CA Paris, 4e ch. B, 20 octobre 1988, n° 88-007737
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Artware (Sté), PC Mart (Sté), Piotrowski
Défendeur :
Commande Electronique (SA), Association Groupe d'Utilisation Francophone d'Informatique, Association Informatique de Communication
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bonnefont
Conseillers :
Mme Beteille, M. Gouge
Avoués :
Mes Varin, Baufume, SCP Parmentier-Hardouin
Avocats :
Mes Chazal, Baudel, Agostini.
Faits et procédure de première instance :
La société " La Commande Electronique " (ci-après LCE) distribue en France des logiciels conçus par la société américaine Ashton-Tate Corporation, en particulier ceux dénommés " d Basse III Plus " et " Framework ".
Pour faire échec au piratage de ces programmes, LCE a mis au point des dispositifs techniques créant des obstacles à leur reproduction mais en revanche, elle remet à tout acquéreur d'un logiciel un premier exemplaire destiné à l'emploi et un second appelé à remplacer celui-ci au cas d'événement tel que perte ou détérioration. De plus, LCE s'engage à fournir à tout utilisateur légitime sur simple demande une disquette se substituant à celle mise hors d'usage. D'un autre côté, les sociétés Artware et PC Mart, dont Piotrowski est le responsable légal, offrent en vente des programmes informatiques appelés Zerodisk ", " Unguard ", " Copywrite ", " Copy " " PC " et " Option Board " et qui sont dits " de déplombage " car leur fonction est de permettre la reproduction de logiciels munis d'un système de protection contre la duplication, soit par un contournement de cette protection soit même par sa suppression.
Dans les pièces mises aux débats, on relève notamment :
- une publicité parue dans la revue " l'Ordinateur Individuel " d'octobre 1986 ; Artware y indique que le programme Copy II PC, présenté comme " l'ultime remède contre les nouvelles prétentions ", dupliquera facilement de base III Plus et Framework.
- un manuel sur disquettes de " Copywrite " diffusé par PC Mart exposant la mise en œuvre du système Unguard à l'effet d'obtenir des copies de sauvegarde et comportant une liste de programmes déprotégés qui, est-il souligné, " comprend plus d'une dizaine de logiciels distribués par LCE ",
- une publicité effectuée par serveur Minitel et qui a donné lieu à un constat de Pollet, huissier, en date du 23 juin 1987 ; Artware et PC Mart proposent le programme Fox Base Plus, " clone parfait de base III Plus " mais six fois plus rapide et en outre non protégé contre la copie.
C'est dans ces conditions que par acte du 11 septembre 1987, LCE a assigné Artware, PC Mart et Piotrowski devant le Tribunal de commerce de Paris pour faire notamment juger :
- que la mise en vente par les défendeurs de logiciels de déplombage destinés à copier les logiciels de Base III et Framework constitue une incitation répréhensible à la contrefaçon et au piratage desdits logiciels et un usage non autorisé de ceux-ci,
- que la publicité effectuée par les défendeurs constitue, outre une incitation à la contrefaçon de logiciels, un dénigrement et une diffamation de LCE,
- que l'ensemble de ces actes est constitutif de concurrence déloyale et de concurrence parasitaire à l'encontre de LCE,
Des mesures de protection et de réparation ont été sollicitées par LCE, en particulier l'allocation de deux millions de francs à titre de dommages et intérêts,
Les défendeurs, excipant de l'incompétence du Tribunal de commerce au bénéfice du Tribunal de grande instance de Paris au motif que les juridictions commerciales ne peuvent connaître d'actions en contrefaçon de marque ni d'actions en concurrence déloyale connexes à de telles actions, ont au fond conclu au rejet de toutes les demandes comme irrecevables à l'égard de Piotrowski et mal fondées à l'égard des sociétés Artware et PC Mart.
