la SA Volvo trois documents :

- que le premier concerne un relevé de garantie relatif à des véhicules pour le mois d'août 1988, qu'il a été établi le 5.09.1988 ; qu'il s'agit d'une correspondance interne entre la SA Volvo France et son concessionnaire ;

- que les deux autres se référent à des travaux de fournitures effectués par le Garage des Sports Claude Frainay, représentant comme concessionnaire Volvo ; qu'il s'agit de factures établies à des clients le 20.06.1989 et 6.12.1989 ;

Considérant qu'il ressort de ces différents éléments que Claude Frainay n'a pas respecté les dispositions contractuelles pourtant claires de l'article 32.3. de la convention du 1.01.1986;

Qu'en effet, cet article précisait d'une part que les panonceaux et enseignes de la marque devaient être déposés immédiatement et d'autre part que le concessionnaire ne devait en aucun cas faire obstacle au démontage de ces enseignes;

Considérant qu'il résulte des lettres et des constats d'huissier précités que Claude Frainay n'a pas rempli ses obligations puisque le 24.01.1989, soit plus de 6 mois après la cessation des relations contractuelles subsistait encore le panonceau Volvo ;

Considérant qu'il résulte par ailleurs de la présence de véhicules neufs de marque Volvo dans son garage le 24.01.1989 et de deux factures établies le 20.06.1989 et 6.12.1989 que Claude Frainay a continué à se rattacher au réseau Volvo, alors qu'il n'avait plus le droit de le faire ; que ces actes constituent une concurrence déloyale et que le dernier a eu lieu plus d'un an après la cessation des relations contractuelles ;

Considérant que Claude Frainay ne saurait dès lors invoquer pour justifier son attitude, les conditions brutales dans lesquelles intervenues la fin des relations contractuelles ;

Considérant que Claude Frainay n'a justifié par aucun élément précis qu'il aurait retiré l'enseigne lumineuse et restitué l'ensemble des documents portant mention de la marque ;

Considérant qu'en ce qui concerne la demande de Volvo tenant au préjudice qu'aurait causé Frainay à un autre concessionnaire, la Cour constate que ce concessionnaire n'est pas présent à la procédure et qu'il n'appartient qu'à lui d'en demander, le cas échéant, la réparation ;

Considérant au vu de ces éléments qu'il y a lieu de confirmer le jugement en ce qui concerne les interdictions et de condamner Claude Frainay à payer à la SA Volvo France Automobile la somme de 80.000 F, à titre de dommages-intérêts ;

Considérant que l'équité commande d'allouer une somme de 10.000 F à la société Volvo au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés tant en première instance qu'en appel ;

Qu'il y a lieu de condamner Claude Frainay aux entiers dépens tant de première instance qu'en appel ;

Par ces motifs : Constate que le litige oppose désormais la SA Volvo Automobile France à Claude Frainay ; Confirme le jugement sur les mesures d'interdiction d'utiliser toute référence à la marque Volvo ; l'infirme pour le surplus ; Statuant à nouveau et y ajoutant : - Constate que la résiliation du contrat par la société Volvo a été effectuée régulièrement avec effet à la date du 17 juin 1988 ; Condamne Claude Frainay à payer à la SA Volvo Automobile France la somme de 36.136,25 F au titre du solde de compte entre les parties, arrêté au 14.09.1988 et 80.000 F de dommages-intérêts tant pour la violation de l'article 3.2.3. du contrat de concession que pour actes de concurrence déloyale ; Le condamne à payer à la SA Volvo Automobile France 10.000 F pour les frais irrépétibles qu'elle a exposés tant en première instance que devant la Cour ; La condamne aux entiers dépens, tant en première instance que d'appel ; Admet Maître Teytaud au bénéfice de l'article 699 du NCPC.