CA Paris, 5e ch. B, 11 avril 1991, n° 90-8124
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
SP 06 Immobilier (SARL)
Défendeur :
Exploitation de la franchise n° 1 (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Schoux
Conseillers :
M. Bourrely, Mme Vigneron
Avoués :
SCP Fisselier-Chiloux, SCP Roblin-Chaix de Lavarene
Avocats :
Mes Helwaser, Lauret.
LA COUR,
Statuant sur les appels interjetés à titre principal par la société à responsabilité limitée SP 06 Immobilier, ci-après SP 06, et à titre incident par la société anonyme Société d'Exploitation de la Franchise " Agences numéro 1 ", ci-après Société FA 1, du jugement du Tribunal de Commerce de Paris du 19 février 1990 qui a condamné la société SP 06, outre aux dépens, à payer à la société FA 1 la somme de 39 510 F avec les intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 1989 et a débouté la société FA 1 de sa demande fondée sur la concurrence déloyale et sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Vu ledit jugement,
Vu les conclusions des parties,
Considérant que le litige porte non sur le contrat de franchise conclu par la société FA 1 le 17 novembre 1984 avec la société SP 06 pour la ville d'Antibes mais sur celui signé le 8 juin 1988 entre ces mêmes sociétés pour la ville de Villeneuve Loubet ;
Que, par ce dernier, il avait été convenu que le franchisé paierait un droit d'entrée de 35 000 F hors taxes au lieu de 60 000 F hors taxes compte tenu de la première convention qui la liait à la société FA 1 ;
Qu'un acompte de 2 000 F a été payé ;
Que, la société SP 06 ayant par lettre du 31 janvier 1989 fait connaître son intention de se retirer du réseau " Agences numéro 1 " de vente, location, commercialisation de biens immobiliers, la société FA 1 l'a assignée en paiement du solde de la redevance de 35 000 F hors taxes, soit 33 000 F hors taxes correspondant à 39 510 F toutes taxes comprises ainsi que les intérêts légaux à compter du jour de l'assignation ;
Considérant que, pour obtenir l'infirmation du jugement de la juridiction consulaire qui avait estimé qu'elle devait cette redevance qui correspondait à la concession exclusive pour la ville de Villeneuve Loubet, la société SP 06 soutient en premier lieu que le paiement par elle d'un second droit d'entrée est dépourvu de cause et qu'elle est ainsi fondée à s'opposer à la demande et à solliciter le remboursement de son acompte de 2 000 F ;
Mais considérant que le deuxième contrat lui accordait l'exclusivité territoriale sur la ville de Villeneuve Loubet pour faire usage de la marque " Agences N° 1 " alors que le premier ne concédait ce droit sur la ville d'Antibes ;
Que, par suite, la redevance prévue avait bien une cause distincte de celle stipulée au premier contrat ;
Que le contrat n'est pas nul ;
Considérant que la société SP 06 sollicite en outre la résolution de ce contrat au motif que la société FA 1 n'avait pas respecté les obligations qui lui incombaient ;
Considérant que cette demande tend aux mêmes fins d'anéantissement rétroactif de l'engagement de la société SP 06 au paiement de la redevance que le défaut de cause invoqué en première instance par cette société même s'il a été explicité seulement dans les motifs des conclusions qui précisaient que si un seul des éléments de la franchise manquait le contrat de franchise était nul et qu'en l'espèce plusieurs éléments de celle-ci faisaient défaut.