Le jugement critique :
Par son jugement du 14 janvier 1988, le Tribunal de commerce de Paris a notamment :
- déclaré mal fondée l'exception d'incompétence,
- mis hors de cause Piotrowski,
- dit que les sociétés Artware et PC Mart ont commis des actes de concurrence déloyale à l'égard de la société LCE en vendant des logiciels de déplombage et en incitant ainsi à la contrefaçon des logiciels distribués par LCE et en se livrant au dénigrement de celle-ci,
- condamné les sociétés Artware et PC Mart solidairement à payer à LCE un franc à titre de dommages et intérêts,
- dit que la publicité et les documents techniques et autres émanant d'Artware et de PC Mart ne pourront plus faire mention des logiciels distribués par LCE et plus particulièrement des logiciels de base III et Framework non plus que de leurs systèmes de protection et ce, sous astreinte de 10 000 F par infraction constatée,
- interdit la diffusion du message diffusé par Minitel et celle de l'opuscule Outils PC exposant les modes de déprotection des logiciels de LCE et ce, sous astreinte de 10 000 F par infraction constatée,
- ordonné la publication du jugement dans cinq journaux ou magazines au choix de LCE et aux frais des sociétés Artware et PC Mart,
- condamné ces sociétés à payer à LCE au titre de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile la somme de 10 000 F,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement sans constitution de garantie, sauf en ce qui concerne la publication de celui-ci.
L'appel :
Un appel a été déclaré le 21 mars 1988 par les sociétés Artware et PC Mart ainsi que par Piotrowski.
Les appelants ayant été autorisés à assigner à jour fixe devant la Cour, celle-ci a été priée de donner acte de son désistement d'appel à Piotrowski.
Les sociétés Artware et PC Mart, qui concluent à l'infirmation du jugement en toutes les dispositions leur faisant grief, sollicitent la somme de 5 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile. Elles soutiennent que le Tribunal de commerce était bien incompétent, la prétendue contrefaçon visant à la fois des marques et des logiciels. Au fond, elles rejettent les griefs qui leur sont adressés en affirmant qu'elles n'ont fait que mettre à la disposition du public l'accessoire indispensable à l'utilisateur du logiciel pour exercer le droit à la copie de sauvegarde que lui reconnaît l'article 47 de la loi de juillet 1985 ; que leur logiciel ne déplombe pas et permet d'effectuer une copie telle quelle du produit vendu par LCE ; qu'au surplus, à supposer que le logiciel de LCE soit amputé de son système de protection, le droit de l'auteur ne pourrait être invoqué car ce que vend LCE est un produit composé où s'ajoute au logiciel dont les droits de commercialisation lui ont été concédés par Ashton-Tarte un logiciel de protection Superlok conçu par la société américaine Sofguard ; qu'enfin, le reproche de concurrence parasitaire n'est pas fondé car ce qui est la cause de la mise en vente des logiciels de copie de sauvegarde n'est pas le logiciel d'origine mais la protection qui lui est ajoutée, la commercialisation des logiciels de sauvegarde s'étant mise en place en raison des positions abusives de certains diffuseurs de logiciels qui tentent d'obtenir un privilège contraire à la loi en imposant des logiciels qui ne peuvent être sauvegardés ;
Intervenantes volontaires en appel, les associations de la loi de 1901 dites GUFI (Groupe d'Utilisation Francophone d'Informatique) et ICOM (Informatique de Communication) prient la Cour de débouter LCE de toutes ses demandes en infirmant une décision qui préjudicie gravement à leurs intérêts statutaires en privant le monde de l'informatique du droit garanti par l'article 47 de la loi du 3 juillet 1985.
Intimée, LCE conclut à la confirmation du jugement en ce que le Tribunal de commerce a retenu sa compétence, dit que les appelantes ont commis des actes de concurrence déloyale par incitation répréhensible à la contrefaçon de logiciels et par dénigrement et prononcé sous astreinte des mesures d'interdiction. Incidemment appelante, elle prie la Cour de réformer la décision attaquée en ce qu'elle a écarté le grief de concurrence parasitaire et de condamner Artware et PC Mart au paiement de deux millions de dommages et intérêts et chacune de ces sociétés au versement de la somme de 10 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile, enfin de modifier la disposition relative à la publication en disant que l'arrêt et non le jugement en fera l'objet.
