Livv
Décisions

Cass. com., 25 février 1992, n° 90-14.329

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Société d'études et de réalisation de travaux maritimes

Défendeur :

Société Te tiare o huahine

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Léonnet

Avocat général :

Mme Le Foyer de Costil

Avocats :

Me Thomas-Raquin, SCP Lemaitre, Monod.

Papeete, du 22 févr. 1990

22 février 1990

LA COUR: - Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches : - Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Papeete, 22 février 1990) que la Société te tiare o huahine (société STTH) a été constituée au début de l'année 1985 pour la construction et la gestion d'un complexe hôtelier ; qu'elle a importé au mois d'octobre 1985 une drague afin d'effectuer les travaux maritimes nécessaires à la construction de l'hôtel ; que la société d'études et de réalisation de travaux maritimes (société SERTM), créée en 1979, a saisi la juridiction consulaire locale, le 27 juillet 1987, d'une action en concurrence déloyale à l'encontre de la société STTH au motif qu'utilisant la drague qu'elle avait acquise en bénéficiant d'aides publiques diverses, elle avait exécuté des travaux maritimes à titre onéreux au profit de tiers ;

Attendu qu'il est reproché à l'arrêt d'avoir débouté la société SERTM de sa demande alors, selon le pourvoi, que, d'une part, tout fait de concurrence illicite est en lui-même générateur d'un préjudice ouvrant droit à réparation ; qu'en déboutant la victime de toutes ses demandes fondées sur des actes de concurrence illicite dûment constatés, la cour d'appel viole l'article 1382 du Code civil, ensemble les principes qui gouvernent l'action en concurrence déloyale ou illicite ; alors que, d'autre part, et en tout état de cause, le simple fait pour une société d'avoir été mise en sommeil le 31 décembre 1987 comme le relève la cour d'appel, soit postérieurement aux faits de concurrence illicite dûment relevés, ne peut suffire à faire écarter une demande en concurrence déloyale ou illicite, dès lors que la cour d'appel ne constate pas que la société, victime de tels agissements, et qui connaissait des difficultés financières, n'avait pas en fait cessé toute activité, ce qui ne s'évince pas des observations de la cour d'appel ; qu'ainsi, l'arrêt est privé de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil, ensemble des règles et principes qui gouvernent l'action en concurrence déloyale ou illicite ; alors, de troisième part, que pour une société ayant une situation de monopole, le fait d'être concurrencée par une autre société de façon illicite constitue en soi un préjudice ayant un lien de causalité nécessaire avec la faute ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel viole derechef le texte et le principe précités ; et alors, enfin, que les juges du fond doivent statuer à partir de certitudes et non d'hypothèses ; qu'en indiquant qu'il est douteux que la drague appartenant à la société concurrencée ait pu être transportée de façon rentable à Bora-Bora, lieu des travaux incriminés, sans dire précisément ce qu'il en était quant à ce, la cour d'appel méconnaît les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que si les faits de concurrence déloyale, générateurs d'un trouble commercial, impliquent l'existence d'un préjudice, il en est autrement lorsque la cour d'appel, analysant les éléments de preuve qui lui sont soumis, retient, comme en l'espèce, que lorsque la société STTH a effectué les travaux litigieux, la société SERTM était en sommeil depuis 1985 et avait saisi la juridiction compétente d'une requête en cessation d'activité ; qu'ainsi, à l'issue de recherches concernant la société SERTM, qui, du fait de l'arrêt de son exploitation, ne pouvait prétendre être en situation de monopole, et, abstraction faite de tout autre motif surabondant, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.