Qu'il convient, par suite, de rejeter la fin de non recevoir tirée de l'article 564 du Nouveau Code de Procédure Civile soulevée par la société FA 1 ;
Considérant que la société SP 06, pour demander cette résolution du contrat, prétend que la société FA 1 a manqué à son obligation de fournir la contrepartie du paiement de la redevance initiale ;
Mais considérant que le montant de celle-ci a été réduit pour tenir compte de ce que la société SP 06 disposait en vertu du premier contrat dont il n'est pas allégué qu'il n'a pas été exécuté par la société FA 1, du savoir-faire original et du manuel d'instructions ;
Que cette société prétend qu'elle a participé à l'assistance technique de la société SP 06 pour le choix et l'aménagement du local à Villeneuve Loubet ainsi que pour les démarches administratives nécessaires à l'ouverture du fonds de commerce ;
Qu'elle justifie avoir organisé des sessions de formation des franchisés et de leur personnel et fait une publicité nationale de la chaîne " Agences numéro 1 " tant à la télévision, que par la radio et la presse, que par voie d'affiches ;
Que l'article 4 du contrat prévoit que la société FA 1 met un panonceau enseigne gratuitement à la disposition du franchisé mais que celui-ci a la charge de son installation ;
Que la société FA 1 prétend qu'elle était disposée à exécuter son obligation à condition que la société SP 06 lui fournisse les éléments nécessaires à la réalisation de cet élément ;
Que cette société ne justifie d'aucune mise en demeure faite par elle à la société FA 1 pour lui demander l'exécution de l'une ou l'autre de ces obligations ;
Qu'elle connaissait depuis 1984 en raison du contrat pour Antibes les prestations de la société FA 1 et a librement contracté avec elle pour Villeneuve Loubet sans prétendre qu'il y a eu une différence dans l'attitude de cette société pour cette localité ;
Qu'elle ne pouvait, dans ces conditions rompre unilatéralement le contrat par sa lettre du 31 janvier 1989 qui, d'ailleurs, loin de reprocher à la société FA 1 le non respect de ses engagements manifeste le regret des signataires de quitter le réseau de franchise en invoquant la situation de trésorerie de la société SP 06 qui ne lui permettait pas de faire face à ses obligations financières à l'égard de la société FA 1 ;
Que, par sa lettre du 27 avril 1989, elle sollicitait, un échelonnement du règlement de sa dette sans faire état d'une quelconque défaillance de la société FA 1 ;
Considérant qu'il n'est pas allégué que la société FA 1 ait refusé de permettre à la société SP 06 d'utiliser la marque " agences numéro 1 " ou ait contrevenu à son obligation d'exclusivité sur le territoire visé par le contrat ;
Considérant qu'il convient, en conséquence, de débouter la société SP 06 de sa demande en résolution du contrat aux torts de la société FA 1 et en restitution de l'acompte de 2 000 F versé par elle et des redevances mensuelles et de la condamner à payer à la société FA 1 la solde de 39 510 F toutes taxes comprises dû sur la redevance initiale ;
Considérant que, sur son appel incident, la société FA 1 reprend sa demande de 100 000 F de dommages intérêts en réparation du préjudice que lui aurait causé la société SP 06 en lui faisant une concurrence déloyale après la rupture du contrat par l'utilisation d'une enseigne et de documents commerciaux de nature à provoquer une confusion dans l'esprit d'une clientèle moyennement attentive entre deux services similaires ;
Mais considérant que la société SP 06 n'a pas utilisé la marque " agences numéro 1 " mais l'enseigne " Leader Immobilier " nettement distincte;
Que le chiffre 1 s'il apparaît à l'intérieur du mot " Leader " en débordant au dessus de celui-ci ne présente aucune ressemblance et aucun risque de confusion même pour une clientèle moyennement attentive avec le chiffre 1 d' " agence n° 1" porté de façon distincte et en italiques à la fin de l'enseigne et après le sigle " n° ";
Que la société FA 1 ne fournit aucune indication ni sur l'auteur ni sur la date de la photographie qu'elle produit pour prouver que la société SP 06 a, malgré la rupture du contrat, continué a utiliser un panneau de trottoir portant le non d' " agences n° 1 " ;
Que ce document n'est pas de nature à apporter cette preuve ;
Que la couleur du fond de la boutique " agence n° 1 " est blanc alors que pour la boutique Leader Immobilier elle est bleue et ne pouvait permettre aucune assimilation;
Que le papier à lettres utilisé portait bien l'en-tête " Leader Immobilier " de façon lisible sans qu'il puisse y avoir confusion dans l'esprit de la clientèle avec le papier commercial du réseau " Agences numéro 1 " même si le bandeau supérieur était d'une couleur proche de celle utilisée par ce réseau;
Considérant que, par suite, la concurrence déloyale n'est pas établie contre la société SP 06;
Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société FA 1 la somme de 8 000 F, non comprise dans les dépens, qu'elle a exposée tant en première instance qu'en appel ;
Qu'il convient de débouter la société SP 06, qui est condamnée aux dépens, de sa demande formée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Par ces motifs : Déclare recevable l'action en résolution du contrat du 8 juin 1988 formée par la société à responsabilité limitée SP 06 Immobilier, Confirme le jugement entrepris, Y ajoutant et le réformant pour partie, Dit que le contrat du 8 juin 1988 n'est pas nul et qu'il n'est pas résolu aux torts de la société anonyme d'Exploitation de la Franchise Agences numéro 1 ; Dit que les redevances mensuelles n'ont pas été indûment perçues, Condamne la société SP 06 Immobilier a verser à celle-ci 8 000 F par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, La déboute de sa demande fondée sur ce texte ; La condamne aux dépens, Admet la SCP Fisselier au bénéfice de l'article 699 du Nouveau Code de la Procédure Civile.