D'autre part, elle demande que soit opposée une fin de non recevoir aux interventions volontaires ou que subsidiairement elles soient déclarées mal fondées ;
Sur ce, la COUR,
Qui, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, se réfère au jugement critiqué et aux écritures d'appel.
Sur la compétence du Tribunal de commerce :
Considérant que pas plus en première instance qu'en appel, il n'a été demandé réparation d'une atteinte à une marque d'Ashton-Tate ou encore LCE qui à aucun moment n'a indiqué être titulaire d'un tel signe distinctif et n'a du reste versé aux débats aucune pièce propre à en établir les caractéristiques, notamment un certificat d'identité ; Qu'ainsi est-ce à bon droit que les premiers juges ont rejeté l'exception d'incompétence dans une instance où faute de marque, la question de sa contrefaçon ne pouvait se poser et où par suite le grief de concurrence déloyale ne présentait aucun lien de connexité avec une action fondée sur la loi du 31 décembre 1964. Que le jugement sera donc confirmé sur ce point ;
Sur les interventions volontaires :
Considérant que les associations GUFI et ICOM sont régulièrement constituées selon les dispositions de la loi de 1901 ;
Que toutes deux ont pour but d'aider leurs membres à tirer de l'usage du matériel informatique un maximum d'efficacités ;
Que leur intervention va donc dans le sens des intérêts qu'elles ont vocation de défendre et, venant au soutien des prétentions des appelantes, est recevable par application de l'article 330 du nouveau Code de procédure civile relatif à l'intervention accessoire ;
Sur la portée de l'article 47 de la loi du 3 juillet 1985 :
Considérant que l'article 47 de la loi du 3 juillet 1985 s'insère dans un ensemble relatif aux droits d'auteur dont du reste les articles 1 à 13 sont venus apporter des modifications ou des ajouts à la loi du 11 mars 1957 ;
Considérant que cette dernière a pour finalité de protéger les auteurs des œuvres de l'esprit en leur accordant un droit de propriété incorporelle qui ne peut supporter de limitations autres que celles qu'elle prévoit ou autorise expressément ;
Que ce droit étant le principe, les tempéraments qui lui sont apportés sont des exceptions qui, comme telles, sont sujettes à une interprétation étroite ; qu'en particulier il est énoncé à l'article 15 que la propriété incorporelle est indépendante de la propriété de l'objet de matériel et à l'article 41 que lorsque l'œuvre a été divulguée, les copies ou reproductions ne peuvent être interdites par l'auteur si elles sont strictement réservées à l'usage privé du copiste et non réservées à une utilisation collective ;
Considérant que la loi du 3 juillet 1985 a le même substrat téléologique que la loi sur la propriété littéraire ou artistique qu'elle complète ou précise ;
Qu'ainsi est-il souligné à l'article 15 qu'aucune disposition du titre ICOM relatif aux droits voisins des droits d'auteur ne doit être interprétée de manière à limiter l'exercice du droit d'auteur par ses titulaires ;
Considérant donc que l'exégèse de l'article 47 précité ne saurait être correctement conduite s'il était perdu de vue qu'aucune restriction aux droits du propriétaire d'un logiciel ne peut être retenue si elle n'est clairement exprimée dans son texte dont les silences ou les ambiguïtés ne doivent en aucun cas mener à une interprétation qui lui soit défavorable ;
Considérant que ledit article 47 dispose : " Par dérogation du 2° de l'article 41 de la loi n°57-298 du 11 mars 1957, toute reproduction autre que l'établissement d'une copie de sauvegarde par l'utilisateur ainsi que toute utilisation d'un logiciel non expressément autorisée par l'auteur ou ses ayants droit, est passible des sanctions prévues par ladite loi " ;
Considérant qu'il convient de remarquer que si d'autres articles concernant les logiciels font dans la loi du 3 juillet 1985 une situation moins avantageuse à l'auteur que dans la loi du 11 mars 1957 (exclusion du droit de repentir sauf stipulation contraire, durée des droits réduits à 25 ans), en revanche l'article 47 tend à l'évidence à soumettre à des conditions particulièrement rigoureuses la reproduction licite du logiciel ; que non seulement il souligne expressément la dérogation apportée à l'article 41, 2° de la loi du 11 mars 1957 autorisant les copies ou reproductions réservées à l'usage privé du copiste mais qu'en outre il est rédigé pour affirmer un principe, celui de l'interdiction de la reproduction qui tombe sous le coup des sanctions de la loi du 11 mars 1957 ; que dès lors la copie de sauvegarde, qui s'y présente comme une exception, ne peut recevoir qu'une définition extrêmement stricte ;
Qu'ainsi serait-il contraire à la finalité du texte de refuser toute portée à l'emploi du singulier (une copie) et de prétendre qu'il n'en résulte pas une interdiction d'exemplaires multiples ;
Qu'à cette limitation de la copie de sauvegarde à une unité, l'article 47 en ajoute une autre relative à la personne pouvant l'établir sans encourir les sanctions de la loi, cette faculté étant réservée à l'utilisateur ;
Considérant que les appelantes s'efforcent, il est vrai, de tourner cette dernière disposition à leur avantage en soutenant que l'acquéreur se serait vu reconnaître le droit, que son vendeur serait tenu de respecter, d'effectuer lui-même sa copie de sauvegarde ;
Que cependant une telle interprétation méconnaît que l'article 47 a pour but essentiel de poser le principe, au profit de l'auteur, de l'interdiction de la reproduction d'un logiciel, et qu'en exonérant de sanction la copie de sauvegarde faite par l'utilisateur il vise seulement à marquer qu'établie par toute autre personne que ce dernier elle est une atteinte aux droits de l'auteur ; qu'ainsi ne saurait-on y voir l'affirmation de droits de l'usager générateur de contraintes pour l'auteur ; qu'au reste, c'est en vain qu'on y chercherait, ne serait-ce qu'esquissée, une quelconque organisation d'un droit de l'acquéreur d'un logiciel à le reproduire ; qu'il suit de là que le texte de l'article 47 ne permet pas d'en tirer une quelconque prohibition d'un dispositif placé en obstacle contre la duplication ; qu'une telle pratique n'est pas juridiquement condamnable et n'est exposée qu'à la sanction du marché, la clientèle étant libre de préférer à des programmes munis d'une protection d'autres qui en sont dépourvus parce que leurs concepteurs ont estimé plus commercialement opportun de courir les risques d'un piratage à grande échelle ;
Sur les droits de la commande électronique :
Considérant qu'il est constant et au demeurant reconnu par les appelantes que LCE, qui n'est pas titulaire des droits de l'auteur sur les œuvres en cause, a obtenu d'Ashton-Tate l'exclusivité de leur distribution en France ;
Qu'à ce dernier titre, elle est fondée, par référence à l'article 1382 du Code civil, à réclamer réparation de tout acte fautif de nature à entraver la commercialisation des logiciels Ashton-Tate et à entamer les profits escomptés d'une situation de monopole qui ne lui a pas été concédée sans contrepartie ;
Considérant qu'à admettre exacte l'allégation des appelantes selon laquelle Ashton ne croit plus devoir à l'heure actuelle imposer à sa clientèle américaine des logiciels protégés contre la copie, il n'en resterait pas moins que la politique différente suivie en France par LCE n'aurait reçu d'elle aucun désaveu, spécialement en ce que le dispositif de protection émanerait d'une société autre qu'Ashton et qui ne serait donc pas l'auteur desdits logiciels ;
Qu'en conséquence nul caractère fautif ne s'attache à l'installation d'une protection sur les disquettes assurant à la clientèle de LCE l'usage des programmes Ashton-Tate ; qu'à fortiori ne peut-on incriminer cette protection quand elle s'accompagne de la fourniture d'une copie de sauvegarde, cette garantie contre la perte ou la détérioration étant, qui plus est, renforcée par la promesse de pourvoir le détenteur légitime du logiciel, sur sa simple demande, d'un autre exemplaire observation faite que la condamnation de cette pratique ne trouve appui, ni comme on l'a vu plus haut, dans la loi du 3 juillet 1985 qui s'abstient d'organiser un droit de l'acquéreur d'un logiciel à effectuer lui-même la copie ni dans tout autre texte et en particulier dans l'ordonnance 45-1483 du 30 juin 1945 pour le temps où elle serait applicable aux faits de la cause car on ne peut assimiler à la pratique de prix illicites l'imposition à l'acheteur d'un exemplaire nécessaire à la maintenance du logiciel ;
Sur les agissements des sociétés Artware et PC Mart :
Considérant que la matérialité des actes reprochés aux appelantes n'étant pas discutée, la portée donnée plus haut à l'article 47 de la loi du 3 juillet 1985 invalide la justification avancée par elles pour faire admettre la licéité de leur comportement :
Considérant qu'en offrant en vente et en vendant aux acheteurs de logiciels Ashton-Tate des programmes leur permettant pour le moins de réduire à rien l'efficacité du dispositif anti-piratage dont LCE les a équipés, les appelantes leur ont procuré le moyen d'obtenir des copies en nombre illimité s'ajoutant à celle de sauvegarde, fournie par LCE; que ces copies n'étant pas de sauvegarde, l'usager qui les établit se rend coupable de reproduction interdite ; que si en outre il les remet à des tiers, il leur évite par cette contrefaçon les frais de l'achat d'un logiciel à LCE ; qu'ainsi, les ventes réalisées par les appelantes sont une source de perte de chiffre d'affaires pour le distributeur exclusif des logiciels Ashton-Tate qu'est LCE ainsi victime d'une concurrence déloyale ;
Que ce grief ne saurait être écarté au motif fallacieux que les appelantes se comporteraient comme un fournisseur d'accessoires, les programmes conçus par elles pour faire échec à la protection Superlok n'étant ni indispensables à la mise en œuvre de logiciels Ashton-Tate ni même propres à améliorer les résultats que l'utilisateur est en droit d'en attendre ;
Considérant que de surcroît les appelantes, afin de persuader le public de l'intérêt de leurs programmes destinés à faire échec aux protections des logiciels Ashton-Tate, se sont adressés à la clientèle d'un concurrent nommément désigné pour lui remontrer qu'elles satisfont à des besoins méconnus par LCE qui l'empêche de faire elle-même sa copie de sauvegarde en adjoignant au logiciel une protection inutilement coûteuse et au surplus illicite; qu'à ce dernier égard, elles n'ont pas craint d'invoquer dans leur publicité par Minitel un arrêt du 7 janvier 1987 de la Cour d'appel de Paris (1re Chambre) rendu dans une instance en référé et où elles ont prétendu trouver une approbation de leur interprétation de l'article 47 précité alors que cette décision s'était bornée à débouter LCE motif pris de l'existence de difficultés dont l'examen excède les pouvoirs de la juridiction des référés ;
Considérant qu'il s'impose de rappeler que le dénigrement des produits d'un concurrent ou des prix qu'il pratique est prescrit des usages loyaux de commerce et ce, quand bien même les faits allégués seraient exacts totalement ou en partie; que si, ce qui n'est pas le cas, les pratiques commerciales de LCE avaient été condamnables au regard des normes législatives ou réglementaires et de nature à fausser le jeu de la concurrence, il eût été loisible aux appelantes d'attirer sur son comportement la vigilance des pouvoirs publicset de façon générale d'user de toute voie de droit appropriée ; qu'elles ont opté pour une stratégie de dénigrement répréhensiblequelle que soit l'interprétation donnée à la loi du 3 juillet 1985 et dont le caractère particulièrement inadmissible en raison de l'inanité des griefs d'ordre juridique articulés à l'encontre de LCE s'accuse à la constatation que dans leur argumentaire de vente de dénigrement de LCE ne les empêche pas de se référer aux produits qu'elle distribue et dont la réputation est ainsi utilisée pour la vente de leurs programmes de reprotection; que force est donc de le relever, le commerce desdits programmes repose sur un amalgame d'agissements constitutifs de concurrence déloyale d'une part, de concurrence parasitaire d'autre part, qui s'observe également dans l'offre en vente du programme Fox Base Plus " clone de la d base III plus parfait " et " 6 fois plus rapide ";
Sur les mesures de protection et de réparation :
Considérant que les interdictions sous astreinte faites aux sociétés Artware et PC Mart doivent être maintenues ;
Considérant que le dénigrement dirigé contre LCE a porté atteinte à son image dans l'esprit du public ;
Que d'autre part, en mettant à la disposition des praticiens de l'informatique des clones de d base III plus non protégés et des logiciels permettant de faire échec aux protections placées par LCE sur ses disquettes, les appelantes ont ouvert la possibilité d'une prolifération à l'infini des programmes Ashton-Tate en cause et agit au mépris de l'exclusivité consentie à LCE ;
Qu'en conséquence, le préjudice de cette dernière n'est nullement symbolique et appelle une toute autre réparation que le franc accordé par le jugement qui sur ce point sera réformé ;
Qu'eu égard à l'importance du marché du logiciel et à celle du piratage facilité par des méthodes dans lesquelles, selon plusieurs constats d'huissier, les appelantes ont persévéré postérieurement au jugement, la Cour a les éléments suffisants pour allouer à LCE l'indemnité fixée au dispositif à laquelle s'ajouteront, à titre de dommages et intérêts complémentaires, les frais de la publication ordonnée par le Tribunal et qui fera mention de l'arrêt ;
Sur l'application de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile :
Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de LCE les frais non compris dans les dépens exposés pour la défense de ses droits en justice ;
Qu'il lui sera accordé le montant justifié indiqué ci-dessous et qui absorbera la somme déjà prononcée par le jugement à l'encontre d'Artware et de PC Mart ; qu'en outre, il est justifié de condamner les intervenantes volontaires au paiement de la somme précisée au dispositif ;
Par ces motifs et ceux non contraires des premiers juges, Dit recevables en leurs interventions volontaires les associations GUFI et ICOM ; Déboutant les sociétés Artware et PC Mart de leur appel, rejette toutes leurs prétentions ainsi que celles des interventions volontaires ; Confirme sur la qualification des agissements des sociétés Artware et PC Mart sauf en ce que le jugement a rejeté le grief de concurrence parasitaire applicable à certains de leurs actes ; Confirme sur les mesures d'interdiction sous astreinte mais réformant sur le montant de l'indemnité, condamne les sociétés Artware et PC Mart au paiement in solidum de la somme de un million de francs ; Confirme sur la mesure de publication en disant qu'elle s'appliquera à l'arrêt, en précisant qu'elle s'effectuera par extrait et que le coût global ne pourra excéder, en ce qu'il sera mis à la charge d'Artware et de PC Mart, la somme de 50 000 F ; Condamne Artware et PC Mart à payer in solidum à la Commande Electronique la somme de 30 000 F absorbant celle déjà alloué par le jugement au titre de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile
Sur le même fondement, condamne chacune des associations intervenantes à payer à la Commande Electronique un montant de 1 000 F. Dit qu'Artware et PC Mart supporteront tous les dépens de première instance et d'appel sauf ceux des intervenantes volontaires contre lesquelles également la Commande Electronique bénéficiera des dispositions de l'article 699 du nouveau Code de Procédure Civile au profit de Maître Baufume, avoué.